L’administration Trump-II ou la prédation américaine du Canada

Publié le 10 décembre 2024 | Temps de lecture : 7 minutes


 
Introduction

À l’occasion d’une rencontre récente avec Justin Trudeau tenue à Mar-a-Lago, Donald Trump a suggéré que le Canada devienne le 51e État américain. Une simple blague, dit-on, dans l’entourage du premier ministre canadien.

À l’heure actuelle, cette idée n’est partagée que par 13 % de la population de ce côté-ci de la frontière.

Au-delà du nationalisme

À l’occasion de la campagne électorale québécoise de 2018, j’avais fait du porte-à-porte pour le Parti Québécois afin de sonder les préférences des citoyens de mon comté.

L’un d’eux m’avait dit au sujet du projet indépendantiste : « Moi, les frontières, je trouve ça tellement démodé.»

Aussitôt, la première chose qui m’était venue à l’esprit, c’était : « Pourquoi tu ne milites pas pour l’annexion du Canada aux États-Unis, mon petit génie ? » Une question que j’avais gardée pour moi.

Parce qu’effectivement, on se demande pourquoi il y a une frontière entre les provinces anglophones du pays et les États-Unis.

Nous, Québécois, avons une langue, une culture et une façon de penser qui nous est propre.

Mais nos amis angloCanadiens, eux, regardent des émissions américaines, voient des films américains, mangent de la malbouffe américaine (nous aussi, d’ailleurs), vivent comme des Américains, et pensent comme des Américains.

Sur la scène internationale, le Canada est le perroquet des États-Unis. Depuis l’ACÉUM (la nouvelle mouture de l’ALÉNA), le Canada ne peut plus signer de nouveaux accords commerciaux qu’avec le consentement de Washington. Et la Banque du Canada a écoulé tous ses lingots d’or pour ne détenir, essentiellement, que des dollars américains.

Le parlement canadien (tout comme le Congrès américain) est devenu le lieu où les banques, les compagnies aériennes, les géants de l’agroalimentaire, soumettent les lois qu’ils veulent faire adopter par le parlement.

Bref, le Canada a abandonné presque tous les attributs de la souveraineté.

Voilà pourquoi, selon Justin Trudeau, la Canada est devenu un État postnational. Selon Wikipédia, le postnationalisme est le processus selon lequel les pays perdent de leur importance par rapport à des entités supranationales et mondiales.

En somme, un pays postnational est un pays qui ne mérite pas d’exister. C’est un pays qui aspire à disparaitre au sein d’un monde global où chaque citoyen, atomisé, choisit ses affiliations et tisse ses allégeances selon ses préférences personnelles.

Le Grand jeu américain

Cette visite précipitée de Justin Trudeau à Donald Trump fait suite à l’annonce de l’intention de ce dernier d’imposer une taxe de 25 % sur tous les biens canadiens vendus aux États-Unis.

On a beaucoup dit que cette menace n’avait pour but que de forcer le Canada à faire cesser deux choses; l’immigration clandestine et l’entrée de fentanyl aux États-Unis en provenance du Canada.

À mon avis, il s’agit d’une feinte (comme au hockey) dont le but est beaucoup plus ambitieux.

En aout 2019 (donc au cours de son premier mandat présidentiel), Donald Trump avait été vexé par le refus danois de lui vendre le Groenland et, conséquemment, avait annulé la visite qu’il devait effectuer au Danemark.

Pourquoi voulait-il que les États-Unis annexent le Groenland ? Pour la richesse présumée de son sous-sol.

Au XXIe siècle, les richesses minérales auront la même importance géostratégique que le pétrole au XXe siècle et que le charbon au XIXe siècle. Trump le sait.

À défaut du Groenland, le Canada fait un excellent prix de consolation.

Les États-Unis ont déjà tenté de s’emparer du Canada en 1774-1775 et en 1812-1814. Toutefois, de nos jours, une annexion territoriale signifie qu’on s’empare de plein de choses inutiles.

Il est beaucoup plus intelligent d’obtenir sélectivement, au rabais, ce qu’on convoite.

En 2017, en imposant une taxe de 220 % sur les avions de la C Series de Bombardier, le but de Trump était accessoirement de protéger Boeing d’un concurrent commercial. Accessoirement puisque Bombardier, comparé à Boeing, n’était qu’un nain.

L’objectif véritable était de provoquer l’effondrement de la valeur capitalisée de Bombardier et de permettre ainsi à Boeing d’acheter Bombardier à bas prix. Et, ipso facto, de faire main basse sur les technologies issues du colossal effort de recherche et développement que Bombardier avait consenti pour mettre au point sa C Series.

Évidemment, dans le cas de Bombardier, les choses ne se sont pas passées comme prévu puisque l’entreprise a préféré vendre sa technologie à Airbus, l’ennemi jugé de Boeing.

De nos jours, en imposant une taxe de 25 % sur les produits canadiens, Donald Trump veut provoquer un effondrement de la valeur du dollar canadien par rapport au dollar américain.

Par exemple, si le huard passe de 70 cents à 60 cents, toutes les entreprises canadiennes sont offertes à 14 % de réduction (du point de vue américain). C’est ça, l’objectif de Trump.

Parce que le 25 % ne s’applique pas aux outils de production qu’on achète — les compagnies, les sites pétroliers, les chantiers navals, les entreprises forestières, les sous-traitants de la filière aéronautique et les terres agricoles — mais seulement aux biens qu’elles produisent.

Et puisque le pays n’a pas su se doter d’experts en intelligence économique, il est à prévoir qu’on assistera, au cours du second mandat de Donald Trump, à un transfert massif des technologies de pointe du Canada vers les États-Unis sous le couvert de l’achat des compagnies qui les détiennent.

Conclusion

L’imposition massive de tarifs douaniers est une déclaration de guerre économique. Or une des conditions essentielles pour gagner une guerre, c’est de bien connaitre son adversaire.

Malheureusement, toute la classe politique canadienne sous-estime Trump. Je ne répèterai pas ici tout le mal qu’on aime en dire.

Ce que nos politiciens n’ont pas compris, c’est que le président élu est doté d’une intelligence nettement supérieure. Ce qui explique sa réussite.

Mais ce n’est pas un intellectuel. Parce que, contrairement à ce qu’on pense, les deux ne vont pas nécessairement ensemble.

Donald Trump n’est pas un intellectuel parce qu’il n’a pas de vocabulaire. Il ne lit pas; rares sont les mots de plus de quatre syllabes qu’il connait. Or il faut du vocabulaire pour exprimer toutes les nuances d’une pensée complexe.

D’un côté, cela en fait un excellent communicateur. Mais de l’autre, cela lui a valu toute sa vie le mépris d’une intelligentsia qu’il déteste en retour.

Bref, Trump est déterminé à livrer notre pays à la cupidité des spéculateurs américains, et de forcer la classe politique canadienne à lui lécher les bottes. Pour éviter le pire, dira-t-elle…

Références :
Droits compensatoires : des failles dans la plainte de Boeing
Intelligence économique
L’affaire Alstom
Le Canada, 51e État américain? Des Canadiens appuient l’idée
Le Danemark abasourdi après l’annulation d’une visite de Trump à cause du Groenland
Les conséquences géostratégiques du basculement vers les énergies vertes
L’idée de Trump d’annexer le Canada n’est pas nouvelle aux États-Unis
Postnationalisme

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le conflit indo-canadien

Publié le 17 octobre 2024 | Temps de lecture : 9 minutes

Introduction

Dans les années 1940, émergea en Inde un mouvement en faveur de la création du Khalistan, un pays encastré situé dans le nord du territoire indien actuel et où les personnes de confession sikhe seraient majoritaires.

Ce mouvement prit de l’ampleur à la suite de l’attaque en 1984 du Temple d’Or (un temple sacré) où s’étaient réfugiés des militants Sikhs armés. Cette attaque avait été ordonnée par Indira Gandhi, première ministre de l’Inde. À la suite de quoi, ses gardes du corps Sikhs l’ont assassinée.

Les 770 000 Canadiens de confession sikhe forment la plus importante communauté sikhe hors de l’Inde. Et c’est au sein de cette diaspora qu’on trouve les personnes les plus dévouées à la cause indépendantiste du Khalistan.

Fêter le meurtre d’Indira Gandhi

Selon le calendrier sikh, c’est en avril qu’on célèbre la fête de la Moisson qui, dans l’hémisphère sud, survient à cette période de l’année.

En 2008, à Surrey, en Colombie-Britannique, la parade de cette fête comprenant une célébration de l’assassinat d’Indira Gandhi.

À la suite des protestations du gouvernement indien à ce sujet, le Canada a répondu que la célébration de la violence politique était compatible avec la liberté d’expression garantie par la constitution du pays.

En juin 2023, un défilé sikh à Brampton (en Ontario) mettait en vedette un char allégorique où cet assassinat politique était de nouveau représenté. Cela provoqua d’autres protestations de l’Inde, également rejetées du revers de la main par le Canada.

Le 6 juin dernier, à l’occasion de manifestations sikhes devant le consulat de l’Inde à Vancouver, on célébra de nouveau cet assassinat. Nouvelles protestations de l’Inde : nouveau haussement d’épaules d’Ottawa.

L’assassinat ciblé de Hardeep Dingh Nijjar

En 2007, un attentat survenu dans une salle de cinéma de la ville indienne de Ludhiana a fait six morts et quarante-deux blessés. Selon les autorités, les suspects arrêtés ont allégué que l’attentat était financé et dirigé par le Canadien Hardeep Dingh Nijjar.

En 2016, les médias indiens révélaient que M. Nijjar était soupçonné d’avoir dirigé, à partir du Canada, un attentat terroriste au Pendjab.

Si bien qu’Interpol a émis deux mandants d’arrestation (en 2014 et en 2016) contre M. Nijjar. Deux mandats auxquels le Canada n’a pas donné suite.

Au sud-est de Vancouver, M. Nijjar organisait des camps d’entrainement des Tigres du Khalistan, où les inscrits apprenaient le maniement des armes.


Aparté : En 2018, à l’occasion du voyage de Justin Trudeau en Inde, le Haut-commissariat canadien à New Delhi a organisé un diner d’honneur où était invité Jaspal Atwal, un extrémiste Sikh qui a été condamné à vingt ans de prison en 1986 pour la tentative d’assassinat d’un ministre indien en visite au Canada.

En 2019, Sécurité publique Canada — qui regroupe depuis 2003 toutes les agences fédérales responsables de la sécurité nationale — considérait que l’extrémisme sikh figurait au cinquième rang des menaces terroristes au pays. Toutefois, les députés fédéraux sikhs obtinrent que toutes les mentions de l’extrémisme sikh soient purgées de la version officielle du rapport.

Rappelons que le pire attentat terroriste de l’histoire canadienne, survenu en 1985, est l’explosion du vol 182 d’Air India, en partance de Montréal. Au cours de cet attentat, 329 personnes ont trouvé la mort, dont le pharmacien Gaston Beauchesne, de Hull. À ce jour, cet attentat sikh est demeuré essentiellement impuni.

En 2022, l’Agence de renseignement de l’Inde a accusé M. Nijjar d’avoir dirigé la tentative d’assassinat au Pendjab du prêtre hindou Kamaldeep Sharma.

Ces allégations sont basées sur les déclarations assermentées de suspects arrêtés en Inde. Toutefois, la World Sikh Organization of Canada (WSO) rejette ces allégations qui, selon elle, auraient été obtenues sous la torture.

Il faut noter ici que pour défendre sa cause contre M. Nijjar, l’Inde a dû partager sa preuve avec le Canada alors que la WSO n’a eu qu’à prétendre que cette preuve avait été obtenue sous la torture pour être crue sur parole par Ottawa.

En juin 2024, le quotidien torontois Globe and Mail révélait avoir obtenu des enregistrements de sermons de M. Nijjar où, en 2021, il en appelait à l’utilisation de la violence armée pour créer le Khalistan.

Depuis 1987, le Canada et l’Inde sont liés par un traité d’extradition.

Toutefois, le Canada a rejeté deux demandes d’extradition contre M. Nijjar afin de ne pas indisposer l’important communauté sikhe canadienne, très politisée, au sein de laquelle M. Nijjar était une personnalité respectée.

Las de l’inertie canadienne, l’ambassade l’Inde au Canada a procédé en juin 2023 à l’assassinat ciblé d’Hardeep Dingh Nijjar. Depuis ce temps, les relations entre le Canada et l’Inde se sont détériorées.

Les assassinats ciblés

Couramment, la Russie tue à l’Étranger ses dissidents politiques, autrefois à la ricine, de nos jours au Novitchok.

Le Canadien Gerald Bull, expert en balistique, a été tué à Bruxelles par le Mossad (israélien) en 1990. De nos jours, Israël procède à des assassinats ciblés contre des dirigeants ennemis réfugiés au Qatar, en Syrie ou en Iran. Et il les tuerait ailleurs s’ils s’y trouvaient.

En octobre 2018, le dissident politique Jamal Khashoggi a été dépecé à la tronçonneuse par un commando saoudien en Turquie.

Le même commando a été intercepté quelques jours plus tard à l’aéroport d’Ottawa. Un agent a trouvé suspect que ces personnes, prétendant effectuer un voyage touristique au Canada, apportaient dans leurs valises des instruments de dissection.

Leur victime devait être Saad Aljabri, ancien numéro deux des services de renseignement saoudiens, réfugié au Canada.

Les tueurs étaient accompagnés d’un diplomate saoudien qui a poursuivi sa route et qui n’a pas été expulsé par le Canada comme il aurait dû l’être. De plus, cet incident n’a pas suscité l’indignation de Justin Trudeau.

Parmi la multitude de leurs assassinats ciblés, les États-Unis ont assassiné en 2020 le général Qassem Soleimani à Bagdad.

Bref, l’assassinat ciblé est pratiqué par tous les pays qui en sont capables.

Conclusion

Le Canada représente pour l’Inde ce que l’Afghanistan représentait pour les États-Unis au moment des attentats du 11 septembre 2001; la base arrière d’extrémistes, voire de terroristes ennemis.

Tant qu’Ottawa se montrera indifférent aux préoccupations sécuritaires de l’Inde et refusera de s’attaquer au tabou canadien de l’extrémiste sikh, l’Inde sera tentée de se faire justice.

Ce qui est d’autant plus facile que le Canada est dirigé par un gouvernement dysfonctionnel, incapable de s’acquitter de ses responsabilités.

Ceci étant dit, le monde de demain sera celui de l’Indo-Pacifique.

Or le bilan diplomatique de Justin Trudeau est un désastre; il a réussi à se mettre à dos, entre autres, la Chine et l’Inde, piliers des BRICS.

En 1970, Pierre-Elliott Trudeau avait été un des tout premiers dirigeants occidentaux à reconnaitre la Chine communiste. Son fils a gaspillé le capital de sympathie amassé par son père en participant au rapt de Meng Wanzhou (une dirigeante de Huawei). Depuis, le Canada et la Chine sont à couteaux tirés.

En 2020, le Canada s’est mêlé des affaires intérieures de l’Inde en appuyant officiellement les manifestations de fermiers (principalement Sikhs) contre trois lois agricoles du gouvernement de Narendra Modi.

Et voilà que Justin Trudeau crée une crise diplomatique majeure autour d’un banal assassinat ciblé.

Sa réaction outrée, c’est celle qu’aurait n’importe quel chef d’État si on assassinait un de ses ministres. Pas un simple citoyen. Dans ce dernier cas, une indignation feinte suffit.

Au pouvoir depuis 2015, Justin Trudeau n’a pas encore compris que la scène internationale est le théâtre de la brutalité des nations. Le jour où il l’aura compris, il sortira enfin de l’adolescence.

Références :
Air India serial bomb threats: Why is it significant amid Canada tensions?
Canada’s Assassination Claim Further Divides Its Indian Diaspora
Canada’s Justin Trudeau backs farmers’ protest; India says remarks ‘ill-informed’
Des assassins saoudiens ont été envoyés à Ottawa
Des « ateliers » sur les normes juridiques du Canada pour des fonctionnaires indiens
Droit international et géopolitique (deuxième partie)
Général iranien tué : comment Donald Trump a pris la décision
Gerald Bull
Hardeep Singh Nijjar
India angered by apparent Sikh parade float in Canada portraying assassination
India complains to Canada about controversial images at Sikh parade
Jamal Khashoggi
Khalistanis burn Indian flag, celebrate Indira Gandhi’s assassination in Canada
L’affaire Huawei : dure pour le Canada, la vie de caniche américain
Le chef du Hamas inhumé au Qatar, « jour de colère » contre Israël
Le multiculturalisme et la guerre des diasporas au Canada
Pro-Khalistan Canadians glorify Indira Gandhi assassination; wield sword, burn Indian flag in Vancouver
The Nijjar enigma
Novitchok
Trudeau en Inde: un voyage diplomatique qui tourne au fiasco
Vol Air India 182
Who was Canadian Sikh leader Hardeep Singh Nijjar?
Who was Hardeep Singh Nijjar, the Sikh activist whose killing has divided Canada and India?

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Forcer la gouverneure générale à parler français : une lutte futile

Publié le 2 octobre 2024 | Temps de lecture : 4 minutes

Madame Mary Simon est la première Autochtone à occuper le poste de gouverneur général du Canada. Sa nomination a suscité la controverse parce qu’elle ne parle pas le français.

Entre nous, si elle ne parlait ni le français ni l’anglais, si elle était même sourde et muette, est-ce que cela changerait quelque chose ? Du moment qu’elle peut voir le doigt qui pointe vers l’endroit où elle doit apposer la signature royale, c’est bien suffisant.

Le ‘scandale’ de sa méconnaissance du français, même trois ans après sa nomination, est essentiellement une indignation limitée à ceux qui n’ont pas encore compris ce qu’est le gouvernement canadien.

Pour ces derniers, ce qui leur vient à l’esprit lorsqu’on parle du fédéral, ce sont les traits de Justin Trudeau, de Mélanie Joly, de Pablo Rodriquez, de François-Philippe Champagne, entre autres.

Tous des Québécois à la mine sympathique.

En réalité, ces gens ne sont que l’interface ministérielle de l’État canadien. Derrière cette façade se cache une fonction publique qui, dans la capitale du pays, travaille en anglais.

Elle travaille en anglais parce qu’à Ottawa, elle est majoritairement composée d’Anglophones unilingues. Secondairement, on y trouve des Francophones bilingues et finalement des Anglophones bilingues. Tous ces fonctionnaires ont une chose en commun; la connaissance de l’anglais, leur langue de travail.

À la commission Rouleau (au sujet du ‘Convoi de la liberté’), tous les fonctionnaires francophones, sans exception, ont préféré témoigner en anglais, la langue qu’ils connaissent le mieux pour parler de leur travail.

Précisons que dans les portes satellites du fédéral au Québec, la majorité des employés sont des Francophones bilingues et secondairement des Anglophones (bilingues ou unilingues). Tous ces gens ont une chose en commun; la connaissance de l’anglais anglais puisque leurs rapports, destinés aux décideurs à Ottawa, doivent être rédigés dans cette langue.

Avant 1969, presque tous les jugements de la Cour suprême du Canada étaient publiés exclusivement en anglais. C’est l’élection d’un gouvernement indépendantiste à Québec en 1976 qui a sonné le réveil du plus haut tribunal du pays à l’importance du bilinguisme.

Depuis 1867, 17 des 30 gouverneurs généraux provenaient de la noblesse anglaise. Et à ce jour, tous les représentants de la monarchie britannique au pays (dont Mme Simon) ont une chose en commun : la connaissance de l’anglais.

L’adoption d’une nouvelle constitution canadienne en 1982 était une belle occasion d’abolir ce poste inutile. Mais puisqu’il a été reconduit, laissons donc cette pauvre Mary Simon terminer son mandat en paix.

À l’heure où un déluge migratoire voulu par Ottawa risque d’entrainer le déclin irréversible du français au Québec — et conséquemment, l’extinction du peuple francoQuébécois — il y a des combats plus importants que celui-là.

Références :
Anciens gouverneurs généraux
Aperçu du fonctionnement interne de l’État canadien
Français: la Cour suprême devrait être exemplaire
Incapable de parler français après trois ans comme gouverneure générale: les libéraux défendent leur nomination de Mary Simon
Incapacité à parler le français: le Bloc va demander à la gouverneure générale de témoigner en comité
La façade ministérielle de l’État canadien

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Un premier ministre indigne

Publié le 20 septembre 2024 | Temps de lecture : 6 minutes

Introduction

Une des leçons de l’Histoire, c’est qu’il est très dangereux de faire croire faussement à une majorité ethnique qu’elle est menacée par une de ses minorités.

Il y a sept jours, sur les ondes de la station CJAD, le premier ministre du Canada déclarait en anglais ce qui suit :

Legault a décidé que la meilleure façon de protéger le français est d’attaquer les Canadiens anglais. Et cela n’a aucun sens. L’idée que quelqu’un va à l’hôpital pour un test ou quelque chose comme ça, anxieux (il pourrait avoir un cancer), anxieux (il pourrait être malade) et là, il va devoir s’inquiéter de savoir s’il peut ou non se faire soigner en anglais parce que son français n’est pas très solide… c’est mal, tout simplement.

Il n’a jamais été question au Québec de priver le peuple angloQuébécois de son droit de recevoir des services médicaux dans sa langue.

Justin Trudeau ment.

La loi fédérale sur les langues officielles

Selon le point de vue, il y a deux manières de considérer les angloQuébécois.

La première consiste à les voir comme la plus importante minorité ethnique du Québec. La deuxième les voit plutôt comme l’annexe québécoise de la majorité anglo-canadienne.

Appelé à se prononcer à ce sujet, le Comite des droits de la Personne de l’ONU statuait en 1993 :

To summarize, the United Nations Human Rights Committee ruled […] that Quebec’s English community does not qualify for protection as a minority language group, because it forms part of the Canadian English-speaking majority.

En d’autres mots, les Québécois anglophones ne peuvent pas être considérés comme une minorité linguistique dans le contexte canadien où ils sont majoritaires.

Depuis toujours, Ottawa soutient le contraire. Sa loi sur les langues officielles trace un parallèle entre d’une part, les minorités francophones hors Québec et d’autre part, la minorité anglophone au Québec.

En réalité, les miettes qu’Ottawa verse aux premières servent d’alibi pour justifier le financement généreux de la colonisation anglaise au Québec.

À titre d’exemple, en 2017-8, Ottawa versait 302 millions$ à McGill, mais seulement 184 millions$ à l’Université de Montréal, et 177 millions$ à l’université Laval.

Au Québec, Ottawa verse 2 663$ par étudiant anglophone à plein temps et 1 430$ pour un étudiant francophone à plein temps.

Le résultat, c’est que les Cégeps et universités anglaises ont 56 % plus d’argent pour former chacun de leurs étudiants. Cela signifie des classes plus spacieuses, des laboratoires mieux équipés, et plus de moyens pour favoriser la réussite des travaux de recherche.

Depuis la pandémie, Ottawa a fait entrer au Québec plus d’un demi-million d’immigrants dont la majorité ne parle pas français.

Le ministère fédéral de l’immigration approuve 92 % des demandes de requérants étrangers pour étudier à l’université McGill. Par contre, il refuse la moitié des demandes pour étudier à l’université Laval. Le pourcentage des refus grimpe même à 72 % dans le cas des établissements scolaires francophones lorsqu’il s’agit de demandeurs provenant d’Afrique.

Dans leur immense majorité, les néoQuébécois expulsés du Québec par Ottawa, ce sont des Francophones parfaitement bien intégrés dans leur milieu d’accueil que le fédéral expulse sous le moindre prétexte; une case à cocher oubliée ou un formulaire qu’on prétend ne pas avoir reçu.


 
Et pendant que l’anglicisation de Montréal s’accélère, Ottawa finance, par le biais de son Programme de contestation judiciaire, la contestation juridique de toutes lois québécoises visant à défendre le français.

Pour couronner le tout, voilà que le premier ministre du pays souffle sur les braises de l’intolérance en faisant croire aux angloQuébécois qu’ils sont attaqués par le gouvernement québécois.

Conclusion

En écrivant la biographie de Justin Trudeau, un auteur pourrait nous présenter une multitude d’anecdotes intéressantes. Mais s’il devait consacrer un chapitre sur la ‘pensée’ de Justin Trudeau, ce chapitre ne devrait pas dépasser trois paragraphes.

La comparaison avec le père fait ressortir l’indigence intellectuelle du fils.

Justin Trudeau aura été le premier ministre du clivage ethnique.

Au cours de ses huit années au pouvoir, il n’a pas cessé de promouvoir le multiculturalisme.

Sans se douter un seul instant que le multiculturalisme était le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes; en enracinant l’appartenance ethnique en tant un marqueur identitaire, le multiculturalisme a contribué à faire du Canada un ensemble de tribus.

Ces tribus peuvent très bien se côtoyer harmonieusement en temps de paix. Mais dès que de violents conflits inter-ethniques éclatent à l’Étranger, ces affrontements se transposent en terre canadienne.

D’autre part, en forçant les organismes financés par Ottawa à se soumettre à ses politiques d’ÉDI (Équité, Diversité et Inclusion), Justin Trudeau y a répandu un wokisme polarisant qui jauge le citoyen à sa pigmentation cutanée, son identité de genre, son orientation sexuelle, son ethnie ou sa religion.

Son appel démagogique à la rébellion des Canadiens anglais attaqués par le gouvernement du Québec entache définitivement la réputation de ce petit premier ministre sans envergure.

Références :
L’anglicisation du Québec et la Caisse de dépôt et placement
Décision de l’Onu
Le multiculturalisme et la guerre des diasporas au Canada
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes
Le PCJ, annexe de la machine coloniale canadienne
Partir ou rester dans le goulag québécois? L’étrange débat du «Montreal Gazette»

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le multiculturalisme et la guerre des diasporas au Canada

Publié le 12 septembre 2024 | Temps de lecture : 8 minutes

Introduction

Chaque fois que de la violence éclate dans les banlieues parisiennes, la presse britannique s’empresse d’en imputer la cause à la laïcité française, accusée d’être antimusulmane.

En contrepartie, lorsque des conflits interethniques surgissent dans les villes ouvrières de Grande-Bretagne, les quotidiens français en concluent que c’est la preuve de l’échec du multiculturalisme à assurer la coexistence pacifique des groupes ethniques de ce pays.

Dans tous les cas, c’est souvent une bavure policière ou une exaspération profonde liée au profilage racial exercé par les forces de l’ordre qui est à l’origine du conflit. Bref, la cause est interne à ces pays.

Ce qui est nouveau depuis quelque temps, ce sont les conflits interethniques qui résultent de guerres à l’Étranger.

Plus précisément, le conflit israélo-palestinien et, dans une moindre mesure, la guerre russo-ukrainienne alimentent des affrontements entre concitoyens canadiens.

Contenir la haine

L’expérience des deux Guerres mondiales nous enseigne que lorsque deux pays s’affrontent militairement, la diabolisation de l’autre n’est pas limitée aux dirigeants du pays ennemi, mais s’étend à toute sa population.

Parce qu’au final, le soldat doit obéir aveuglément à l’ordre de tirer ou de bombarder, sans le filtre de sa conscience. Et pour qu’il devienne une simple machine à tuer, cette détestation doit s’étendre à chacun des soldats du pays ennemi, voire à n’importe quel de ses citoyens.

Israël et l’Ukraine sont des alliés militaires du Canada aux prises avec un conflit armé. Pour faire accepter aux contribuables les sommes que le Canada consacre à les aider, Ottawa doit diaboliser leurs adversaires. Ce qui s’appelle la fabrication du consentement.

Mais voilà que cette stratégie dérape.

La haine des Russes et de leur culture

Au lieu de simplement haïr Vladimir Poutine, une certaine partie des Canadiens se sont mis à haïr également leurs concitoyens de descendance russe et à s’attaquer aux entreprises qu’ils possèdent au pays.

De plus, sous la menace d’internautes anonymes, le milieu de la culture se voit dans l’obligation d’annuler des spectacles mettant en vedette des Russes ou des artistes canadiens de descendance russe.

Au lieu d’en appeler au calme, les dirigeants canadiens poussent leur aveuglement jusqu’à applaudir au Parlement un ex-soldat d’une division ukrainienne pro-nazie.

Plus grave encore, la vice-première ministre du Canada réclamait récemment qu’un documentaire portant sur l’armée russe soit retiré de la programmation du Festival international du film de Toronto.

En raison de son sujet pointu et de sa durée de plus de deux heures, ce film n’était pas destiné à intéresser un large public, même en temps de paix.

Si la projection, prévue demain, devait être maintenue, le cri de ralliement hostile de Chrystia Freeland, propagée sur les médias sociaux, mettra en danger la sécurité des festivaliers qui choisiront de le voir.

Par cette tactique, la vice-première ministre canadienne accepte à l’avance de porter l’odieux de la violence qu’elle aura suscitée. De cette manière, elle se montre digne de son grand-père pro-nazi. Ce dernier n’a jamais tué de Slaves; il a simplement encouragé les autres à le faire.

La haine contre les Canadiens de descendance juive

Depuis l’attaque du Hamas en Israël et la réplique massive de ce dernier, plus d’une centaine d’institutions juives au pays ont été la cible de méfaits.

De plus, sur un bon nombre de campus à travers le pays, des manifestants palestiniens, appuyés par des sympathisants, crient des injures à l’égard de manifestants de descendance israélienne. Et inversement. Comme s’ils étaient citoyens de pays différents.

Ici encore, la haine entre Canadiens est inacceptable. Peu importe l’ethnie concernée et ses sympathies légitimes à l’égard de ses co-religionnaires à l’Étranger.

Il y a deux semaines, cinquante-deux membres arabes et musulmans du Parti libéral du Canada ont annoncé publiquement leur refus d’aider leur parti à gagner une prochaine élection partielle au Québec. C’est leur choix.

Ceux-ci écrivent : « Vous ne pouvez pas profiter de notre travail au pays tout en perpétuant notre déshumanisation à l’étranger.»

Aucun Arabe et aucun Musulman canadien n’est déshumanisé à l’Étranger.

Quand les signataires parlent de leur déshumanisation à l’Étranger, ils parlent en tant que membres du peuple palestinien ou d’un des peuples arabes dont ils se réclament.

