Les écoles passerelles

Publié le 21 juin 2010 | Temps de lecture : 2 minutes

Le projet de loi 103 prévoit une grille d’analyse dont se serviront des fonctionnaires pour déterminer qui — parmi les élèves qui devraient fréquenter l’école française en vertu des dispositions invalidées de la Loi 101 — pourront plutôt fréquenter l’école publique anglaise en vertu de cette nouvelle loi. Un des critères principaux est le passage de trois ans dans une école anglaise privée.

S’il est adopté, le projet de loi 103 accordera le droit d’aller à l’école publique anglaise non seulement à l’élève en question, mais également à ses frères, ses sœurs et ses descendants. Compte tenu du faible taux de natalité parmi les québécois francophones, et grâce à cet effet multiplicateur, la loi 103 permettra donc l’anglicisation progressive du Québec aux frais des contribuables, très majoritairement francophones pour l’instant.

Pour donner une idée de l’importance de ce phénomène, signalons que le Québec accueillait environ 50 000 immigrants (hommes, femmes et enfants) en 2008 alors que cette année-là, plus de quatre milles élèves fréquentaient illégalement une école passerelle, un nombre en croissance exponentielle depuis une décennie : environ 700 en 1998, 1379 en 2002 et plus de 4000 en 2008.

Rappelons également que le gouvernement du Parti libéral du Québec a sabré dernièrement dans les cours de francisation destinés aux immigrants et voilà qu’il leur ouvre les portes de l’école publique anglaise.

En vertu de la grille d’analyse de la loi 103, les écoles privées de langue anglaise ne sont pas toutes sur le même pied. Un passage dans une école parmi neuf établissements scolaires dits de type « A », jugées véritablement anglophones — en réalité, plus onéreux car totalement non-subventionnés par l’État — donnera davantage de points.

Ce sont l’Académie adventiste Greaves, l’Académie Kells, l’Académie Kuper, l’école Selwyn House, le Lower Canada College, Miss Edgar’s and Miss Cramp’s School, le St. George’s School of Montreal, The Priory School et The Study.

À une exception près, elles sont situées dans un périmètre assez restreint de l’île de Montréal, essentiellement à Westmount et ses environs immédiats.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le projet de loi 103 : Over my dead body !

Publié le 12 juin 2010 | Temps de lecture : 4 minutes

Afin de contourner la loi 101, il suffisait d’envoyer ses enfants pendant quelques semaines ou quelques mois dans des écoles qualifiées de « passerelles » — des établissements privés non subventionnés de langue anglaise — pour obtenir le droit de les envoyer ensuite à l’école publique anglaise.

En 2002, 1379 élèves avaient eu recours à ce stratagème, le double qu’en 1998. Pour y mettre fin, le gouvernement québécois rendait ces écoles passerelles illégales en 2002 en vertu d’une loi jugée depuis anticonstitutionnelle par la Cour suprême du Canada. Signalons que malgré l’effet dissuasif de cette loi, le nombre d’écoliers fréquentant une école passerelle sans détenir de certificat d’admissibilité dépassait 4 000 pour l’année scolaire 2007-2008 alors que le Québec accueillait environ 50 000 immigrants (hommes, femmes et enfants). C’est donc dire l’importance du phénomène.

Après des mois de réflexion, le gouvernement libéral vient de présenter sa solution alternative, soit le projet de loi 103. Celui-ci prescrit que l’élève devra avoir passé au moins trois ans dans un établissement privé anglais non subventionné pour avoir accès — cet élève, ses frères, ses soeurs et ses descendants — au réseau public anglophone qui, rappelons-le, est financé par les payeurs de taxes (en majorité francophones).

En fait, le droit à l’école anglaise sera évaluée au cas par cas, selon une grille d’analyse complexe prévue par règlement et qui nécessitera des dizaines de milliers d’heures de fonctionnaires à analyser les cas soumis. Ces fonctionnaires seront payés, encore là, par les payeurs de taxes majoritairement francophones.

Quant aux coûts de l’école totalement privée — de 8 000$ à 12 000$ par an — cette somme n’est pas si dissuasive qu’elle paraît puisque les écoles concernées donnent elles-mêmes le moyen de la rendre déductible d’impôt donc financée indirectement par les contribuables.

De plus, je n’aimerais pas apprendre par les journaux qu’on peut obtenir le droit d’envoyer ses enfants à l’école anglaise en échange d’une contribution à la caisse de Parti libéral du Québec.

Alors que le Conseil supérieur de la langue française recommandait de soumettre les écoles privées non subventionnées à la loi 101, ce qui nécessitait le recours à la clause nonobstant de la Constitution canadienne, le gouvernement Charest a choisi d’ignorer cet avis et de légaliser les écoles passerelles en limitant toutefois, de son propre aveu, leur accès par des mesures administratives dilatoires. Il faut une naïveté que je n’ai plus pour croire qu’on peut légalement empêcher indirectement ce qu’on ne peut pas empêcher directement.

Pourquoi donc le gouvernement libéral refuse-t-il d’utiliser la clause nonobstant ? Parce qu’une telle dérogation irrite le Canada anglais. À mon avis, le Québec ne doit jamais hésiter à y recourir quand son avenir en dépend. N’oublions pas que la Constitution canadienne, ce n’est pas notre constitution; c’est celle du Canada anglais. Elle fut adoptée grâce à un déblocage survenu le lendemain d’une nuit de négociation intensive à laquelle le Québec n’avait pas été invité mais à laquelle toutes les provinces anglophones ont participé. Jamais le Québec n’a voté pour cette Constitution. Elle fut passée sur notre dos.

Donc cette Constitution, on s’en sert quand ça fait notre affaire et on invoque sans hésiter la clause nonobstant lorsque c’est nécessaire. Si le Canada anglais n’aime pas cela, c’est son problème et non le nôtre.

On me dit qu’il est normal pour un immigrant au Québec de souhaiter le meilleur avenir possible pour ses enfants, ce qui signifie les envoyer à l’école anglaise. Je réponds qu’en tant que payeur de taxe, je refuse de payer pour l’anglicisation du Québec. Si cet immigrant veut payer en totalité pour l’école privée non-subventionné, cela ne me regarde pas.

Mais s’il s’imagine que je vais payer stupidement pour que le français disparaisse du Québec, il est mieux de prier le Ciel pour que le Parti libéral du Québec demeure au pouvoir jusqu’à notre extinction.

Références :
Coalition contre le projet de loi 103
Jugement de la Cour suprême du Canada
L’école anglaise ouverte aux parents fortunés
Loi 103: la dictature de l’arbitraire
Une passerelle plus étroite

Paru depuis :
Augmentation des résidents non permanents dans les écoles anglaises (2021-03-19)

Note : Photo de M. Charest par le journal Le Devoir.

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Écrit par Jean-Pierre Martel