Covid-19 : les tests rapides et la fin des mesures sanitaires grossières

15 février 2022

Introduction

Dans presque tous les pays du monde, on a surestimé le pouvoir de la vaccination à mettre fin, seule, à une pandémie dotée d’une remarquable agilité à contourner les moyens mis en œuvre pour la combattre.

Ce qui est une occasion de redéfinir la place des tests rapides, sous-estimés jusqu’ici.

Caractéristiques des tests rapides

La fiabilité

Depuis leur apparition peu de temps après le début de la pandémie, la fiabilité des tests rapides s’est considérablement améliorée. De nos jours, ils sont presque aussi fiables que les tests de laboratoire.

Par exemple, le test Rapid Response de la compagnie BTNX est spécifique aux membres de la famille covidienne et les décèle dans environ 95 % des cas.

La rapidité et ses conséquences

Avec le Covid-19 ‘classique’, l’écart entre le moment où quelqu’un attrapait l’infection et le moment où il devenait contagieux était de quatre jours : les symptômes apparaissaient dès le lendemain.

Avec le variant Delta et l’Omicron, cet écart est réduit de moitié.

Avec des variants rapides, le socle d’une stratégie de dépistage efficace est la réactivité. Ce qui n’est possible qu’avec des tests dont le résultat s’obtient en quelques minutes.

Différences quant au prélèvement

Le mode d’emploi de certains tests rapides exige que le prélèvement se fasse au fond du nez. Par contre, d’autres n’ont besoin que d’un prélèvement nasal peu profond (ce qui évite de recourir à du personnel spécialisé).

L’automatisation des tâches

Aucun test rapide n’est difficile à utiliser. Mais le nombre d’étapes à franchir varie considérablement d’une marque à l’autre.

Si bien que certain tests sont impropres à servir au dépistage généralisé.

Si on exclut le temps qu’il met à révéler ses résultats, il faut compter environ cinq minutes pour exécuter toutes les étapes d’un test ‘Rapid Response’ de la compagnie BTNX (ceux distribués gratuitement dans les pharmacies québécoises).

Ce qui signifie qu’un professeur mettra environ deux heures et demi à tester une classe de trente élèves. Ce qui rend impossible le dépistage quotidien en milieu scolaire.

L’exemple des cartes BinaxNOW

Avec ce produit d’aspect rudimentaire, un professeur peut tester une classe de trente élèves en trente minutes.

Il n’a qu’à retirer un écouvillon de son enveloppe transparente et le donner à l’élève devant lui.

Et pendant que l’élève effectue son prélèvement, le professeur extrait une carte pliée de son sachet, la déplie et verse six gouttes de réactif dans l’ouverture appropriée de celle-ci.


 
Reprenant l’écouvillon utilisé par l’élève, le professeur l’insère dans l’autre ouverture de la carte, le fait pivoter du bout des doigts et referme la carte sur elle-même.

Puis il tend à l’élève un crayon pour que ce dernier aille identifier la carte à son nom pour ensuite prendre place dans la classe.

En quinze minutes, ses trente élèves auront passé le test.

Après quinze minutes supplémentaires à attendre les résultats, le professeur jette les tests négatifs dans une poubelle dédiée aux déchets biomédicaux, prend la pile de tests positifs, pénètre en classe et demande aux élèves atteints d’aller dans une salle de quarantaine située près d’une sortie de l’école (où ils passeront les prochaines journées).

Le temps nécessaire aux cartes BinaxNOW peut même être plus court si le professeur dispose d’un aide qui extrait pour lui la carte, la déplie et verse les gouttes de réactif. Cet aide peut être un parent venu conduire son enfant à l’école et qui reste bénévolement une demi-heure de plus pour donner un coup de main à son professeur.

Par contre, les étapes de Rapid Response sont presque toutes séquentielles. Ce qui rend relativement incompressible le temps consacré à son utilisation.

Bref, seuls des tests dont le mode d’emploi se prête à l’automatisation peuvent servir au dépistage généralisé.

Àparté

Le mode d’emploi de tous les tests rapides exige que la personne se mouche immédiatement avant de passer ce test. Dans le contexte d’un dépistage scolaire généralisé, cela est approprié quand ce dépistage se fait à l’extérieur, avant de pénétrer dans l’école.

Se moucher génère une quantité considérable d’aérosols. Au cours de la saison froide, alors que le dépistage se fera à l’intérieur, cela risque de contaminer les personnes qui, les uns après les autres, respireront les gouttelettes respiratoires en suspension laissées par les personnes qui les ont précédées.

Sans compter qu’il faudra prescrire la désinfection des mains après avoir jeté le mouchoir de papier dont on se sera servi.

Conclusion

Ces jours-ci, les uns après les autres, les pays parient que la pandémie tire à sa fin.

Le Danemark a complètement levé ses restrictions sanitaires. La Nouvelle-Zélande compte sur la vaccination pour effectuer son retour à la normale. Et de très nombreux pays songent à les imiter.

Contrairement à ce qu’on pense, ce n’est plus qu’une question de semaines — au plus, de mois — avant que la pandémie reprenne de plus belle. Et le retour en force de la pandémie sera facilité par le fait qu’on aura abaissé la garde.

C’est donc le temps idéal pour commander des quantités colossales de tests rapides lorsque la demande baissera en raison de l’insouciance du public.

L’idéal serait même d’inciter dès maintenant les Laboratoires Abbott (ou un fabricant d’ici) à démarrer au Québec la fabrication de tests rapides d’utilisation simple. Et ce, autant pour servir le marché domestique que celui des pays étrangers pris au dépourvu par la menace d’un futur variant.

Du strict point de vue du développement économique, il est plus intéressant pour le Québec de produire des tests qu’on doit utiliser souvent, que des vaccins (à peine plus chers) qu’on injecte une fois par cinq ou six mois.

Le recours à ces tests permet de changer radicalement d’approche.

Jusqu’ici, ‘aplatir la courbe’ a consisté à essayer, très grossièrement, d’atténuer les vagues successives de Covid-19 en réduisant le nombre de contacts au sein de la population.

Mais en appliquant successivement le chaud et le froid depuis deux ans, ce Yo-yo sanitaire a fini par exaspérer une bonne partie de l’opinion publique.

D’où l’idée d’abandonner ces mesures grossières pour un dépistage routinier et anodin à l’école (révélateur des familles atteintes) et la mise en quarantaine ‘chirurgicale’ des personnes contagieuses.

C’est le contraire de ce qu’on a fait jusqu’ici, alors qu’on misait sur la contamination massive des écoliers pour immuniser à la dure la population québécoise.

Références :
Covid-19 : baisse des prix des tests antigéniques et des autotests en pharmacie
Covid-19 : du Yo-yo à la roulette russe
How much does a Covid test cost around the world?
Le Danemark tourne la page des mesures sanitaires
Plus de 2 millions de Québécois auraient eu la COVID-19 depuis décembre
The new normal: New Zealand braces for shift from Covid zero to Covid acceptance

Paru depuis :
Plus d’un adulte sur quatre infecté par la COVID-19 au cours de l’hiver (2022-05-09)

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5 commentaires

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Invitation à boycotter, pour l’instant, l’autodéclaration des résultats des tests rapides

26 janvier 2022

Depuis hier, il est possible de déclarer au ministère de la Santé du Québec les résultats d’un test rapide de Covid-19.

Contrairement à la Grande-Bretagne, le Québec n’a pas mis sur pied un programme lui permettant de connaitre le taux de contagion à partir d’un échantillon important de participants représentatifs de l’ensemble de la population.

Jusqu’à tout récemment, le nombre de cas correspondait au nombre de résultats positifs décelés par les laboratoires de la Santé publique.

Limitée à environ 50 000 tests par jour — ce qui correspond à 0,6 % de la population du Québec — cette capacité de dépistage est rapidement devenue insuffisante à l’arrivée de l’Omicron.

Voilà pourquoi le gouvernement de la CAQ a mis sur pied un site web qui permet aux citoyens de dévoiler les résultats des tests rapides distribués gratuitement en pharmacie.

Les résultats déclarés positifs s’ajoutent donc à ceux décelés par les laboratoires de Santé publique afin de donner une meilleure idée de l’étendue de la contamination par le Covid-19.

Sur son site, le gouvernement précise :

La déclaration du résultat du test rapide est uniquement utilisée à des fins statistiques de suivi de l’utilisation de ces tests. Les résultats que vous déclarez ne seront pas inscrits dans votre preuve de vaccination. Ils ne modifieront pas le statut de protection de votre passeport vaccinal. Donc, si vous déclarez un résultat positif, votre statut vaccinal ne sera pas modifié.

Même s’il est dit que tout cela ne servira qu’à des fins statistiques, je ne compterais pas trop là-dessus.

On doit savoir que contrairement aux États-Unis, la Santé publique du Québec considère qu’attraper le Covid-19 équivaut à une vaccination.

On fait toutefois exception pour ceux qui doivent voyager à l’Étranger, notamment aux États-Unis, à défaut de quoi ils seraient refoulés aux frontières. Mais pour tous les autres, c’est non.

Ceci étant dit, il est vrai qu’attraper le Covid-19 confère une certaine immunité.

D’un côté, la personne qui attrape l’Omicron est immunisée contre ce variant. Au moment où celui-ci déferle au Québec, cela est un avantage puisque la vaccination immunise plutôt contre le Covid-19 ‘classique’ (aujourd’hui disparu) et, de manière décroissante, contre les variants apparus depuis.

Malheureusement, les études scientifiques ont démontré qu’attraper le Covid-19 confère une immunité qui varie considérablement selon la sévérité de l’atteinte.

L’absence de fiabilité de la protection acquise lors d’un épisode de contagion est la raison principale du refus des autorités américaines de considérer l’immunité ‘naturelle’ comme un substitut à la vaccination.

Les économies de bouts de chandelles du gouvernement de la CAQ sont d’autant plus incompréhensibles qu’il est impossible d’être ‘trop’ immunisé contre le Covid-19.

Les personnes qui, croyant bien faire, déclareront un résultat positif à un test rapide doivent savoir qu’elles risquent d’être punies.

Cette menace aura disparu lorsque la Santé publique aura fait volteface à ce sujet et que le ministère de la Santé se sera engagé explicitement à ne pas pénaliser les personnes qui se déclareront positives au Covid-19.

J’invite donc le ministre à clarifier la situation le plus tôt possible.

Références :
Le dépistage ‘massif’ du Covid-19 au Québec : une plaisanterie
Québec lance une plateforme de déclaration de résultats de tests rapides de COVID-19

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Écrit par Jean-Pierre Martel