La responsabilité de l’attentat terroriste au Métropolis

Publié le 11 septembre 2012 | Temps de lecture : 5 minutes
Funérailles de Denis Blanchette

Préambule

À l’époque où j’étudiais à l’université de Montréal, je m’étais assis un jour à la table d’un de mes professeurs. Ce dernier — dont je ne me rappelle plus du nom — avait les traits et la peau pigmentée des peuples du sous-continent indo-pakistanais.

Nous avions été rejoints par un de ses amis. Très tôt, ce dernier s’était lancé dans une tirade hostile à mon égard, me reprochant — en tant qu’Occidental blanc — d’avoir profité et d’être complice (donc responsable) de l’impérialisme anglais qui avait tant humilié, pillé, et torturé son peuple.

Étudiant, j’étais plutôt nationaliste. Il m’apparaissait donc étonnant qu’on puisse m’accuser des méfaits de l’impérialiste britannique. Estomaqué par l’accusation, je n’avais rien trouvé à lui répondre : pour moi, l’incident se résumait à un manque de politesse, de la part d’une personne frustrée.

Dès cette époque et depuis ce temps, j’ai toujours refusé de porter quelque responsabilité que ce soit dans les méfaits commis par des inconnus avec lesquels je partage certaines caractéristiques. Ce n’est pas parce que je suis homme, blanc, et francophone, que je mérite d’être blâmé par un crime commis par un autre homme, un autre blanc ou un autre francophone. Lui c’est lui, et moi c’est moi.

Voilà pourquoi j’ai toujours été complètement imperméable au discours de certaines féministes à l’effet que tous les hommes seraient des irresponsables, des violeurs potentiels, et des abuseurs-nés. Et j’ai toujours fait la sourde oreille à ceux qui voudraient me convaincre que je suis complice de tous les abus contre lesquels je ne m’élève pas.

C’est donc avec un manque total de sympathie que j’ai lu les thèses de ceux qui cherchent à trouver des responsabilités collectives à l’attentat terroriste au Métropolis.

C’est la faute des autres

Dans mon billet du 7 septembre, j’ai déjà parlé de la thèse stupide d’un ex-ministre libéral à l’effet que les Péquistes « ont couru après ».

D’autre part, sous le prétexte que le tireur au Métropolis était non seulement anglophone, mais se prétendait être le bras armé du réveil des Anglophones, certains y voient une responsabilité de ces derniers ou de leurs institutions. À mon avis, une telle accusation relève de la chasse aux sorcières.

C’est ainsi que la Société Saint-Jean-Baptiste blâme les média canadiens-anglais de diffuser des commentaires haineux de lecteurs qui ne se gênent pas de faire des parallèles entre le mouvement indépendantiste et les mouvements fascistes, voire néo-nazis. Malheureusement, la SSJB elle-même est bien connue pour ses excès langagiers comme l’accusation lancée à tous les députés québécois au gouvernement fédéral d’être des « traîtres ».

Et puisqu’il y a probablement aussi des déséquilibrés chez les partisans de l’indépendance du Québec, que dirait la SSJB si l’attentat avait été perpétré par l’un d’eux contre un rassemblement libéral ou caquiste ?

C’est de notre faute

À l’autre extrémité du spectre des opinions, ils y a les « auto-flagellateurs » c’est-à-dire ceux qui croient que nous portons tous la responsabilité de cet attentat.

Le philosophe Nicolas Lévesque déclare : « Le délire de cet homme n’aurait pas pris cette forme-là si le Québec était une société où on pouvait vraiment discuter. Nous sommes tous responsables : les intellectuels qui n’osent prendre leur place, les médias qui ont abandonné les idées, les gouvernements, les universités, les Québécois qui n’osent plus discuter à table.»

Prétendre que tout le monde est responsable, cela revient à dire que personne ne l’est véritablement.

Si la responsabilité de tous les crimes sur Terre sont la faute des collectivités humaines dans lesquels ces crimes sont perpétrés, les criminels sont alors des marionnettes dont les comportements ne sont que la conséquence d’un avilissement dont toute la société est responsable. Et leurs victimes ne sont que les cibles aléatoires de leurs bourreaux.

Quelle conception masochiste du monde…

Conclusion

Pour moi, les choses sont simples. Il y a une cible : un rassemblement de sympathisants péquistes. Il y a un tueur, un mort et un blessé. C’est tout. Si d’autres attentats surviennent, on cherchera des similitudes, des causes communes et des solutions. Mais pour l’instant, on ne cherchera pas à tirer des lois générales d’un fait particulier.

Les média anglophones ne sont pas responsables. Les Anglophones du Québec ne sont pas responsables. La société québécoise n’est pas responsable. Je ne suis pas responsable et vous ne l’êtes pas non plus. Pour l’instant, seul le tueur l’est. Dans quelle mesure est-il lui-même responsable de ses actes ? C’est ce que son procès nous révélera.

Au-delà du tueur, tout au plus pourra-t-on blâmer les lacunes de la protection de Mme Marois par la Sécurité du Québec.

Références :
Attentat au Métropolis: la SSJB pointe les médias anglophones
L’aveuglement partisan d’un imbécile
Lettre – Nous ne sommes pas tous responsables
«Nous sommes tous responsables» de l’attentat du Métropolis

Paru depuis : Au Métropolis, une police de pee-wee (2022-12-02)

Détails techniques de la photo : Olympus OM-D e-m5, objectif M.Zuiko 40-150mm R — 1/320 sec. — F/5,6 — ISO 200 — 108 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’aveuglement partisan d’un imbécile

Publié le 7 septembre 2012 | Temps de lecture : 4 minutes
Funérailles de Denis Blanchette

Il y a des jours où je me rends compte que je ne devrais pas consulter les journaux.

Je suis furieux. Je viens de lire les commentaires de l’ex-ministre libéral Serge Simard relativement à la tuerie au Métropolis.

L’ex-ministre, qui s’est déjà fait remarqué pour avoir félicité le maire de la ville de Saguenay pour ses propos xénophobes, a accusé le Parti Québécois d’être responsable de la mort cette semaine de Denis Blanchette au Métropolis.

Sa déclaration exacte est : « Les derniers mois, on a cultivé la violence et certains partis à l’Assemblée nationale ont favorisé la violence. Ça, c’est regrettable parce que, regardez qu’est-ce que ça fait; ça amène des individus qui ont des difficultés mentales à poser des gestes semblables à ceux qui ont été posés.»

Si nous avions affaire ici à un partisan péquiste qui avait tenté de faire bruler vif des centaines de partisans libéraux, je comprendrais la réaction de l’ex-ministre. Mais ce n’est pas le cas. Pas plus que la tuerie à l’Assemblée nationale en 1984 n’était causée par un Indépendantiste.

Puisque l’ex-ministre y fait allusion, parlons de la violence de la crise étudiante. Ce conflit social est né d’une hausse substantielle des frais de scolarité décrétée dans le dernier budget du gouvernement Charest.

Cette mesure ne découle pas d’une promesse électorale explicite. Il ne s’agit donc pas d’un choix de société — c’est-à-dire d’un mandat que le peuple a confié au Parti libéral, réélu sur la base de cette promesse — mais simplement d’un choix budgétaire.

Peu importe la valeur et la pertinence de cette décision, un choix budgétaire n’est qu’un choix budgétaire. Rien ne justifie que l’État s’entête et provoque un chaos social à moins que la survie de la Nation passe absolument par la mise en œuvre de cette mesure, ce qui n’est pas le cas ici.

Le Parti libéral a été élu en 2008 par 42% des votes exprimés lors d’un scrutin dont le taux de participation n’était que de 57%; conséquemment, seulement 24,6% des citoyens adultes ont donc voté pour cette formation politique (comme 23,8% de ces derniers ont voté pour le PQ mardi dernier).

Aveuglé le succès de sa stratégie électorale et heureux d’être enfin majoritaire à l’Assemblée nationale, le gouvernement Charest a oublié l’essentiel : la faible caution populaire qui le privait de l’autorité morale de chambarder quoi que ce soit.

Plutôt que de reculer — comme il l’a fait dans le dossier aujourd’hui oublié de la privatisation du Mont-Orford — le gouvernement s’est entêté et à répondu à la bruyante désobéissance civile des étudiants en déchaînant les pouvoirs répressifs de l’État.

Loin de moi l’idée d’excuser les méfaits commis à l’occasion des protestations étudiantes. Mais le gouvernement Charest porte une lourde part de responsabilité dans le climat social qui s’est installé au Québec depuis quelques temps.

Même le port symbolique d’un petit carré de tissus coloré représentait à ses yeux un geste subversif et un acte violent. Et dans sa rhétorique belliqueuse, l’État s’en prenait verbalement — non pas aux Témoins de Jéhovah et aux Communistes, comme sous le gouvernement de Maurice Duplessis — mais aux « Carrés rouges » et aux anarchistes. Sans le pouvoir rassurant des tribunaux, le Québec aurait reculé 60 ans en matière de droits civiques.

C’est donc pour moi un sujet de scandale qu’un ex-ministre xénophobe, répudié par ses électeurs, ait l’audace de tenter d’excuser un acte terroriste commis une fois de plus par un défenseur armé de l’unité canadienne, et tente de récupérer cet attentat à des fins politiques par un raisonnement aussi tortueux que faux.

Références :
Affaire de la privatisation du Mont-Orford
Attentat au Métropolis : la SSJBM met en cause la presse anglophone
Denis Lortie
Serge Simard salue le courage du maire Jean Tremblay

Sur le même sujet : La responsabilité de l’attentat terroriste au Métropolis

Détails techniques de la photo : Olympus OM-D e-m5, objectif M.Zuiko 40-150mm R — 1/320 sec. — F/5,6 — ISO 200 — 108 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel