Les sacs en plastique mince : meilleurs pour l’environnement ???

15 janvier 2018

Introduction

Le Centre international de référence sur le cycle de vie des produits, procédés et services (CIRAIG) est né et basé à l’école Polytechnique de Montréal.

Il est associé à des centres de recherche européens et a conclu des partenariats avec d’importants groupes industriels, dont la pétrolière française Total et le groupe chimique Solvay.

Pour le compte de Recyc-Québec, le CIRAIG a dernièrement effectué une analyse des impacts environnementaux des sacs d’emplettes au Québec.

En résumé, l’étude conclut que les sacs minces d’épicerie — ceux qu’un nombre croissant de municipalités bannissent — sont meilleurs pour l’environnement que leurs solutions de remplacement, notamment les sacs en papier et ceux en coton.

Le texte qui suit ne vise pas à faire l’analyse détaillée de cette étude, mais à comprendre comment on est arrivé à la conclusion que les sacs nés de l’industrie pétrochimique sont préférables à leurs solutions de remplacement naturels et parfaitement biodégradables.

Les sacs en papier

Réglons immédiatement le cas du sac en papier.

Il est le plus facilement compostable, dégradé en 86 jours. En comparaison, le sac en plastique se dégrade en 500 ans et le sac de coton en 111 jours.

Habituellement sans poignée, il est le moins robuste. Particulièrement sous la pluie. Peu pratique, il ne sera pas considéré au-delà de cette section expéditive.

Comparons maintenant les sacs en plastique mince aux sacs en coton.

Les couts environnementaux du transport

Parce qu’ils sont imprimés au nom du commerce qui les utilise, les sacs en plastique mince sont principalement produits au Canada, plus particulièrement en Ontario.

Les sacs en coton sont généralement produits en Chine.

Les premiers parcourent en moyenne 800 km en camion pour parvenir au Québec alors que les seconds sont transportés en bateau sur une distance de 22 000 km.

Contrairement à ce qui se passe en Europe, très peu de commerces québécois offrent des sacs en coton à leur nom. Si cette coutume se répandait ici, il n’est pas exclu de penser que la nécessité de les personnaliser favoriserait leur production en Amérique du Nord, comme c’est le cas des sacs d’emplettes mince.

La production des sacs en plastique mince

Le plastique servant à leur fabrication est importé principalement du Texas. Il est dérivé d’hydrocarbures extraits du sol à l’aide d’une machinerie alimentée au pétrole.

Toutefois, l’empreinte environnementale des sacs en plastique mince est jugée nulle en raison de leur taux élevé de réutilisation comme sacs à ordures.

En d’autres mots, dans la mesure où ils évitent l’utilisation de sacs à ordure dédiés, ils n’ont aucune empreinte environnementale.

Cette prémisse étonnante n’est pas valable dans le cas de Montréal.

S’il n’est pas rare que des sacs en plastique mince servent à protéger l’intérieur de poubelles d’intérieur, les citoyens de Montréal doivent les placer finalement à l’intérieur de sacs à poubelle standards, ce qui ne dispense personne de l’utilisation de ceux-ci.

Il s’agit là d’une faille méthodologique majeure. Cette prémisse étant inexacte, cela entraine que les calculs de l’étude devront être refaits avant de conclure que l’interdiction montréalaise des sacs en plastique mince est une mauvaise décision.

La production des sacs en coton

Plan de coton chinois

Le plus grand producteur mondial de coton est la Chine. Le coton utilisé dans ce pays est produit localement. Celui-ci séquestre 0,26 kg de carbone par kg et 152,3 m³ de méthane à la tonne.

Ces avantages sont contrebalancés par le fait que sa culture nécessite l’utilisation de pesticides et d’eau (une ressource limitée en Chine). Pire, son tissage là-bas se fait sur des machines alimentées par de l’électricité principalement produite par la combustion du charbon.

Les auteurs de l’étude n’ont pas pris en considération le fait que si le cultivateur chinois ne produisait pas de coton, ses terres seraient utilisées à produite autre chose qui nécessiterait aussi l’emploi d’eau et de pesticides.

Si les sacs de coton étaient universellement bannis, les usines de tissage chinois ne cesseraient pas d’opérer dans ce pays de 1,3 milliard de personnes où la demande de tissus (pour des vêtements ou des sous-vêtements) ne cesse d’augmenter.

À l’opposé, si les sacs en plastique mince étaient universellement bannis, les usines texanes en faillite ne se seraient pas nécessairement replacées par d’autres entreprises de fabrication de biens en plastique.

Les couts environnementaux de l’usage

À juste titre, les auteurs ont présumé que personne ne lave ni ne repasse ses sacs en plastique.

Toutefois, les auteurs présument que les sacs en coton sont lavés à toutes des douze utilisations. Ils ont donc pris en considération l’impact environnemental de la lessive (savon, eau et électricité) comme si les utilisateurs de sacs en coton effectuaient une brassée exclusivement pour ceux-ci. Encore là, il s’agit d’une prémisse étonnante.

Finalement, les auteurs ont estimé la distance en voiture qu’effectuerait le consommateur s’il réalisait qu’il a oublié d’apporter son sac en coton. Cette distance est estimée être entre 13 et 126 km (sic).

On a peine à croire que les épiceries sont si dispersées sur le territoire montréalais et que tout le monde s’y rend en voiture.

Conclusion

À la lecture de cette étude, il est évident que les auteurs ont effectué une recherche approfondie et des calculs impressionnants, mais à partir de prémisses indéfendables.

Comme un gratte-ciel en béton armé, en acier et en verre qui reposerait sur de la vase.

Bref, rien dans cette étude ne permet de mettre en doute l’à-propos du bannissement des sacs en plastique mince sur le territoire montréalais.

Références :
Analyse du cycle de vie des sacs d’emplettes au Québec
Le CIRAIG annonce l’un des plus importants partenariats du monde dans le secteur de la recherche sur le cycle de vie
Les sacs de plastique ont-ils été bannis trop vite?

Détails techniques : Panasonic GH1, objectif Lumix 14-45mm — 1/250 sec. — F/5,6 — ISO 100 — 14 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel