La Géorgie (3e partie) : l’ère ivanichvilienne

Publié le 28 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 18 minutes


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De 2012 à aujourd’hui

Bidzina Ivanichvili est un oligarque géorgien qui a fait fortune en Russie à la suite de l’effondrement de l’URSS en 1991.

En 2012, au moment où commence ce texte, sa fortune personnelle est estimée à 6,4 milliards de dollars. Ce qui équivaut à 46 % du PIB de son pays d’origine, la Géorgie.

En avril 2012, il crée une coalition politique autour du parti politique qu’il avait fondé quelques mois plus tôt.

L’intention avouée d’Ivanichvili était de devenir premier ministre pour deux ou trois ans, le temps de planter le décor politique en Géorgie, puis de se retirer ensuite pour retourner à ses affaires… tout en conservant un œil sur ce qui se passe à la tête du pays.

En matière de politique étrangère, Ivanichvili promettait une approche pragmatique destinée à réduire la confrontation avec la Russie et à restaurer les liens économiques avec ce pays sans sacrifier le cheminement de la Géorgie vers une intégration à l’Otan et au marché commun européen.

La coalition politique d’Ivanichvili reprochait au gouvernement sortant d’avoir négligé le secteur agricole (qui faisait vivre la moitié de la population du pays) et d’avoir imposé un néolibéralisme brutal (qui a provoqué un taux de chômage de 16 % et une augmentation des taux d’intérêt à 14,3 %).

De plus, on lui reprochait son autoritarisme croissant.

Dans un premier temps, cette dernière accusation laissa froid l’électorat (qui en avait vu d’autres). Toutefois, un mois avant le scrutin, une vidéo faisait scandale en dévoilant les traitements brutaux infligés dans une prison de la capitale.

Même si les ténors du gouvernement sortant se sont plu à dépeindre Ivanichvili comme une marionnette du Kremlin, la réalité est plus complexe; l’oligarque a quitté la Russie en 2002 pour la France, puis est retourné en 2003 vivre en Géorgie, tout en gérant à distance ses avoirs russes (qu’il aurait toutefois vendus, dit-il, avant d’entrer en politique).

De 2003 à 2012, fuyant les journalistes, le milliardaire a adopté un profil bas. Seuls avaient attiré l’attention, sa philanthropie à l’égard des œuvres caritatives de l’Église orthodoxe géorgienne, de même que ses dons pour des écoles, les hôpitaux, les théâtres, et les musées.

Aux élections législatives d’octobre 2012, sa coalition obtient 55 % des voix et fait élire 85 des 150 députés du parlement.

Le parti du président Mikheil Saakachvili ayant été défait, celui-ci nomme Ivanichvili premier ministre le 17 octobre 2012. Une nomination entérinée par le parlement huit jours plus tard.

Dans la formation de son cabinet, Ivanichvili accorde des postes-clés à des politiciens pro-occidentaux, notamment au ministère de la Défense.

Dès le départ, la cohabitation politique s’annonce difficile, le premier ministre Ivanichvili ne cessant de critiquer le président Saakachvili et de réclamer sa démission.

Pour forcer la main de ce dernier, le nouveau ministre de la Justice du gouvernement d’Ivanichvili entame des poursuites contre plusieurs des anciens ministres du clan présidentiel.

De guerre lasse, le président démissionne à l’automne de 2013 et s’enfuit aussitôt aux États-Unis (étant lui-même poursuivi en justice).

À l’élection présidentielle anticipée qui suit, le vice-premier ministre du gouvernement d’Ivanichvili se présente à la présidence et est élu par 62 % des voix.

Trois jours après son entrée en fonction de celui-ci, Ivanichvili démissionne comme premier ministre, jugeant avoir atteint son objectif. Pour compléter le restant de son mandat, Ivanichvili fait nommer son ministre de l’Intérieur pour lui succéder.

Depuis ce temps, Ivanichvili est l’éminence grise du pouvoir politique géorgien.

Après avoir fait élire, comme nous venons de le voir, son bras droit à l’élection présidentielle de 2013, la candidate élue à l’élection présidentielle suivante (celle de 2018) était soutenue par Rêve géorgien, le parti politique fondé et financé par Ivanichvili.

Quant au parlement, depuis une décennie, il fut dirigé successivement par neuf premiers ministres du Rêve géorgien puisque c’est cette formation politique qui fut élue majoritairement aux élections législatives de 2016 et de 2020.

Au cours de cette période, le pays a procédé à plusieurs réformes constitutionnelles qui ont eu pour effet de dépouiller la présidence du pays d’une bonne partie de ses pouvoirs. Et ce, afin de prévenir l’autoritarisme présidentiel qui a prévalu au cours des mandats des premiers présidents du pays depuis l’indépendance.

En raison de l’abandon de son régime présidentiel au profit d’un régime parlementaire, les élections législatives du 26 octobre prochain prennent toute leur importance puisque c’est le parlement, et lui seul, qui déterminera dorénavant les grandes orientations du pays.

Le pouvoir politique des ONG en Géorgie

Adopté en 1997, le Code civil géorgien facilite la création d’ONG. Le pays en compte plus de quatre-mille.

Cette abondance s’explique par le fait que ces OGN servent de paravent à la manipulation de l’opinion publique géorgienne par de riches intérêts étrangers.

Ce fut le cas, par exemple, au cours de la révolution des Roses.

Orchestrée par des ONG financées par le milliardaire américain George Soros, cette révolution provoqua en 2003 la démission du président géorgien. Depuis ce temps, toute la classe politique du pays craint l’influence des ONG sur l’opinion publique.

Leurs appels à la mobilisation générale sont suivis et fréquents. Ils vont jusqu’à paralyser le fonctionnement du parlement en bloquant l’accès des députés.

Dans certains cas, leurs actions ont pris l’allure de soulèvements insurrectionnels.

À la suite de la moindre force utilisée pour disperser des protestataires — comme la force utilisée dans nos pays pour démanteler des campements pro-palestiniens — Bruxelles fait savoir à la Géorgie que cela diminue ses chances d’adhérer au marché commun européen.

Et parce qu’elles le savent, les ONG sont devenues de plus en plus audacieuses et exigeantes, réclamant la démission de tout officiel qui leur tient tête.

Leurs manifestations peuvent durer tout un mois.

C’est ainsi que des milliers de manifestants ont réclamé avec insistance que le pays se dote d’un système électoral totalement proportionnel. Ce qui n’existe nulle part au monde.

Las de leurs excès et de leur intransigeance, le gouvernement géorgien a décidé d’assécher le financement de toutes les ONG qui servent de paravent à des intérêts étrangers.