En somme, ils se voient d’abord et avant tout comme des membres d’une diaspora au Canada.

De la même manière, les Palestiniens qui protestent à McGill sont en bonne partie des étudiants américains ou canadiens-anglais dont la loyauté première est à l’égard de leur peuple au Proche-Orient et non à l’égard des Québécois qui subventionnent niaiseusement leurs études.

Conclusion

Depuis toujours, les recensements des États-Unis dénombrent les diverses ‘races’ qui peuplent son territoire (ci-dessous).

De manière générale, l’appartenance ethnique est la fondation sur laquelle sont édifiées les sociétés anglo-saxonnes; ce sont des sociétés inégalitaires et racistes au sein desquelles chacun doit demeurer à sa place.

Le multiculturalisme est la façade idéologique de ce tribalisme; il consiste à encourager les citoyens, non pas à se définir comme Canadiens avant tout, mais comme membres de sa tribu ethnique.

Plutôt que de promouvoir l’égalité de tous les citoyens aux yeux de l’État, le multiculturalisme exacerbe la tendance naturelle au repli ethnique et renforce le sentiment d’appartenance à sa tribu.

Comme en Inde, on aboutit donc à une série de castes régies par des tabous, dont l’interdiction d’accomplir des tâches réservées aux gens d’une caste différente de la sienne.

Par exemple, se porter à la défense des peuples autochtones est inacceptable pour les metteurs en scène (ex.: Robert Lepage), les enseignants universitaires (ex.: Alexandra Lorange) et les cinéastes (ex.: Michelle Latimer) qui n’appartiennent pas à la tribu appropriée.

Et puisque la politique d’Équité, de diversité et d’inclusion du fédéral est basée (entre autres) sur des considérations raciales, il est essentiel de débusquer ceux qui n’ont pas la pureté du sang requise.

Depuis un demi-siècle, le multiculturalisme se pare des attributs de la Vertu et de la Justice.

Mais il a suffi qu’éclatent des guerres beaucoup plus proches de nous, des guerres auxquelles certains Canadiens peuvent d’identifier, pour que le multiculturalisme mène à des affrontements tribaux entre Canadiens, voire à une fragmentation sociétale.

Ce n’est une coïncidence si les campements pro-palestiniens sont apparus d’abord aux États-Unis pour se répandre ailleurs en Occident et que la détermination des protestataires y a été plus grande; c’est qu’il s’agit d’une société fragmentée où le patriotisme ostentatoire n’est que de façade.

Comme en Ukraine, combien de millions de jeunes Américains préfèreraient se réfugier à l’Étranger (au Canada, par exemple) plutôt que de défendre leur pays s’il était attaqué ?

C’est ça, le multiculturalisme.

Références :
Des menaces et des alertes à la bombe visent plus d’une centaine de groupes juifs au pays
Détecter les « faux Autochtones » dans les universités
Documentaire sur des soldats russes en Ukraine : Chrystia Freeland s’indigne
Équité, diversité et inclusion : la nouvelle discrimination multiculturelle
Gaza : des employés du PLC menacent de boycotter la partielle
La convergence culturelle : communion et symbiose
La fabrication du consentement politique : un exemple américain
La guerre a changé la vie de Canadiens d’origine russe
Le grand-père de la vice-première ministre du Canada, un collabo nazi
Le marécage du multiculturalisme canadien
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes
Un historien du génocide face à Israël

Parus depuis :
Manifestations propalestiniennes sur les campus: Amira Elghawaby veut plus de profs musulmans (2024-09-13)
Le TIFF invoque des raisons de sécurité pour suspendre les projections de Russians at War (2024-09-13)
Relations Inde-Canada : une manifestation tourne au vinaigre à Brampton (2024-11-03)
La Presse à Brampton : Banlieue sous haute tension (2024-12-03)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les cinq prisonniers canadiens en Arabie

Publié le 10 septembre 2024 | Temps de lecture : 4 minutes

Introduction

À l’époque où le blogueur Raïf Badawi purgeait sa peine en Arabie saoudite, Washington prévenait ses citoyens que s’ils devaient être emprisonnés dans ce pays, les États-Unis ne pourraient pas faire grand-chose pour eux.

Par contre, le ministre des Affaires étrangères du Canada préférait susciter l’espoir. Le jovialiste François-Philippe Champagne ne ratait jamais une occasion de dire qu’il était en discussion avec le ‘gouvernement’ (sic) d’Arabie saoudite et qu’il avait bon espoir qu’il serait libéré bientôt par ‘Sa Majesté’ (sic) le prince Mohammed ben Salmane (ou MBS, surnommé ‘Mister Bone Saw’).

Évidemment, le Canada exerçait ses pressions par voie diplomatique. De toute évidence, si cela avait été par la poste, le ministre Champagne n’aurait pas hésité à lécher le derrière des timbres à l’effigie du Prince.

Dès que le public s’est désintéressé du cas de Badawi, on n’a plus entendu parler des pourparlers canado-saoudiens à son sujet. Si bien que Badawi a purgé ses dix ans de prison.

Les cinq Canadiens

Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères du Canada

On apprend ce matin que cinq Canadiens sont présentement détenus en Arabie saoudite.

L’un d’eux est un citoyen canadien, né en Arabie saoudite, mais qui ne possède pas la citoyenneté de ce pays. Depuis un an et demi, ce Canadien pâtit dans les geôles saoudiennes sans procès ni jugement.

Les cinq auraient ‘J’aimé’ ou retransmis des messages écrits par d’autres sur X, le média social d’Elon Musk. Ces messages accusaient le régime saoudien d’être une dictature.

Or l’Arabie n’a jamais hésité à incarcérer et à fouetter tous ceux qui soutiennent cela, dut-elle les débiter à la tronçonneuse pour leur faire entendre raison.

Parmi les commentaires publiés en réponse au texte de Radio-Canada, on voit quelques personnes qui aimeraient savoir, parmi les cinq prisonniers canadiens, combien sont nés au pays.

À mon avis, cela n’a pas d’importance; tous les Canadiens, nés ici ou ailleurs, paient des impôts à Ottawa et conséquemment, ont le même droit à la protection du Canada.

Jusqu’ici, la ministre actuelle des Affaires étrangères du Canada, Mme Mélanie Joly, est demeurée discrète à leur sujet.

Elle a raison; les pourparlers diplomatiques de m’importe quel pays se font toujours derrière des portes closes.

Conclusion

Il y eut une époque, encore récente, où les pays occidentaux étaient craints.

Mais en adoptant des sanctions économiques contre la Russie qui se sont retournées contre l’Europe, et en réduisant dangereusement leur arsenal militaire afin d’aider vainement l’Ukraine, les pays occidentaux ont saboté l’effet dissuasif de leur puissance économique et militaire.

Si bien que de nos jours, les pays qui sont candidats à l’adhésion à l’Otan sont des pays pauvres d’Europe de l’Est ou du Caucase, alors que les pays les plus riches du Sud global se pressent aux portes des BRICS.

Le Canada doit assumer la place qu’il occupe maintenant dans les affaires mondiales; celle d’une puissance mineure au sein d’un Occident en déclin.

Conséquemment, le Canada doit prévenir explicitement toute personne qui veut se rendre dans la dictature saoudienne; si vous êtes arrêtée (peu importe les motifs) dans ce pays, le Canada ne pourra rien faire pour vous.

À Ottawa, aura-t-on enfin le courage de dire la vérité ?

Références :
Cinq Canadiens détenus en Arabie saoudite, Ottawa discret sur leur sort
La guerre russo-ukrainienne et la vassalisation de l’Europe
La leçon du fiasco occidental en Ukraine
Le ministre François-Philippe Champagne, paillasson de l’Arabie saoudite
Les députés conservateurs bloquent la citoyenneté d’honneur pour Raif Badawi
Un Canadien en prison en Arabie saoudite depuis plus d’un an… pour des tweets

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La surtaxe canadienne de 100 % sur les voitures chinoises

Publié le 8 septembre 2024 | Temps de lecture : 6 minutes

Introduction

À la suite de Washington, Ottawa a décidé d’imposer une surtaxe qui doublera le prix canadien des véhicules électriques (VE) chinois.

Cette mesure entrera en application dans deux mois et s’appliquera aux VE importés de Chine et non aux VE fabriqués en Amérique du Nord par des fabricants chinois.

Le message est clair : « Si vous voulez éviter la surtaxe, venez fabriquer vos voitures chez nous.»

Dans sa chronique dans le Journal de Montréal, Michel Girard critique cette guerre commerciale, lui reprochant de se faire sur le dos des consommateurs.

Le chroniqueur suggère également qu’Ottawa a pris cette décision en se basant sur la considération suivante.

En 2023, nos échanges commerciaux avec les États-Unis représentaient 595 milliards$ d’exportations et 374 milliards$ d’importations.

Alors qu’en Chine, ces échanges étaient de 30,5 milliards$ d’exportations (vingt fois moins) et 89 milliards$ d’importations (quatre fois moins).

Évidemment, cela ne tient pas compte du fait que beaucoup des produits américains que nous importons sont des produits chinois portant une étiquette américaine qui nous sont revendus beaucoup plus cher.

Les raisons officielles d’Ottawa

Malgré sa manière toute ‘trumpienne’ de faire de la politique, le chef de l’opposition officielle s’est bien gardé de critiquer le premier ministre Justin Trudeau.

Pour la simple et bonne raison que s’il était au pouvoir, il ferait pareil.

Officiellement, Ottawa justifie sa décision en accusant la Chine de subventionner la fabrication de ses VE et conséquemment, de surproduire.

De plus, la surtaxe canadienne serait une bonne chose puisqu’elle servirait à protéger les emplois des travailleurs œuvrant dans l’industrie automobile.

Protéger nos emplois

Le protectionnisme crée un marché captif qui protège nos industries de la concurrence étrangère.

Toutefois, classé selon la taille de sa population, le Canada occupe le 39e rang mondial. La petitesse de son marché intérieur ne permet pas à nos industries de profiter d’économies d’échelle. Pour ce faire, le Canada doit exporter.

Voilà pourquoi le Canada est un apôtre de la libre circulation des biens et des services.

Ceci étant dit, il y a souvent de très bonnes raisons pour faire exception à une règle, si bonne soit-elle.

À l’époque encore récente où nos politiciens de droite niaient la réalité des changements climatiques et soutenaient que les gaz à effet de serre aidaient les plantes à mieux pousser (sic), la Chine misait sur la voiture électrique.

Lorsque les pays occidentaux ont été confrontés, concrètement, aux effets couteux des changements climatiques et ont tardivement décidé de décarboner leur économie, la Chine était prête à leur fournir ce qu’il leur fallait pour y parvenir, dont des VE.

Pour pallier leur retard industriel dans ce domaine, les États-Unis ont donc décidé d’ériger des barrières commerciales derrière lesquelles ils peuvent tenter de rattraper la Chine. Une fois qu’ils se sentiront moins menacés, on peut s’attendre à ce qu’ils baissent la garde.

D’ici là, semer l’idée selon laquelle il faut recourir au protectionnisme pour protéger nos emplois alimente les milieux qui prêchent le repli sur soi.

Les subventions

Il est vrai que la Chine subventionne les secteurs de pointe voués à assurer sa suprématie commerciale, dont la construction des VE.

De leur côté, les pays riches d’Occident se sont lancés dans une surenchère aux subventions pour attirer chez eux les constructeurs de VE ou de batteries électriques.

De plus, jusqu’à tout récemment, les pays occidentaux subventionnaient l’achat d’un VE.

Lorsque Canada pointe un doigt accusateur et fronce les sourcils contre les pays qui accordent des subventions à leurs carrossiers, il aurait intérêt à ne pas le faire devant un miroir.

La surproduction chinoise

Tous les pays exportateurs au monde produisent au-delà des besoins de leur marché intérieur. Lorsqu’on limite la production aux besoins de ses propres consommateurs, cela s’appelle la gestion de l’offre.

Pour les États-Unis, la gestion de l’offre, c’est du communisme.

Voilà pourquoi, à chaque nouveau traité de libre-échange avec nos voisins du Sud ou avec l’Union européenne, le Canada ampute toujours un peu plus la gestion de l’offre sur l’autel du néolibéralisme.

Mais surprise ! Voilà que nos dirigeants politiques aimeraient que la Chine — déjà communiste selon la rumeur — le devienne davantage en adoptant la gestion de l’offre. Mao Zedong serait ravi…

Ce qui montre bien qu’il ne s’agit pas des vrais motifs de la surtaxe canadienne.

Les vraies raisons

Face à la possibilité que la Chine interdise l’importation de canola canadien — ce qui représenterait des pertes d’un milliard de dollars pour nos agriculteurs — on s’inquiète.

En réalité, le Canada n’a pas le choix.

Les voitures électriques chinoises offrent beaucoup plus pour le même prix.

Le Canada ne peut pas se permettre de servir de lieu de transit à la contrebande de voitures chinoises destinées aux États-Unis. Ce qui obligerait Washington à appliquer ses mesures protectionnistes antichinoises contre le Canada.

Ce serait alors une catastrophe pour l’industrie nord-américaine de la construction automobile, dont l’intégration nous est très profitable.

La géographie détermine l’histoire des peuples.

Nous profitons grandement du voisinage de la plus grande économie du monde, soit le marché américain.

Ce qui comporte d’immenses avantages, mais parfois quelques inconvénients. Comme quoi on ne peut pas tout avoir dans la vie.

Si la Chine ferme ses frontières au canola canadien, Ottawa pourra toujours gémir et entretenir sa belle relation sadomasochiste avec la Chine depuis l’affaire Huawei.

En réalité, nous devons assumer notre destin. Si on regarde ailleurs dans le monde, sommes-nous tant à plaindre ?

Références :
Des pressions chinoises sur le canola pourraient coûter 1 G$
L’affaire Huawei : dure pour le Canada, la vie de caniche américain
La guerre aux véhicules électriques chinois se fait sur le dos des consommateurs
Liste des pays par population
Pendant ce temps en Chine : la construction automobile
Tarifs de 100% sur les véhicules chinois: «J’ai peur que ça augmente le prix de beaucoup»

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Postes Canada : langue de service vs langue de travail

Publié le 22 août 2024 | Temps de lecture : 4 minutes

Introduction

Lundi dernier, on apprenait l’intention de Postes Canada d’offrir davantage de services en anglais au Québec.

Cela est normal; la région montréalaise s’anglicise et conséquemment, la clientèle anglophone augmente. Postes Canada, comme toutes les entreprises qui offrent leurs services directement à la population, doit faire face à cette demande accrue.

La langue de service

La Loi 101 a pour but d’assurer qu’on puisse vivre en français au Québec, ce qui implique le droit d’un francophone d’être servi dans sa langue. Cette loi n’a jamais eu pour but d’empêcher un angloQuébécois d’être servi dans la sienne.

Parmi les locuteurs anglophones, l’État québécois peut distinguer entre les angloQuébécois ‘de souche’ et les autres.

Mais on ne doit pas s’attendre à ce qu’il soit nécessaire d’apporter son certificat de naissance pour pouvoir acheter un timbre en anglais au Québec.

Il en est autrement de la langue de travail.

La langue de travail


 
Plus de quatre-millions de Québécois sont unilingues français. Évidemment, ceux-ci peuvent baragouiner quelques mots d’anglais, mais ne peuvent pas postuler pour un poste où le bilinguisme est exigé.

Donc, toute exigence de la connaissance de l’anglais lorsque cela n’est pas nécessaire correspond à une discrimination à l’embauche exercée contre la moitié de la population québécoise.

Prenons un cas concret. Il est normal que les employés à la réception d’un hôtel montréalais soient tous bilingues. Et il est normal d’avoir une personne bilingue à la comptabilité au cas où un touriste voudrait des détails sur sa facture.

Mais il n’est pas normal d’exiger le bilinguisme à tout le personnel de son département de comptabilité au cas où il recevrait un appel en anglais : si cela arrive, on passera plutôt l’appel à la personne bilingue.

L’exigence abusive de l’anglais, c’est ce que font généralement les sociétés fédérales lors de l’embauche de leur personnel. Et c’est le cas à Postes Canada, que ce soit à l’embauche de personnes pour livrer le courrier que pour travailler à ses centres de tri.

Lorsqu’on apprend que Postes Canada viole la Loi 101 à l’embauche, il ne lui suffit pas de s’excuser; elle doit congédier la personne embauchée par erreur et la remplacer, selon le cas, par un francoQuébécois unilingue ou par un Québécois (francophone ou anglophone) bilingue.

Ce congédiement est un service qu’on rend à l’employé unilingue anglais puisque c’est la meilleurs manière de le motiver à apprendre la langue commune du Québec.

Règle générale, il faut parler la langue de Shakespeare pour s’épanouir dans les provinces anglaises du pays. De manière similaire, il n’y a pas de place pour l’unilinguisme anglais sur le marché du travail au Québec.

À preuve, la Loi 101 oblige même l’employeur anglophone à s’adresser en français à son personnel francophone. Donc, même un patron doit savoir parler français : à plus forte raison un employé.

Conclusion

La controverse au sujet de l’augmentation de l’offre de services en anglais par Postes Canada est une tempête dans un verre d’eau. Le problème est ailleurs.

Par contre, il est regrettable que nos taxes à Ottawa (qui épongent les déficits colossaux de Postes Canada) servent à angliciser le Québec, notamment par la discrimination à l’embauche exercée par les entreprises fédérales contre la moitié de la population québécoise.

C’est entre autres par ce moyen que s’exerce la colonisation anglaise du Québec.

Références :
Anglicisation de Montréal depuis quinze ans
Année 2023 – Postes Canada enregistre une perte de 748 millions avant impôt
Emplois «in English» à Postes Canada: «Une nouvelle preuve du mépris du gouvernement fédéral»
«C’est bourré d’unilingues»: pas besoin de parler français pour être facteur au Québec en 2024
Postes Canada offrira davantage de services en anglais au Québec

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Faire disparaitre la pollution par magie

Publié le 17 juillet 2024 | Temps de lecture : 5 minutes
Lac Louise, en Alberta

La restauration de sites miniers abandonnés

L’article 101 de la loi sur les mines permet la création d’une mine si un plan de réaménagement et de restauration minière a été préalablement approuvé par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune.

L’article 232.4 de cette loi oblige la compagnie minière à fournir une garantie dont le montant correspond aux couts anticipés de ce plan.

Mais restaurer coute cher.

La magie au service de l’environnement

Depuis des mois, les démarcheurs des compagnies minières se relaient aux antichambres ministérielles afin de les convaincre d’une brillante idée.

Au lieu d’enfouir des résidus miniers dans des réservoirs souterrains imperméables, puis de les recouvrir de manière à redonner au site minier un aspect ‘présentable’, ne serait-il pas beaucoup plus économique de jeter tous ces résidus dans nos lacs afin de les faire disparaitre instantanément ? Comme par magie…

L’idée vous fait sourire ? Lisez bien ce qui suit.

Après une bataille juridique de quinze ans contre deux organismes de défense de l’environnement, le gouvernement norvégien a reçu en début d’année la bénédiction des tribunaux du pays pour autoriser Nordic Mining à déverser 170 millions de tonnes de résidus toxiques dans le fjord Førde.

Selon l’Institut norvégien de recherche marine (Havforskninginstituttet), cette décharge sera située à proximité d’un des sites dont la biodiversité marine est parmi les plus riches du pays.

Après la Turquie et la Papouasie—Nouvelle-Guinée, la Norvège devenait ainsi le troisième pays au monde à permettre le déversement maritime des déchets miniers.

Trente-sept lacs à polluer

Il y a deux ans, le gouvernement de la CAQ autorisait Minerai de fer Québec (filiale d’une minière australienne) à jeter ses résidus miniers dans des lacs. Et ce, malgré l’avis contraire du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) et malgré l’opposition des groupes environnementalistes.

Mais il restait à obtenir l’appui d’Ottawa.

C’est fait. Le fédéral vient d’accorder à cette minière la permission de jeter 408 millions de mètres cubes de résidus miniers dans trente-sept lacs du Québec.

Toutefois, cette permission est assortie d’une contrepartie, soit l’obligation de dépolluer, ailleurs, un territoire d’une superficie équivalente à ces 37 lacs, 1,56 km².

On connait la chanson.

Au cours de la campagne électorale fédérale de 2019, Justin Trudeau promettait de faire planter deux-milliards d’arbres en contrepartie de la construction d’un pipeline traversant les montagnes Rocheuses.

Cinq ans plus tard, le pipeline est construit. Mais la contrepartie se fait attendre; en avril dernier, Ottawa annonçait que la plantation (embryonnaire jusqu’ici) des deux-milliards d’arbres commencerait véritablement bientôt.

La nature d’un lac

La mine de fer en question est située à proximité du lac Bloom, à 747 mètres d’altitude.

Les 37 lacs qui serviront de dépôts de résidus miniers ne sont pas des bassins d’eau morte. L’eau s’y renouvèle par le biais de sources qui les alimentent ou qui en font la vidange, et enfin par le biais de canaux aquifères qui relient ces lacs à des nappes phréatiques situées au travers du roc.

Lorsque des résidus miniers s’accumulent hors du sol, l’eau de pluie n’a que quelques secondes pour solubiliser ce qui se trouve à leur surface. Baignant dans un lac, les mêmes résidus offrent à l’eau la possibilité de se minéraliser pendant un temps considérable.

Jeter de grandes quantités de roches dans un lac libère les acides et les solvants utilisés par le processus d’extraction et de raffinage. Inévitablement, ces lacs pollueront les nappes phréatiques auxquelles ils sont reliés, de même que les cours d’eau en surface que ces nappes phréatiques alimentent.

La loi québécoise sur les mines permet l’exploitation minière des cours d’eau à faible débit et des plans d’eau (lacs et étangs). Les minières peuvent y faire ce qu’elles veulent à la condition de restaurer le site à la fin de l’exploitation minière.

La permission accordée à Minerai de fer Québec est une exemption implicite de l’obligation de restaurer.

On voit mal le ministère des Ressources naturelles s’équiper de scaphandres pour vérifier si, à la fermeture du site, cette multinationale a oublié une roche au fond d’un lac.

Les résidus engloutis seront donc là pour de bon.

Conclusion

Selon le ministre fédéral de l’Environnement, la destruction des 37 lacs québécois est nécessaire (sic) puisque les métaux extraits de cette mine seront utiles à la transition énergétique. Bref, leur destruction est un sacrifice sur l’autel de l’environnement.

C’est aussi la chanson utilisée par la CAQ pour faire accepter aux citoyens de Limoilou le sacrifice de respirer cinq fois plus de poussière de nickel, probablement cancérigène. Parce que ce métal est utile à la transition énergétique.

En d’autres mots, pour combattre la pollution de l’air et les bouleversements climatiques qui en découlent, il est nécessaire d’empoisonner l’eau et le sol.

Alors, il reste quoi ?

Références :
Historic lawsuit to save the Førdefjord
La destruction de 37 lacs est nécessaire, selon Steven Guilbeault
La plantation de deux milliards d’arbres commencera ce printemps
Norway to allow mining waste to be dumped in fjords
Seuls 8,5 millions des 2 milliards d’arbres promis par Justin Trudeau ont été plantés

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II + objectif M.Zuiko 7-14mm F/2,8 — 1/4000 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 7 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La mauvaise foi du juge Galiatsatos

Publié le 28 mai 2024 | Temps de lecture : 7 minutes

Introduction

Le 15 aout 2018, soit huit jours avant de déclencher des élections générales, le gouvernement libéral de Philippe Couillard faisait accéder cinq avocats à la magistrature. L’un d’eux est Dionisios (ou Dennis) Galiatsatos.

Depuis, l’honorable Galiatsatos a acquis une renommée internationale pour avoir, dans un de ses jugements, écrit qu’adresser un doigt d’honneur était un droit constitutionnel au Canada.

De quoi s’agissait-il ?

Un jugement hors sujet

Dans cette affaire, après avoir entendu le témoignage irréfutable de l’accusé, l’avocate de la poursuite, réalisant que sa cause était perdue, invitait elle-même le juge Galiatsatos à innocenter l’accusé.

Le magistrat aurait pu rejeter la plainte séance tenante. Mais il a plutôt décidé de prendre le tout en délibéré et de s’allouer deux semaines pour écrire un jugement dans lequel il déclare, effectivement, qu’adresser un doigt d’honneur est un droit constitutionnel.

Malheureusement, cette décision est hors sujet puisque ce qu’on reprochait à l’accusé, ce n’était pas d’avoir adressé un doigt d’honneur à ses voisins, mais de les avoir menacés de mort.

Voilà pourquoi il s’agissait d’une cause criminelle.

Alors pourquoi écrire 26 pages inutilement ?

Meubler son temps

À l’époque, le juge Galiatsatos — comme tous les juges de la Cour du Québec — avaient beaucoup de temps libre.

Un an avant le jugement en question, Me Lucie Rondeau, juge en chef de la Cour du Québec, ordonnait une grève du zèle des juges sous son autorité.

Pour forcer le ministre de la Justice du Québec à nommer plus de juges bilingues, Me Rondeau était prête à provoquer artificiellement une thrombose judiciaire pour parvenir à ses fins.

Zélé, le juge Galiatsatos avait décidé de se trainer les pieds.

Une ‘injustice’ tirée par les cheveux

Depuis l’adoption de la loi 96 — qui renforce timidement la Loi 101 — un grand nombre de juges ultra-fédéralistes trépignent à l’idée d’invalider une ou plusieurs de ses dispositions. Comme on l’a déjà fait pour des pans entiers de la Loi 101, devenue l’ombre d’elle-même.

Parmi ces juges ultra-fédéralistes, on compte l’honorable Galiatsatos.

Le premier paragraphe de l’article 10 de la loi 96 se lit comme suit :

Une version française doit être jointe immédiatement et sans délai à tout jugement rendu par écrit en anglais par un tribunal judiciaire lorsqu’il met fin à une instance ou présente un intérêt pour le public.

En d’autres mots, lorsqu’un jugement est rendu en anglais au Québec, il doit être accompagné de sa traduction française. De plus, leur publication conjointe doit se faire promptement.

Concrètement, il ajoute une nouvelle tâche aux magistrats; celle de s’assurer de la traduction française d’une décision en anglais afin de publier les deux conjointement.

Traduire officiellement une décision juridique prend habituellement quelques jours.

Dans un jugement de 34 pages rendu en anglais plus tôt ce mois-ci, le juge Galiatsatos a estimé que ce retard prolongera l’anxiété des Anglophones en attente d’un jugement puisqu’ils devront attendre la traduction française avant de connaitre la décision du tribunal rédigée en anglais.

Selon la traduction de Radio-Canada, le juge écrit :

Ultimement, dans un monde réel, les accusés anglophones seront moins bien traités que les accusés francophones puisqu’ils devront attendre plus longtemps avant de connaitre leur sort.

Dans cette cause, une automobiliste anglophone était accusée d’avoir entrainé la mort d’une cycliste francophone.

Puisque le décompte pour porter un jugement en appel commence à partir de la date du jugement (le 24 mai, dans ce cas-ci), et non de la date de sa traduction (qu’on attend toujours), pourquoi la famille francophone de la cycliste décédée devrait-elle avoir moins de temps que l’accusée anglophone pour analyser le jugement et pour décider ou non de porter la cause en appel ?

À partir du 1er juin prochain, l’article 10 de la loi 96 entrera en vigueur. Dans une cause semblable à celle-ci, cet article ne corrigera-t-il pas l’injustice dont nous venons de parler puisqu’alors, les deux parties prendront connaissance du jugement en même temps ?

Quant à savoir pourquoi cette exigence ne s’applique pas aux jugements en français, c’est que si tous les jugements étaient systématiquement accompagnés de leur traduction, le Québec serait une province bilingue. Ce qui n’est pas le cas.

Pour terminer, le juge estime que c’est Ottawa qui a autorité sur le Code criminel et conséquemment, que le Québec a outrepassé ses pouvoirs en exigeant la traduction française systématique des jugements en anglais rendus dans des causes criminelles.

En réalité, c’est Ottawa qui détermine ce qui constitue un crime en vertu du Code criminel. Mais ce sont les provinces qui administrent l’appareil judiciaire et régissent son fonctionnement.

Conclusion

L’an dernier, le juge Galiatsatos se trainait les pieds dans le but de contribuer au combat corporatiste mené par la juge Rondeau. Le voilà maintenant soucieux de rendre jugement le plus rapidement possible.

S’il est vrai qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire, il arrive parfois que ce soit prématuré.

Puisque l’article 10 entrera en vigueur dans quelques jours, la charge du juge Galiatsatos contre cet article de loi est tout simplement prématurée et hors sujet.

Évidemment, le juge Galiatsatos aurait pu se trainer les pieds au-delà de cette date pour rendre son jugement. Et là, évidemment, il aurait pu accuser la loi 96 de retarder la justice.

Mais il n’a pas pu résister à l’envie de faire parler de lui.

Si bien que sa décision à ce sujet est aussi futile que sa décision de reconnaitre le doigt d’honneur comme un droit fondamental au Canada.

Dans ce cas-ci, cela oblige le procureur général à porter ce jugement en appel. Ce qui pénalise l’accusée anglophone qui devra assumer de nouveaux honoraires afin que son avocat plaide pour elle devant la Cour d’appel du Québec. En plus d’avoir à attendre pour connaitre la décision définitive des tribunaux.

Le regard tourné vers son nombril, le juge Galiatsatos ne se rend pas compte qu’il nuit à la cause qu’il croit défendre.

En faisant prématurément flèche de tout bois, la mauvaise foi de ce juge contribue au préjugé selon lequel une partie des magistrats au Québec sont de petits soldats du colonialisme canadian et à ce titre, ne ratent jamais l’occasion d’essayer de saboter les efforts légitimes que nous entreprenons pour assurer la pérennité du français au Québec.

Références :
Anglicisation du Québec : l’omelette de la loi 96
Bilinguisme des magistrats : la capitulation du ministre Simon Jolin-Barrette
Les familles Caïn et Abel
Juge et partie
Présenter un doigt d’honneur constitue un droit fondamental, estime un juge québécois
Prosecutor who convicted Richard Henry Bain nominated as judge
Texte final de la loi 96
Un juge du Québec décrète que la loi 96 est incompatible avec le Code criminel

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