Comment assurer l’étiquetage en français ?

Publié le 14 novembre 2024 | Temps de lecture : 4 minutes

Le Journal de Montréal publiait hier une enquête effectuée dans un petit nombre de commerces situés dans la région montréalaise dans lesquels l’immense majorité des produits offerts étaient étiquetés dans diverses langues, mais pas en français.

La loi n’interdit pas l’étiquetage dans d’autres langues en plus du français. Mais le français est obligatoire.

La plupart des commerces montréalais offrent des produits généralement étiquetés correctement avec accessoirement un petit nombre de produits ‘déviants’.

Au début des années 1960, il était courant que des produits ne soient étiquetés qu’en anglais. Pour corriger cette situation, le gouvernement québécois avait adopté une loi qui bannissait l’étiquetage unilingue anglais.

En vertu de cette loi, n’importe quel consommateur pouvait porter plainte à la Cour des petites créances où il suffisait de se présenter et de soumettre l’étiquette unilingue, de même que le reçu de la caisse pour que, séance tenante, le commerçant soit condamné à payer une amende versée au plaignant.

C’est ainsi qu’un couple d’étudiants en droit avait financé leur formation universitaire en poursuivant les commerces fautifs. En quelques mois, il était devenu impossible à Montréal de trouver un seul produit étiqueté exclusivement en anglais. Ceux qui auraient pu l’être portaient dorénavant un collant qui traduisait en français la composition du produit et son mode d’emploi.

À l’époque, l’Office québécois de la langue française existait puisqu’il avait été créé en 1961.

Mais plutôt que d’embaucher des fonctionnaires pour recevoir les plaintes et des inspecteurs pour aller visiter les commerces fautifs afin d’y constater les infractions, l’État avait jugé plus efficace de remettre la défense du français entre les mains du peuple et surtout, de lui confier les moyens répressifs de faire appliquer la loi.

Ultérieurement, on a lui retiré ce pouvoir pour le confier exclusivement à l’Office.

En 2005, il a suffi au gouvernement de Jean Charest de nommer à la tête de l’Office une guenille libérale pour que l’Office cesse de jouer son rôle efficacement.

Aujourd’hui, il serait inutile d’essayer de refaire la même chose. Pourquoi ? Parce que, de nos jours, on doit attendre deux à trois ans pour qu’une cause soit entendue devant la Cour des petites créances.

Toutefois, on peut créer un mécanisme encore plus efficace en recourant au pouvoir de contravention.

Je m’explique.

Lorsqu’un policier — ou même un simple agent de la circulation qui n’a pas reçu de formation policière — constate qu’une voiture est mal garée, il ne porte pas plainte devant les tribunaux; il dresse un constat d’infraction et le glisse sous les essuie-glaces de la voiture.

Ce constat donne un délai au contrevenant pour faire parvenir l’amende à la ville à défaut de quoi il est poursuivi par les tribunaux. Ce qui coute beaucoup plus cher.

Au sujet de la langue d’étiquetage, une seule personne pour tout le Québec est capable de gérer des dizaines de plaintes reçues du public quotidiennement, soit cinq à dix-mille plaintes par année.

Pour ce faire, sa tâche doit être simple.

Sans quitter son bureau, il lui suffit de recevoir l’original de l’emballage du produit fautif, de même que le reçu de la caisse, pour être en mesure de délivrer un constat d’infraction, de sommer le contrevenant de lui faire parvenir un chèque émis au nom du plaignant, et de le poster à ce dernier par courrier recommandé.

Pour simplifier les choses, une plainte ne devrait concerner que la vente d’un seul produit même si plusieurs produits fautifs ont été achetés en même temps. Toutefois, le même produit ou un produit différent, acheté un autre jour, pourrait faire l’objet d’une autre plainte.

Pour prévenir les contestations juridiques, il suffit que l’amende soit raisonnable (disons 100 $ par plainte) pour qu’un commerçant comprenne rapidement le message et décide de retourner tous les produits fautifs à son grossiste afin qu’un collant en français soit apposé à leur emballage.

Références :
Du mandarin, du coréen, de l’anglais… et un peu de français chez T&T et Loblaw
Le doux sommeil de l’Office de la langue française

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les garderies-ghettos

Publié le 13 novembre 2024 | Temps de lecture : 5 minutes

Introduction

C’est le journaliste Francis Vailles, de La Presse qui révélait hier que dans la région de Montréal, trente-six garderies subventionnées par l’État n’acceptent que des enfants qui appartiennent à certaines minorités ethniques ou religieuses.

Ces garderies offrent environ deux pour cent des 134 000 places disponibles dans la région de Montréal⁠.

C’est en 1998 que le Québec a déconfessionnalisé son système scolaire, abolissant ainsi à la fois les commissions scolaires catholiques et protestantes.

Qu’un quart de siècle plus tard, apparaissent des garderies confessionnelles subventionnées par l’État, cela représente un retour en arrière.

Si une garderie veut se constituer en ghetto qui n’accepte que des enfants de parents qui partagent la même confession religieuse ou la même ethnie — voire la même aisance financière — elle ne doit pas être subventionnée par l’État.

Les dangers de la ghettoïsation

Quarante ans après que le parlement de Stockholm eut décidé de transformer la Suède en un pays multiculturel, celui-ci est devenu la capitale du viol en Occident.

Non pas que le multiculturalisme ou que l’immigration conduisent séparément à ce résultat, mais parce que de 2005 à 2016 ce pays a accueilli un grand nombre de réfugiés — majoritairement d’Afghanistan, d’Iran, d’Irak, de Syrie, de Somalie et d’Érythrée — qu’il n’a pas pris le soin d’intégrer à la culture du pays en raison du laisser-faire inhérent au multiculturalisme.

Or leur nombre n’est pas négligeable; en 2019, un Suédois sur cinq était né à l’Etranger.

De son côté, la France est opposée au multiculturalisme. Mais elle a laissé se développer des banlieues qui se sont constituées en ghettos mono-ethniques au sein desquels les valeurs républicaines sont demeurées étrangères à la mentalité de la majorité des jeunes qui y habitent.

Multiculturalisme vs convergence culturelle

Le multiculturalisme canadien encourage l’appartenance ethnique en tant que marqueur identitaire. Il favorise la tendance naturelle du repli rassurant entre semblables.

De son côté, la convergence culturelle n’oblige pas le Québécois né à l’Étranger à épouser les valeurs québécoises. Mais il le motive, entre autres, en pénalisant le repli sur soi.

Cesser le financement des garderies-ghettos par l’État les rend plus onéreuses et dissuade ainsi les parents d’y envoyer leurs enfants.

La solution du guichet unique

L’apparition des garderies-ghettos est le résultat du laisser-faire de la CAQ.

Ce laisser-faire s’explique par le fait que la manière pour la CAQ de diminuer les taxes tout en prétendant que cela n’affecte pas la qualité des services, c’est de ne jamais vérifier dans quelle mesure les normes sont respectées, notamment après l’adoption de budgets insuffisants.

Et comme chaque dollar dépensé en inspection est un dollar de moins pour créer une place en garderie, c’est une raison de plus pour ne pas aller voir ce qu’on a intérêt à ne pas savoir.

Pour empêcher les garderies de se constituer en ghettos, le gouvernement se propose de créer un guichet unique qui attribuera les places automatiquement à partir de l’automne 2025.

Comme c’est facile.

Dans un pays idéal, les parents devraient avoir le choix de la garderie où envoyer leurs enfants. S’ils jugent approprié de les retirer d’une garderie privée subventionnée parce que la salubrité ou l’encadrement pédagogique y laisse à désirer, ils devraient en avoir le droit.

Malheureusement, dans un contexte de sous-financement des garderies et du nombre insuffisant de places, le choix des parents est limité.

Si en plus, c’est un ordinateur qui détermine là où leurs bambins doivent aller, on abolit tout incitatif à l’excellence de la part des garderies subventionnées. C’est le nivèlement par le bas.

Évidemment, le guichet unique existe aussi en santé. Mais le nivèlement par le bas y est contré par les inspections des Ordres professionnels qui s’assurent du maintien de la qualité des services. Ce qui n’est pas le cas du personnel en garderie privée.

Ce que l’article de La Presse nous apprend, c’est qu’à défaut d’inspections de routine, avant que le gouvernement apprenne les lacunes qui sévissent dans une garderie, cela prend des années.

Après l’instauration de son guichet unique, commenceront les années au cours desquelles les parents seront forcés d’envoyer leurs enfants à la garderie déterminée par ‘l’ordinateur de la CAQ’.

Références :
Confessionnalisme et neutralité religieuse dans les écoles de Montréal
Immigration en Suède
La convergence culturelle : communion et symbiose
La Suède, capitale du viol en Occident
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes
Places en garderie : un « vrai » guichet unique dans un an
Trente-six CPE sélectionnent selon l’ethnie ou la religion

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Transport en commun : les comptables à la rescousse de la CAQ

Publié le 8 novembre 2024 | Temps de lecture : 5 minutes
Passagers évacuant un train en panne dans le tunnel du métro

Le gouvernement de la Coalition Avenir Québec (CAQ) est pro-automobile et anti-transport en commun.

Contrariée d’avoir à payer le déficit croissant des sociétés de transport, la CAQ a demandé un audit à leur sujet, c’est-à-dire un examen de leurs comptes et leurs états financiers.

Hier, les comptables de Raymond Chabot Grant Thornton ont rendu public leur rapport. Celui-ci signale qu’il serait possible de réaliser 346 millions de dollars d’économies en ‘optimisant’ les dépenses des sociétés de transport.

On connait la chanson.

Depuis plusieurs décennies, nous élisons des partis politiques qui promettent ‘de couper dans le gras’, de procéder à la ‘réingénierie’ de l’État, de ‘remettre de l’argent’ dans les poches des contribuables. Le tout sans affecter la qualité des services que nous recevons, parait-il.

Le résultat, c’est que notre filet de protection est en ruine, que la construction de logements sociaux se fait au compte-goutte (aggravant la crise du logement), et qu’il y a annuellement mille pannes (de plus de cinq minutes) dans le métro de Montréal alors que certaines années, sur la ligne principale du métro de Paris, il n’y en a aucune (aucune comme dans zéro).

Évidemment, la firme Raymond Chabot Grant Thornton a raison; on peut toujours presser le citron encore plus tant qu’il n’est pas complètement sec, faire appel au privé (qui s’en mettra plein les poches) et appliquer au transport en commun les recettes désastreuses que la CAQ et le PLQ ont appliquées à notre système de Santé.

La vérité, c’est que le transport en commun souffre de sous-investissement chronique.

Si la CAQ disposait d’une véritable stratégie industrielle — autre que la filière batterie (qui bat de l’aile) — elle aurait compris que plus les Québécois achètent des voitures, plus des milliards de dollars quittent chaque année le Québec pour enrichir les pays qui produisent les voitures et l’essence que nous leur achetons.

Depuis qu’elle est au pouvoir, la CAQ a payé les factures du Réseau express métropolitain (déjà en construction), mais elle a différé tous les autres projets de transport en commun à l’exception du Service rapide par bus le long de la rue Pie-IX.

Elle a même retardé l’achèvement des stations à venir du REM (donc autres que les quatre déjà en service) puisque plus le réseau s’agrandit, plus son déficit d’opération s’accroit.

Finalement, rien ne nous assure que l’annonce toute récente du prolongement de la ligne bleue du métro de Montréal ne pourrait pas faire l’objet d’une autre volteface de la CAQ.

Avec un gouvernement réellement nationaliste au pouvoir, le Québec investirait massivement dans le transport en commun électrique fabriqué au Québec.

Dans l’étude que j’ai réalisée en 2018 en comparant la Finlande au Québec, cette étude concluait que si nous avions investi dans le transport en commun comme la Finlande l’a fait depuis quatre décennies, il y aurait 3,1 millions de véhicules de moins sur nos routes, dont 694 000 sur l’ile de Montréal.

Ce qui prouve qu’investir dans le transport en commun, ce n’est pas seulement avantageux pour ceux qui l’utilisent, mais également pour les automobilistes.

En effet, en faisant disparaitre un grand nombre de voitures qui encombrent nos rues, cela entraine une conduite plus agréable pour les automobilistes qui restent, moins d’accidents, moins de rage au volant, et des milliards de dollars de moins dépensés annuellement au Québec à l’achat de voitures et à leur entretien.

Finalement, si nous voulons sauver la planète, il faut moins consommer. Et un des moyens d’y parvenir, c’est de cesser, lorsque cela est possible, d’acheter des voitures, qu’elles soient à combustion ou électriques.

Et pendant que la CAQ cherche à assécher les finances de nos services de transport en commun, la Chine construit un TGV de 1 629 km qui traversera l’Himalaya au cout de cinquante-milliards de dollars. Et la Russie, en dépit des sanctions financières de l’Occident, annonçait en septembre dernier qu’elle construira un TGV entre Moscou et Saint-Pétersbourg, long de 680 km, au cout de 24 milliards d’euros.

Références :
Fizgibbon et le parc automobile du Québec
Le TGV entre Moscou et Saint-Pétersbourg prend forme et il sera un des plus rapides au monde
Le transport en commun finlandais : le matériel roulant
Métro de Montréal : le champion mondial des pannes
Portes palières et pannes de métro
Prolongement de la ligne bleue : les travaux sont lancés
Transport collectif : une firme mandatée par Québec a trouvé comment économiser 346 M$
Why is China Building a $50 Billion Railway in the Himalayas? (vidéo)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La condamnation de toute désobéissance civile

Publié le 2 novembre 2024 | Temps de lecture : 4 minutes

Introduction

Lorsque les partisans de Martin-Luther King décidaient de s’assoir au comptoir d’un restaurant, dans une section où cela leur était défendu en vertu de lois ségrégationnistes, leur désobéissance civile était directement reliée à un interdit qui n’avait pas sa raison d’être.

Bloquer un pont ou jeter de la sauce tomate sur La Joconde de Léonard de Vinci n’est pas un droit. Si c’était un droit, s’en prévaloir en violant une loi qui s’y oppose serait de la désobéissance civile.

Dans un cas comme dans l’autre, ce sont plutôt des coups de publicité en faveur de groupuscules radicaux auxquels appartiennent les auteurs de ces méfaits.

S’incliner devant l’ordre établi

Plus tôt cette semaine, en réaction au blocage du pont Jacques-Cartier, Québec Solidaire a refusé son consentement pour que soit débattue une motion gouvernementale condamnant toute désobéissance civile.

Québec Solidaire doit être félicité pour s’être tenu debout.

On aurait tort de croire que la désobéissance civile n’a de place que dans l’Amérique raciste de Martin-Luther King ou dans l’Inde sous colonisation anglaise de Gandhi.

Très peu de Québécois se rappellent les circonstances entourant la création du parc canadien de Forillon, en Gaspésie.

En 1970, 225 familles vivaient en parfaite autarcie sur le territoire qui allait devenir celui de ce parc.

Mais le 17 juillet de cette année-là, sous la pression d’Ottawa, le gouvernement du Parti libéral du Québec (PLQ) adopte la loi P-8; celle-ci accordait à Québec tous les pouvoirs en vue de la création du parc.

Faisant la sale besogne au nom du fédéral, le gouvernement du PLQ a réduit tous ces gens à la misère en leur accordant une somme moyenne équivalente à 30 000$ (en dollars d’aujourd’hui) en échange de leur maison, de leur grange, de leur terrain, de leur terre à bois, et de leurs animaux.

Cette spoliation est un scandale qui a été d’autant plus facilement oublié qu’il n’a été marqué d’aucun incident violent.


 
D’autre part, à l’époque où Paul Desmarais était propriétaire de Sagard — le luxueux domaine forestier de 76 km² qu’il possédait dans Charlevoix — si Québec et Ottawa avaient décidé de l’acheter pour une bouchée de pain en vue d’en faire un parc, qu’aurait fait le milliardaire ?

À la manière des expropriés de Forillon, se serait-il laissé expulser de chez lui, escorté par des agents de la Sécurité du Québec, pendant qu’on mettait le feu à son château ?

Il aurait plutôt fait appel aux avocats les plus compétents du pays et se serait battu jusqu’en Cour suprême, si nécessaire, pour conserver la propriété de son bien.

En effet, le recours aux tribunaux et l’utilisation de la ‘procédurite’ pour retarder et faire obstacle à la volonté de l’État contituent le privilège de celui qui en a les moyens.

Par contre, la désobéissance civile, c’est la résistance du pauvre.

En profitant d’un fait divers insignifiant pour tenter de jeter le discrédit sur toute désobéissance civile, la CAQ est le successeur idéologique du duplessisme.

Références :
50 ans de Forillon: encore de tristes souvenirs pour les expropriés
Grève de l’amiante
QS s’oppose à une autre motion condamnant la désobéissance civile

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Northvolt : le hold-up financier de la Goldman Sachs

Publié le 24 octobre 2024 | Temps de lecture : 4 minutes

De tous les projets de Northvolt à travers le monde, l’usine québécoise de Northvolt est celui qui bénéficie du meilleur financement.

Non seulement le Québec a entièrement financé l’achat du terrain de 240 millions de dollars sur lequel cette usine sera bâtie, mais Investissement Québec et la Caisse de dépôt et placement du Québec ont déjà investi 710 millions$ dans le projet.

Jusqu’ici, Nothvolt a défriché son terrain à Bécancour, mais l’usine n’est pas sortie de terre. Si bien que les caisses de la succursale québécoise de Northvolt sont pleines.

Pendant ce temps, la maison-mère suédoise se bat pour sa survie; elle manque de liquidités. Or dès qu’une compagnie a les caisses vides, c’est la faillite.

Le gouvernement Legault se fait rassurant en soulignant l’indépendance financière de la filiale québécoise (pleine aux as) de la maison-mère (qui lutte pour sa survie).

Cette indépendance est bien relative (nous y reviendrons).

Sous la pression de ses créanciers, Northvolt a réduit ses dépenses en coupant 1 600 postes à son usine suédoise. Ce qui représente le quart de ses effectifs mondiaux. De plus, elle a remis à plus tard tous ses projets actuels (dont celui du Québec, différé de 18 mois).

Elle a contacté tous ses investisseurs actuels (privés et publics) pour leur demander de contribuer à un financement d’urgence.

Avec 19,2 % des parts, la banque d’investissements Goldman Sachs est le deuxième plus important actionnaire de la maison-mère de Northvolt (un peu derrière Volkswagen, avec 21,0 % des parts).

Cette banque offre d’injecter la plus grande part des 300 millions $US nécessaires pour assurer la survie de Northvolt jusqu’au premier trimestre de 2015. Et ce, à deux conditions.

Premièrement, elle exige que le gouvernement du Québec renonce à ses garanties financières en cas de faillite de Northvolt. En somme, elle veut que le Québec n’ait pas priorité sur elle en cas de liquidation des actifs de la compagnie.

Et deuxièmement, elle exige que les succursales de Northvolt qui ont de l’argent de trop (ce qui vise spécifiquement la succursale québécoise) transfèrent leurs surplus à la maison-mère.

Voyons en détail ces deux exigences.

Le sauvetage d’urgence de la maison-mère n’assure pas la survie de Northvolt à long terme. En d’autres mots, même si le Québec renonce à ses garanties, il n’est pas plus avancé puisque Northvolt pourrait faire faillite quand même si l’ambitieuse campagne de financement projetée l’an prochain est un échec.

Quant au transfert des surplus, ce qui en décide, ce ne sont pas les actionnaires; c’est le Conseil d’administration (CA) de la filiale québécoise.

S’il décide d’investir des centaines de millions de dollars dans le capital-actions de la maison-mère, les actionnaires furieux pourront toujours limoger les membres du CA lors de l’assemblée annuelle des actionnaires. Mais il sera déjà trop tard.

Si la banque américaine réussit son coup, le Québec se retrouvera avec des garanties qui concerneront les avoirs d’une coquille vide que sera devenue la filiale québécoise de Northvolt.

Références :
Déboires de Northvolt : quels seront les impacts à Bécancour?
Northvolt : Une faveur pour sauver les meubles ?
Québec céderait ses garanties financières pour sauver Northvolt

Complément de lecture : Le bras dans le tordeur Northvolt

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Francisation : l’insignifiance de la CAQ

Publié le 17 septembre 2024 | Temps de lecture : 9 minutes

Introduction

On apprend ce matin que la première décision du nouveau ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration est de couper l’allocation de 28$ par jour que le gouvernement de la CAQ offrait aux néoQuébécois qui assistent aux cours de francisation donnés par l’État.

Jean-François Roberge est un des plus brillants ministres de la CAQ. Et c’est un excellent communicateur; il pourrait vendre des réfrigérateurs aux Esquimaux.

Pour justifier sa décision, il affirme :

On n’a plus besoin de cette mesure incitative, nos listes d’attente débordent !

Le ministre oublie de dire que les listes débordent parce que son offre de francisation est nettement insuffisante.

Entre l’année fiscale 2018-2019 et l’année 2023-2024, le nombre de participants à ces cours a plus que doublé, passant de 30 734 à 68 844.

Malgré cette augmentation, le nouveau commissaire à la langue française estime que l’offre de francisation correspond à environ 5 à 6 % du nombre nécessaire pour que les immigrants temporaires puissent parler couramment français.

En d’autres mots, si on n’admettait plus aucun immigrant temporaire, cela prendrait seize à vingt ans pour franciser ceux qui sont déjà sur le territoire québécois.

Plus tôt cette semaine, le premier ministre a déclaré à l’Assemblée nationale que le nombre d’immigrants temporaires au Québec était passé (en gros) de 300 000 à 600 000 personnes en deux ans.

Le fiasco de la francisation

En Grande-Bretagne, un immigrant ne peut pas mettre le pied sur le sol britannique s’il n’a pas déjà la connaissance de l’anglais. De manière conséquente, un citoyen britannique ne peut pas faire venir son conjoint de l’Étranger si cette personne ne parle pas l’anglais.

La CAQ a choisi une autre approche. L’exigence préalable n’est pas demandée. Toutefois, le requérant à l’immigration doit s’engager à apprendre le français au cours des trois années qui suivent son arrivée au Québec. À défaut de quoi la CAQ exigera son expulsion du pays par le gouvernement canadien.

En d’autres mots, Québec demandera à Ottawa — où la majorité des fonctionnaires sont des Anglophones unilingues — d’expulser des gens dont le crime aura été d’être eux aussi des Anglophones unilingues.

C’est épouvantable; ils avaient dit qu’ils apprendraient le français” dira la CAQ. “Ya, big deal” répondront les fonctionnaires d’Ottawa en bâillant.

Lorsque la francisation est exigée préalablement, cela ne coute rien à l’État puisque ceux qui veulent venir au Québec se francisent à leurs frais dans leur pays d’origine… à l’exception des réfugiés, évidemment, en raison de l’urgence de leur situation.

Mais quand c’est l’État qui francise ceux qu’il a admis au pays, il faut des classes de francisation et des enseignants. Et quand cela ne suffit pas, il faut offrir une prestation financière. Tout cela est dispendieux.

Or l’expérience démontre l’échec de cette approche.

Avant même l’arrivée de la CAQ au pouvoir, on savait que :
• les deux tiers des immigrants qui ne pouvaient pas parler français à leur arrivée ne se donnaient même pas la peine d’assister aux cours gratuits qu’on leur offrait,
• le tiers des inscrits abandonnaient leur formation avant la fin, et
• dans 90 % des cas, ceux qui tenaient bon jusqu’à la fin étaient toujours incapables de fonctionner en français.

Bref, c’est un fiasco.

Lorsqu’une situation est désespérée et qu’on croit que ça ne peut pas être pire, il arrive souvent qu’on réalise que le pire est possible. En fait, ça peut toujours être pire; ça dépend de ce qu’on fait.

Le 10 aout dernier, on apprenait que la CAQ obligeait un certain nombre d’écoles à réduire ou à limiter le nombre de classes de francisation et ce, malgré l’explosion de la demande.

Et maintenant, le ministre Roberge coupe les allocations destinées à motiver les néoQuébécois à apprendre le français.

Est-il nécessaire d’avoir une boule de cristal pour prévoir la suite des choses ?

Les “prometteux” de la CAQ

En mai 2023, la CAQ annonçait son intention d’exiger la connaissance du français comme condition préalable à l’immigration.

Pour la première fois depuis que la CAQ est au pouvoir, je me réjouissais d’entendre cela.

Mais un détail m’avait échappé; la CAQ n’annonçait pas la mise en application d’une mesure, mais la simple intention de l’adopter.

Depuis, on attend.

Le 27 aout 2024, soit quinze mois plus tard, le quotidien Le Devoir révélait qu’il faudra attendre encore pour savoir concrètement comment la CAQ compte imposer préalablement la connaissance adéquate du français à ceux qui veulent immigrer au Québec.

La règlementation habilitante sera ‘pré-publiée’ cet automne en vue d’une entrée en vigueur souhaitée en 2025… si, évidemment, la CAQ n’y renonce pas d’ici là.

Bref, la politique linguistique de la CAQ est comme les éoliennes; elle change en fonction du vent.

La défense homéopathique du français par la CAQ

Le comble de l’insignifiance est cette campagne publicitaire — une grande mobilisation citoyenne, dit le ministre Roberge — invitant les citoyens à exiger d’être servis en français et d’exiger de travailler dans notre langue.

La langue de travail

La Loi 101 interdit à un employeur d’exiger de ses employés la connaissance de l’anglais à moins que cela soit strictement nécessaire.

En somme, pour franciser les milieux de travail, la Loi 101 exige l’unilinguisme français par défaut.

À tort ou à raison, 63 % des entreprises montréalaises exigent de leurs employés la connaissance de l’anglais. Et dans certains cas (notamment les entreprises fédérales), on embauche fréquemment des anglophones unilingues. Ce qui a pour effet de faire de l’anglais la langue de travail plutôt que le français.

Lorsque le ministre Roberge demande aux travailleurs francophones d’exiger de travailler dans leur langue, que veut-il dire exactement ?

Veut-il dire que, lors d’une entrevue d’embauche, celui qui aspire à un poste fasse savoir à l’employeur qu’il refusera de parler autre chose que le français ? Ou qu’il acceptera de parler anglais uniquement selon son bon vouloir ?

Veut-il dire que ceux qui ont déjà un emploi devraient dorénavant refuser de parler autre chose que la langue de Molière ?

Concrètement, je n’arrive pas à comprendre ce que veut dire ‘exiger de parler le français’ pour celui qui n’a généralement aucun recours s’il est congédié sauf de porter plainte au Tribunal du travail et d’attendre deux ou trois ans avant que sa cause soit entendue.

La langue de service

Notre ministre ponce-pilate veut remettre la défense du français entre les mains du citoyen. Bien.

Si le ministre veut que les citoyens aient la responsabilité de faire respecter la Loi 101, qu’il leur en donne les moyens, notamment l’accès direct aux tribunaux.

En d’autres mots, sans passer par la plainte à l’Office québécois de la langue française. Une plante qui, dans l’immense majorité des cas, ne donne rien.

Lorsque l’État transfert ses responsabilité sans transférer ses moyens répressifs, cela veut dire : arrangez-vous avec vos troubles.

Au contraire, il lui suffit de faire adopter une loi qui exempte, par exemple, le client de payer la note d’un restaurant s’il a été servi en anglais et c’est certain que les choses bougeront rapidement.

Pour défendre le français au Québec, les vœux pieux ne suffisent pas. Il faut que la personne responsable de cette défense (le ministre ou le peuple) dispose d’un pouvoir de coercition parce que cela ne se fera pas tout seul.

Conclusion

En théorie, le gouvernement québécois ne devrait rien dépenser du tout pour la francisation des néoQuébecois; à l’exception des réfugiés, aucun immigrant ne devrait mettre les pieds au Québec, sans connaitre préalablement le français.

Le message devrait être :

Bienvenue chez nous. Nous sommes heureux de vous accueillir alors que nous manquons de bras et de talents.

Toutefois, vous devez absolument prendre racine chez nous en français puisque nous refusons de devenir des étrangers dans notre propre pays.

En se dotant d’une politique linguistique couteuse et inefficace, la CAQ la soumet aux vicissitudes de la situation budgétaire de l’État québécois.

Les quinze ans de laisser-faire libéral auront donc été suivis par six ans d’hésitation caquiste.

Indépendamment de la question qui leur sera posée, la véritable question à laquelle les Québécois auront à répondre au prochain référendum sera, implicitement : «Préférez-vous affronter les tumultes d’une accession à l’indépendance ou renoncer à l’héritage de vos ancêtres et vous réfugier dans le confort d’une lente ‘louisianisation’ menant à l’extinction du peuple francoQuébécois ?»

Bref, c’est l’indépendance ou la mort.

Références :
Avec sa publicité sur la défense du français, le gouvernement Legault nous dit: «Débrouillez-vous», selon le Mouvement Québec français
Immigrants’ spouses ‘must speak English before entering UK’
La convergence culturelle : communion et symbiose
L’été est la saison des ‘p’titres vites’ : la CAQ manque d’argent pour franciser
L’immigration au Québec : enfin de bonnes décisions !
Manquer à ses promesses en francisation
Québec lance une nouvelle campagne publicitaire pour faire la promotion du français

Paru depuis : L’offre en francisation se réduit à Montréal, Granby et Sherbrooke (2024-10-17)


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Écrit par Jean-Pierre Martel


Doit-on bannir l’importation de matières fécales humaines ?

Publié le 5 septembre 2024 | Temps de lecture : 5 minutes

Introduction

Biosolides est le nom donné aux matières fécales humaines lorsqu’on les utilise pour la fertilisation des terres agricoles. On les appelle également boues d’épuration.

En principe, les biosolides sont très utiles. Qu’il s’agisse de fumier animal ou humain, le compost créé à partir d’eux contient de l’azote, du phosphore et du potassium (comme dans les engrais chimiques), mais également des oligoéléments, c’est-à-dire des sels minéraux essentiels au métabolisme des plantes.

Dans tous les cas, on doit simplement éviter que ces engrais organiques contiennent des niveaux élevés de contaminants toxiques.

Par mesure de prudence, la règlementation québécoise stipule également que lorsque du compost est fait à partir de fumier humain, il ne doit pas servir à engraisser des sols où poussent des plantes destinées à l’alimentation humaine.

Autre avantage : leur utilisation à titre de fertilisants évite qu’ils soient déversés dans nos cours d’eau par certaines municipalités quand leurs usines d’épuration sont débordées.

Voilà pourquoi les municipalités paient des entreprises spécialisées pour que celles-ci les débarrassent de leurs biosolides.

Pour les entreprises qui en font la distribution, cela est tellement payant qu’elles donnent littéralement ces engrais aux agriculteurs qui acceptent de s’en servir.

En 2021, le Canada a importé 70 000 tonnes de matières fécales des États-Unis. Annuellement, on estime que 2 300 camions chargés d’excréments américains traversent la frontière canadienne.

Les polluants éternels

Au cours de la pandémie au Covid-19, les autorités sanitaires du Québec échantillonnaient les matières fécales de diverses municipalités puisqu’il s’agissait d’un excellent moyen de connaitre l’étendue de l’infection au sein d’une population.

Depuis des décennies, on sait également qu’on trouve des traces de médicaments (ou de leurs métabolites) dans nos cours d’eau puisque l’immense majorité des médicaments sont de petites molécules que nos usines d’épuration n’arrivent pas à retenir.

C’est également le cas de produits industriels comme les ‘polluants éternels’.

En 2009, la Convention de Stockholm a classé le PFOS (l’acide perfluorooctane sulfonique) et ses sels comme des polluants organiques éternels en raison de leur nature omniprésente, persistante, bioaccumulable et toxique.

En Amérique du Nord, c’est principalement dans le Midwest américain qu’étaient situés les principaux producteurs de ces produits chimiques.

Au Minnesota, leur contamination est tellement répandue qu’ils ont même contaminé les nappes phréatiques.

En 2018, la compagnie 3M a accepté de payer 850 millions de dollars pour régler à l’amiable une poursuite de cinq-milliards$ intentée à ce sujet par cet État.

L’Ontario importe ses biosolides des États du Midwest américain alors qu’au Québec, nous les recevons de la Nouvelle-Angleterre (beaucoup moins contaminée).

L’État du Maine a totalement interdit leur utilisation et a condamné les terres agricoles contaminées par ces substances.

Les entreprises qui en faisaient le commerce au Maine ont donc cherché d’autres débouchés et se sont tournées vers le Québec.

La solution

Il y a deux ans, la révélation de ce scandale par Radio-Canada a obligé le gouvernement de la CAQ à imposer un moratoire sur l’importation des biosolides américains.

Après deux ans de réflexion, la CAQ songe à lever cette interdiction pour la remplacer par une norme du ministère de l’Environnement.

Après avoir abaissé l’an dernier les taux d’imposition de manière à priver l’État de recettes fiscales représentant deux-milliards de dollars par année, la CAQ manque d’argent; elle s’apprête donc à réduire ses dépenses partout.

Ceux qui croient que son ministre ‘Tefal’ de l’Environnement va embaucher des enquêteurs, payer pour faire analyser les échantillons prélevés par ceux-ci et imposer des amendes aux contrevenants, sont beaucoup plus optimistes que je le suis.

Pour éviter que le Québec ne redevienne la toilette des États-Unis, il faut une législation simple et dissuasive.

Or le plus simple est l’interdiction totale de l’importation de matières fécales, y compris en provenance d’autres provinces canadienne pour éviter que l’Ontario nous refile des biosolides hypercontaminés du Midwest américain.

Cette interdiction devrait être associée à une pénalité minimale d’un million de dollars dès la première infraction.

Et il suffira au ministère de l’Environnement de procéder de temps en temps à une filature comme l’a fait Radio-Canada, et d’encaisser les millions.

Interdire l’importation favorise l’émergence de l’industrie des biosolides au Québec (ce qui n’est quand même pas de la haute technologie) et nous donne une certaine assurance que nous ne contribuerons pas à nous polluer plus que nous le sommes déjà.

Références :
Les États-Unis nous emmerdent !
Québec veut limiter les PFAS dans les biosolides utilisés en agriculture
Scotchgard

Parus depuis :
Les agriculteurs québécois se méfient encore du « fumier humain » (2024-09-07)
US lawmakers push to exclude lucrative chemicals from official PFAS definition (2024-09-12)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’été est la saison des ‘p’titres vites’ : la CAQ manque d’argent pour franciser

Publié le 28 août 2024 | Temps de lecture : 5 minutes

Le volet migratoire de toute politique linguistique au Québec doit viser à maintenir l’équilibre linguistique, soit 80 % de locuteurs francophones.

Immédiatement avant la pandémie au Covid-19, seulement 55 à 60 % des néoQuébécois parlaient notre langue à leur arrivée.

La moitié des autres parlait anglais tandis que le reste possédait une connaissance insuffisante à la fois du français et de l’anglais.

À défaut de posséder tous les pouvoirs en matière d’immigration — ce que le Québec aurait en faisant son indépendance — les cours de francisation destinés aux néoQuébécois et aux immigrants temporaires représentent un des rares moyens dont dispose le Québec pour éviter l’extinction du peuple francoQuébécois.

Depuis toujours, les cours de francisation sont facultatifs et ne comportent pas de récompense en cas de réussite.

L’année qui a précédé la défaite libérale de 2018, la vérificatrice générale concluait que la francisation des immigrants était un échec.

Remis en 2017, son rapport révélait que les deux tiers des immigrants qui ne pouvaient pas parler français à leur arrivée ne se donnaient même pas la peine d’assister aux cours gratuits qu’on leur offrait. Que le tiers des inscrits abandonnaient leur formation avant la fin. Et que dans 90 % des cas, ceux qui tenaient bon jusqu’à la fin étaient toujours incapables de fonctionner en français.

Depuis 2018, la Coalition Avenir Québec (CAQ) est au pouvoir. De 2019 à 2024, les sommes allouées par la CAQ à la francisation des immigrants ont augmenté de 50 %, passant de 69 à 104 millions de dollars.

Entre l’année fiscale 2018-2019 et l’année 2023-2024, le nombre de participants a plus que doublé, passant de 30 734 à 68 844.

Malgré cela, ces sommes demeurent très insuffisantes selon le nouveau commissaire à la langue française en raison du déluge migratoire voulu par Ottawa afin de faire passer la population canadienne de 36 à 100 millions de personnes d’ici 2100.

Dans le rapport qu’il a remis plus tôt cette année, celui-ci estime que le nombre d’heures réalisées en francisation correspond à environ 5 a 6 % du nombre nécessaire pour que tous les immigrants temporaires puissent parler couramment français.

En d’autres mots, si on n’admettait plus aucun immigrant temporaire, cela prendrait seize à vingt ans pour franciser ceux qui sont actuellement sur le territoire québécois… en supposant qu’ils demeurent temporairement chez nous tout ce temps.

Ceci étant dit, où est la ‘p’tite vite’ du titre ?

C’est qu’on apprenait le 10 aout dernier (donc, en plein été) qu’en raison d’une ‘impasse budgétaire’, la CAQ force un certain nombre d’écoles à réduire ou à limiter le nombre de classes de francisation et ce, malgré l’explosion de la demande.

En d’autres mots, après avoir gaspillé en 2019 un milliard de dollars afin que l’industrie du taxi devienne compatible avec le modèle d’affaires d’Uber, après avoir abaissé l’an dernier les taux d’imposition de manière à priver l’État de recettes fiscales représentant deux-milliards de dollars par année, après avoir gaspillé l’électricité du Québec en la vendant au coutant à des mineurs de cryptomonnaies et des centres de données, voilà que la CAQ manque d’argent pour franciser nos immigrants.

Jean de la Fontaine écrivait : « La Cigale, ayant chanté tout l’été, se trouva fort dépourvue quand la bise fut venue…»

Parions que bientôt la CAQ ira crier famine chez la fourmi fédérale, sa voisine, la priant de lui prêter quelques grains pour subsister…

Comme tout cela est pathétique…

Références :
Anglicisation du Québec : l’omelette de la loi 96
Controversy over Chinese miners in B.C. prompts review
Couillard regrette d’avoir dit le fond de sa pensée: les ouvriers doivent tous parler anglais!
Défense du français : les tergiversations de la CAQ
Face à un achalandage record, les délais chez Francisation Québec explosent
Francisation des immigrants – Québec loin de ses objectifs
Hausse « phénoménale » des demandes, mais peu d’impacts sur le français
Immigration temporaire :choisir le français
Immigration temporaire: jusqu’à 13 milliards $ pour la francisation
La baisse d’impôt promise par la CAQ ne fait pas l’unanimité
La Cigale et la Fourmi
La francisation des immigrants au Québec est un échec, selon la vérificatrice générale
Le miracle impossible de la francisation
L’ubérisation du taxi québécois : le premier grand gaspillage de la CAQ
Moins de classes de francisation malgré une forte demande

Paru depuis : L’offre en francisation se réduit à Montréal, Granby et Sherbrooke (2024-10-17)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Faire disparaitre la pollution par magie

Publié le 17 juillet 2024 | Temps de lecture : 5 minutes
Lac Louise, en Alberta

La restauration de sites miniers abandonnés

L’article 101 de la loi sur les mines permet la création d’une mine si un plan de réaménagement et de restauration minière a été préalablement approuvé par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune.

L’article 232.4 de cette loi oblige la compagnie minière à fournir une garantie dont le montant correspond aux couts anticipés de ce plan.

Mais restaurer coute cher.

La magie au service de l’environnement

Depuis des mois, les démarcheurs des compagnies minières se relaient aux antichambres ministérielles afin de les convaincre d’une brillante idée.

Au lieu d’enfouir des résidus miniers dans des réservoirs souterrains imperméables, puis de les recouvrir de manière à redonner au site minier un aspect ‘présentable’, ne serait-il pas beaucoup plus économique de jeter tous ces résidus dans nos lacs afin de les faire disparaitre instantanément ? Comme par magie…

L’idée vous fait sourire ? Lisez bien ce qui suit.

Après une bataille juridique de quinze ans contre deux organismes de défense de l’environnement, le gouvernement norvégien a reçu en début d’année la bénédiction des tribunaux du pays pour autoriser Nordic Mining à déverser 170 millions de tonnes de résidus toxiques dans le fjord Førde.

Selon l’Institut norvégien de recherche marine (Havforskninginstituttet), cette décharge sera située à proximité d’un des sites dont la biodiversité marine est parmi les plus riches du pays.

Après la Turquie et la Papouasie—Nouvelle-Guinée, la Norvège devenait ainsi le troisième pays au monde à permettre le déversement maritime des déchets miniers.

Trente-sept lacs à polluer

Il y a deux ans, le gouvernement de la CAQ autorisait Minerai de fer Québec (filiale d’une minière australienne) à jeter ses résidus miniers dans des lacs. Et ce, malgré l’avis contraire du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) et malgré l’opposition des groupes environnementalistes.

Mais il restait à obtenir l’appui d’Ottawa.

C’est fait. Le fédéral vient d’accorder à cette minière la permission de jeter 408 millions de mètres cubes de résidus miniers dans trente-sept lacs du Québec.

Toutefois, cette permission est assortie d’une contrepartie, soit l’obligation de dépolluer, ailleurs, un territoire d’une superficie équivalente à ces 37 lacs, 1,56 km².

On connait la chanson.

Au cours de la campagne électorale fédérale de 2019, Justin Trudeau promettait de faire planter deux-milliards d’arbres en contrepartie de la construction d’un pipeline traversant les montagnes Rocheuses.

Cinq ans plus tard, le pipeline est construit. Mais la contrepartie se fait attendre; en avril dernier, Ottawa annonçait que la plantation (embryonnaire jusqu’ici) des deux-milliards d’arbres commencerait véritablement bientôt.

La nature d’un lac

La mine de fer en question est située à proximité du lac Bloom, à 747 mètres d’altitude.

Les 37 lacs qui serviront de dépôts de résidus miniers ne sont pas des bassins d’eau morte. L’eau s’y renouvèle par le biais de sources qui les alimentent ou qui en font la vidange, et enfin par le biais de canaux aquifères qui relient ces lacs à des nappes phréatiques situées au travers du roc.

Lorsque des résidus miniers s’accumulent hors du sol, l’eau de pluie n’a que quelques secondes pour solubiliser ce qui se trouve à leur surface. Baignant dans un lac, les mêmes résidus offrent à l’eau la possibilité de se minéraliser pendant un temps considérable.

Jeter de grandes quantités de roches dans un lac libère les acides et les solvants utilisés par le processus d’extraction et de raffinage. Inévitablement, ces lacs pollueront les nappes phréatiques auxquelles ils sont reliés, de même que les cours d’eau en surface que ces nappes phréatiques alimentent.

La loi québécoise sur les mines permet l’exploitation minière des cours d’eau à faible débit et des plans d’eau (lacs et étangs). Les minières peuvent y faire ce qu’elles veulent à la condition de restaurer le site à la fin de l’exploitation minière.

La permission accordée à Minerai de fer Québec est une exemption implicite de l’obligation de restaurer.

On voit mal le ministère des Ressources naturelles s’équiper de scaphandres pour vérifier si, à la fermeture du site, cette multinationale a oublié une roche au fond d’un lac.

Les résidus engloutis seront donc là pour de bon.

Conclusion

Selon le ministre fédéral de l’Environnement, la destruction des 37 lacs québécois est nécessaire (sic) puisque les métaux extraits de cette mine seront utiles à la transition énergétique. Bref, leur destruction est un sacrifice sur l’autel de l’environnement.

C’est aussi la chanson utilisée par la CAQ pour faire accepter aux citoyens de Limoilou le sacrifice de respirer cinq fois plus de poussière de nickel, probablement cancérigène. Parce que ce métal est utile à la transition énergétique.

En d’autres mots, pour combattre la pollution de l’air et les bouleversements climatiques qui en découlent, il est nécessaire d’empoisonner l’eau et le sol.

Alors, il reste quoi ?

Références :
Historic lawsuit to save the Førdefjord
La destruction de 37 lacs est nécessaire, selon Steven Guilbeault
La plantation de deux milliards d’arbres commencera ce printemps
Norway to allow mining waste to be dumped in fjords
Seuls 8,5 millions des 2 milliards d’arbres promis par Justin Trudeau ont été plantés

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II + objectif M.Zuiko 7-14mm F/2,8 — 1/4000 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 7 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’ubérisation du taxi québécois : le premier grand gaspillage de la CAQ

Publié le 3 juillet 2024 | Temps de lecture : 4 minutes
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Le contexte

À son arrivée au pouvoir en 2018, la CAQ héritait des surplus budgétaires dégagés par l’austérité budgétaire du gouvernement libéral de Philippe Couillard.

Plutôt que d’investir massivement dans les différentes missions de l’État négligées par quinze ans d’incurie libérale, la CAQ a préféré gaspiller ces surplus en accordant des réductions d’impôt et en ubérisant l’industrie du taxi québécois.

À l’époque, le grand gourou informatique de la CAQ était le ministre Éric Caire. Or celui-ci était formel; il fallait, à n’importe quel prix ubériser le taxi québécois afin de moderniser cette industrie. Comme si c’était la priorité économique de son gouvernement.

Grâce à l’application téléphonique d’Uber, les utilisateurs du taxi québécois pourront, disait-il, bénéficier de la facturation dynamique — c’est-à-dire d’un tarif fluctuant selon l’offre et de la demande — tandis que, d’autre part, n’importe quel automobiliste pourra se transformer en opérateur de taxi.

Pour un parti de droite comme la CAQ, Uber était le symbole de l’économie de demain, caractérisée par le ‘capitalisme participatif’.

Pour les utopistes libertariens, une démocratie parfaite serait celle où tous les citoyens, même les plus pauvres, seraient des capitalismes par gout ou par nécessité.

Toutefois, l’ubérisation de l’industrie du taxi nécessitait le rachat de tous les permis de taxi en circulation (sic).

Lorsque la CAQ l’a promise, il s’agissait d’une promesse mineure de son programme électoral. Essentiellement, à l’élection générale de 2018, l’immense majorité de ceux qui ont voté pour la CAQ, l’ont fait pour se débarrasser des Libéraux.

Si on leur avait demandé de nommer les principales promesses de la CAQ, presque personne n’aurait mentionné l’ubérisaton du taxi. Cette promesse était tellement mineure que la CAQ elle-même en ignorait le cout exact.

Mais bientôt, il s’est avéré que la somme à débourser était colossale. N’importe quel gouvernement responsable aurait renoncé à une promesse qui s’avèrerait excessivement couteuse.

Le dogmatisme idéologique du gouvernement

Lorsqu’une entreprise privée a besoin d’un bien pour opérer (un terrain, une bâtisse, de la machinerie, etc.), c’est à elle de l’acquérir à ses frais.

Si le modèle d’affaire d’Uber nécessite le rachat de tous les permis de taxi au Québec, c’est à Uber d’en assumer le cout.

Afin de plaire à cette multinationale, la CAQ a préféré gaspiller notre argent en rachetant les milliers de permis détenus par des Québécois. Des Québécois qui paient honnêtement l’impôt sur leurs revenus. Alors qu’Uber pratique l’optimisation fiscale en délocalisant ses profits dans des paradis fiscaux.

Si bien que la CAQ a dépensé une fortune pour diminuer ses revenus fiscaux.

À sa face même, c’était une idée stupide.

Le cout final

Le 21 juin dernier, la Cour supérieure condamnait le gouvernement de la CAQ à payer 143,9 millions de dollars supplémentaires en raison des sommes insuffisantes que la CAQ a versées jusqu’ici pour le rachat des permis de taxi.

Avec les intérêts, cela fait 220 millions de dollars. Cela s’ajoute à la somme versée en 2018 aux propriétaires de permis de taxi, soit 873 millions de dollars.

Au total, l’ubérisation de l’industrie du taxi a couté plus d’un milliard de dollars aux contribuables québécois.

Références :
Baisse d’impôts de la CAQ: voici combien vous pourriez économiser
Libertarianisme
L’ubérisation du taxi québécois
Perte de valeur des permis de taxis : Québec devra verser plus de 143 millions $

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II + objectif M.Zuiko 25mm F/1,2 — 1/320 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 25 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel