Un atelier d’écriture est un entrainement à l’écriture visant à développer la créativité des participants. Jeudi soir dernier, à l’Université de Montréal, on offrait un atelier de ce genre, décrit comme suit : « Basé sur des techniques de stimulation éprouvées et sur des jeux d’écriture inspirés des surréalistes, cet atelier vous permettra de découvrir en vous des possibilités de création que vous ne soupçonnez peut-être pas ». Intrigué, je me suis inscrit.
Un des exercices proposés consistait à diviser les vingt participants à l’atelier en groupes égaux de cinq personnes et à demander à chaque équipe de créer une phrase formée successivement des cinq éléments suivants : un mot, un adjectif, un verbe, un deuxième mot et finalement un deuxième adjectif. Donc cinq personnes pour trouver les cinq éléments d’une phrase. Le hic, c’est que chaque membre d’une équipe devait trouver son élément à l’insu des autres.
Concrètement, la première personne du groupe écrivait un mot sur un morceau de papier. Après avoir replié ce papier de manière à cacher ce mot, elle passait le papier à la deuxième personne du groupe qui devait écrire le premier adjectif. Celle-ci cachait son adjectif et passait le papier au troisième participant. Et ainsi de suite.
Étant le premier de mon groupe, j’avais choisi « confiture » et finalement, la phrase composée par notre équipe fut :
• « La confiture — brutale — décrit — l’arc-en-ciel — amoureux ».
Les trois autres groupes composèrent les phrases suivantes :
• « La lanterne — délicate — submergera — la cathédrale — atomique »,
• « La multitude — vieille — pansera — les soldats — misérables », et
• « Les fourmis — délicates — écoutent — le pouce — savoureux ».
Cet jeu s’appelle le cadavre exquis parce qu’il fut inventé à Paris vers 1925 par un groupe d’écrivains surréalistes et que leur toute première phrase à eux fut « Le cadavre — exquis — boira — le vin — nouveau ».
Notre professeure, Mme Marie-Christiane Hellot, invita ensuite l’ensemble des participants à partager les images ou les réflexions que chacune de ces phrases nous inspirait. Finalement, elle nous demanda de choisir une de ces phrases, pas nécessairement la nôtre, et de composer un texte basé sur elle. J’ai choisi « La lanterne délicate submergera la cathédrale atomique » et voici le résultat que cela a donné.
On est toujours impressionné par ce qui est gros, ce qui est massif. Mais tout ce qui existe, grand ou petit, vivant ou inanimé, est vulnérable.
Si on pouvait voir l’infiniment petit, on serait surpris de l’importance du vide dans la matière. À titre d’exemple, prenons le cas du plus petit des atomes, celui de l’hydrogène. Il n’est formé que d’un proton autour duquel gravite un électron. Si son proton mesurait un mètre de diamètre, son électron, gros comme un pois, graviterait à une distance de 30 km.
À l’opposé, l’atome d’uranium nous paraitrait gigantesque avec son noyau formé d’une multitude de protons, de neutrons, et son nuage d’électrons au loin, insaisissables. Paradoxalement, cette masse complexe, si impressionnante, est extrêmement vulnérable. Comme ces grandes familles où les conflits sont incessants, ces grosses molécules sont instables.
Parfois, à la faveur d’un rayon gamma émis par une molécule voisine, quelques protons, neutrons et électrons quittent spontanément l’atome pour aller vivre indépendants, provoquant ainsi la déchéance de l’uranium en quelque chose d’autre.
Mais cette décomposition peut être provoquée. La lumière d’un rayon laser, si difficile à produire il y a un demi-siècle et maintenant si commun puisqu’on la trouve au cœur de n’importe quel lecteur CD, DVD ou Blu-ray, un simple rayon laser, dis-je, suffit à briser l’atome d’uranium. Comme une lanterne délicate provoquant l’écroulement d’une cathédrale atomique.
Références :
Atelier d’écriture
Atelier d’écriture – Écoutez le créateur en vous
Cadavre exquis
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