Bouleversement dans le traitement de l’hépatite C

Publié le 30 juillet 2014 | Temps de lecture : 4 minutes

Le 28 juillet se tient la Journée mondiale contre l’hépatite. Cette année, cet événement prend une importance particulière puisqu’elle sert à faire savoir aux millions de personnes atteintes qu’on dispose depuis peu de nouveaux traitements extrêmement efficaces contre cette maladie.

Mais avant d’aller plus loin, expliquons d’abord ce qu’est l’hépatite.

L’hépatite est une inflammation du foie habituellement d’origine virale. On compte trois types d’hépatites virales, identifiées par les lettres A, B et C.

L’hépatite A est la plus fréquente et la moins dangereuse. Dans certains pays en voie de développement, son incidence est de 100%. Ses symptômes sont habituellement mineurs et elle confère une immunité à vie.

L’hépatite B et l’hépatite C se transmettent toutes deux lors de rapports sexuels et par contact avec du sang contaminé, notamment par le partage de matériel souillé par les utilisateurs de drogue injectables.

Ces deux types d’hépatite peuvent causer une cirrhose, puis le cancer du foie et rendre nécessaire une greffe hépatique; à lui seul, l’hépatite C est responsable de 26% des cirrhoses et 28% des cancers du foie.

S’il existe un vaccin contre l’hépatite A et B, il n’y en a pas contre l’hépatite C. Jusqu’à maintenant, les médicaments injectables utilisés contre cette dernière étaient très dispendieux, mal tolérés et n’avaient qu’une efficacité inférieure à 50%.

Mais depuis décembre 2013, on dispose de nouveaux traitements nettement plus performants.

Non seulement peuvent-ils se prendre par la bouche — et non par des injections — mais ils assurent la disparition de l’infection dans 90 à 100% des cas, alors que la résistance à ces antiviraux n’est pas encore apparue.

À l’heure actuelle, le traitement — qui dure trois mois — est constitué de la prise d’une association de deux médicaments  qui agissent sur le virus selon deux mécanismes différents.

Malheureusement, le prix de ces nouveaux produits est prohibitif. Au Canada, chaque comprimé de l’un d’entre eux — le sofosbuvir — coûte 700$ alors que chez nos voisins du Sud, c’est 933$ du comprimé. Chez eux, le coût total du traitement est de plus de 84 000$.

À travers le monde, on estime qu’environ 130 à 170 millions de personnes sont infectées de manière chronique par l’hépatite C.

À cause de leur longue, coûteuse et inefficace guerre contre la drogue, les États-Unis se sont retrouvés avec le plus important taux d’incarcération au monde.

D’environ 600 000 prisonniers en 1982, ce pays en a près de 2 250 000 trente ans plus tard, dont le sixième est porteur du virus de l’hépatite C.

Les relations homosexuelles plus ou moins consenties et l’usage clandestin de drogues dures ont créé un bassin de porteurs autant dans les prisons américaines que dans l’entourage de ceux qui ont été remis en liberté.

Si bien qu’entre 2,7 et 3,9 millions d’Américains sont aujourd’hui porteurs de cette maladie, à leur insu dans la moitié des cas. Dans ce pays, plus de personnes meurent de l’hépatite C que du Sida.

En raison des coûts extrêmement élevés des nouveaux médicaments destinés au traitement de l’hépatite C, si les États-Unis adoptaient une politique de dépistage et de traitement de tous ceux qui en sont infectées et qui passeront par le système correctionnel au cours des douze prochains mois, cela représenterait une dépense de 152 milliards$.

Mais puisqu’on n’acquiert pas d’immunité contre l’hépatite C, les prisonniers ainsi guéris seraient aussitôt contaminés en retournant à leurs vieilles habitudes à leur sortie de prison.

Au Canada, environ 350 000 personnes sont infectées par l’hépatite C, dont seulement 14% sont Québécois (en dépit du fait que nous représentons 23% de la population canadienne).

Cette sous-représentation découle probablement du fait que le système judiciaire québécois recoure à l’incarcération de manière moins importante que dans les provinces anglophones, notamment quant à la simple possession de marijuana (complètement tolérée au Québec).

Références :
Curing Chronic Hepatitis C — The Arc of a Medical Triumph
Hépatite A
Hépatite C
Hépatite C : l’épidémie silencieuse
Responding to Hepatitis C through the Criminal Justice System
Therapy for Hepatitis C — The Costs of Success

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Écrit par Jean-Pierre Martel