VISA Desjardins et les pourrisseurs d’entreprise

Le 31 mars 2013
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Il y a quelques jours, j’ai reçu un appel de Desjardins Sécurité financière (DSF) me proposant gratuitement une assurance solde de crédit applicable à ma carte VISA Desjardins.

Il s’agit d’une protection offerte au détenteur d’une carte de crédit qui deviendrait incapable de payer son solde en cas de décès, de mutilation, d’invalidité, de perte involontaire d’emploi, ou de maladie grave.

Au cours de cet appel, qui a duré au total une dizaine de minutes, « gratuit » et « ne coûte rien » ont été répétés une dizaine de fois.

Il m’est déjà arrivé de souscrire à des services proposés par une compagnie téléphonique bien connue qui étaient gratuits au moment où on me les avait offerts par télémarketing, mais qui devenaient payants quelques mois plus tard à la suite d’un avis en petits caractères ajouté au bas d’un relevé mensuel.

Dans le cas de l’appel de DSF, arès des minutes à expliquer que j’étais réticent à souscrire à ce service gratuit par crainte que « les règles du jeu » ne changent sans en être informé explicitement, je finis par poser la question : « Comme ça, tant qu’on paie le solde avant la date limite, ça ne coûte rien ? ». Et là — tenez-vous bien — on m’apprend au contraire que des frais s’appliquent dès le moment d’une transaction.

Effectivement, sur le site web de Desjardins, on dit clairement qu’aucune prime n’est applicable lorsque le solde de la carte est à zéro.

Pour que cette assurance soit gratuite, il faudrait qu’on paie à VISA Desjardins le coût de toutes nos transactions avant de les effectuer, ce qui en pratique n’arrive jamais. Moi, je n’appelle plus cela une carte de crédit s’il faut payer nos achats d’avance.

Mais par télémarketing, cette précision capitale n’est révélée que si l’appelé prend l’initiative de poser la question à ce sujet. Autrement, tout ce qu’il retient ce sont les mots «  gratuit » et « ne coûte rien ».

On pourrait penser que la téléphoniste avait peut-être fait cette précision mais que j’ai eu un moment de distraction. Cette hypothèse m’a traversée l’esprit. Ce qui m’a convaincu du contraire, c’est l’importance attachée à la gratuité au cours de la conversation. Pourquoi a-t-on présenté avec autant d’insistance cette assurance comme étant gratuite si ce n’est pour m’induire en erreur.

De toute évidence, on se trouve en présence d’une tentative de tromperie, c’est-à-dire d’une fraude au sens de la loi, probablement effectuée auprès de dizaines, de centaines, voire même de tous les détenteurs de carte VISA Desjardins.

Je ne crois pas que la haute direction de DSF ait autorisé cette fausse représentation effectuée en son nom. Puisque ce texte l’en avise publiquement, il serait tentant pour elle de simplement réprimander la personne responsable de ce stratagème.

À mon avis, ce serait imprudent. Je suggère plutôt à Desjardins de congédier le Directeur des ventes ou le responsable de cette tentative de tromperie. Pourquoi ? Parce que ces personnes sont des pourrisseurs d’entreprise.

Le capitalisme est le meilleur système économique pour un pays développé. Mais il est de plus en plus pourri de l’intérieur par des officiers totalement dépourvus de scrupule, pour qui tous les moyens sont bons (y compris ceux illégaux) afin de dégager des profits.

Or le moyen le plus rapide d’augmenter les profits d’une entreprise est de tromper les personnes qui ont suffisamment confiance en celle-ci pour faire affaire avec elle.

Évidemment, on ne peut pas saper la clientèle d’une compagnie sans que celle-ci finisse par péricliter. Mais ces gens s’en foutent. Lorsque l’entreprise écopera des conséquences de leur duperie, ils seront rendus ailleurs. Et dans leur curriculum-vitae, ils se vanteront de la croissance de leur ancien employeur au cours de la courte période de temps où ils ont été à son service.

Tout employé dépourvu de scrupule est une bombe à retardement, n’hésitant pas à intriguer, mentir, et frauder s’il en a l’occasion. Or plus cette personne occupe un poste de décision, plus le tort infligé à l’entreprise est important. D’où la nécessité absolue et urgente de s’en départir. En effet, la respectabilité (essentielle pour une entreprise financière) dépend de son honnêteté et de sa franchise.

Il y a quelques années, dans la haute finance anglo-américaine, on s’échangeait des courriels internes ridiculisant les clients — des banques et des fonds de pensions — assez stupides pour acheter les titres financiers toxiques sans se douter qu’ils ne valaient rien, assez naïfs pour croire en la respectabilité de leur employeur.

Une crise économique plus tard, les mêmes comportements subsistent toujours — dans ce cas-ci à une échelle beaucoup moindre — parce que le monde de la finance n’a pas tiré de leçon de cette crise et n’a pas su sévir contre ceux qui le pourrissent de l’intérieur.

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Post-Scriptum : Le 3 décembre 2019, à la suite d’une importante fuite de données, le PDG de Desjardins a congédié deux hauts dirigeants, dont Denis Berthiaume.

En 2013, ce dernier occupait le poste de premier vice-président Gestion du patrimoine et Assurance de personnes.

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3 commentaires à VISA Desjardins et les pourrisseurs d’entreprise

  1. Pierre Pinsonnault dit :

    Monsieur Martel, félicitations (encore une fois) car votre texte décrit vraiment de façon excellente ce que ce sont les pourrisseurs d’entreprise.

    J’en connais plusieurs qui agissent aux dépens de personnes peu aptes à se défendre, à savoir des aînés. De la part de ces pourrisseurs, une négation totale du Droit, de la Justice et de la Loi tout en faisant croire le contraire.

    Pourquoi agissent-ils ainsi ? J’ai lu ceci il n’y a pas longtemps : “La trahison peut être le fait d’une intelligence supérieure, entièrement affranchie des idéologies civiques». Il s’agit d’une citation de Paul Léautaud, un assez curieux bonhomme.

    Ont-ils fait leur cette hypothèse qui leur accorderait un certain lustre ? Je serais quant à moi plutôt porté à parler d’eux ainsi : “Du ben bon monde mais ben voleurs”.

    • Au XIXe siècle, tout le secteur manufacturier était constitué d’entreprises familiales, dont les dirigeants étaient unis par les liens du sang.

      Parce ce que la compagnie était souvent le principal moteur économique du village, ses dirigeants étaient l’objet d’égards, de respect et de passe-droits dont profitaient tous les membres du clan familial, du grand patron au dernier petit cousin de la fesse gauche. Être fils ou fille de bonne famille vous donnait presque tous les droits.

      Pour ces dirigeants, la faillite de l’entreprise représentait une catastrophe personnelle et les rendaient sujets au ressentiment général des villageois ruinés.

      De nos jours, les cadres d’entreprises n’ont pas d’attachement particulier à l’égard de leur entreprise. Il cherchent moins sa prospérité à long terme que la réussite éclatante du mandat qui leur est confié, réussite qui sera le tremplin vers une fonction encore mieux rémunérée. Or leur ascension sociale est beaucoup plus rapide en papillonnant d’une compagnie à l’autre qu’en attendant patiemment qu’un poste se libère au sein de la firme qui les emploie déjà.

      Donc tous les moyens sont bons pour dégager des profits immédiats, quitte à compromettre la survie à long terme de l’entreprise.

      On la saigne donc de ses forces vives par des mises à pied même lorsqu’elle fait des profits record. On sabre dans la recherche et le développement au profit du marketing. On presse comme un citron une clientèle captive par contrat. Et on se dépêche à quitter le navire avant qu’il ne sombre.

      Alors on voit des compagnies respectables se comporter comme des voyous corporatifs parce que ceux qui l’animent sont totalement dépourvus d’éthique et de sens moral. Voilà la pourriture dont est affligée le capitalisme occidental.

      P.S.- Merci pour les cinq étoiles… 😉

  2. M.Martins dit :

    Félicitations (c’est toujours un plaisir vous lire).

    Dans mon cas je vais vers 75 ans et un énergumène chez Sears n’arrête pas de m’envoyer des lettres en me demandant de payer ma carte Sears.

    Depuis trois ans j’ai envoyé trois lettres recommandées. Et comme j’ai arrêté de souscrire à la carte Sears puis j’ai écris au Bureau de défense des consommateurs de Québec, il y a un fonctionnaire que ne veut rien savoir. La lettre vient de Toronto et le fonctionnaire est francophone… Je me demande : c’est possible une affaire de même aujourd’hui ??

    Une chance que nous avons des jeunes comme vous.

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