En janvier 2023, l’Allemagne hésitait à envoyer et à permettre aux autres pays d’envoyer des blindés Leopard, de fabrication allemande.
La raison officielle était que l’envoi de chars d’assaut risquait de rappeler aux Russes les souvenirs de l’invasion allemande au cours de la Deuxième Guerre mondiale, et de galvaniser l’armée de Vladimir Poutine.
Se croyant malin, le chancelier allemand avait toutefois ajouté qu’il consentirait à envoyer des chars Leopard si les États-Unis acceptaient d’envoyer eux aussi leurs chars les plus sophistiqués, soit les Abrams, pariant que les Américains ne le feraient pas.
Il fut pris de court quand les Américains ont annoncé leur intention d’envoyer les leurs. Pour beaucoup d’observateurs, il ne s’agissait que d’un bluff destiné à forcer la main aux Allemands.
Mais bientôt, on apprenait qu’une base militaire américaine en Allemagne (Grafenwoehr) avait reçu quelques-uns d’entre eux pour servir à la formation d’opérateurs ukrainiens.
C’est finalement en septembre 2023 que l’Ukraine a commencé à recevoir ces précieuses machines de guerre. Au total, 31 chars Abrams M1A1 ont été reçus.
Toutefois, on annonce aujourd’hui que déjà cinq d’entre eux ont été détruits par l’armée russe. Si bien que, de concert avec l’armée américaine, tous ces chars ont été retirés du front.
Dans leur cas, l’armée russe a copié l’ingéniosité ukrainienne, soit d’utiliser de simples drones pour anéantir des blindés.
Au début de cette guerre, la Pologne s’était débarrassée de ses vieux chars d’assaut datant de l’époque soviétique en les donnant à l’Ukraine. En quelques mois, l’armée russe les avait tous détruits.
On avait cru que les chars américains, mieux blindés, ne subiraient pas le même sort.
Ce n’est pas le cas.
De plus, les chars Abrams possèdent leurs propres vulnérabilités.
Premièrement, ils sont alimentés par du combustible d’avion. Ce qui nécessite des chaines d’approvisionnement différentes que pour les autres chars utilisés par l’armée ukrainienne.
Deuxièmement, ils sont très lourds. Les plus lourds au monde. Donc plus sujets à s’enliser dans les plaines boueuses d’Ukraine au printemps ou à l’automne.
Et troisièmement, après deux heures d’utilisation normale, chaque blindé nécessite huit heures de réparation, soit davantage que les chars ordinaires.
Quoiqu’il ne reste probablement plus aucun char soviétique dans l’arsenal de l’Ukraine (ce qui simplifie les choses), son armée doit quand même maintenir des chaines d’approvisionnement en pièces détachées pour chacun des modèles de char qu’elle utilise. Ce qui constitue un enfer logistique.
De son côté, l’armée ukrainienne a endommagé des milliers de chars de l’armée russe. Des centaines d’entre eux jonchent çà et là le paysage ukrainien.
Mais la plupart ont simplement été retirés à l’arrière du front, rafistolés tant bien que mal — puisque leur fabrication est plus rudimentaire — et renvoyés au front dès qu’ils sont en mesure de fonctionner.
Conclusion
Contre la guerre, l’arme la plus efficace demeure la dissuasion. Plus l’ennemi vous croit invulnérable, moins il osera vous attaquer.
Et malgré le prix élevé de la dissuasion — qui repose souvent sur la technologie ou sur des stocks faramineux d’armement — c’est encore moins cher qu’une vraie guerre comme celle qui se déroule en Ukraine.
En fournissant à ce pays nos armes les plus précieuses, celles qui devaient rendre son armée invulnérable, l’Occident compromet la dissuasion qui lui est indispensable pour maintenir son hégémonie.
L’Occident a tout à perdre en s’entêtant à soutenir une guerre perdue d’avance. Depuis très longtemps, le temps est à la négociation.
Si Boris Johnson (l’ancien premier ministre britannique) n’avait pas convaincu les dirigeants ukrainiens de renoncer à entériner l’entente intervenue à Ankara (en Turquie) entre les négociateurs ukrainiens et russes un mois après le déclenchement de cette guerre, que serait-il arrivé ?
Réponse : des dizaines de milliers de veuves et d’orphelins ne pleureraient pas leurs héros, d’innombrables gaillards ne seraient pas handicapés pour le reste de leur vie, et 40 % de l’économie ukrainienne n’aurait pas été détruite.
Plutôt que de répéter des messages creux par esprit de solidarité otanienne, quand un chef d’État occidental osera-t-il dire que ça suffit !
Références :
L’Allemagne accepte finalement d’envoyer des chars Leopard à l’Ukraine
Ukraine pulls Abrams tanks from front after losing 5 to Russian attacks: US officials
Ukraine war briefing: Kyiv pulls back Abrams tanks due to drone raids and losses, says US
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Fort intéressant. Je ne connaissais pas cette «entente» survenue à Ankara. Ça m’étonnerait que les Ukrainiens aient été influencés par le très stupide B.Johnson.
Au lieu de chars, je suggère le recours à des fantassins du style de ceux de César : avancer avec un bouclier, résistant aux drones, au-dessus de la tête.
Boris Johnson fut le premier dirigeant occidental à se rendre à Kyiv après le début de la guerre. Son but était dissuader Zelensky d’entériner l’entente intervenue entre les négociateurs russes et ukrainiens en Turquie.
Assurant son hôte que la sévérité des sanctions financières contre la Russie allaient provoquer l’effondrement de l’économie russe et garantissant que les puissances occidentales donneraient à l’Ukraine toutes les armes dont elle avait besoin pour gagner cette guerre, Boris Johnson a fait miroiter l’espoir que Zelensky passerait à l’Histoire, malgré les sacrifices de son peuple, comme l’équivalent ukrainien de Winston Churchill.
Référence : La Russie et l’Ukraine avaient rédigé un traité de paix peu après le début de la guerre