Nombre record de pannes dans le métro : les conséquences du laisser-faire

Publié le 6 mars 2018 | Temps de lecture : 4 minutes
Exemple de panne dans le métro de Montréal

La Société de transport de Montréal (STM) n’a aucun plan de réduction des pannes. Aucun objectif. Aucune cible.

Selon les journalistes de la CBC, ses interruptions de service ont augmenté du quart cette année. Mais cela n’est pas nouveau; chaque année, nous allons de pire en pire.

En 2017, il y a eu 1 171 pannes de plus de cinq minutes. La durée moyenne fut de 11 minutes et 25 secondes. Pour l’année, cela signifie 222,8 heures d’interruptions. Puisque le métro est ouvert dix-huit heures par jour, ces pannes représentent donc 12,3 jours d’inactivité.

Elles surviennent surtout aux heures de pointe.

Selon son rapport pour l’année 2016, le métro de Paris a atteint un taux de fiabilité de 100% sur certaines de ses quatorze lignes, en particulier sur la ligne 1, la plus importante en direction est-ouest.

Celle-ci relie La Défense et le Château de Vincennes en passant par l’avenue des Champs-Élysées, les Tuileries, Le Louvre, le Châtelet, l’Hôtel de Ville, la Bastille, et la gare de Lyon.

Dans le rapport, le taux de fiabilité aux heures de pointe dépasse 100% puisque même les trains surnuméraires ajoutés à l’occasion se sont comportés parfaitement.

Ici, à Montréal, la STM n’a jamais estimé le cout économique des pannes pour les usagers. Combien de millions d’heures-personnes perdues ? Combien de frais de taxi ? Bref, combien de millions de dollars$ ? On ne sait pas et on ne veut pas le savoir.

Jusqu’à l’élection de Valérie Plante à la mairie de Montréal, le transport en commun n’était une priorité ni de l’administration municipale ni du gouvernement québécois.

Publier des données sur les pertes économiques importantes occasionnées par les interruptions de service, cela aurait fait pression sur les gouvernements supérieurs afin qu’ils débloquent des fonds pour améliorer la fiabilité du réseau.

Or la priorité, du moins à Québec, était d’imposer une cure l’austérité à la province.

Les dirigeants de la STM se seraient donc trouvés en position conflictuelle avec leurs patrons. Voilà pourquoi, en dépit du fait que tout se mesure, la STM se dit incapable de préciser les conséquences économiques de ses pannes.

Il est plus simple de blâmer les usagers qui se suicident ou qui descendent imprudemment pour récupérer des objets échappés sur la voie.

Dans l’immédiat, la STM se contera donc de faire des campagnes de publicité pour nous convaincre que cela n’est pas de sa faute, mais de la nôtre. Ce seront des millions$ gaspillés à ne rien faire.

Métro de Shanghai

À Paris et à Shanghai, on a choisi de dresser une paroi transparente entre les utilisateurs et les voies. Des portes ne s’ouvrent qu’au moment où un train est en gare. Pas de suicide. Pas de téléphone échappé sur la voie.

Dans ces deux villes, plutôt que de se battre contre la nature humaine, on a été à la cause du problème et on a apporté les correctifs appropriés.

Voilà ce qui s’appelle agir de manière responsable.

Il n’est pas nécessaire d’attendre d’avoir les moyens d’installer des parois sur tout le réseau.

Au lieu de dépenser des millions$ en publicité pour nous apprendre ce qu’on sait déjà — qu’il est dangereux de descendre sur les voies — les dirigeants de la STM n’ont qu’à utiliser cette somme pour installer des parois sur une ou plusieurs stations, à commencer par celles où de tels incidents sont les plus fréquents.

Ce serait déjà un pas dans la bonne direction. Mais cela ne leur vient même pas à l’esprit.

Que cela fait pitié…

Références :
Les mille pannes annuelles du métro de Montréal
La navette du 747 : un service pourri
Métro de Montréal : les statistiques de la désinformation
Nombre record d’interruptions dans le métro de Montréal en 2017
Refonte majeure du réseau d’autobus de la STM

Parus depuis :
La STM alertée 25 fois par jour pour des escaliers roulants bloqués (2018-06-01)
Des portes «antisuicides» dans 13 stations de la ligne orange (2018-08-17)
Interruptions de service dans le métro : Retour aux niveaux prépandémiques (2024-06-29)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La navette du 747 : un service pourri

Publié le 23 octobre 2017 | Temps de lecture : 8 minutes

Introduction

Depuis quelques années, la ligne d’autobus No 747 relie l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau au centre-ville de Montréal.

L’an dernier, j’avais été frappé par la qualité misérable de ce service offert aux Montréalais de retour chez eux, de même qu’aux visiteurs étrangers dont cette navette — après le cafouillage fréquent à l’aéroport lui-même — déterminera leur première impression, péjorative, au sujet de la métropole.

Ce service est digne du Tiers-Monde; des autobus dont l’intérieur est plutôt sale, au confort minimal, dont la suspension masque à peine le mauvais état du réseau routier québécois et dont les porte-bagages ont été conçus et réalisés par des amateurs.

Des déclarations rassurantes

En 2016, avant d’écrire un texte critique à ce sujet, j’avais contacté la Société de transport de Montréal (STM) afin d’obtenir leur version des faits.

J’avais appris qu’environ la moitié des véhicules utilisés pour cette navette étaient des autocars. De plus, la société de transport comptait augmenter leur proportion à l’avenir et notamment à l’occasion du 375e anniversaire de Montréal.

À l’aller comme au retour, je n’avais jamais vu les autocars dont me parlait la STM. Les seuls véhicules de la STM que j’avais pris jusque là étaient des autobus réguliers rafistolés médiocrement pour tenir compte des bagages des voyageurs.

En face du terminus de la 747, près de la station Berri-UQUAM, se trouve la Grande Bibliothèque. Je m’étais donc rendu à cet édifice afin d’observer pendant un long moment les allées et venus des autobus de la 747.

Effectivement, cet après-midi-là, environ la moitié des véhicules étaient des autocars.

Convaincu que l’utilisation des autobus rafistolés était un héritage du passé, appelé à disparaitre à moyenne échéance, j’avais renoncé à écrire mon article.

Un an plus tard, de retour la semaine dernière d’un voyage à Porto, j’espérais prendre un des autocars de la 747, quitte à laisser passer un ou deux autobus rafistolés qui se pointeraient entretemps.

À ma grande surprise, les autocars de l’an dernier ont disparu : seuls des autobus rafistolés assurent dorénavant la navette du 747.

En somme, l’an dernier, le porte-parole de la STM avait menti ou la STM a simplement changé d’orientation.

Les étagères pour les bagages

Dans les boutiques pour voyageurs où l’on vend des bagages, les dimensions de ceux-ci sont standardisées depuis longtemps.

Et puisque les transporteurs aériens limitent le nombre de bagages des passagers, ces derniers utilisent préférablement deux des formats standards; la plus grosse valise sur roulettes qu’on peut amener en cabine et le plus gros bagage autorisé en soute.

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Les autobus réguliers de la STM n’ont pas été conçus pour transporter des bagages ni être destinés à être transformés à cette fin. On a donc dû faire des choix.

Afin d’éviter que les allées soient encombrées de bagages, il est obligatoire de les placer sur des étagères.

Et pour éviter que les étagères elles-mêmes nuisent à la circulation des passagers dans l’autobus, on a décidé que la profondeur des tablettes serait inférieure à la hauteur maximale des bagages standards.

Mais pour que ces étagères aient trois tablettes, celles-ci sont trop rapprochées pour que les grosses valises soient placées debout. On les place donc couchées; conséquemment, elles dépassent et les cordons destinés à les conserver en place deviennent essentiellement une nuisance.

Ces cordons sont constitués d’un ressort en acier extrêmement résistant enveloppé d’une gaine protectrice qui évite que ces ressorts n’égratignent les valises.

Dans l’image ci-dessus (prise en 2016), les cordons sont placés à la mi-hauteur de l’espace consacré aux bagages. Cette année, dans la majorité des cas, il y a plutôt deux séries de deux cordons pour chacun des espaces consacrées aux bagages.

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On ne peut pas rouler ses bagages au bas de l’étagère. La femme, la personne handicapée ou le vieillard doit absolument se pencher et soulever son bagage afin de le placer sur la tablette du bas.

Concrètement, cela signifie qu’il devra soulever son bagage d’une main pendant qu’il écarte les deux cordons du haut (qui s’y opposent).

Si cette valise n’est pas trop lourde, la femme, la personne handicapée ou le vieillard trouvera sans doute un bon samaritain pour l’aider. Si ce n’est pas le cas, il sera difficile de trouver quelqu’un qui voudra courir le risque de s’éreinter pour une bonne cause.

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Dans le cas des deux autres tablettes, la femme, la personne handicapée ou le vieillard devra soulever ses lourds bagages jusqu’au niveau des épaules (2e tablette, photo ci-dessus) ou par-dessus la tête (3e tablette) pour réussir à les loger.

Même un enfant de cinq ans trouverait que cela n’a pas de bon sens. Et pourtant, cela dure depuis sept ans.

Quels sont les responsables qui ont bien pu concevoir et adopter un système aussi pourri ? Réponse : Que des technocrates tellement biens payés qu’ils prennent le taxi (50$) en arrivant à l’aéroport plutôt que les autobus réservés à la populace qui paient leurs salaires.

L’abandon sur la rue

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Et une fois arrivé à destination, le passager s’attend peut-être à ce qu’on le débarque à l’intérieur d’un terminal comme à la Gare Centrale. Ou au moins sous un abri, protégé des intempéries.

Malheureusement, cela coute beaucoup trop cher; on le débarquera sur la rue, loin d’une bouche de métro.

S’il débarque à Berri-UQAM, ce sera sur un trottoir qui longe un mur. À la station Lionel-Groulx, ce sera de l’autre côté de la rue; il devra aller jusqu’à l’intersection, attendre le feu vert, traverser la rue Atwater, et marcher une centaine de mètres en transportant ses bagages sous la pluie battante ou sous des bourrasques de neige si c’est le cas.

« Savez-vous comment ça coûte ?»

Devant ma surprise lorsque j’ai appris que la STM avait décidé de retirer tous ses autocars, un des deux employés de la STM à l’information m’à demandé : « Un autocar, savez-vous comment ça coute ?». Comme si le transport en commun, de manière générale, était une chose rentable.

Utiliser des autocars, ce n’est pas rentable. Tout comme le métro est déficitaire. Tout comme le réseau d’autobus ne fait pas ses frais. Même les trottoirs ne rapportent rien.

De l’argent au Québec, il y en a. Le problème en est un d’allocation des ressources. On a des centaines de millions$ pour augmenter la rémunération des médecins, plus de cent-millions$ pour racheter des permis d’exploration pétrolière qui ne valent plus rien à Anticosti, et ainsi de suite.

Mais s’il faut dépenser une vingtaine de millions$ pour acheter des autocars, on n’a pas d’argent.

Le problème, c’est que nous avons élu des politiciens qui nous ont promis d’être de bons gestionnaires. Mais au lieu de nous en donner plus pour notre argent, ils ont décidé de nous en donner moins et de se faire réélire en nous redonnant — à la veille du renouvèlement de leur mandat — une partie de notre argent qu’ils ont économisé.

Pour se justifier, ils nomment à la direction des services publics des subalternes renommés pour être de bons communicateurs; leur mandat est de nous faire avaler des couleuvres. De nous dire que tout va bien. D’affirmer que les coupes budgétaires qui leur ont été imposées n’eurent aucune conséquence. Tout heureux, leurs patrons les citeront pour se justifier.

Face à mes griefs, l’employé de la STM à l’aéroport me suggérait d’écrire à son employeur pour me plaindre. « Quand on est trop insistant à rapporter les plaintes des usagers, on est mal vus par la compagnie, qui nous accuse de manque de solidarité envers elle.»

Je suis très heureux que mon retour de voyage coïncide avec la proximité d’élections municipales. Je ne sais pas encore pour qui je vais voter. Mais vous n’avez pas idée comment j’ai le gout de faire regretter à certains le service pourri que j’ai reçu à l’aéroport.

Sur le même sujet :
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Paru depuis :
Métro de Montréal: vers un record de pannes (2017-11-24)

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