Une députée modèle

Publié le 4 octobre 2018 | Temps de lecture : 12 minutes

Introduction

Carole Poirier, ex-députée

Jusqu’à ce que je m’implique à titre de bénévole pour la réélection de notre députée sortante, j’avais une opinion assez sommaire du rôle du représentant de notre circonscription à l’Assemblée nationale.

Pour moi, le devoir d’un député, c’était d’aider des citoyens à remplir des formulaires gouvernementaux ou à s’y retrouver dans les dédales administratifs de l’État québécois.

Il s’agissait aussi de mettre en contact des nécessiteux avec les organismes qui ont pour mission de leur venir en aide.

C’était aider des chômeurs à trouver un emploi en leur signant une lettre de recommandation si appropriée.

Et c’était enfin d’offrir une oreille compatissante à tout ceux qui ne savent plus à qui se confier.

Bref, c’était là des tâches exercées souvent par une secrétaire pendant que le député faisait tapisserie à l’Assemblée nationale.

Dans mon esprit, quand un député n’accède jamais au Conseil des ministres, c’était la preuve d’un manque d’envergure qui le confinait au rang de personnalité politique mineure, voir de simple béni-oui-oui.

J’ai véritablement appris le rôle de ma députée à l’occasion des différents breffages qui avaient pour but de donner aux bénévoles des arguments en vue de convaincre les citoyens indécis lors des porte-à-porte.

En voici trois exemples.

L’école Baril

Lorsque le gouvernement Marois entreprit de s’attaquer aux écoles insalubres du Québec, l’école Baril — construite dans le premier quart du XXe siècle — n’était pas dans les priorités gouvernementales.

Pourtant, la députée recevait de très nombreuses plaintes de parents dont des enfants souffraient de bronchites à répétition et de maladies respiratoires chroniques.

Incapable de convaincre son propre gouvernement, la députée se résolut à utiliser l’arme ultime; elle menaça la première ministre Pauline Marois de démissionner si on ne décontaminait pas l’École Baril.

Or Carole Poirier, qui ne fut jamais ministre, était néanmoins considérée comme un pilier du PQ en raison de son expérience, comme en témoigne la liste des tâches qui lui furent confiées au fil du temps (voir à la fin du texte).

Les tests effectués révélèrent qu’effectivement, l’école Baril était à ce point atteinte de moisissures qu’il était impossible de la décontaminer. Conséquemment, le gouvernement décida de raser l’édifice et d’en construire un neuf.

Le couvent des sœurs du Saint-Nom-de-Jésus

Il y a plusieurs années, les sœurs du Saint-Nom-de-Jésus, décimées par l’âge, avaient été approchées par un promoteur immobilier en vue de la transformation de leur couvent en condominiums.

Prévenue, Carole Poirier s’était empressée de rencontrer les sœurs et de leur proposer plutôt de céder gratuitement leur couvent à la collectivité.

La députée leur proposa de transformer les étages supérieurs en une quarantaine de logements sociaux, tandis que le rez-de-chaussée devenait un CPE (c’est-à-dire une garderie publique) d’environ 80 places.

Le tout devait se réaliser lorsque les dernières religieuses, en perte d’autonomie, auraient quitté leur couvent pour un hospice.

Entretemps, lorsque le gouvernement libéral prit le pouvoir, celui-ci a voulu mettre fin à tout projet de CPE afin de privilégier les garderies privées subventionnées par l’État.

Carole Poirier, maintenant dans l’opposition, a fait valoir qu’une fois placées dans un CHSLD, il était impossible pour les sœurs de gérer la location d’un local utilisé par une garderie privée et que leur volonté devait être respectée intégralement.

C’est ce qui fit reculer le gouvernement Couillard.

Il y a quelques semaines, les dernières sœurs ont quitté leur couvent. D’ici peu, on commencera à briser les cloisons des chambrettes des religieuses pour créer des logements susceptibles d’accueillir des familles à bas revenus.

La pénurie de médecins dans le quartier

Tout l’Est de l’ile de Montréal possède le plus faible taux de médecins de famille au Québec. Le creux du creux est dans le quartier d’Hochelaga-Maisonneuve (HoMa) où il n’y en avait aucun jusqu’au mois dernier.

Le ministère de la Santé était sourd aux demandes de la députée. La raison était que le quartier faisait partie de la zone administrative de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve.

Or le ministre Barrette prétendait qu’HoMa n’avait pas de problème puisqu’un vingtaine de médecins s’étaient installés dans une superclinique située sur la rue Langelier (dans Mercier).

En réalité, cela ne donnait pas un médecin de plus puisqu’il s’agissait d’une clinique privée d’une vingtaine de médecins qui s’était transformée en superclinique.

De plus, celle-ci était située à deux kilomètres du domicile de certains patients d’HoMa en déambulateur ou incapables de se déplacer autrement qu’en transport adapté.

La députée connaissait la mentalité de la machine de l’État. La seule manière de faire bouger les choses était de faire en sorte qu’HoMa soit désigné comme une zone administrative autonome, ce qui révélait officiellement qu’aucun médecin ne s’occupait des 56 000 citoyens qui y habitaient.

À cette fin, la députée a organisé mensuellement des protestations regroupant quelques dizaines de citoyens un peu partout dans le quartier pendant plus d’un an.

De plus, elle a fait circuler une pétition signée par des milliers de résidents. Cette pétition, sur des cartons individuels, était remise de main à main au ministre Barrette, à sa plus grande exaspération.

Si bien que le ministère a finalement accepté de faire en sorte qu’HoMa devienne une zone administrative autonome.

Les effets de cette décision furent immédiats; cinq nouveaux médecins à temps partiel — l’équivalent de deux médecins à plein temps — se sont établis dans HoMa au cours du mois dernier.

Un nouveau député

Alexandre Leduc, nouveau député

Historien et syndicaliste au sein de la FTQ, Alexandre Leduc a été élu député d’HoMa à l’élection du 1er octobre 2018 avec 50,4% des voix exprimées.

À l’occasion de deux débats, j’ai pu constater qu’il s’agit d’un homme brillant, excellent communicateur, et de loin le meilleur rival de Carole Poirier parmi une kyrielle d’opposants dont certains étaient d’une médiocrité inimaginable.

Bref, Alexandre Leduc possède toutes les qualités nécessaires pour bien représenter HoMa.

Pour l’instant, je doute qu’il ait l’efficacité de la députée sortante. Mais tout s’apprend et je présume qu’il fera éventuellement un bon travail.

Conclusion

Carole Poirier est une des femmes les plus remarquables que j’ai rencontrées.

Simple députée, elle a profité de sa profonde connaissance de la machine de l’État québécois pour mener dans le quartier des projets qui, sans elle, n’auraient jamais vu le jour.

À l’école Baril, des milliers d’enfants auraient continué à être malades pendant des années.

À l’ancien couvent des sœurs du Saint-Nom-de-Jésus, 46 logements sociaux s’ajouteront aux 1 200 créés dans le quartier depuis que Carole Poirier y a été élue députée.

Oubliés par la profession médicale depuis des années, des citoyens du quartier pourront être pris en charge par un médecin qui sera horrifié de voir l’état de ces personnes à l’issue d’un si long abandon.

Ces trois exemples ont été choisis pour donner un indice des différents moyens auxquels un député doit recourir pour s’acquitter de son mandat. Celui de défendre ses commettants.

Durant son mandat, Carole Poirier a changé la vie de centaines de personnes dans mon quartier. C’est en ce sens qu’elle est une députée modèle.

J’ai été honoré d’avoir fait sa connaissance et je crois qu’il était de mon devoir de lui rendre hommage.

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II, objectif M.Zuiko 75mm F/1,8
1re photo : 1/2000 sec. — F/1,8 — ISO 200 — 75 mm
2e  photo : 1/160 sec. — F/1,8 — ISO 2000 — 75 mm


Qualifications, fonctions politiques et parlementaires de Carole Poirier

• Détentrice d’un baccalauréat multidisciplinaire en administration, en gestion des services municipaux et en administration des services publics décerné par l’UQÀM en 2005
• Détentrice d’une maitrise de gestionnaire en administration publique décerné par l’École nationale d’administration publique en 2008
• Directrice de cabinet de la ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale en 1997-1998
• Directrice de cabinet de la ministre des Affaires municipales et de la Métropole en 1998-2002
• Directrice de cabinet de la Présidence de l’Assemblée nationale en 2002-2003
• Directrice de cabinet de la cheffe de l’opposition officielle en. 2005-2006
• Première vice-présidente de l’Assemblée nationale du 30 octobre 2012 au 20 mai 2014
• Whip en chef de l’opposition officielle du 14 octobre 2016 au 2 février 2018
• Leader parlementaire de l’opposition officielle du 8 avril 2018 au 15 mai 2018
• Leader parlementaire adjointe de l’opposition officielle du 2 février 2018 au 8 avril 2018 et du 15 mai 2018 au 23 aout 2018
• Membre suppléante du Bureau de l’Assemblée nationale du 1er novembre 2016 au 6 février 2018
• Membre du Bureau de l’Assemblée nationale du 27 mai 2014 au 15 septembre 2015
• Membre de la Commission de l’Assemblée nationale du 30 octobre 2012 au 5 mars 2014, du 17 mai 2016 au 2 février 2018 et du 8 avril 2018 au 15 mai 2018
• Membre de la Commission de la culture et de l’éducation du 6 février 2018 au 23 aout 2018
• Membre de la Commission de l’administration publique du 21 mai 2015 au 17 mai 2016
• Membre de la Commission de la santé et des services sociaux du 15 septembre 2009 au 22 septembre 2010 et du 20 septembre 2011 au 1er août 2012
• Membre de la Commission des affaires sociales du 14 janvier 2009 au 14 septembre 2009
• Membre de la Commission des institutions du 2 juin 2014 au 21 mai 2015
• Membre de la Commission des relations avec les citoyens du 22 septembre 2010 au 20 septembre 2011, du 21 mai 2015 au 27 octobre 2016 et du 19 septembre 2017 au 23 aout 2018
• Membre de la Sous-commission de la réforme parlementaire du 30 octobre 2012 au 5 mars 2014, du 14 octobre 2016 au 2 février 2018 et du 8 avril 2018 au 15 mai 2018
• Membre de la Section du Québec, Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) du 27 mai 2009 au 8 mars 2012
• Membre de la Section du Québec, Association parlementaire Ontario-Québec (APOQ) du 27 mai 2009 au 1er aout 2012
• Membre de la Section du Québec de la Confédération parlementaire des Amériques (COPA) du 6 décembre 2012 au 5 mars 2014 et du 20 juin 2014 au 23 aout 2018
• Membre de la Délégation de l’Assemblée nationale pour les relations avec la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Région wallonne (DANRWB) du 27 mai 2009 au 1er aout 2012 et du 20 juin 2014 au 23 aout 2018
• Membre de la Délégation de l’Assemblée nationale pour les relations avec la Catalogne (DANRC) du 6 décembre 2012 au 5 mars 2014
• Porte-parole de l’opposition officielle en matière de condition féminine du 9 janvier 2009 au 26 aout 2010 et du 25 avril 2014 au 14 octobre 2016
• Porte-parole de l’opposition officielle en matière d’éducation primaire et secondaire du 2 février 2018 au 23 aout 2018
• Porte-parole de l’opposition officielle en matière d’éducation des adultes du 2 février 2018 au 23 aout 2018
• Porte-parole de l’opposition officielle en matière de famille du 27 août 2010 au 18 aout 2011
• Porte-parole de l’opposition officielle en matière de francophonie du 25 avril 2014 au 14 octobre 2016
• Porte-parole de l’opposition officielle en matière de laïcité du 19 aout 2011 au 1er aout 2012
• Porte-parole de l’opposition officielle en matière d’immigration et de communautés culturelles du 14 octobre 2016 au 2 février 2018
• Porte-parole de l’opposition officielle en matière d’habitation du 9 janvier 2009 au 26 aout 2010 et du 25 avril 2014 au 14 octobre 2016
• Porte-parole de l’opposition officielle en matière de persévérance scolaire du 2 février 2018 au 23 aout 2018
• Porte-parole de l’opposition officielle en matière de relations internationales du 25 avril 2014 au 14 octobre 2016
• Porte-parole de l’opposition officielle pour la Métropole du 14 octobre 2016 au 23 aout 2018
• Porte-parole de l’opposition officielle responsable de l’ile de Montréal du 14 octobre 2016 au 23 aout 2018
• Porte-parole de l’opposition officielle pour les ainés du 19 août 2011 au 1er aout 2012
• Présidente de la Commission de l’administration publique du 17 mai 2016 au 27 octobre 2016
• Rapporteure de la Commission de l’éducation, de la communication et des affaires culturelles (et Réseau parlementaire de lutte contre le VIH/SIDA) de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) du 18 juin 2014 au 23 aout 2018
• Rapporteure de la Commission des affaires parlementaires de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) du 8 mars 2012 au 1er aout 2012 et du 6 décembre 2012 au 5 mars 2014
• Vice-présidente de la Section du Québec de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) du 6 décembre 2012 au 5 mars 2014 et du 18 juin 2014 au 23 aout 2018

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Embourgeoisement des villes : l’échec des utopies

Publié le 20 novembre 2017 | Temps de lecture : 6 minutes

Rares sont les villes qui se développent uniformément. Les périodes de gloire et de déclin laissent successivement leurs marques. Les unes par le foisonnement de leurs témoignages : les autres, par leur rareté.

Et ces couches historiques inégales, amputées par quelques catastrophes que sont les guerres et les incendies, forgent habituellement la personnalité architecturale des villes.

Montréal n’échappe pas à cette règle.

Contrairement à Paris — où le remodelage urbain sous la férule de l’État a joué un rôle important — c’est l’étalage urbain qui fut la principale caractéristique du développement de la métropole.

Secondairement, plus que les incendies, ce sont des intérêts privés qui refaçonnent le bâti montréalais et sont donc responsables de la rénovation urbaine.

Lorsque les ‘riches’ s’achètent un condo, ils abandonnent leurs logements antérieurs qui devient alors disponibles à d’autres. Ces derniers libèrent les leurs. Et dans ce jeu de chaises musicales, en fin de compte, des logements deviennent disponibles pour des gens à faible revenu. Voilà comment Montréal se développe et vit depuis des décennies.

De nos jours, Hochelaga-Maisonneuve est précisément le résultat de ce jeu de chaises musicales; par exemple, les logements cossus construits autrefois pour héberger les ingénieurs anglais de la Vickers et les employés syndiqués du constructeur naval sont aujourd’hui habités par des gens moins fortunés qu’eux.

Toutefois l’excellent documentaire Quartiers sous tension de Carole Laganière permet de comprendre ce qui a provoqué la naissance d’un mouvement d’hostilité à l’égard de l’embourgeoisement de ce quartier.

Personne n’a d’objection à ce qu’une famille de jeunes professionnels aménage dans un logement laissé vacant par une personne décédée ou par un locataire qui a trouvé un logement qui lui convient mieux ailleurs.

Malheureusement, la législation adoptée par les gouvernements du Parti québécois afin de donner plus de pouvoir aux locataires a été érodée par de nouvelles tactiques qui permettent de contourner leurs droits.

De nos jours, pour 135$, un propriétaire n’a qu’à se procurer un permis municipal pour agrandissement ou subdivision. Ce document lui donne automatiquement le droit de mettre à la rue ses locataires, sans avoir même à donner suite à ce permis.

En d’autres mots, jamais la Régie du logement ne demandera à voir des contrats signés auprès d’entrepreneurs pour juger du sérieux de l’intention à rénover ou agrandir. Comme preuve, le permis suffit.

Des locataires qui ont vécu des décennies au même endroit sont donc sommés d’abandonner leur logement en quelques semaines.

Ceux qui ont le droit d’y rester — les locataires âgés de 70 ans ou plus — sont harcelés par des coupures intempestives d’eau, d’électricité ou de chauffage jusqu’à ce que, de guerre lasse, ils quittent les lieux.

Or l’accessibilité économique à la Justice fait défaut depuis que le système judiciaire tout entier a été pris en otage par une caste juridique qui l’a transformé en machine à sous pour servir ses propres intérêts.

Le résultat est que le peuple est à la merci de la rapacité de certains entrepreneurs. Voilà le problème.

Ce qui m’a stupéfait à l’écoute du documentaire dont j’ai parlé plus tôt, c’est la naïveté des anarchistes qui luttent contre l’embourgeoisement du quartier.

Comme moyen de s’y opposer, ces derniers ont choisi de s’attaquer à des petits marchands, perçus comme des « collaborateurs de la gentrification ».

Aucune banque au monde ne finance l’ouverture d’un commerce si la demande de prêt ne s’appuie pas sur une étude de marché. En d’autres mots, il faut d’abord l’établissement de bourgeois pour qu’on vienne ensuite offrir des biens et des services qui leur sont destinés.

Il y a deux solutions à ce problème; des changements législatifs afin d’éviter les abus et une politique de construction de logements sociaux.

Or ni l’une ni l’autre de ces mesures ne sont envisageables tant que nous serons gouvernés par des partis de droite. Or c’est le cas au fédéral, au provincial et au municipal (jusqu’à récemment) depuis presque deux décennies.

Le dernier grand projet municipal de construction de logements sociaux date du Plan Dozois (1957-1961).

Ceux qui luttent contre l’embourgeoisement de mon quartier se refusent à considérer l’action politique. Ils font partie d’une génération qui s’imagine que tous les politiciens sont interchangeables parce que c’est tout ce qu’ils ont connu depuis vingt ans.

Pour eux, seul compte l’action directe. Or leurs méfaits ne sont que des faits divers qu’on oublie le lendemain. La leçon est déjà évidente; le terrorisme utopique est voué à l’échec.

Il ne leur vient pas à l’esprit que les partis politiques sont des coquilles vides que chacun d’entre nous peut envahir et façonner à sa manière.

Lutter contre l’embourgeoisement d’un quartier est l’équivalent de lutter contre le vent. Veut-on réellement qu’Hochelaga-Maisonneuve devienne un ghetto de pauvres ? Ou veut-on qu’il redevienne un repère de drogués et de prostituées ?

Ce qui est important, c’est de lutter contre les abus de l’embourgeoisement. Cela est faisable. Il suffit de prendre les bons moyens. Ce qui veut dire, cesser d’élire des gouvernements de droite et façonner à notre manière les partis centristes ou de gauche.

C’est un peu plus long que de casser les vitrines d’un commerce, mais quand on ne veut pas simplement se défouler contre la propriété d’autrui, on prend les vrais moyens.

Sur le même sujet :
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Montréal fait la guerre aux taudis (taille du fichier : 14,2 Mo)
Non au terrorisme utopiste

Parus depuis :
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Haro sur l’« éco-embourgeoisement » (2019-08-05)
Hausses de loyers abusives: plus de 100 000 logements abordables disparus au Québec en cinq ans (2023-02-21)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Non au terrorisme utopiste

Publié le 2 décembre 2013 | Temps de lecture : 4 minutes

La semaine dernière, quatre restaurants ont été victimes d’actes de vandalisme dans le quartier montréalais d’Hochelaga-Maisonneuve; des vitrines ont alors été fracassées et de la peinture a été lancée sur la devanture de ces établissements.

Une des briques ayant servi à commettre ce méfait était accompagnée d’un message dénonçant l’embourgeoisement du quartier. Accusant les commerçants d’être des « collaborateurs de la gentrification », la courte missive se faisait menaçante en précisant que ceux-ci n’étaient « pas en sécurité dans le quartier ».

Rappel historique

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À l’époque de la construction du Château Dufresne (de 1915 à 1918), cette partie de l’île de Montréal constituait une municipalité indépendante connue sous le nom d’Hochelaga (de 1875 à 1883), puis de Maisonneuve (de 1883 à 1918).

Ce château, de même que le Marché Maisonneuve, le bain Morgan (dont la façade est inspirée de la Central Station de New York), la caserne Letourneux (inspirée du style de Frank Lloyd Wright), et l’Hôtel de Ville néoclassique (devenu bibliothèque de quartier depuis), visaient à faire de Maisonneuve une cité bourgeoise modèle.

Après la construction ruineuse de ces édifices emblématiques et après l’abolition complète de taxe offerte aux industries qui voudraient bien s’installer chez elle, la municipalité de Maisonneuve se retrouva au bord de la faillite et se résigna à l’annexion à Montréal en 1918.

Au cours des décennies suivantes, la fermeture de pôles industriels importants (la Vickers et les usines Angus) et le dépeuplement le long de la rue Notre-Dame ont appauvri le tissu social du quartier. La présence de piqueries, et de prostituées ont achevé ce qui pouvait rester de respectabilité au quartier qui, originellement, se voulait huppé.

Retour au présent

Lorsque les ‘riches’ s’achètent un condo, ils abandonnent leurs logements antérieurs qui devient alors disponibles à d’autres. Ces derniers libèrent les leurs. Et dans ce jeu de chaises musicales, en fin de compte, des logements deviennent disponibles pour des gens à faible revenu. Voilà comment Montréal se développe et vit depuis des décennies.

De nos jours, Hochelaga-Maisonneuve est précisément le résultat de ce jeu de chaises musicales; par exemple, les logements cossus construits autrefois pour héberger les ingénieurs anglais de la Vickers et les employés syndiqués du constructeur naval sont aujourd’hui habités par des gens moins fortunés qu’eux.

Par le moyen du terrorisme, vouloir préserver intacte la misère du quartier en réclamant futilement la construction de HLM (ce qui n’arrivera pas de si tôt), c’est condamner Hochelaga-Maisonneuve à devenir un ghetto de pauvres et ultimement, un petit Chicago.

Le terrorisme utopiste des malfaiteurs qui se sont attaqués à des commerçants du quartier est une menace au développement économique et pénalise tous les citoyens du quartier, qu’ils soient riches ou pauvres.

Les commerçants qui font réparer les dommages causés par des malfaiteurs refilent la facture à leurs assureurs : ces derniers s’empresseront d’augmenter leurs primes.

Cette augmentation affectera non seulement les commerces déjà vandalisés, mais tous ceux que l’assureur estimera soumis à ce risque. Et les frais supplémentaires que devront débourser les commerçants pour pouvoir s’assurer, sont refilés à leurs clients, c’est-à-dire à nous tous.

Bref, en fin de compte, ce sont nous, les consommateurs, qui payons pour les folies des casseurs utopistes.

Paru depuis :
Hochelaga-Maisonneuve: un attentat anti-embourgeoisement avorté, croit le SPVM (2016-04-26)

Détails techniques : Appareil Olympus OM-D e-m5, objectif Lumix 12-35mm F/2,8 — 1/400 sec. — F/7,1 — ISO 200 — 12 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel