Les bactéries pathogènes retrouvées dans le bœuf haché sont d’origine intestinale.
Il a y très longtemps, lorsqu’une cargaison de bœufs arrivait à l’abattoir, elle était traitée immédiatement afin de ne pas faire attendre le fournisseur.
Depuis, on a trouvé une manière plus efficace d’arriver au même résultat; c’est d’aménager d’immenses enclos autour des usines, de manière à y accumuler les animaux. Cette solution a l’avantage d’éviter non seulement l’attente du fournisseur — qui décharge immédiatement sa cargaison dans l’enclos qui lui est attribué — mais également celle de l’usine qui n’est jamais paralysée par une livraison qui arrive en retard sur l’heure prévue.
Très tôt, le sol de ces enclos devient une boue formée de terre, d’urine, et de matières fécales. Lorsque les animaux — fatigués par un long voyage ou par une attente interminable au soleil — décident de s’y étendre, leur fourrure s’imprègne de la soupe microbienne à leurs pieds.
Lorsque vient son tour d’être abattu, l’animal est amené dans l’usine où il est d’abord assommé à l’aide d’une décharge électrique (électronarcose) avant qu’être égorgé. Soulevé par les pattes, l’animal suspendu est « lavé » à la grande eau d’un boyau d’arrosage avant d’être dépecé.
Mais contrairement au porc, le bœuf est très velu. Le jet d’eau puissant déloge la grande majorité des matières fécales mais laisse des milliards de bactéries dans la fourrure du bovidé. Avant d’être écorché, toutes les coupes à la scie électrique — afin d’ouvrir l’animal pour lui retirer ses viscères ou afin de lui retirer cette fourrure — ont pour effet de pousser des bactéries à la surface de la viande.
Lorsque les parties moins nobles de l’animal sont transformées en viande hachée, ces bactéries se mêlent à la nourriture. D’où l’obligation de bien cuire la viande hachée industrielle.
Évidemment, on pourrait raser l’animal avant le nettoyage mais ce serait une solution longue et coûteuse. On pourrait également tremper la carcasse écorchée de l’animal dans un bassin d’eau bouillante mais cela cuirait la surface d’une partie de la viande qui perdrait alors l’apparence de la viande crue.
On pourrait aussi faire en sorte que le sol des enclos soit surélevé et nettoyé automatiquement des matières fécales : on n’empêcherait pas la contamination dans les camions de livraison (à bord desquels les animaux voyagent sur un peu de paille) mais celle, beaucoup plus importante, des enclos d’usines d’abattage.
Depuis l’incident du bœuf haché de XL Foods contaminée par des bactéries intestinales, des voix se font entendre en faveur de l’irradiation de la viande par des rayons gamma.
Cela se fait déjà pour d’autres aliments, mais pas pour la viande. En principe, l’idée est astucieuse. Mais il est à craindre que cette solution de facilité, associée à la diminution des inspecteurs fédéraux, justifie un abaissement des normes sanitaires des abattoirs puisque même la contamination grossière sera compensée par l’irradiation. Seul un petit « je-ne-sais-quoi » dans le goût du bœuf, présent en dépit de la cuisson, pourrait nous faire réaliser les conséquences de l’abaissement de ces normes sanitaires.
Lorsqu’on comprend les causes de la contamination à l’usine de XL Foods, on se rend compte que de tels incidents sont inévitables et sont appelés à se répéter tant que le mode de fonctionnement de tels usines ne sera pas remis en question.
D’ici là, tout bœuf haché ne devrait être consommé qu’après une cuisson complète. Quant aux tartares de bœuf, même dans les plus grands restaurants, ce sera toujours une manière élégante et savoureuse de jouer à la roulette russe.