Prévalence du viol en Asie

Publié le 10 septembre 2013 | Temps de lecture : 3 minutes

L’égalité entre les hommes et les femmes est une valeur occidentale récente, consécutive à la Révolution féministe du XXe siècle.

En Asie, les mariages obligés, la réprobation familiale à l’égard des jeunes filles qui veulent faire carrière et la prévalence du viol, sont autant d’indices à l’effet que cette révolution a eu beaucoup moins d’impact dans cette partie du monde.

Dans l’édition de ce matin de la revue britannique The Lancet — une des plus influentes revues médicales au monde — on apprend les résultats d’une étude réalisée au sujet de la prévalence du viol.

Cette étude a été réalisée pendant deux ans (de janvier 2011 à décembre 2012) auprès de 10 178 hommes dans six pays asiatiques, dont l’âge variait de 18 à 49 ans.

Le degré de participation a varié selon les pays. Au Cambodge, 97% des hommes approchés ont accepté de répondre au questionnaire alors qu’au Sri Lanka, cette proportion ne fut que 58%.

De manière générale, l’âge des participants a reflété la courbe de répartition des différents groupes d’âge dans chaque pays à l’exception des hommes âgés de 50 ans ou plus, exclus de l’étude, afin d’éviter le biais causé par une mémoire qui aurait oublié des faits anciens.

Dans le questionnaire, on a évité d’utiliser le mot « viol ». Les questions utilisaient plutôt des périphrases comme « forcer une femme à avoir une relation sexuelle » ou « avoir une relation sexuelle avec une femme trop ivre ou trop droguée pour être en mesure de dire si elle était d’accord ou non ».


Prévalence du viol dans six pays asiatiques

    Femme Homme
  Viol seul Viol collectif  
Bangladesh rural 2,5% 1,9% 3,8%
Bangladesh urbain 2,7% 1,4% 1,8%
Cambodge 3,1% 5,2% 3,3%
Chine 5,8% 2,2% 1,7%
Indonésie (capitale) 6,6% 2,0% 1,5%
Indonésie rurale 4,3% 1,5% 1,8%
Indonésie (Papouasie) 16,6% 6,8% 1,5%
Papouasie-Nouvelle-Guinée 26,6% 14,1% 7,7%
Sri Lanka 4,6% 1,6% 2,7%


 
La prévalence du viol est d’environ 6 à 8%. Majoritairement, les femmes en sont les victimes.

Si on tient compte du fait que le violeur peut avoir agit seul dans certains cas, et avoir participé à des viols collectifs dans d’autres cas, la prévalence de violeurs parmi la population masculine varie de 4% au Bangladesh urbain, à 41% en Papouasie-Nouvelle-Guinée.

Dans 55,4% des cas, le violeur n’a fait qu’une seule victime. Dans 28,3%, il commis deux ou trois viols. Dans 12% des cas, il a commis entre quatre et dix viols. Et dans 4,2% des cas, le nombre de ses victimes dépasse dix personnes.

Le premier viol du répondant — aujourd’hui âgé de 18 ans ou plus — a été commis alors que le violeur avait moins de quinze ans dans 14,8% des cas, entre 15 et 19 ans chez 42,7% d’entre eux, dans la vingtaine chez 35,2% des cas, dans la trentaine chez 4,4% des cas, et au-delà de cet âge dans 2,9% des cas.

Après le viol, 55,2% des violeurs l’ont regretté, 35,7% ont subit les représailles d’amis ou de la famille de la victime, 32,5% ont été arrêtés, et 22,9% ont subi une peine d’emprisonnement.

Références :
En Asie-Pacifique, un quart des hommes ont déjà commis un viol
Prevalence of and factors associated with non-partner rape perpetration: findings from the UN Multi-country Cross-sectional Study on Men and Violence in Asia and the Pacific

Complément de lecture : Mariages forcés en Ontario : au moins 210 cas en trois ans

Un commentaire

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le Canada complice des coutumes arriérées de l’Afghanistan

Publié le 3 décembre 2011 | Temps de lecture : 2 minutes

Plus tôt cette semaine, on apprenait l’histoire de cette Afghane violée par le cousin de son époux alors qu’elle n’avait que 17 ans, répudiée par son mari parce que « souillée » par ce drame, condamnée pour « adultère » par les tribunaux, et qui avait donné naissance en prison à une fillette issue de ce viol, il y a deux ans. L’attention médiatique portait sur le fait que cette femme avait reçu une offre de libération à la condition d’épouser son violeur, Asadullah Sher Mohammad.

À la suite du scandale que cette nouvelle a provoqué en Occident, cette femme aurait finalement été libérée sans condition.

Son cas est connu de tous grâce à un documentaire réalisé à son sujet. Sans ce film, personne n’aurait entendu parler d’elle et cette femme continuerait de purger sa peine de douze ans de prison.

Ce qui est significatif, c’est que les forces d’occupation — dont le Canada — n’ont joué aucun rôle jusqu’ici dans cette affaire. En Afghanistan, des femmes sont battues, violées, vitriolées, ou tuées sans que le Canada ne lève le petit doigt pour elles à moins que l’opinion publique canadienne ne le force à agir. Pourquoi ?

Parce que le gouvernement canadien n’a aucune volonté de faire évoluer les coutumes et mentalités de ce pays. Le but de l’occupation est uniquement de prévenir le retour au pouvoir des Talibans.

Il suffirait que le régime fantoche de Kaboul décide de vouloir changer les coutumes arriérées du pays pour que les Afghans se soulèvent massivement contre lui à l’invitation du pouvoir religieux local, comme ce peuple s’est soulevé autrefois contre les Russes quand ceux-ci ont voulu faire de même au nom du communisme.

Il y a cinq ans, je signais un texte intitulé « La mission canadienne en Afghanistan ou La perpétuation de coutumes arriérées ». Le cas de cette femme est un rappel que ce texte est tout aussi pertinent aujourd’hui qu’il l’était à l’époque.

Références :
Afghan woman jailed after rape is released from Kabul prison
L’afghane violée libérée sans condition
Une Afghane emprisonnée après un viol épousera son agresseur pour être libérée

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Écrit par Jean-Pierre Martel


WKS vs DSK

Publié le 25 mai 2011 | Temps de lecture : 6 minutes

Préambule

Les juges siégeant aux tribunaux américains de première instance sont des avocats choisis au suffrage universel. Ils sont élus à la suite de campagnes électorales dans les journaux et à la télévision.

La seule chose qui les distingue des politiciens, c’est que leurs messages électoraux sont régis par les règles d’éthique de leur corporation professionnelle. Donc pas de campagne calomnieuse envers les autres candidats.

Le système judiciaire américain remonte à l’époque coloniale. Les colons y pratiquaient une justice expéditive et sommaire ; par exemple, un Noir accusé d’avoir volé une montre appartenant à un Blanc était pendu sans procès.

Lorsqu’on a voulu constituer un état de droit aux États-Unis, les citoyens s’opposaient à l’idée de céder cette justice populaire au profit d’un gouvernement local ou fédéral. En effet, la méfiance des citoyens à l’égard de l’État est profondément ancrée dans les valeurs américaines. Le compromis fut donc que les citoyens éliraient leurs juges locaux. Cela est encore vrai aujourd’hui.

L’affaire Kennedy-Smith

Je prenais mes vacances annuelles en Floride en 1991 alors qu’une affaire de mœurs y passionna l’opinion publique.

Un lundi matin, une jeune secrétaire de 29 ans et mère monoparentale d’une fillette de deux ans, se présente au travail l’air abattu. Ses camarades s’informent de son état. La jeune femme est au bord des larmes mais refuse de révéler les raisons de son état.

Après beaucoup d’insistance, elle fini par avouer avoir été victime d’un viol durant la fin de semaine, à la luxueuse résidence du sénateur Edward Kennedy à Palm Beach, en Floride.

Ses collègues sont scandalisés et l’invitent à passer outre ses réticences à porter plainte contre un membre de l’influente et riche famille Kennedy. Elle finit donc par accuser William Kennedy-Smith, un neveu de 31 ans du sénateur Kennedy, lui-même frère de l’ex Président des Etats-Unis, John-F. Kennedy.

Ils s’étaient rencontrés le vendredi après-midi précédant dans un bar de Palm Beach. Ils s’étaient plus. Le jeune homme l’avait invitée à une soirée donnée le lendemain soir chez son oncle.

Comme d’habitude, la soirée de sénateur avait été très « spéciale ». Selon la rumeur, le sénateur y était apparu ivre, en sous-vêtements, devant ses invités.

William et sa compagne avaient décidé de se promener le long de la mer. Dans la pénombre de la nuit, ils s’étaient embrassés, allongés sur la plage. Mais lorsque le jeune homme était devenu trop entreprenant, la jeune fille avait refusé ses avances. Mais le jeune homme avait passé outre le refus de sa compagne et, emporté par sa libido, l’aurait violée.

Toute la Floride était révoltée contre le sans-gêne des Kennedy, ces Papistes — c’est ainsi que les Protestants surnomment les Catholiques — qui se croient tout permis. Lorsque le procès débute, les lignes ouvertes des radios, les lettres des lecteurs aux quotidiens et l’ensemble de la presse, sont hostiles à l’égard du mode de vie décadent de la famille Kennedy.

Celle-ci avait recouru aux services d’un important cabinet d’avocats et avaient décidé d’assumer les coûts juridiques de la défense de William (qui n’en avait pas les moyens).

Après plusieurs jours de battage médiatique, le jeune Kennedy était finalement apparu en public afin de répondre aux questions des journalistes. Revêtu sobrement d’un complet « bas de gamme », d’une chemise blanche et d’une cravate très ordinaire, il avait répondu timidement et avec candeur aux questions agressives des journalistes.

Puis les journalistes avaient interrogé ceux qui l’avaient connu à l’université et qui, unanimement, louaient sa gentillesse et la douceur de son caractère. Puis on apprenait qu’il appartenait à une branche pauvre de la famille. Bref, l’accusé était un garçon besogneux, honnête et sympathique.

D’autre part, la rumeur voulant que la victime soit une secrétaire respectable et une bonne mère de famille s’avéra non fondée. Les témoignages entendus lors du procès révélèrent que la jeune femme était une cocaïnomane qui négligeait son enfant. De plus, on apprit qu’avant même la soirée chez les Kennedy, la jeune femme avait confié à sa meilleure amie qu’elle avait une occasion en or de se faire de l’argent et qu’elle ne manquerait pas l’occasion de s’enrichir aux dépends de ses hôtes.

Bref, lorsque le juge rendit sa sentence, il était clair pour tout le monde que William Kennedy-Smith avait été victime d’une tentative d’escroquerie. Le jugement du magistrat alla dans le sens de l’opinion publique.

L’affaire Dominique Strauss-Kahn

D’après la jurisprudence américaine, il n’y a pas de relation sexuelle sans pénétration. C’est ce qui avait permis à l’ex Président Bill Clinton d’affirmer publiquement qu’il n’avait pas eu de relation sexuelle avec Monica Lewinsky. Or peut-il y avoir viol sans relation sexuelle ?

Toutefois, si l’accusation en est une de tentative de viol, cela est différent.

La plaignante — une jeune mère analphabète de religion musulmane — est sans aucun doute l’objet de nombreux tiraillements. Il faut savoir que les femmes musulmanes sont soumises à un code d’honneur particulièrement exigeant. Dans le cas d’une tentative de viol, on l’estime la victime « souillée », ce qui lui vaut l’ostracisme d’une partie de sa communauté. Donc avant même l’ouverture du procès, elle est punie d’avoir portée plainte. De plus, l’honneur de la famille est entaché.

À cette étape-ci de l’affaire, je suis enclin à croire la plaignante. Mais on peut imaginer les pressions qui s’exerceront sur elle, en particulier de la part de ses proches.

Je m’attends donc à plein de rebondissements puisque c’est devant l’opinion publique locale — celle qui pourrait avoir à réélire le juge — que tout se jouera. Il s’agira donc autant d’un procès que d’une campagne de relation publique. C’est dans ce sens que l’Affaire DSK pourrait bien ressembler à l’affaire WKS.

Références :
Claim of Rape at Kennedy Home Draws Media Swarm
Rape Charge Urged Against Kennedy Kin; Palm Beach Police Say `Sexual Battery’ of Woman Occurred March 30

À lire absolument sur le sujet :
DSK/Sinclair: une leçon d’amour

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Écrit par Jean-Pierre Martel