La loi sur l’influence étrangère

En 2012, Moscou adoptait une loi sur les agents étrangers.

Parmi ses exigences, cette loi obligeait les ONG russes, financées de l’Étranger, à le déclarer publiquement. En 2019, cette exigence a été étendue aux médias, aux entreprises, et à toute personne qui exerce une activité politique en Russie.

En mai 2024, à la suite de la Russie et du Kirghizistan, la Géorgie fit semblable (et non pareil) en ciblant uniquement les ONG et les partis politiques.

Jugée liberticide par ses opposants, cette loi a provoqué d’innombrables manifestations, dont certaines, violentes. C’est ainsi qu’au sein même de l’hémicycle parlementaire, les députés en sont venus aux coups lors de son adoption.

En 1938, le Congrès américain adoptait la ‘Foreign Agents Registration Act’ qui, essentiellement, exige la même chose que la loi géorgienne (et la première version de la loi russe).

Comment se fait-il que les États-Unis exigent le retrait de la loi géorgienne alors qu’ils ont eux-mêmes adopté une loi semblable ?

C’est que les deux lois ont des effets opposés. La loi américaine protège les États-Unis alors que la loi de Géorgie protège contre les États-Unis…

En 2003, le milliardaire américain George Soros a dépensé 42 millions$ en Géorgie pour y financer une révolution (voir le premier texte de cette série).

Avec la loi géorgienne sur l’influence étrangère, si de riches particuliers (comme Soros) ou des gouvernements étrangers veulent se servir d’ONG opérant en Géorgie pour tenter d’y renverser des gouvernements démocratiquement élus, ils devront le faire à visage découvert.

Pour ce qui est des exigences de cette loi auprès des partis politiques géorgiens, on doit se rappeler que la législation d’ici interdit tout financement étranger des partis politiques québécois.

En effet, la loi électorale du Québec — adoptée par le gouvernement péquiste de René Lévesque — limite aux seuls citoyens du Québec le droit de verser de l’argent à un parti politique d’ici (au maximum, 100$ par année – 200$ quand c’est une année électorale).

Le droit d’être corrompu secrètement par des intérêts étrangers n’existe pas.

Par conséquent, loin d’être liberticide, la loi géorgienne est un geste d’affirmation démocratique. Et non le contraire, comme le soutiennent tous les médias occidentaux.

Répercussions en Géorgie de la guerre en Ukraine

Depuis son indépendance en 1991, l’histoire de la Géorgie se distingue de celle de l’Ukraine.

En Ukraine, on a assisté à une alternance de présidents pro-russes et pro-ukrainien jusqu’au basculement pro-occidental définitif provoqué les évènements de Maïdan en 2014.

En Géorgie, le pays s’est plutôt doté d’une succession ininterrompue de présidents et de premiers ministres pro-occidentaux et pro-Otan.

Tout au cours de l’ère ivanichvilienne, dès l’entrée en fonction d’un président et d’un premier ministre, le protocole voulait que son premier voyage officiel à l’Étranger se fasse à Bruxelles, afin d’y rencontrer les dirigeants de la Commission européenne et ceux de l’Otan. Le but étant d’y réitérer la volonté de la Géorgie d’adhérer à l’un et à l’autre et, en retour, recevoir l’assurance qu’elle est la bienvenue dans les deux.

Depuis sa guerre avec la Russie en 2008, la Géorgie achète exclusivement du matériel militaire occidental. Ce qui lui permet de participer à des exerces conjoints avec l’Otan. De plus, l’armée géorgienne accueille la formation d’instructeurs américains.

Chaque visite dans un pays de l’Otan est une occasion de conclure un accord de coopération militaire.

Conséquemment, l’allégation des partis d’opposition selon laquelle Ivanichvili serait un homme de paille de Poutine est une accusation grotesque.

Depuis la guerre opposant la Géorgie à la Russie (et les nombreuses petites escarmouches survenues depuis), les Géorgiens sont massivement hostiles à Moscou.

Voilà pourquoi, dès le début de la guerre russo-ukrainienne, les Géorgiens ont ouvert les bras pour accueillir plus de cent-mille réfugiés provenant de la partie orientale de l’Ukraine.

Ce sont essentiellement des Ukrainiens ukrainophones (minoritaire dans cette partie de l’Ukraine) et non russophone puisqu’il était plus simple pour ces derniers d’émigrer en Russie (où on parle russe) plutôt qu’en Géorgie (où la minorité russe est persécutée depuis l’indépendance).

Toutefois, au fur et à mesure que les Géorgiens assistaient à la destruction de l’économie de l’Ukraine et aux souffrances de sa population, les Géorgiens ont pris conscience du prix qu’ils pourraient avoir à payer si leur pays choisissait de devenir un ennemi militaire de son puissant voisin.

Il y a deux mois, Jean de Gliniasty, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques et ancien ambassadeur de France à Moscou, déclarait sur les ondes de France24 : « C’est dans la sagesse de la nation. Il y a une partie des Géorgiens qui savent qu’ils ne peuvent compter que sur leurs propres forces. Et donc, qu’il faut s’accommoder avec un voisin aussi pénible et dur soit-il

La Russie et ses alliés sont dotés d’un complexe militaro-industriel capable de soutenir de manière prolongée une guerre de haute intensité alors que les usines occidentales d’armement peinent à obtenir une chose aussi élémentaire que la nitrocellulose, c’est-à-dire de la poudre à canon, produite principalement en Chine (alliée de Moscou).

Pour Ivanichvili, une guerre en Géorgie comme celle qui se déroule en Ukraine serait catastrophique. Non pas qu’elle constituerait une menace à sa fortune personnelle (à l’abri dans des paradis fiscaux), mais parce que, depuis son retour dans son pays natal, Ivanichvili a dépensé des centaines de millions$ à des activités caritatives.

Le résultat concret d’une telle guerre, ce sont des écoles, des hôpitaux, des musées, des salles de concert, et des complexes sportifs qui ne doivent leur existence qu’à son mécénat, qui disparaitraient sous les bombardements ennemis.

Bref, ouvrir un second front contre la Russie, c’est l’anéantissement de l’œuvre de sa vie.

Conséquemment, sa préférence pro-occidentale est inchangée, mais dans le contexte géopolitique actuel, il a réalisé que la Géorgie avait intérêt à adopter un profil bas.

Cette réalpolitik se bute à l’opposition vigoureuse des ONG pour qui tout assouplissement du ton hostile à l’égard de Moscou est une trahison.

La campagne actuelle en vue des législatives d’octobre 2024

Les élections législatives de cette année opposent le parti d’Ivanichvili (appuyé par l’Église orthodoxe) et les partis d’opposition (appuyés par presque toutes les ONG).

Depuis des années, les sondages démontrent que 80 à 85 % de la population adulte du pays désire l’intégration économique de leur pays à l’Union européenne.

Voilà pourquoi la stratégie de l’opposition est de dépeindre Ivanichvili comme un homme de paille du Kremlin.

À preuve, on dira qu’il a fait fortune en Russie (ce qui est vrai) et que c’est un fourbe qui a promis d’implanter un système électoral complètement proportionnel, mais qui s’est arrangé pour que cette réforme soit battue par ses propres députés (comme si c’était le premier politicien à briser une promesse électorale).

Preuve ultime de son allégeance secrète à Moscou; il attaque lui aussi les valeurs dites ‘décadentes’ de l’Occident comme le fait Poutine.

La stratégie de parti d’Ivanichvili est d’assumer pleinement cette dernière accusation et de la retourner contre ses opposants.

Dans ce pays, la moitié de la population vit sur de petites exploitations agricoles, travaille fort, et prie Dieu.

Conséquemment, l’Église orthodoxe géorgienne — qui ne relève pas du patriarche de Moscou depuis 1917 — est très influente et n’hésite pas à défendre publiquement son dogme religieux.

Au cours de cette campagne électorale, le parti d’Ivanichvili se fait le champion des ‘valeurs géorgiennes’ et n’hésite pas à accuser les ONG d’être les paravents derrière lesquels se cachent des intérêts obscurs voués à propager l’idéologie décadente de l’Occident et pervertir l’âme séculaire de la Géorgie.

Concrètement, ses candidats s’en prennent à l’homosexualité, à la théorie du genre et à la légalisation du cannabis.

Tout cela peut nous sembler très réactionnaire. Mais cela n’est pas différent du discours que tiennent les prédicateurs et les politiciens locaux de la Bible Belt américaine.

Quant à la loi sur l’influence étrangère, les candidats du parti d’Ivanichvili déclarent que pour n’importe quelle ONG authentiquement géorgienne, cette loi ne change rien. Par contre, pour les autres, elle représente une menace existentielle puisque cette loi les force à révéler les intérêts obscurs pour lesquels elles travaillent secrètement.

Pour caricaturer ses opposants, le parti d’Ivanichvili pourrait dire que toutes les manifestations de ces ONG contre cette loi sont comme ces séances d’exorcisme au cours desquelles les possédés du démon occidental se tortillent de douleur quand on les asperge de l’eau bénite de la législation géorgienne.

Politiquement, cette stratégie semble porter ses fruits. Un sondage effectué en mars dernier révélait que le parti d’Ivanichvili recueillerait 31 % des voix, soit environ le double du principal parti d’opposition.

Références :
Abashidze, Karasin Talk Bilateral Trade, as Russia slams United States, NATO
Alarm bells ring for Pankisi gorge – the echo of the Syrian war reaches Georgia
Bidzina Ivanichvili
Defense Minister Concludes U.S. Visit
Defense Minister Garibashvili Concludes U.S. Visit
Géorgie: démission du président du Parlement après les heurts
2017 en Géorgie
2018 en Géorgie
2020 en Géorgie
2022 en Géorgie
Dix organisations non gouvernementales réclament la démission de Tea Tsulukiani (en géorgien)
Élections législatives géorgiennes de 2012
Élections législatives géorgiennes de 2020
En Géorgie, les LGBT+, nouveau bouc émissaire du pouvoir : « C’est une persécution à grande échelle »
Entretien avec la chaîne de télévision américaine Fox News (en russe)
EU: Georgia Lacks Progress on Labor Safety
Foreign Agents Registration Act
Georgian Defense Minister, NATO Officials Discuss Deepening Ties
Georgia orders trucks as modernisation drive continues
Géorgie : Bidzina Ivanichvili, l’oligarque qui veut faire tomber Saakachvili
Géorgie: le premier ministre remanie le gouvernement
Géorgie : pour le président Margvelachvili, l’adhésion à l’UE « est notre horizon »
Géorgie : retour sur l’année 2017
Giorgi Kvirikashvili : « Nous avons surmonté les difficultés que de nombreux pays développés ont du mal à surmonter, sans notre politique économique, nous serions confrontés à une réalité différente.» (en géorgien)
Giorgi Kvirikashvili remercie le gouvernement américain pour son soutien continu à la Géorgie (en géorgien)
« Il faut les balayer » : importante manifestation en Géorgie pour exiger de nouvelles élections législatives
Interview with Irakli Garibachvili
Irakli Garibashvili Net Worth 2022, Age, Wife, Children, Height, Family, Party
Ivanishvili And The Russians
Ivanishvili, le milliardaire qui veut s’offrir la Géorgie
La Géorgie adopte la loi sur l’« influence étrangère » en dépit des manifestations
La présidente Zurabichvili s’adresse au Parlement (en géorgien)
La nitrocellulose et la guerre
Le premier ministre géorgien Irakli Garibachvili annonce sa démission
Le président ne nommera pas de juge en chef « pour l’instant » (en géorgien)
Les États-Unis offrent deux patrouilleurs à la Géorgie (en géorgien)
Les ministres des Affaires étrangères de l’OTAN saluent les progrès de la Géorgie et réitèrent leur soutien à l’adhésion (en géorgien)
Lettre à l’Union européenne
Loi russe sur les agents étrangers
Loi sur “l’influence étrangère” : la Géorgie choisit-elle Poutine ? (vidéo)
Manifestations géorgiennes de 2019
MIA Arrests Four for Participation in June 20-21 “Group Violence”
MPs Vote Down Mandatory Gender Quotas Bill
NATO to Ramp up Georgia’s Security Against ‘Aggressive’ Russia
Politics, protests and propaganda: Georgia’s generational divide
Prisonniers torturés : le ministre géorgien de l’Intérieur démissionne
Projet financé par les États-Unis pour contrer la propagande anti-occidentale (en géorgien)
Prosecutor’s Office Says June 20-21 an Attempt at ‘Violent overthrow of government’
Protesters Rally for Drug Policy Liberalization (en géorgien)
Ruling party on the defensive over Russian MP in the Parliament Speaker Seat
Ruling party, opposition hold first meeting at US Embassy amid political crisis following elections
Scandale de corruption par le Qatar au Parlement européen
Two Detained on Bribing, Threatening Late District Election Commission Head
Ukraine et Russie : l’échec cuisant de Victoria Nuland
Ukraine : l’histoire secrète de la révolution de Maïdan
Vano Merabichvili

Paru depuis : US pauses $95m in aid to Georgia after passage of ‘foreign agents’ law (2024-07-31)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Priver de bras l’effort de guerre ukrainien

Publié le 24 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 4 minutes

La guerre russo-ukrainienne oppose deux armées alimentées en soldats par la conscription.

Au lieu d’appeler sous les drapeaux tous ceux capables de guerroyer — soit les 18 ans ou plus — l’Ukraine a choisi dès le départ de fixer à 27 ans l’âge minimal pour s’inscrire dans son armée.

Au déclenchement de la guerre, la population ukrainienne comprenait environ 1 750 000 adultes de moins de 27 ans.

Exemptés du service militaire, une bonne partie d’entre eux en ont profité pour grossir les rangs des 6,4 millions d’Ukrainiens qui ont fui à l’Étranger (dont trois-cent-mille au Canada).

En février dernier, le seuil de la conscription a été réduit à 25 ans en raison de la pénurie aigüe de combattants du côté ukrainien. À l’heure actuelle, l’âge moyen des soldats ukrainiens est de 43 ans.

Mais cette mesure arrive trop tard; de nos jours, les bureaux de recrutement de l’armée ukrainienne accueillent plus d’hommes qui se présentent avec une exemption médicale que d’hommes aptes à guerroyer.

En vertu du programme de visa d’urgence pour les Ukrainiens déplacés par la guerre, Ottawa a émis 962 000 de ces visas. Environ 298 000 Ukrainiens ont effectivement fait le voyage jusqu’ici. Le ministère fédéral de l’Immigration ignore ce qui est arrivé aux autres.

Ce programme témoigne de l’influence politique de la vice-première ministre du Canada (de descendance ukrainienne).

En effet, le Canada n’a pas créé un programme semblable au sujet de la guerre en Congo (qui a fait entre 5 et 12 millions de morts), ni au sujet de la guerre dans la Bande de Gaza (qui, proportionnellement, a fait beaucoup plus de victimes). Le quota canadien pour les Gazaouis, c’est mille personnes. Autant dire qu’on ne veut pas d’eux.

Le programme d’urgence dont il est question ici s’adresse aux Canadiens de descendance ukrainienne qui, inquiets du sort de parents ou d’amis demeurés en Ukraine, aimeraient les accueillir au pays.

À leur place, tout le monde ferait pareil.

Toutefois, cette mesure a été adoptée par clientélisme politique, à l’encontre de l’avis des fonctionnaires du ministère fédéral de l’Immigration.

Si les dirigeants des pays qui ont accueilli un grand nombre de réfugiés ukrainiens avaient consulté leurs stratèges militaires, ceux-ci leur auraient probablement dit que les accueillir en si grand nombre nuit aux minces chances de l’Ukraine de l’emporter contre la Russie.

Pour l’Ukraine, il ne suffit pas de recevoir de l’armement occidental; encore faut-il des soldats pour s’en servir. Or l’Ukraine, saignée par l’Occident plus que par la guerre, manque de bras.

Selon le partage traditionnel de l’effort de guerre entre les sexes, les hommes prennent les armes tandis que les grands-parents gardent les enfants, permettant ainsi aux mères de participer à l’effort de guerre en travaillant dans les usines d’armement ou en soignant les blessés.

En somme, une guerre, c’est un effort collectif où chaque citoyen compte, qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme, d’un jeune ou d’un vieux.

Accueillir des millions de jeunes ukrainiens dans nos pays, c’est participer ainsi à la grande prédation occidentale de ce pays.

Références :
Accueil de réfugiés palestiniens  la limite d’accueil de 1000 critiquée
Des fonctionnaires avaient déconseillé d’offrir des visas d’urgence aux Ukrainiens
Le Congo et le verrou rwandais
Ukraine : l’âge de la conscription abaissé à 25 ans
Ukraine : le bilan de deux ans de guerre en chiffres

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Une Joconde chinoise

Publié le 23 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 1 minute
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Le cadre enchanteur du Jardin botanique de Montréal se prête bien aux séances de photographie.

Le plus souvent, il s’agit de photos de mariage. Mais il n’est pas rare de rencontrer aussi un photographe à l’œuvre avec un modèle, généralement féminin.

Cet après-midi, au Jardin de Chine, je me suis permis de prendre mes propres photos de ce modèle-ci, parée de ses plus beaux attraits.

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II + objectif M.Zuiko 40-150mm F/2,8 — 1/160 sec. — F/5,6 — ISO 320 — 75 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les Gloires des neiges

Publié le 20 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 2 minutes

Le genre Chionodoxa ne compte que six espèces, collectivement surnommées ‘Gloire des neiges’. Ce surnom leur vient de leur floraison très précoce. En grec, le mot qui de prononce ‘chioni’ veut dire neige et celui qui se dit ‘dvoxa’ signifie gloire

Ces plantes sont originaires des montagnes du sud-est de la Turquie, de même que celles de Crête et de Chypre.


Chionodoxa forbesii

La plus connue est le Chionodoxa forbesii, aux fleurs bleu poudre à cœur blanc. Hautes de 20 cm, ces plantes ont de fines feuilles en lanières au-dessus desquelles se dressent leurs tiges florales portant plusieurs fleurs à six tépales.


Chionodoxa luciliae Alba

Semblable à l’espèce précédente, le Chionodoxa luciliae Alba se distingue par le nombre restreint de fleurs par tige florale (une seule, dans ce cas-ci) et, évidemment, par sa couleur.

Détails techniques des photos : Olympus OM-D e-m5 mark II, objectif M.Zuiko 40-150 mm F/2,8 (4e photo) + multiplicateur de focale M.Zuiko MC-14 (2e et 3e photos) ou multiplicateur de focale M.Zuiko MC-20 (1re photo)
1re photo : 1/250 sec. — F/6,3 — ISO 200 — 140 mm
2e  photo : 1/640 sec. — F/4,0 — ISO 200 — 125 mm
3e  photo : 1/1000 sec. — F/4,0 — ISO 200 — 125 mm
4e  photo : 1/320 sec. — F/5,6 — ISO 200 — 140 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Infrarouge au parc Angrignon

Publié le 18 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 1 minute






Détails techniques : Sigma DP1 infrarouge à spectre complet + filtre bleu B+W KB20 + filtre vert jaunâtre B+W 061 + filtre bleu LBC8 de Kenko + filtre anti-infrarouge partiel GRB3/KG3 [1 mm d’épaisseur]
1re photo : 1/60 sec. — F/4,0 — ISO 100 — 16,6 mm
2e  photo : 1/50 sec. — F/4,0 — ISO 100 — 16,6 mm
3e  photo : 1/80 sec. — F/4,0 — ISO 100 — 16,6 mm
4e  photo : 1/60 sec. — F/4,0 — ISO 100 — 16,6 mm
5e  photo : 1/50 sec. — F/4,0 — ISO 100 — 16,6 mm
6e  photo : 1/40 sec. — F/4,0 — ISO 100 — 16,6 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Faire disparaitre la pollution par magie

Publié le 17 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 5 minutes
Lac Louise, en Alberta

La restauration de sites miniers abandonnés

L’article 101 de la loi sur les mines permet la création d’une mine si un plan de réaménagement et de restauration minière a été préalablement approuvé par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune.

L’article 232.4 de cette loi oblige la compagnie minière à fournir une garantie dont le montant correspond aux couts anticipés de ce plan.

Mais restaurer coute cher.

La magie au service de l’environnement

Depuis des mois, les démarcheurs des compagnies minières se relaient aux antichambres ministérielles afin de les convaincre d’une brillante idée.

Au lieu d’enfouir des résidus miniers dans des réservoirs souterrains imperméables, puis de les recouvrir de manière à redonner au site minier un aspect ‘présentable’, ne serait-il pas beaucoup plus économique de jeter tous ces résidus dans nos lacs afin de les faire disparaitre instantanément ? Comme par magie…

L’idée vous fait sourire ? Lisez bien ce qui suit.

Après une bataille juridique de quinze ans contre deux organismes de défense de l’environnement, le gouvernement norvégien a reçu en début d’année la bénédiction des tribunaux du pays pour autoriser Nordic Mining à déverser 170 millions de tonnes de résidus toxiques dans le fjord Førde.

Selon l’Institut norvégien de recherche marine (Havforskninginstituttet), cette décharge sera située à proximité d’un des sites dont la biodiversité marine est parmi les plus riches du pays.

Après la Turquie et la Papouasie—Nouvelle-Guinée, la Norvège devenait ainsi le troisième pays au monde à permettre le déversement maritime des déchets miniers.

Trente-sept lacs à polluer

Il y a deux ans, le gouvernement de la CAQ autorisait Minerai de fer Québec (filiale d’une minière australienne) à jeter ses résidus miniers dans des lacs. Et ce, malgré l’avis contraire du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) et malgré l’opposition des groupes environnementalistes.

Mais il restait à obtenir l’appui d’Ottawa.

C’est fait. Le fédéral vient d’accorder à cette minière la permission de jeter 408 millions de mètres cubes de résidus miniers dans trente-sept lacs du Québec.

Toutefois, cette permission est assortie d’une contrepartie, soit l’obligation de dépolluer, ailleurs, un territoire d’une superficie équivalente à ces 37 lacs, 1,56 km².

On connait la chanson.

Au cours de la campagne électorale fédérale de 2019, Justin Trudeau promettait de faire planter deux-milliards d’arbres en contrepartie de la construction d’un pipeline traversant les montagnes Rocheuses.

Cinq ans plus tard, le pipeline est construit. Mais la contrepartie se fait attendre; en avril dernier, Ottawa annonçait que la plantation (embryonnaire jusqu’ici) des deux-milliards d’arbres commencerait véritablement bientôt.

La nature d’un lac

La mine de fer en question est située à proximité du lac Bloom, à 747 mètres d’altitude.

Les 37 lacs qui serviront de dépôts de résidus miniers ne sont pas des bassins d’eau morte. L’eau s’y renouvèle par le biais de sources qui les alimentent ou qui en font la vidange, et enfin par le biais de canaux aquifères qui relient ces lacs à des nappes phréatiques situées au travers du roc.

Lorsque des résidus miniers s’accumulent hors du sol, l’eau de pluie n’a que quelques secondes pour solubiliser ce qui se trouve à leur surface. Baignant dans un lac, les mêmes résidus offrent à l’eau la possibilité de se minéraliser pendant un temps considérable.

Jeter de grandes quantités de roches dans un lac libère les acides et les solvants utilisés par le processus d’extraction et de raffinage. Inévitablement, ces lacs pollueront les nappes phréatiques auxquelles ils sont reliés, de même que les cours d’eau en surface que ces nappes phréatiques alimentent.

La loi québécoise sur les mines permet l’exploitation minière des cours d’eau à faible débit et des plans d’eau (lacs et étangs). Les minières peuvent y faire ce qu’elles veulent à la condition de restaurer le site à la fin de l’exploitation minière.

La permission accordée à Minerai de fer Québec est une exemption implicite de l’obligation de restaurer.

On voit mal le ministère des Ressources naturelles s’équiper de scaphandres pour vérifier si, à la fermeture du site, cette multinationale a oublié une roche au fond d’un lac.

Les résidus engloutis seront donc là pour de bon.

Conclusion

Selon le ministre fédéral de l’Environnement, la destruction des 37 lacs québécois est nécessaire (sic) puisque les métaux extraits de cette mine seront utiles à la transition énergétique. Bref, leur destruction est un sacrifice sur l’autel de l’environnement.

C’est aussi la chanson utilisée par la CAQ pour faire accepter aux citoyens de Limoilou le sacrifice de respirer cinq fois plus de poussière de nickel, probablement cancérigène. Parce que ce métal est utile à la transition énergétique.

En d’autres mots, pour combattre la pollution de l’air et les bouleversements climatiques qui en découlent, il est nécessaire d’empoisonner l’eau et le sol.

Alors, il reste quoi ?

Références :
Historic lawsuit to save the Førdefjord
La destruction de 37 lacs est nécessaire, selon Steven Guilbeault
La plantation de deux milliards d’arbres commencera ce printemps
Norway to allow mining waste to be dumped in fjords
Seuls 8,5 millions des 2 milliards d’arbres promis par Justin Trudeau ont été plantés

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Guerre au Proche-Orient et racisme woke

Publié le 11 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 2 minutes

On apprenait hier qu’on organise sur les médias sociaux un boycottage des restaurants montréalais qui appartiennent à des Québécois de confession juive ou de descendance juive.

L’idée de boycotter les restaurants ‘juifs’ est née aux États-Unis.

L’appartenance ethnique est la fondation sur laquelle se sont édifiées les sociétés anglo-saxonnes; sous l’appellation de ‘multiculturalisme’ se cache un tribalisme qui sape la cohésion sociale de ces sociétés.

Ce tribalisme est omniprésent. Dans ces pays, même l’antiracisme (dont le wokisme) contribue à perpétuer involontairement l’enracinement profond de l’appartenance ethnique en tant que vecteur identitaire.

Lorsqu’on dit que ces restaurants sont ciblés en raison de leurs liens avec Israël, c’est faux; ils sont visés en raison de l’appartenance ethnique de leurs propriétaires.

Le boycottage des entreprises en Israël (ou celui des produits agricoles importés des colonies juives en Palestine) peut se justifier en raison de la relation entre la puissance économique d’Israël et sa puissance militaire.

Mais les restaurants ‘juifs’ de Montréal et leurs propriétaires ne paient pas d’impôt à l’État d’Israël. On peut présumer qu’il leur arrive de cotiser à des causes israéliennes, mais cela n’est qu’une présomption.

Ce boycottage est contraire à la Charte québécoise des droits et libertés. Son article 10 interdit toute discrimination fondée sur la religion et l’origine ethnique ou nationale.

Or, on a affaire ici à une discrimination ethnique qui se présente hypocritement sous le couvert de l’anticolonialisme et de l’appui à la cause palestinienne.

Que ce boycottage soit dirigé contre des entrepreneurs québécois de descendance juive, arabe, russe, chinoise ou autres, cela constitue une menace à la paix sociale québécoise. Une menace qui doit être condamnée dans les termes les plus sévères.

Références :
Boycottage de restaurants : Parce que « nous sommes juifs »
Europeans are experiencing a ‘wave of antisemitism’, survey finds
La convergence culturelle : communion et symbiose
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes
McGill : protestataires vs donateurs

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’Occident ne veut pas payer pour reconstruire l’Ukraine

Publié le 9 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 9 minutes


 
La conférence de Londres

Avant le début de l’invasion russe, l’Ukraine était le deuxième pays le plus pauvre d’Europe (devant la Moldavie). Or depuis, plus de 30 % de l’économie ukrainienne a été détruite.

De nos jours, l’État ukrainien vit sous le respirateur artificiel de l’Occident. Sans les sommes qui lui sont versées, Kyiv serait incapable de payer la solde des soldats, les salaires des professeurs, des médecins, des fonctionnaires, de même que la pension des retraités.

Selon Alain Juillet (de 16:45 à 17:50 dans le vidéo à la fin du texte), l’aide américaine serait exclusivement constituée de prêts accordés à l’Ukraine en contrepartie du contrôle américain sur la reconstruction à venir du pays.

À la conférence de Londres, tenu en juin 2023, une soixantaine de pays se sont entendus sur le financement de la reconstruction de l’Ukraine après la guerre. On estime que cette reconstruction coutera entre 410 et 750 milliards$, soit entre 230 % et 419 % de son PIB.

Si l’Ukraine devait assumer seule une telle reconstruction, elle deviendrait, de très loin, le pays le plus endetté au monde. Et les intérêts qu’elle aurait à payer sur sa dette la condamneraient à la ruine perpétuelle.

C’est Anthony Blinken, secrétaire d’État américain (soit l’équivalent de ministre des Affaires étrangères des États-Unis) qui a le mieux résumé le consensus auquel sont parvenus les pays représentés à la Conférence de Londres :

« Soyons clairs : la Russie est à l’origine de la destruction de l’Ukraine. Et la Russie finira par payer le cout de la reconstruction de l’Ukraine.»

Si on lit entre les lignes, cela veut dire « Ce n’est pas à nous, les États-Unis, de payer pour ça.»

En Afghanistan, les Américains n’ont rien dépensé pour la reconstruction du pays. En Irak, la reconstruction promise s’est limitée à réparer les routes et les ponts menant à la ‘zone verte’ (là où étaient stationnés les soldats américains à Bagdad). En Syrie, le pays est toujours en ruine. Quant à la Libye, après avoir renversé le régime de Kadhafi, on livré le pays au chaos et à l’anarchie.

Les États-Unis ont utilisé l’Ukraine pour affaiblir l’armée russe et tester le matériel de guerre américain dans les conditions réelles d’un conflit armé.

Maintenant que la Finlande a rejoint l’Otan, Washington n’a plus besoin de l’Ukraine pour y déployer ses missiles nucléaires au voisinage de la Russie.

Bref, l’Ukraine n’est plus utile aux États-Unis. Si bien qu’un nombre croissant d’experts trouvent que la poursuite de cette guerre n’en vaut pas la peine et qu’on devrait même fermer définitivement la porte de l’Otan à l’Ukraine pour avoir la paix.

Les États-Unis trouvent d’autant plus légitime de se désintéresser militairement de l’Ukraine que se propage en Europe la Nouvelle théorie des dominos.

En vertu de cette théorie, les soldats ukrainiens ne font pas que défendre leur pays attaqué par la Russie; ils se battent pour protéger le monde libre. Si l’Ukraine capitule, l’Europe tout entière tombera à son tour entre les mains de Vladimir Poutine.

En réalité, la Russie peine à faire la conquête d’un pays de 44 millions d’habitants, soit l’Ukraine avant la guerre. On voit mal comment elle pourrait guerroyer avec succès contre l’Occident qui totalise 880 millions d’habitants, soit vingt fois plus.

À preuve, c’est précisément parce que la Russie en a plein les bras en Ukraine qu’elle n’a rien fait, en septembre 2023, pour empêcher l’Azeibaïdjan d’annexer le Haut-Karabagh aux dépends de l’Arménie (son alliée).

La dette ukrainienne

Les pays créditeurs et le Fond monétaire international se sont entendus pour laisser à l’Ukraine jusqu’en 2027 pour payer ce qu’elle leur doit. Toutefois, il en est autrement des créditeurs privés.

On appelle moratorium tout délai accordé par la loi pour s’acquitter d’une dette. Depuis deux ans, l’Ukraine bénéficie d’un moratorium qui vient à échéance le 1er aout prochain.

Ce pays doit 24 milliards $US à des firmes privés d’investissements. Ce qui représente douze pour cent de son PIB.

Évidemment, en pleine guerre, l’Ukraine est incapable de payer cette somme. Elle leur propose une décote de 60 % — c’est-à-dire de les rembourser à hauteur de 40 cents par dollar de dette — alors que ceux-ci ne veulent pas accepter une décote supérieure à 22 cents (c’est-à-dire descendre en dessous de 78 cents par dollar de dette).

À défaut d’une entente, l’Ukraine se retrouverait en défaut de paiement. Ce qui ouvre la porte à des poursuites devant les tribunaux.

Ce qu’on craint, c’est que ces fonds d’investissement vendent leurs bons du Trésor ukrainien à des fonds spéculatifs (hedge funds) qui, tels des chiens pitbulls, s’acharneraient sur ce pays jusqu’au paiement de la totalité de ce qu’elle leur doit.

Le mirage de la confiscation

Depuis des mois, certains pays occidentaux font miroiter la possibilité de confisquer les biens russes détenus en Occident pour aider l’Ukraine à payer ses dettes. Cette idée s’apparente à un bluff.

Déposséder les oligarques russes

Dans les pays occidentaux, le droit de propriété est sacré.

Si quelqu’un a commis un crime, les tribunaux peuvent le condamner à une amende, voire à être dépouillé de ses biens (en partie ou en totalité). Mais être ami avec quelqu’un qu’on déteste ne constitue pas un crime punissable de quoi que ce soit.

Henry Ford était un admirateur d’Hitler. Au moment de son embauche, chaque employé dans les usines Ford en Allemagne recevait une copie de Mein Kampf, écrit par Hitler. De plus à chaque anniversaire du führer, Ford lui versait un cadeau personnel de 50 000$ (ce qui équivaut aujourd’hui à un million de dollars).

À la fin de la guerre, le carrossier General Motor a eu l’audace de poursuivre le gouvernement américain pour les dommages subis à ses installations allemandes, celles qui participaient à l’effort de guerre de l’Allemagne nazie.

En 1967, GM a reçu 33 millions$ de dédommagement de la part du gouvernement américain.

Ce qui prouve bien que le caractère sacré du droit de propriété dans les pays capitalistes.

Conscient de cela, le Canada s’est vanté d’avoir saisi les biens d’oligarques russes, mais est incapable d’en fournir un seul exemple. Probablement parce qu’il sait qu’il n’a aucune base juridique pour ce faire.

S’emparer des réserves monétaires de la Banque de Russie

Reste à savoir si les pays occidentaux peuvent saisir les devises que la Banque centrale de Russie possède à l’Étranger.

En temps de guerre, les pays peuvent geler les avoirs d’un pays ennemi : certains pays peuvent même les confisquer.

La différence entre les deux, c’est que le détenteur d’un bien ne peut en jouir tant que ce bien est gelé. Mais en demeure propriétaire. Dans le deuxième cas, il en perd la propriété.

Ceci est vrai en temps de guerre. Mais officiellement, les pays occidentaux ne sont pas en guerre contre la Russie. Ils nient même être co-belligérants.

Pour les créanciers étatiques de l’Ukraine, le plus grand risque n’est pas la capitulation de l’Ukraine puisqu’en soi, cela ne change rien à ses obligations.

Le risque viendrait d’un changement de statut juridique du pays.

Après la Deuxième Guerre mondiale, la Finlande et l’URSS ont conclu un traité d’amitié en vertu duquel la Finlande s’engageait respecter une stricte neutralité militaire. Ce qui a permis à ces deux voisins de vivre en paix depuis.

Mais après l’effondrement de l’URSS en 1991, la Finlande a estimé ne plus être liée par ce traité puisqu’il a été conclu avec l’URSS (qui n’existe plus) et non avec la Fédération de Russie (qui lui a succédé).

Le corolaire de cette logique (un peu mince, à mon avis) entraine que si l’Ukraine, amputée du cinquième de son territoire, devenait une république membre de la Fédération de Russie, elle échapperait à ses créanciers occidentaux puisqu’ils ont fait affaire avec un pays qui n’existerait plus.

Le meilleur moyen d’éviter ce risque, aussi léger soit-il, est que les États-Unis aient le contrôle des négociations de paix entre l’Ukraine et la Russie. De manière à s’assurer que l’effort de reconstruction repose entre leurs mains.

Pour ce faire, ils devront faire échouer toute tentative de paix qui ne viendrait pas d’eux.

Le résumé de géopolitique concernant l’Ukraine

Veuillez cliquer pour démarrer

Pour terminer, je vous invite à écouter une conférence qu’Alain Juillet prononçait le 17 juin dernier et qui résume assez bien les enjeux géopolitiques qui concernent l’Ukraine.

Références :
Conférence de haut niveau sur la paix en Ukraine
Conflit au Haut-Karabakh : comment l’Azerbaïdjan a fait plier l’Arménie
Divergences occidentales sur une adhésion de l’Ukraine à l’OTAN
Ford Motor Company Sued the US Government for Bombing Its Factories in Nazi Germany
General Motors : mark of excellence
Henry Ford
La délicate restructuration de la dette ukrainienne
La nouvelle Théorie des dominos
La saisie fictive des avoirs d’oligarques russes au Canada
Les alliés veulent faire payer la Russie pour la reconstruction
L’Ukraine, sous la menace du défaut de paiement, bataille avec ses créanciers privés
Reconstruire l’Ukraine coûtera au moins 750 milliards de dollars, dit Kiev
The Nato alliance should not invite Ukraine to become a member – Open letter
Ukraine eyes debt deal before deadline, seeks to add GDP warrants, sources say
Ukraine : un détournement de 40 millions de dollars destinés à l’achat d’armes révélé
UK urged to protect Ukraine from legal action over private debt default

Paru depuis : L’agence S&P abaisse la note de l’Ukraine, à un cran désormais du défaut de paiement (2024-08-03)

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés à la guerre russo-ukrainienne, veuillez cliquer sur ceci.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Deux nouvelles sous le thème de la diversité sociale

Publié le 6 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 4 minutes

Une bonne nouvelle de Grande-Bretagne

Ce matin, le nouveau premier ministre britannique annonçait la composition de son Conseil des ministres.

Comme c’est souvent le cas en Angleterre, Keir Starmer a adressé son premier discours à la nation dans la rue, devant sa résidence officielle du 10 de la rue Downing.

Sa formation politique, le Parti travailliste, étant de la gauche traditionnelle, l’accent a été mis sur la diversité sociale. En effet, son cabinet fait une large place à des personnes issues de familles modestes formées à l’école publique.

En faisant cette annonce, le premier ministre a déclaré :

« Pendant trop longtemps, nous avons ignoré les personnes qui se comportaient en bons citoyens, qui travaillaient dur tous les jours. Je veux dire très clairement à ces personnes [qu’avec moi] elles ne seront plus ignorées. Notre mission de renouveau est urgente et nous commençons aujourd’hui.»

En Amérique du Nord, les règles qui régissent les mises en candidature politique sont des barrières économiques qui empêchent les classes laborieuses d’accéder au pouvoir.

C’est ainsi que le Congrès américain est exclusivement composé de millionnaires, généralement masculins à la peau pâle.

Ici même à Montréal, vous ne trouverez pas de travailleurs manuels ou d’assistés sociaux au sein de l’administration de Valérie Plante; ce sont tous de jeunes parvenus, qui aiment commander des huitres à Paris ou boire des vins dispendieux à Vienne, et qui ont été choisis pour composer un portrait de famille représentant toutes les nuances de la pigmentation humaine.

Lorsque l’avocate Cathy Wong — à l’époque, deuxième personne en ordre d’importance au sein de l’administration Plante — demande à un conseiller municipal de confession juive de ne pas se représenter aux élections afin de faire place à la ‘diversité’, elle veut dire qu’il nuit à ce portrait de famille. Parce que les Juifs, apparemment, ne font pas partie de la ‘diversité’.

L’an dernier, la ville de Montréal a démantelé 240 campements d’itinérants pour les forcer à aller dans des refuges qui, en réalité, n’acceptent plus personne parce que débordés par la crise du logement.

Le résultat, c’est que, expulsés des terrains vacants sous les ponts, ils se dispersent plutôt dans les quartiers centraux de la ville où ils agressent les passants et traumatisent les enfants des garderies ou des écoles à proximité.

De la même manière, l’administration Plante s’est acharnée contre Guylain Levasseur, ce bon samaritain qui alimente gratuitement les itinérants dans les campements ‘illégaux’ et conséquemment, fait concurrence aux travailleurs sociaux patentés de la ville.

Une mauvaise nouvelle des États-Unis

Mais par-dessus tout, la nouvelle du jour qui m’a fait le plus sursauter est ce clip vidéo, publié sur TikTok, dans lequel John McEntee — responsable du personnel de la Maison-Blanche sous Donald Trump — s’est vanté de faire l’aumône aux itinérants qu’il rencontre en leur donnant des billets contrefaits de 5$ afin qu’ils se fassent arrêter par la police en voulant s’en servir. Ce qui lui permet de faire œuvre utile en débarrassant les rues de ces gens-là.

Rappelons que George Floyd a été assassiné lors d’une arrestation policière après avoir effectué un achat payé avec un billet de banque contrefait. Or, on n’a jamais su si Floyd savait que son billet était un faux.

Je soupçonne que John McEntee a simplement voulu faire parler de lui comme aime le faire son ancien patron à la Maison-Blanche. Mais le simple fait que, de nos jours, on puisse sentir le besoin de publier des messages aussi outrageants, cela est le signe d’une société profondément malade.

Références :
Au Royaume-Uni, le nouveau premier ministre travailliste Keir Starmer forme un gouvernement marqué par la diversité sociale
En marge du meurtre de George Floyd
Guylain Levasseur vs l’hypocrisie bourgeoise de l’administration Plante
Le manque de jugement de l’avocate Wong
Les itinérants-campeurs et la gestion du risque
Montée du nombre de cas de COVID-19 dans les refuges pour itinérants à Montréal
Plus de 240 campements d’itinérants démantelés depuis le début de l’année à Montréal

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’ubérisation du taxi québécois : le premier grand gaspillage de la CAQ

Publié le 3 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 4 minutes
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Le contexte

À son arrivée au pouvoir en 2018, la CAQ héritait des surplus budgétaires dégagés par l’austérité budgétaire du gouvernement libéral de Philippe Couillard.

Plutôt que d’investir massivement dans les différentes missions de l’État négligées par quinze ans d’incurie libérale, la CAQ a préféré gaspiller ces surplus en accordant des réductions d’impôt et en ubérisant l’industrie du taxi québécois.

À l’époque, le grand gourou informatique de la CAQ était le ministre Éric Caire. Or celui-ci était formel; il fallait, à n’importe quel prix ubériser le taxi québécois afin de moderniser cette industrie. Comme si c’était la priorité économique de son gouvernement.

Grâce à l’application téléphonique d’Uber, les utilisateurs du taxi québécois pourront, disait-il, bénéficier de la facturation dynamique — c’est-à-dire d’un tarif fluctuant selon l’offre et de la demande — tandis que, d’autre part, n’importe quel automobiliste pourra se transformer en opérateur de taxi.

Pour un parti de droite comme la CAQ, Uber était le symbole de l’économie de demain, caractérisée par le ‘capitalisme participatif’.

Pour les utopistes libertariens, une démocratie parfaite serait celle où tous les citoyens, même les plus pauvres, seraient des capitalismes par gout ou par nécessité.

Toutefois, l’ubérisation de l’industrie du taxi nécessitait le rachat de tous les permis de taxi en circulation (sic).

Lorsque la CAQ l’a promise, il s’agissait d’une promesse mineure de son programme électoral. Essentiellement, à l’élection générale de 2018, l’immense majorité de ceux qui ont voté pour la CAQ, l’ont fait pour se débarrasser des Libéraux.

Si on leur avait demandé de nommer les principales promesses de la CAQ, presque personne n’aurait mentionné l’ubérisaton du taxi. Cette promesse était tellement mineure que la CAQ elle-même en ignorait le cout exact.

Mais bientôt, il s’est avéré que la somme à débourser était colossale. N’importe quel gouvernement responsable aurait renoncé à une promesse qui s’avèrerait excessivement couteuse.

Le dogmatisme idéologique du gouvernement

Lorsqu’une entreprise privée a besoin d’un bien pour opérer (un terrain, une bâtisse, de la machinerie, etc.), c’est à elle de l’acquérir à ses frais.

Si le modèle d’affaire d’Uber nécessite le rachat de tous les permis de taxi au Québec, c’est à Uber d’en assumer le cout.

Afin de plaire à cette multinationale, la CAQ a préféré gaspiller notre argent en rachetant les milliers de permis détenus par des Québécois. Des Québécois qui paient honnêtement l’impôt sur leurs revenus. Alors qu’Uber pratique l’optimisation fiscale en délocalisant ses profits dans des paradis fiscaux.

Si bien que la CAQ a dépensé une fortune pour diminuer ses revenus fiscaux.

À sa face même, c’était une idée stupide.

Le cout final

Le 21 juin dernier, la Cour supérieure condamnait le gouvernement de la CAQ à payer 143,9 millions de dollars supplémentaires en raison des sommes insuffisantes que la CAQ a versées jusqu’ici pour le rachat des permis de taxi.

Avec les intérêts, cela fait 220 millions de dollars. Cela s’ajoute à la somme versée en 2018 aux propriétaires de permis de taxi, soit 873 millions de dollars.

Au total, l’ubérisation de l’industrie du taxi a couté plus d’un milliard de dollars aux contribuables québécois.

Références :
Baisse d’impôts de la CAQ: voici combien vous pourriez économiser
Libertarianisme
L’ubérisation du taxi québécois
Perte de valeur des permis de taxis : Québec devra verser plus de 143 millions $

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II + objectif M.Zuiko 25mm F/1,2 — 1/320 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 25 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel