Le Fonds des générations ou Quand l’État spécule à la bourse

20 juillet 2014
© 2008 — Wikipedia

Historique

Le Fonds des générations a été créé en 2006 par le gouvernement Charest. Depuis ce temps, une partie des revenus de l’État y sont déposés annuellement.

Cette contribution sera de 1,3 milliards$ en 2014-5 et de 1,58 milliards$ en 2015-6.

Puisque l’équilibre budgétaire du gouvernement québécois a été rompu à la suite de la Grande récession de 2007 et n’a pas été rétabli depuis, la contribution au Fonds des générations accentue en apparence le solde déficitaire du budget du Québec.

À titre d’exemple, sans la contribution prévue au fonds de 1,3 milliards$ en 2014-5, ce déficit ne serait que d’un milliard$ au lieu de 2,35 milliards$.

Dans un fonds semblable, l’Alberta dépose une partie de ses surplus budgétaires. Dans le sien, la Norvège dépose une partie des revenus pétroliers.

Dans ces deux cas, il s’agit de gouvernements qui disposent de surplus budgétaires et qui en épargnent une partie dans le but d’avoir les moyens de faire face à des temps moins favorables, le cas échéant.

Le Québec est, au contraire, en situation de déficit budgétaire. On peut donc se demander quelle est la logique derrière la création de ce fonds.

En effet, au lieu de payer ses dettes, le Québec accentue son déficit accumulé en contribuant à ce fonds.

Motifs de la création du Fonds des générations

En 2006, au moment de la création de ce fonds, nous étions à la fin d’un long cycle boursier hautement spéculatif où tout investissement à la bourse rapportait davantage que les taux d’intérêt des bonds du Trésor.

En d’autres mots, si dix ans plus tôt, le gouvernement du Québec avait emprunté des milliards$ de plus afin de jouer à la bourse, cet investissement aurait rapporté davantage que le taux de ses emprunts. Bref, le Québec aurait fait de l’argent.

C’est à partir de ce constat simpliste que le gouvernement Charest a décidé de la création du Fonds des générations.

La réalité

En 2006-7, le fonds rapportait 0,99% alors que le taux de l’intérêt moyen pondéré de la dette coûtait 5,46%. En 2007-8, c’était respectivement 1,6% vs 5,04%.

En 2008-9, après l’éclatement de la bulle immobilière et la chute des marchés boursiers, c’était -21,88% vs +4,16%.

L’hebdomadaire Les Affaires écrivait en 2010 : “Le gouvernement a fait exactement la même chose qu’une famille qui, au lieu de rembourser ses dettes avec les allocations familiales qu’elle reçoit, place cet argent à la Bourse en espérant obtenir un rendement supérieur à l’intérêt payé sur ses dettes. S’il est chanceux, il fera un gain net. S’il perd de l’argent à la Bourse, il essuiera une perte.

De ces temps-ci, l’indice Dow Jones atteint des niveaux records (au-delà de 17 000 points). Conséquemment, il est à prévoir que le gouvernement libéral profitera de l’appréciation aussi importante que soudaine de la valeur du Fonds des générations pour justifier son existence.

Au contraire, le gouvernement actuel serait mieux avisé de profiter cette nouvelle bulle spéculative pour liquider ce fonds pendant qu’il en est encore temps et appliquer la totalité des sommes récupérées au remboursement de la dette.

À mon avis, il est inacceptable que l’État spécule avec l’argent des contribuables. Les sommets boursiers actuels lui fournissent une excellente occasion de mettre fin à cette anomalie. S’il néglige de le faire, il portera l’odieux de ce qui surviendra.

Références :
Fonds des générations: un travail de (très) longue haleine
La Bourse est-elle en train de perdre la boule?
Les malheurs du Fonds des générations

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le Québec doit faire son deuil de l’amiante

15 avril 2011
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L’amiante cause des cancers broncho-pulmonaires, le cancer de la plèvre ou, plus rarement, du péritoine, et des cancers digestifs. Toutes les variétés d’amiante sont cancérigènes, que ce soit la chrysotile (dont les gisements du Québec sont riches) ou la crocidolite (ou amiante bleu, que l’on rencontre au Brésil, entre autres).

Comme pour toute autre substance cancérigène, il n’existe pas de seuil en dessous duquel la présence de fibres d’amiante est sécuritaire. Même les épouses des travailleurs de l’amiante ont un risque augmenté de faire un mésothéliome, probablement parce qu’elles s’occupent du soin des vêtements du mari imprégnés de poussières d’amiante.

La nocivité de l’amiante est augmentée par l’exposition à d’autres agents cancérigènes. En comparaison avec un non-fumeur non exposé à ce minerai, le risque de cancer du poumon est multiplié par 5 pour le travailleur exposé aux taux « sécuritaires » d’amiante, par 10 pour le fumeur, et par 50 pour le travailleur de l’amiante qui fume.

Dans les villes minières québécoises où l’activité économique dépendait de l’extraction de l’amiante, les médecins subissaient des pressions pour que les mortalités soient simplement diagnostiqués comme des victimes de cancer (sans précision de la cause) afin de ne pas nuire au développement économique de leur région.

La Confédération des syndicats nationaux (CSN) a du faire venir des médecins du Mont Sinaï Hospital pour faire pression sur la CSST afin qu’elle indemnise correctement les mineurs atteints d’amiantose.

Selon l’Association médicale canadienne, le Canada est la seule démocratie occidentale à s’être constamment opposée aux efforts internationaux visant à réglementer le commerce mondial de l’amiante en manipulant honteusement les connaissances scientifiques.

De nos jours, l’amiante est bannie dans de nombreux pays et son utilisation est limitée à des usages très restreints : par exemple, l’isolation thermique des navettes spatiales et véhicules orbitaux de la NASA.

Le Québec est encore aujourd’hui le quatrième producteur mondial d’amiante, derrière la Russie, le Kazakhstan, et la Chine, mais devant le Brésil.

Il y a deux jours, le ministre du Développement économique du Québec annonçait que le gouvernement Charest acceptait le projet de relance de la mine Jeffrey d’Asbestos et qu’il accorde une garantie de prêt de 58 millions de dollars nécessaire à la relance des activités. Quelque 425 emplois seront créés à Asbestos avec la relance de Mine Jeffrey.

L’extraction de ce minerai n’a aucun avenir. Inévitablement, Mine Jeffrey cessera ses opérations et les contribuables québécois auront à payer cette garantie de prêt. De plus, peu importe comment l’État dépense, cela crée des emplois. Le choix n’est donc pas entre créer des emplois ou non, mais de créer de l’emploi dans l’extraction de l’amiante ou d’en créer autrement.

Ce qui nous amène à la question fondamentale : Ne devrait-on pas laisser à d’autres pays le soin d’extraire ce minerai dangereux et utiliser plutôt l’argent de nos impôts à soutenir les entreprises tournées vers des technologies d’avenir ?

Cette position est partagée par la Confédération des syndicats nationaux (CSN), dont la présidente éclarait récemment : « La vie d’un travailleur (…) ne peut être sacrifié au nom de l’emploi.»

Références :
Amiante
L’amiante a tué 373 travailleurs entre 2007 et 2010
Mine Jeffrey – Clément Gignac défend son choix
Mine Jeffrey – Québec est critiqué
Québec d’accord pour relancer la mine d’amiante Jeffrey

Détails techniques de la photo : Panasonic GH1 + tube d’espacement de 16 mm + objectif Voigtländer 50mm f/1,1 — 1/13 sec. — F/16,0 — ISO 800 — 50 mm.

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| 2003-2012 (années Charest), Politique québécoise | Mots-clés : , | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel