Le Covid-19 aux aéroports : la passoire canadienne

14 juin 2020

Dès l’annonce des tout premiers décès canadiens au Covid-19, je critiquais le gouvernement du pays pour n’avoir retenu aucune leçon de la pandémie du SRAS de 2003.

En particulier, je le blâmais de ne pas s’être équipé de scanneurs thermiques et de ne pas avoir institué de suivi des voyageurs symptomatiques qui entraient au pays comme le faisaient déjà les pays d’Extrême-Orient.

Depuis, rien n’a véritablement changé.

Finalement, la prise de température à l’aide de scanneurs thermiques débutera à la fin de ce mois-ci pour les voyageurs internationaux.

Ils ne seront pas testés à leur arrivée au pays. On compte sur les compagnies aériennes pour qu’elles testent les voyageurs à l’Étranger, en partance pour le Canada.

Dans la mesure où c’est ce même ministère qui a adopté en décembre dernier une Charte des voyageurs qui soustrait les transporteurs aériens des dispositions de la Loi québécoise de protection des consommateurs et qui leur permet de dérober des milliards$ aux voyageurs canadiens concernés par des vols annulés, on ne s’attend pas à ce que ce ministère sévisse si les compagnies devaient s’arranger pour ne pas respecter les mesures de sécurité fédérales. D’autant plus que les infractions surviendront hors du territoire national.

Ottawa ne fera pas de tests aléatoires à l’arrivée et on ne prévoit pas de pénalités pour les compagnies qui manqueront à leurs obligations.

Le ministère fédéral des Transports mettra donc de nouveau en application sa politique d’autorèglementation, celle déjà en vigueur dans le transport ferroviaire et qui a donné d’excellents résultats à Lac-Mégantic…

En réalité, les scanneurs thermiques étaient utiles pour déceler les voyageurs symptomatiques il y a des mois, à l’époque où on n’avait pas encore mis au point des tests qui permettent de vérifier la charge virale dans le nez et la gorge.

Ces tests permettent de déceler non seulement les personnes symptomatiques (comme le font les scanneurs) mais également les porteurs asymptomatiques et ceux qui le deviendront dès le lendemain.

Depuis le début de cette pandémie, on cite l’exemple des pays d’Extrême-Orient, celui de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, et celui de la Suède et de l’Allemagne.

Mais on ne parle jamais de la Grèce. Savez-vous combien il a eu de morts par million (mpm) d’habitants dans ce pays ?

Non pas 483 mpm comme en Suède ni 106 mpm comme en Allemagne, mais à peine 18 mpm. Vous avez bien lu; dix-huit.

Ce n’est pas aussi bien qu’en Océanie ou qu’en Extrême-Orient. Mais pour un pays d’Europe occidentale, c’est remarquable.

Alors c’est quoi la recette de la Grèce à ses aéroports ?

Depuis un mois, on fait des prélèvements dans le nez ou la gorge de tous les voyageurs. Pendant 24h, ils sont mis en quarantaine et deviennent libres dès le lendemain, à l’annonce de leurs résultats si négatifs.

Les autres, positifs, sont alors mis en quarantaine forcée pour quatorze jours.

Dans une entrevue à CNN, le président du pays, Kyriakos Mitsotakis, déclarait que depuis quatre jours, on a testé près de quatre-mille voyageurs (mille par jour) à l’aéroport d’Athènes et on a trouvé deux cas positifs, tous deux asymptomatiques.

Au Canada, ces deux voyageurs auraient passé au travers du filet de protection basé sur des scanneurs thermiques.

Pauvre passoire canadienne…

Références :
COVID-19 : un premier mort au Canada
Covid-19 : les prix citron à Ottawa et à la STM
En Grèce, les touristes à nouveau bienvenus à partir de lundi
L’armée restera au Québec et les thermomètres arrivent dans les aéroports
On GPS: Greece’s success with containing Covid-19 (vidéo)

Parus depuis :
La COVID-19 détectée dans des vols intérieurs et internationaux au Canada (2020-07-08)
Presque 70 vols commerciaux avec des cas confirmés de COVID-19 dans les dernières semaines (2020-08-28)
Ottawa a exempté une milliardaire américaine de l’obligation de la quarantaine (2020-09-17)
Des dizaines de passagers sanctionnés au Canada pour refus de porter un masque (2020-12-22)
Des faux tests négatifs de COVID-19 à 100$ pour les voyageurs canadiens (2021-01-09)
Quarantaine à l’hôtel : Ottawa ne connaît pas le nombre de contrevenants (2021-03-06)
Des taxis américains permettent aux Canadiens d’éviter la quarantaine à l’hôtel (2021-04-11)
Aucune sanction pour les voyageurs refusant la quarantaine à Montréal et Calgary (2021-05-04)
Des « lacunes importantes » dans le contrôle des voyageurs entrant au Canada (2021-12-09)

Sur le même sujet :
‘Close to 100% accuracy’: Helsinki airport uses sniffer dogs to detect Covid (2020-09-24)

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés au Covid-19, veuillez cliquer sur ceci

2 commentaires

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le déclin de la Grèce

16 mai 2010

C’est à partir de la Renaissance que l’Occident a dépassé la Chine et est devenue la civilisation dominante au Monde, tant au point de vue des sciences qu’au niveau technologique.

Or ce n’est pas une coïncidence; la Renaissance fut la redécouverte et la diffusion de la Civilisation gréco-romaine.

C’est cette redécouverte qui nous a fait sortir de la superstition et de la grande noirceur médiévale.

C’est le pouvoir de la raison qui nous a permis de découvrir les moyens de contrôler les épidémies qui décimaient des millions de personnes au Moyen-Âge et ce sont les inventions scientifiques qui nous ont apporté l’aisance et le confort dont nous profitons aujourd’hui.

Il est donc triste de voir la Grèce, un pays à qui nous devons tant, s’enliser dans la décadence.

On estime que 30 à 40% du produit intérieur brut de ce pays est représentée par le travail au noir, par les combines sous la table et les magouilles de toutes sortes. L’évasion fiscale y est généralisée, tout comme la corruption des agents du fisc. Or l’exemple vient de haut.

Pour 2009, le gouvernement conservateur grec sortant avait annoncé un déficit de 6% alors que le gouvernement socialiste, nouvellement élu, révélait qu’il était plutôt du double.

Cette révélation était une douce revanche pour les socialistes puisque cinq ans plus tôt, lorsque les conservateurs les avaient chassés du pouvoir, ceux-ci avaient révélé que les socialistes avaient maquillé les comptes publics et que les déficits publics de leurs prédécesseurs étaient deux fois supérieurs à ceux annoncés (en 2000, 4,1% vs 2% — en 2001 et 2002, 3,7% vs 1,4% — en 2003, 4,6% vs 1,7% — en 2004, 5,4% vs 1,2%).

Pour l’instant, les socialistes n’ont pas eu le temps de fouiller la période de 2005 à 2008 mais on croit généralement que la tradition de trafiquer les comptes publics est une grande constance de la politique grecque.

Mais il n’y a pas que l’État qui triche.

Quand le ministre des finances de ce pays a demandé à ses contrôleurs de vérifier la rémunération des médecins du plus chic quartier d’Athènes (Kolonaki), quelle ne fut pas sa surprise d’apprendre qu’une bonne partie de ceux qui menaient un train de vie fastueux ne déclaraient que des revenus de 10 000 à 15 000 euros par année. Son ministère a également publié une liste de onze médecins spécialistes qui ont déjà reçu une amende globale de 4,3 millions d’euros pour fraude fiscale.

D’après ce que j’ai cru comprendre, il y a une taxe sur les piscines en Grèce. Or le fisc vient d’utiliser Google Earth pour compter les piscines dans les quartiers huppés du nord d’Athènes. Le résultat ? Alors qu’il en y avait 324 déclarées officiellement, on en a dénombré cinquante fois plus, soit 16 974.

Entre 2000 et 2009, la Grèce a acheté pour 65,3 milliards d’euros de matériel militaire, soit l’équivalent de 5 930 euros par habitant. Entre 2005 et 2009, ce pays fut le cinquième plus important acheteur d’armes au Monde.

En somme, ce pays a plus de latitude qu’on pense généralement pour à la fois réduire ses dépenses (tout spécialement en équipement militaire) et pour aller chercher l’argent là où il se trouve, soit dans les poches de ses plus riches fraudeurs.

L’élément déclencheur de la crise grecque, c’est la décote — au rang d’investissement spéculatif — de la dette de ce pays par une importante agence de notation. Cette décode était souhaitable, voire nécessaire; il est inadmissible qu’un pays mente systématiquement et ce, pendant des années, sur l’importance de son déficit et tente ainsi de tromper ses créanciers.

La colère de ces derniers, qui a secoué toutes les bourses du Monde — grâce à l’effet multiplicateur des millions de petits menés suiveux qui jouent à la bourse sans savoir ce qu’ils font — a été suffisante pour ébranler la monnaie européenne et pour inciter les dirigeants politiques européens à faire en sorte que leurs contribuables à eux se portent garants de cette dette (et possiblement la paient un jour de leurs taxes).

Références :
En Grèce, fraude et corruption à tous les étages
Grèce : Georges Papandréou veut enrayer la fraude fiscale généralisée
Grèce : hausse du chômage et chasse au gaspi
Les avantages de la crise grecque
Payer l’impôt, c’est être un con
Trends in international arms transfers, 2009

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Écrit par Jean-Pierre Martel