Le Château Dufresne

Publié le 21 octobre 2012 | Temps de lecture : 4 minutes


 
Historique

À l’époque de la construction du Château Dufresne (de 1915 à 1918), cette partie de l’île de Montréal constituait une municipalité indépendante connue sous le nom d’Hochelaga (de 1875 à 1883), puis de Maisonneuve (de 1883 à 1918).

Équivalent de ce qu’on appelle un hôtel particulier à Paris, cet édifice abrite deux logis jumelés et symétriques, séparés par un mur mitoyen, soit ceux de Marius et d’Oscar Dufresne. Ceux-ci étaient fils de l’entrepreneur Thomas Dufresne, qui avait fait fortune dans la fabrication de chaussures.

Marius Dufresne était architecte et un industriel bien connu. En tant qu’architecte, on lui doit notamment le Marché Maisonneuve, le bain Morgan (dont la façade est inspirée de la Central Station de New York) et la caserne Letourneux (inspirée du style de Frank Lloyd Wright). Avec l’Hôtel de ville (devenu bibliothèque de quartier depuis), ces réalisations visaient à faire de Maisonneuve une cité modèle.

Après la construction ruineuse de ces édifices emblématiques et après l’abolition complète de taxe offerte aux industries qui voudraient bien s’installer chez elle — ce qui rappelle les ambitions du Plan Nord québécois — la municipalité de Maisonneuve se retrouva au bord de la faillite et se résigna à l’annexion à Montréal en 1918.

Oscar Dufresne était l’ainé de la famille et à ce titre, succéda à son père à la tête de Dufresne & Locke, un fabricant de chaussures établi depuis 1900 dans Maisonneuve. En 1909, la production annuelle de la compagnie était estimée à plus d’un demi-million de paires de souliers. Oscar Dufresne fut également trésorier de la municipalité de Maisonneuve et participa à la création du journal Le Devoir.

Avec Marius, il fonde la Dufresne Construction Company puis, en 1938, la Dufresne Engineering Company. Celle-ci construisit le pont Pie-IX et le pont Viau (appelé aussi pont Ahuntsic) qui relient Laval à Montréal. Cette compagnie participa également à la construction du Pont Jacques-Cartier.

Un insolent manifeste architectural

Conçu par Marius Dufresne en collaboration avec l’architecte lorrain Jules Renard, le Château Dufresne est une double résidence construite en pleine guerre mondiale alors que l’effort de guerre mettait en péril l’approvisionnement en matériaux.

L’édifice est en béton revêtu de pierre calcaire lisse importée d’Indiana (aux États-Unis). Inspirée du Petit Trianon de Versailles, sa façade est ornée de huit colonnes ioniques ainsi qu’une balustrade sur le toit.

Au total, le château a coûté un million de dollars, soit une somme colossale pour l’époque. On ne peut pas imaginer l’impact de ce nouvel édifice, typiquement français, dans le paysage urbain de Montréal, dominé jusque-là par les grandes demeures bourgeoises de l’Ouest de la ville. En comparaison, ces vieilles maisons victoriennes semblaient dater soudainement d’une époque révolue.

La décoration intérieure

L’intérieur est somptueux. Habité par Marius, le coté oriental de l’édifice est garni du mobilier d’origine ayant appartenu à l’architecte. Le côté occidental, habité par son frère et l’épouse de celui-ci, est présentement dépourvu de meuble. Toutefois c’est dans cette partie qu’on trouve les plus belles fresques de la maison, dues au maitre italo-canadien Guido Nincheri.

Les pièces de séjour sont traitées chacune dans un style différent : salon d’inspiration Louis-XV ou Louis-XVI, salle à manger de style Renaissance italienne, bibliothèque néo-gothique ou Tudor, fumoir au décor arabisant.

Le plafond à caissons du salon (que l’on peut voir de 1:55 à 2:04 dans la vidéo) a reçu quatorze toiles illustrant les amours d’Orphée et d’Eurydice. Les six espaces triangulaires du plafond d’une des bibliothèques (de 2:05 à 2:10) sont décorés d’allégories du Savoir. Quant au petit boudoir (de 2:15 à 2:51), il est orné de douze panneaux étroits qui, avec le plafond, sont placés sous le thème du Temps qui fuit.

La maison comprenait alors toutes les commodités du jour : électricité, eau chaude, chauffage central, aspirateur central, monte-plats et garage.

Références :
Château Dufresne
Hochelaga-Maisonneuve
Musée du Château Dufresne
Résidence Dufresne

Détails techniques de la vidéo : Appareil photo Olympus OM-D e-m5, objectif Lumix 12-35mm F/2,8.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’exposition « Venise : de souveraine des mers à capitale de la culture »

Publié le 15 octobre 2012 | Temps de lecture : 2 minutes


 
Jusqu’au 28 octobre prochain, une exposition temporaire au Château Dufresne présente sommairement l’histoire de Venise, de ses débuts jusqu’à son unification à l’Italie en 1866. À cela s’ajoute une deuxième section, consacrée aux arts à Venise (particulièrement le verre du Murano) ainsi qu’à ses fêtes populaires (dont le célèbre carnaval).

Les objets présentés sont des toiles, des imprimés (authentiques ou des fac-similés), des costumes, des masques, de l’argenterie, des verres et des bijoux.

Puisque cette ville fut déjà la capitale européenne de l’imprimerie, l’exposition fait une large place à des livres de la Renaissance italienne.

Les amateurs montréalais de typographie sont donc gâtés ces temps-ci puisque l’exposition au Château Dufresne complète celle — toujours en cours jusqu’au 27 janvier 2013 à la Grande bibliothèque — relativement aux imprimés européens de la Renaissance.

Pour le bénéfice des lecteurs qui seraient dans l’impossibilité de visiter l’exposition au Château Dufresne, la brève vidéo ci-dessus en donne un aperçu.

Une des pièces les plus extraordinaires exposées est une carte de l’Amérique du Nord dessinée par le vénitien Vincenzo-Maria Coronelli (1650–1718). Cette carte complète celle de Terre-Neuve publiée la semaine dernière sur ce blogue.

Carte de l’Amérique du Nord, réalisée en 1689 (© — Musée Stewart)

Pour télécharger une version à haute résolution (4544 x 3276 pixels) de la carte ci-dessus, veuillez cliquer sur ceci

Complément de lecture : La naissance des italiques

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Écrit par Jean-Pierre Martel