Étudiants étrangers : les préférences canadiennes

1 avril 2022

En 2017, Ottawa a autorisé 64 % des demandes de permis d’études d’étudiants étrangers au Québec et 69 % des demandes pour le reste du pays.

En 2021, le taux d’acceptation était descendu à 39 % au Québec et à 53 % pour le reste du pays.

Le réseau collégial québécois a été beaucoup plus impacté par cette diminution que le réseau universitaire.

Lorsqu’on étudie attentivement les données à ce sujet, on découvre que les chances d’être acceptés sont beaucoup plus grandes dans le cas des demandes qui proviennent de pays peuplés de gens à la peau pâle, contrairement aux demandes qui proviennent de pays habités par des gens à la peau sombre ou olivâtre.

Le taux d’acceptation des demandes concernant des étudiants d’Algérie, de la République démocratique du Congo, du Togo, du Sénégal ou du Cameroun est d’environ 20 %.

Par contre, les demandes faites de France, de Grande-Bretagne ou d’Allemagne sont presque toutes acceptées.

Le ministère fédéral de l’Immigration se défend des accusations de racisme en disant que depuis mars 2018, tout est décidé par ordinateur. En effet, depuis cette date, un système informatique, appelé Chinook, a été mis en place.

En somme, dit Ottawa, je n’y suis pour rien; c’est de la faute de l’ordinateur.

Sur quels algorithmes le logiciel se base-t-il ? C’est confidentiel. Quels sont les indicateurs de risque auxquels les fonctionnaires doivent répondre pour alimenter le système ? C’est confidentiel.

Les rapports générés par Chinook et les notes de travail des agents sont détruits. Dans le dossier du requérant, seuls sont conservés les documents échangés entre lui et le ministère fédéral de l’Immigration.

Ce qui est moins confidentiel, c’est le résultat.

Il y a deux jours, Radio-Canada révélait que le pourcentage des demandes acceptées par Ottawa était de 50 % pour les étudiants étrangers à l’université Laval et de 92 % (!!!) pour ceux à l’université McGill.

Il est courant que les diplômés étrangers les plus brillants fassent une demande d’immigration à la fin de leurs études que le Canada s’empresse, à juste titre, d’accepter.

Par conséquent, on doit réaliser que les politiques migratoires fédérales sont un des nombreux moyens utilisés par Ottawa de favoriser la colonisation anglaise au Québec et nuire au rayonnement international du Québec dans la francophonie.

Voilà le prix du fédéralisme.

Références :
Comment des étudiants étrangers francophones sont refusés par Ottawa
Rejet des étudiants francophones : le ministre du Travail du Québec interpellé

Parus depuis :
Visas étudiants refusés : un rapport fédéral évoque de possibles « préjugés raciaux » (2022-06-04)
Rentrée ratée pour Immigration Canada (2022-08-29)
Immigration francophone – Ottawa doit revoir sa cible à la hausse, dit le ministre Roberge (2022-12-06)
Hausse de l’immigration francophone – La cohésion sociale en dépend, selon le ministre Fraser (2022-12-07)
Permis d’études pour étudiants étrangers : la moitié des demandes pour le Québec refusées par Ottawa (2023-05-18)

Complément de lecture : Visas de visiteur : des délais qui font mal à Montréal (2023-06-14)

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés au prix que nous payons pour appartenir au Canada, veuillez cliquer sur ceci.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le multiculturalisme et la guerre

31 mars 2022

L’intolérance ethnique

Le multiculturalisme est le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes. Ce que ces sociétés voient en premier lieu dans le citoyen, ce n’est pas la personne, mais son appartenance ethnique ou raciale; d’abord et avant tout, il y est vu comme le représentant plus ou moins fidèle de son ethnie.

De nos jours, partout en Amérique du Nord, les commerces qui vendent des produits russes ou ukrainiens sont la cible de menaces et de vandalisme.

Au début du mois, l’Orchestre symphonique de Montréal a annulé tous les concerts du pianiste russe Alexander Malofeev, âgé de vingt ans.

Non pas parce qu’il utiliserait ses concerts pour faire de la propagande russe (ce qu’il ne fait pas). Ni parce qu’à titre privé, il utiliserait les médias sociaux pour défendre la guerre de la Russie en Ukraine (ce qu’il ne fait pas non plus).

Non; on a annulé ses concerts parce qu’il appartient à la ‘mauvaise ethnie’, à celle qu’on veut punir pour l’inciter à renverser des dirigeants que nous n’aimons pas.

À Vancouver, ses concerts ont été annulés en raison des craintes de manifestations de la part de partisans de la culture de l’annulation.

Déjà, un peu partout au Canada, on hésite à programmer des œuvres de compositeurs russes par peur des réactions d’internautes qui, de toute manière, n’assistent jamais à ces concerts de musique classique, jugée ennuyeuse.

La culture étatique de l’annulation

Dans notre pays, la culture est un domaine de compétence constitutionnelle exclusive des provinces. Pour contourner la Canadian constitution, Ottawa utilise son pouvoir de dépenser pour régenter la vie culturelle du pays.

Ce matin, on apprend que le ministre du Patrimoine canadien — c’est le nom du ministre de la Culture au fédéral — mettra fin aux subventions et contributions versées à tous ceux qui collaborent avec des artistes liés à la Russie et à la Biélorussie.

La directive ministérielle précise : “Nous vous demandons d’examiner et d’évaluer vos programmes actuels et vos liens possibles avec des partenaires étatiques russes ou bélarusses (sic).

Le problème, c’est qu’en Russie comme partout en Occident, les entreprises culturelles importantes sont habituellement subventionnées par l’État. Et lorsqu’elles ne le sont pas, c’est qu’elles dépendent financièrement d’oligarques amis du régime.

Hésitant à saisir les entreprises pétrolières canadiennes qui sont totalement ou partiellement la propriété de milliardaires russes, le Canada s’empresse de sévir contre des artistes, c’est-à-dire des gens qui, en Russie comme ailleurs, crèvent généralement de faim.

Se préparer à la guerre contre la Russie

Dans les années 1930, c’est seulement après qu’on ait fait disparaitre l’art ‘dégénéré’ juif des bibliothèques, des musées et des salles de spectacles allemands, qu’on a pu entreprendre la Solution finale; éradiquer les Juifs de la surface du globe.

Car la première étape de toute guerre, c’est la propagande haineuse; il faut diaboliser l’ennemi afin de supprimer toute hésitation à le tuer.

Voilà pourquoi toute campagne de détestation à l’égard d’un pays est le signe prémonitoire d’une guerre.

Après une première course à l’armement déclenchée par l’Otan en 2014, cette organisation de coopération militaire en débute une deuxième à la faveur de la guerre russo-ukrainienne.

Pourtant, la puissance militaire de l’Otan est déjà douze à quinze fois supérieure à la puissance militaire russe. Du coup, le risque de voir la Russie déclarer la guerre à l’Occident est nul à court et à moyen terme.

Par ailleurs, l’Histoire nous enseigne que la rivalité entre deux puissances hégémoniques les conduit inéluctablement à la guerre, déclenchée par celle qui croit avoir plus de chances de l’emporter.

C’est seulement à l’issue de la Deuxième Guerre mondiale que la France et l’Allemagne ont découvert le moyen efficace de prévenir leurs conflits; par l’intégration économique.

Au contraire, en s’engageant à couper à moyen terme toutes les relations économiques avec la Russie, on s’assure qu’une guerre qui aurait lieu à partir de ce moment-là entrainerait le moins possible d’inconvénients pour nous.

Et en supprimant l’exposition des populations occidentales à la culture russe, on prépare leur consentement à une telle guerre qui, dans leur esprit, tuerait un peuple qui ne mérite pas d’exister.

À l’exclusion des belligérants, les pays qui ont recours ces jours-ci à la rhétorique la plus violente sont les pays anglo-saxons.

Cela n’est pas surprenant; le multiculturalisme, idéologie officielle de ces pays, facilite le racisme et l’intolérance ethnique puisque leur vision du monde passe par le prisme de la race et de l’ethnie.

Références :
Doubler les dépenses militaires et la dénaturation du Canada
La guerre en Ukraine, point de départ de menaces contre des commerces à Toronto
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes
L’engrenage ukrainien
Liens avec la Russie : Ottawa menace de couper le financement des artistes
L’OSM annonce le retrait du pianiste russe Alexander Malofeev
Ottawa ne veut pas dire s’il a gelé des actifs russes au Canada

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés à la guerre russo-ukrainienne, veuillez cliquer sur ceci.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La chasse à l’Autochtone

15 novembre 2021

Introduction

Tout comme pour le racisme tout court, il existe différents degrés de sévérité dans le racisme systémique.

Celui-ci est patent dans le refus du gouvernement québécois de mettre en tutelle le service de police de la ville de Repentigny, dont le racisme, qui dure depuis des années, est une gêne nationale.

De plus, lorsqu’un enfant Autochtone tombe à ce point malade qu’il faut d’urgence le transporter par avion à un hôpital situé dans le Sud, le Québec est la seule province canadienne qui refuse que l’enfant soit accompagné de sa mère ou d’un autre parent.

Mais il y a pire. Parce qu’il y a toujours pire…

Le racisme colonial anglais

Il y eut une époque où les colons anglais pratiquaient la chasse à l’Autochtone. Comme on pratique, de nos jours, la chasse à l’orignal (l’élan d’Amérique).

Le génocide réussi des Béothuks à Terre-Neuve (devenu province canadienne en 1949) est le résultat de cette chasse.

Elle fut également pratiquée aux États-Unis.

De 1675 à 1760, les gouvernements de la Nouvelle-Angleterre ont émis 69 décrets accordant une prime équivalente à douze-mille dollars d’aujourd’hui pour le scalp d’un Autochtone mâle, la moitié pour le scalp d’une Autochtone et un peu moins pour celui d’un enfant.

Une cinquantaine d’autres décrets ont été promulgués ailleurs aux États-Unis, jusqu’aussi récemment que 1885.

En principe, la prime était accordée uniquement pour l’homicide d’un Autochtone issu d’une des nombreuses nations hostiles. Mais comme il était impossible de distinguer, par exemple, le scalp d’un ‘bon’ Iroquois d’un ‘mauvais’ Algonquin, n’importe quel scalp était récompensé.

Cette récompense équivalait à la solde d’un soldat anglais pour deux ans de service.

Parfois, quand un groupe de colons exterminaient tout un village, en plus de la prime, on leur accordait le territoire occupé par les scalpés afin qu’ils puissent s’y établir. C’est ainsi que des milliers d’acres de terres en Nouvelle-Angleterre sont devenus des territoires ‘non cédés’.

En 1755, l’honorable Spencer Phips, en sa qualité de lieutenant-gouverneur de la baie du Massachusetts, promulguait un décret qui déclarait la nation des Penobscots comme cible d’extermination et ordonnait aux sujets de sa Majesté de saisir toutes les occasions de traquer, de capturer, de tuer, et de les éradiquer tous.

Une recherche en cours dans les archives coloniales de la Nouvelle-Angleterre a documenté jusqu’ici 375 primes versées à la suite de 94 réclamations, représentant des déboursés équivalents à plus de quatre-millions de dollars d’aujourd’hui.

Dès 1790, une fois par décennie, le recensement effectué par le gouvernement fédéral américain servait, entre autres, au décompte national des esclaves.

En 1860, on ajouta l’item ‘Indians’ au choix de réponses à la question qui portait sur la ‘race’ du citoyen afin de documenter le génocide en cours des Autochtones du pays.

Références :
Ces cowboys de Repentigny qui déshonorent le métier de policier
Le génocide des Béothuks à Terre-Neuve
Le racisme systémique en mode binaire
Le transport aérien d’urgence d’enfants autochtones malades : la cruauté de l’État québécois
L’obsession américaine de la ‘race’
New England once hunted and killed humans for money. We’re descendants of the survivors

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’aspiration populaire au changement en temps de pandémie

11 novembre 2021

Introduction

La firme de sondage Pew Research Center a publié le 21 octobre dernier les résultats d’une consultation téléphonique effectuée du 1er au 7 février 2021 auprès de 2 596 Américains et du 12 mars au 6 mai 2021 auprès de 16 254 adultes répartis dans seize autres pays développés.

Globalement

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Une médiane se définit la valeur centrale séparant une population en deux parties égales.

Dans ce cas-ci, dans huit pays étudiés, moins de 56 % des gens souhaitent que le système politique de leur pays soit réformé de manière importante ou du tout au tout. Dans neuf autres pays, ce souhait est partagé par 56 % de la population ou plus.

Dans les 17 pays analysés, ceux qui souhaitent des changements majeurs sont majoritairement pessimistes quant à la probabilité que cela arrive.

Aux États-Unis et en Corée du Sud, neuf personnes sur dix perçoivent des conflits importants entre les partisans de différentes formations politiques. Cette perception est associée à une insatisfaction quant au fonctionnement de la démocratie et au désir de réformes politiques.

Pour ce qui est d’une réforme économique majeure, la médiane est de 51 %.

Selon les sondages successifs de la Pew Research Center réalisés depuis plus d’une décennie, le désir de réforme économique est le plus important dans le sud de l’Europe.

Les peuples insatisfaits de la situation économique ont davantage tendance à être critiques quant au fonctionnement de la démocratie dans leur pays et du coup, sont davantage portés à y vouloir des réformes politiques importantes.

De la même manière, les parents pessimistes quant à l’avenir économique de leurs enfants sont particulièrement nombreux à souhaiter des réformes économiques majeures.

Le désir de changement est moins vif à l’égard du système national de santé. L’insatisfaction à ce sujet est la plus élevée en Grèce et aux États-Unis.

Les gens qui croient que leur gouvernement a mal géré la crise sanitaire causée par le Covid-19 sont aussi plus nombreux à être insatisfaits du fonctionnement démocratique de leur pays et à espérer des réformes politiques importantes.

De plus, ils sont également plus nombreux à vouloir une réforme majeure du système de Santé. Ce qui ne signifie pas qu’ils soient critiques envers le personnel soignant.

Le désir de réformes politiques

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En analysant plus finement l’aspiration au changement politique, on constate que la médiane des pays est de 38 % quant à des changements majeurs et de 23 % quant au désir d’une réforme complète.

Le paroxysme de la volonté révolutionnaire se trouve en Espagne, en Corée du Sud, aux États-Unis et en Italie. Aux États-Unis, le désir d’une réforme complète est de 47 % chez les partisans démocrates et de 38 % chez les partisans républicains.

Dans ce pays, 85 % de la population souhaitent des changements majeurs ou draconiens : aux deux tiers, ils sont convaincus que cela n’arrivera pas.

En Italie, où le désir de réforme est encore plus élevé (à 89 %), ce pessimiste atteint plus des quatre cinquièmes de ceux qui veulent des changements importants.

À l’opposé, la satisfaction à l’égard du statuquo est maximale en Nouvelle-Zélande et en Suède.

Le désir de réformes économiques

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En Italie, en Grèce et en Espagne, une forte proportion de citoyens estiment que la situation économique de leur pays est mauvaise. Cette opinion est associée, évidemment, au désir de réformes économiques importantes.

Aux États-Unis, 80 % des Démocrates estiment que le système économique de leur pays a besoin de changements majeurs. Cet avis est partagé par 50 % des Républicains.

Le désir de réformes du système de santé

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C’est aux États-Unis et en Grèce qu’on trouve le plus de gens qui souhaitent des changements majeurs de leur système de santé.

Aux États-Unis, chez les partisans démocrates, 39 % souhaitent une réforme complète et 47 % veulent des changements majeurs du système de santé. Chez les partisans républicains, ces pourcentages sont respectivement de 20 % et de 43 %.

Au Canada, en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Corée du Sud, les vieillards sont plus nombreux à estimer que leur système de santé devrait être l’objet de réformes importantes (sans doute en raison de la mortalité élevée due au Covid-19 dans les hospices).

Aux États-Unis, ce sont des adultes plus jeunes qui croient le plus en la nécessité d’une réforme des soins de santé.

Le respect des libertés individuelles

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Au cours de la pandémie actuelle, beaucoup de gouvernements nationaux ou locaux ont gouverné par décret. Ce qui leur a permis d’exercer de larges pouvoirs.

De manière générale, les deux tiers des gens sont d’avis que leur gouvernement n’a pas abusé des pouvoirs qu’il s’est arrogés.

Dans les pays d’Extrême-Orient et d’Océanie, les citoyens sont les plus nombreux à partager cet avis alors que, paradoxalement, c’est dans ces pays où les mesures sanitaires ont été les plus draconiennes.

Dans le cas particulier de la France, la proportion des citoyens qui croient que l’État ne respecte pas les libertés individuelles est passée de 22 % en 2008, à 36 % en 2014, à 33 % en 2017 et à 41 % cette année.

En Allemagne, aux États-Unis, en Italie, en Suède, en Corée du Sud et en Espagne, l’avis que l’État respecte les libertés individuelles augmente avec le niveau de scolarité.

Dans tous les pays, les partisans du parti qui forme le gouvernement sont davantage d’avis qu’il n’abuse pas de ses pouvoirs.

L’écart est le plus important en Grèce; 85 % des partisans du parti au pouvoir sont de cet avis alors que ce pourcentage tombe à 35 % chez ceux qui appuient des partis d’opposition.

Plus les gens croient leur gouvernement respectueux des libertés individuelles, plus ils se disent satisfaits de leur système démocratique.

Référence :
Citizens in Advanced Economies Want Signifiant Changes to Their Political Systems

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La propagande haineuse contre les Autochtones doit cesser

10 novembre 2021

En 1623, lorsque Gabriel Sagard se rend en Huronie — située à l’époque au cœur de la région des Grands Lacs — il est accompagné de deux autres frères récollets, dont Nicolas Viel.

À son retour vers Québec en 1625, le canoë du frère Viel chavire dans les rapides de la rivière des Prairies où il se noie.

En raison de sa rivalité avec les Hurons-Wendats, le chef algonquin Tessouat a fait répandre dès 1634 la rumeur selon laquelle cet accident aurait été volontaire. En d’autres mots, qu’il s’agirait d’un homicide commis par les Hurons-Wendats.

Cela est improbable pour deux raisons. Premièrement, au cours de son séjour contemporain en Huronie, Gabriel Sagard (confrère de Viel) décrit l’extraordinaire hospitalité dont il fut l’objet. Et deuxièmement, les Hurons-Wendats ont ramenés sains et saufs les deux autres confrères de Nicolas Viel, Gabriel Sagard et Joseph Le Caron.

Malgré cela, l’accusation du chef Tessouat fut reprise par le père jésuite Paul Le Jeune dans son récit de voyage de 1634.

Le monument au frère Viel
Socle du monument au frère Viel
Socle du monument à Ahuntsic

Dans le quartier montréalais d’Ahuntsic, devant l’église de la Visitation, on peut voir deux monuments dont le socle reproduit un extrait du récit de voyage du jésuite Paul Le Jeune.

Cet extrait pue la haine raciale.

D’autre part, le 28 octobre dernier, on apprenait l’intention du pape François de visiter au Canada dans le cadre d’un processus de guérison et de réconciliation avec les victimes des pensionnats autochtones.

D’ici là, il serait souhaitable que cette propagande religieuse d’une autre époque soit supprimée. Non seulement parce qu’elle est préjudiciable à la démarche du pape, mais surtout parce qu’il s’agit pour l’instant d’une calomnie (jusqu’à preuve du contraire) qui est profondément choquante.

On s’étonne que cela n’ait pas été enlevé plus tôt.

Références :
Gabriel Sagard en Huronie
Nicolas Viel
Paul Le Jeune
 

Postscriptum du 27 aout 2023 :

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Depuis la parution de ce texte, on a ajouté une plaque qui masque le texte offensant. Lors d’une courte entrevue accordée par le curé de la paroisse, celui-ci révélait qu’on envisage la possibilité d’y inscrire un texte qui replace mieux cet incident dans le contexte de l’époque.

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 infrarouge à spectre complet, objectif M.Zuiko 12-40mm F/2,8 + filtre bleu FS KB20 + filtre FS VertX1a + filtre Lee No 354 (Special Steel Blue) — 1/125 sec. — F/5,6 — ISO 200 — 24 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La candeur de Jean Chrétien face aux Autochtones

25 octobre 2021

Jean Chrétien fut premier ministre du Canada de 1993 à 2003 après avoir été responsable de nombreux ministères, dont celui des Affaires indiennes de 1968 à 1974.

Hier, à l’émission Tout le monde en parle, il a déclaré que même pendant les six ans et demi où il s’occupa de ce ministère, il n’avait jamais entendu parler des pensionnats autochtones.

C’est possible.

M. Chrétien a grandi alors que, du primaire au collégial inclusivement, l’enseignement était aux mains de communautés religieuses.

C’était à l’époque où on glorifiait le rôle des missionnaires auprès des ‘païens’.

J’ai un peu connu cette époque. À l’adolescence, la seule chose supplémentaire que j’ai apprise, c’est qu’en Abitibi-Témiscamingue, au cours d’une partie de chasse, les ‘Blancs’ qui violaient une femme Autochtone n’étaient jamais inquiétés par la justice.

On apprenait le viol quand les Autochtones prenaient des mesures de représailles contre les violeurs. Ce qui faisait alors l’objet d’une enquête policière.

M. Chrétien soutient donc qu’à titre de ministre de 1968 à 1974, il n’a jamais été informé du sort subi par les enfants Autochtones dans les pensionnats financés par son ministère jusqu’en 1996. Pourtant les premiers rapports officiels d’abus généralisés dans les pensionnats financés par Ottawa remontent à 1907.

Cette déclaration est une preuve supplémentaire que le fédéral est un gouvernement colonial au sein duquel les députés, les sénateurs et les ministres ne sont que l’interface entre une machine étatique et le peuple.

Et cette machine, ce sont des milliers de fonctionnaires et surtout un petit nombre de mandarins qui exercent le pouvoir dans l’ombre, animés de leur propre conception de l’intérêt de l’État.

Or, lorsqu’on veut contrôler ce que le ministre décide, on doit contrôler ce qu’il sait. Donc, de l’aveu même de M. Chrétien, on s’est bien gardé de l’informer correctement. Tout au plus, l’a-t-on avisé qu’il y avait des problèmes anecdotiques à certains endroits.

Dans un autre ordre d’idée, lorsque M. Chrétien rappelle que son épouse et lui ont adopté un Autochtone en bas âge, je ne doute pas un seul instant que ce couple ait aimé cet enfant comme le leur.

De toute évidence, M. Chrétien ne s’est jamais posé la question :
est-ce normal que des services sociaux confient de jeunes Autochtones à des ‘Blancs’ alors que les communautés autochtones, même dans la plus profonde pauvreté, sont parfaitement capables d’en prendre soin…

En d’autres mots, il ne lui est jamais venu à l’esprit que l’adoption par des ‘Blancs’ était un nouveau mécanisme d’assimilation culturelle et de ce fait, un substitut moderne aux pensionnats autochtones.

Références :
Jean Chrétien
L’adoption par des ‘Blancs’, le substitut aux pensionnats autochtones
La façade ministérielle de l’État canadien
L’histoire d’un crime national
Révélations de Robert Poëti: grand ménage au ministère des Transports
Sévices sexuels sous le nez de Chrétien à La Tuque
Un sous-ministre n’a pas à recevoir «d’ordres», selon Dominique Savoie

Paru depuis :
Sévices dans les pensionnats : « Pensez-vous que je n’aurais rien fait? » (2021-10-27)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Vaccination obligatoire : la redécouverte des droits collectifs

21 octobre 2021


 
Le plus fondamental de tous les droits fondamentaux est le droit à la vie. Et dans l’échelle des droits, le droit à l’intégrité physique est probablement celui qui devrait figurer au deuxième rang.

Ce qui signifie le droit de refuser qu’on vous injecte quoi que ce soit sans votre accord.

Ceux qui s’opposent à la vaccination obligatoire au nom de ce droit ont raison.

Dans un autre ordre d’idée, lorsqu’un pays déclare la guerre et proclame la conscription obligatoire, le citoyen appelé sous les drapeaux ne peut pas invoquer son droit à la vie pour refuser de servir de chair à canon.

Et s’il déserte l’armée, il risque le peloton d’exécution.

C’est donc à dire que même un droit fondamental comme celui à la vie n’est pas absolu.

Si le pays est attaqué, il a besoin de tous ses citoyens aptes au service militaire pour protéger ceux qui ne peuvent se défendre.

Dans ce cas, le droit collectif à la vie a préséance sur le droit individuel.

Il en est ainsi en temps de guerre sanitaire.

Les travailleurs de la Santé et ceux qui exercent en milieu scolaire sont en contact avec des personnes vulnérables. Dans le premier cas, ce sont les malades. Et dans le second, ce sont les enfants non vaccinés.

Ces travailleurs sont comme ces soldats. Mais au lieu que l’État les oblige de se confronter aux dangers de la guerre, il les oblige de recevoir un vaccin inoffensif dans 99,999 % des cas.

Alors que se multiplient les obligations vaccinales à travers le monde, nous sommes en train de découvrir qu’il y a un temps pour défendre le respect des droits individuels. Et il y a un temps pour défendre le respect des droits collectifs.

C’est la menace d’un ennemi commun qui marque le basculement d’une époque à l’autre.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Que fait-on si la foule hue la déclaration du club Canadien de Montréal ?

20 octobre 2021

Introduction

Le club Canadien a dernièrement décidé qu’au début de chaque partie de hockey tenue au Centre Bell, on prononcerait une déclaration selon laquelle ce centre sportif serait construit sur un territoire mohawk non cédé.

Cette initiative suscite des réactions diverses au sein de la classe politique québécoise.

Résumé historique

Au cours de son deuxième voyage au Canada, Jacques Cartier est accueilli en 1535 dans le village iroquoien d’Hochelaga, situé sur l’ile de Montréal.

Précisons que l’adjectif iroquoien n’est pas synonyme d’iroquois. Dans sa rubrique consacrée aux Iroquoiens du Saint-Laurent, Wikipédia débute par l’avertissement “Ne doit pas être confondu avec Iroquois”.

À l’époque de Jacques Cartier, les Iroquoiens du Saint-Laurent peuplaient toute la vallée du Saint-Laurent, y compris l’ile de Montréal.

Toutefois, ils avaient complètement disparu au siècle suivant lorsque Samuel de Champlain débarque au Canada.

Que s’est-il passé entretemps ? Cette question divise les historiens.

Les uns émettent l’hypothèse d’un choc viral; les Européens auraient contaminé involontairement les Autochtones par un ou plusieurs virus mortels.

D’autres experts croient que la vallée du Saint-Laurent aurait connu une mini-glaciation qui aurait provoqué une succession de mauvaises récoltes de maïs (la céréale de base de l’alimentation autochtone) et ainsi provoqué la famine.

Les Iroquois ont échappé à cela parce qu’ils vivaient plus au sud, dans ce qui est aujourd’hui l’État de New York.

Alliés aux Anglais, les Iroquois ont mené des razzias contre les Français installés à Lévis (en face de la ville de Québec) et à Montréal. Mais ils n’ont jamais peuplé l’ile. Jamais.

Le poids des mots

Lorsqu’un paysan construit une ferme sur le terrain de son voisin, cette ferme appartient non pas à celui qui l’a construite mais à celui qui possède le terrain.

Lorsqu’on dit d’une région qu’il s’agit d’un territoire mohawk non cédé, cela veut dire que ce territoire leur a été volé.

Si c’est le cas, les Mohawks sont justifiés d’intenter des poursuites en vue d’obtenir des dizaines, voire des centaines de milliards de dollars de dédommagements puisque tout qui se trouve actuellement sur l’ile est à eux.

Les politiciens qui soutiennent la thèse fallacieuse du territoire non cédé agissent de manière irresponsable.

Ils incitent les Mohawks à réclamer justice. Or si ces derniers intentent des poursuites, ils n’ont pas la moindre chance de l’emporter.

Ce qui accentuera leur ressentiment à la fois contre la justice des ‘Blancs’ et contre les Québécois, descendants de leurs ennemis en Nouvelle-France.

Au lieu d’être un geste de vérité et de réconciliation, c’est exactement le contraire; une fausseté qui ravive des rancunes séculaires.

Une boite de Pandore

Tout comme le premier ministre Cameron n’avait pas prévu que le peuple britannique voterait pour le Brexit, il est probable que les dirigeants du club Canadien de Montréal n’ont pas envisagé la possibilité que leur texte de reconnaissance territoriale soit hué par la foule.

D’un match à l’autre, si les partisans du Canadien développent cette habitude, les dirigeants du club réaliseront qu’ils ont ouvert une boite de Pandore.

Cette déclaration publique est une occasion offerte à la foule de réagir. Si la foule hue cette déclaration, est-ce en raison d’un désaccord quant à sa véracité ou par racisme à l’égard des Mohawks ?

Tout l’élite politico-médiatique anglo-canadienne verra dans la réaction de la foule une preuve supplémentaire du racisme des Québécois.

En contrepartie, les Québécois y verront une preuve supplémentaire de l’hypocrisie de cette élite, toujours désireuse de nous faire porter le poids des politiques génocidaires d’Ottawa.

On peut anticiper que cette décision du club Canadien favorisera l’éveil nationaliste d’une grand nombre de Québécois.

C’est au moins ça de bon.

Références :
Jacques Cartier
Iroquoiens du Saint-Laurent
L’initiative du Canadien divise à Québec
Proximité autochtone québécoise d’hier à aujourd’hui (2021-03-01)
Un texte de reconnaissance territoriale lu avant chaque match au Centre Bell

Paru depuis : Réplique (en anglais) des Mohawks (2021-10-22)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’obsession américaine de la ‘race’

15 octobre 2021

Introduction

Depuis le séquençage du génome humain en 2004, on sait qu’un ‘Blanc’ typique et un Noir ‘pure race’ ont en commun entre 99,5 % et 99,9 % de leurs chromosomes. Or cette proportion est la même entre deux membres d’une même ‘race’.

Bref, de la même manière qu’il n’existe pas de race constituée des gens aux yeux bleus, il n’existe pas de race de gens à la peau pigmentée. La pigmentation de la peau n’est qu’une parmi une multitude de caractéristiques humaines.

Le racisme ne consiste donc pas à distinguer ces différences de pigmentation entre deux personnes, mais à y attacher une importance démesurée.

Tout comme le racisme, le racisme systémique possède des degrés de sévérité. Nulle part n’est-il plus évident qu’aux États-Unis.

Les recensements

Les recensements canadiens ne demandent pas aux répondants de préciser à quelle race ils appartiendraient, contrairement aux recensements américains.

Dès les premiers d’entre eux, on chercha à faire l’inventaire des esclaves et des Noirs affranchis.

En 1790, le peuple américain était partagé en trois groupes;
• les mâles et les femelles (sic) Blancs,
• les autres personnes libres, et
• les esclaves.

Originellement, l’analphabétisme était tellement généralisé que les recensements étaient effectués par des préposés qui évaluaient la couleur de la peau des répondants.

En 1850, les catégories se précisaient :
• les Mâles et les Femelles blancs,
• les Noirs (libres),
• les Mulâtres (libres),
• les esclaves Noirs, et
• les esclaves Mulâtres.

À ces catégories, s’ajoute une sixième (‘Indiens’) en 1860.

En raison de l’abolition officielle de l’esclavage, on supprime en 1870 et en 1880 les deux catégories qui y font référence, mais on ajoute la catégorie ‘Chinois’.

Au recensement de 1890, le gouvernement américain veut mesurer l’importance des unions interraciales (interdites dans certains États). Les catégories deviennent :
• les Mâles et les Femelles blancs,
• les Noirs,
• les Mulâtres,
• les Quadroons (quelqu’un ayant un quart de ‘sang noir’),
• les Octoroons (quelqu’un qui a un huitième de ‘sang noir’ ou moins),
• les Indiens,
• les Chinois, et
• les Japonais.

L’historique familial permettait aux préposés au recensement d’évaluer grossièrement le degré de pureté du sang. De plus, on comprendra qu’aux États-Unis (même de nos jours), un ’Blanc’ est un ’Blanc pur race’.

En 1900, toutes les personnes de descendance noire sont regroupées dans la catégorie ‘Noirs’. Les autres catégories demeurent.

Mais en 1910, la catégorie ‘Mulâtres’ réapparait alors que s’ajoute la catégorie ‘Autres’ (pour les Coréens, les Philippins et les gens originaires de l’Inde).

À partir de 1920, les catégories se multiplieront.

En 1930, le mot en ’N’ (ci-contre) est utilisé pour la première fois et le sera jusqu’au recensement de 2010 inclusivement.

On peut présumer que c’est Barak Obama, président depuis 2009, qui s’est assuré qu’il en était ainsi pour la dernière fois.

Même si on les effectue une seule fois par décennie, les recensements basés entre autres sur la pigmentation de la peau contribuent à faire d’elle un marqueur identitaire.

Les médias

Cette obsession de tout voir au travers d’un prisme racial explique le fait que même une chaine de nouvelles comme CNN ne peut pas s’empêcher de décliner toutes ses statistiques selon les États ou selon la race (pudiquement appelés ‘Groupes racisés ou racialisés’, ce qui revient au même). Presque jamais par groupes socioéconomiques.

Dans ce pays, il n’est pas étonnant qu’on ait senti le besoin de colliger des données relatives aux taux d’infection et de mortalité au Covid-19 selon la ‘race’. Ces données ont révélé, sans surprise, que les personnes considérées comme ‘Noires’ étaient davantage victimes du Covid-19.

Pour un suprémaciste blanc, quelle aubaine; à ses yeux, c’est la preuve de la robustesse, voire de la supériorité, de la ‘race blanche’ à laquelle il appartient.

Lorsqu’on est persuadé que la vulnérabilité aux infections dépend des caractéristiques physiques inhérentes à l’individu — en d’autres mots, lorsqu’on croit que c’est gravé dans ses chromosomes — que peut-on y faire ? Son triste sort, n’est-il pas le résultat de la Volonté divine ? N’est-ce pas Dieu qui l’a fait ainsi ?

Par contre, si on croit que la mortalité par Covid-19 dépend des caractéristiques socioéconomiques des gens, il faut travailler à la réduction des inégalités sociales, cause véritable des taux d’infection différents.

Les statistiques au sujet du Covid-19 sont colligées par les États parce que la Santé est un de leurs domaines de juridiction exclusive. Or ceux-ci sont majoritairement dirigés par des gouverneurs Républicains (donc de Droite, sinon d’extrême-Droite). Voilà pourquoi on préfère baser ces statistiques sur la ‘race’, perpétuant ainsi l’importance démesurée qu’on y attache.

Ce à quoi les groupes antiracistes eux-mêmes ne voient pas d’objection. Ce qui prouve bien à quel point le racisme systémique américain est enraciné partout.

Références :
Le néo-racisme multiculturel du NPD
The changing categories the U.S. census has used to measure race
What Census Calls Us
What Census Calls Us – A Historical Timeline

Paru depuis :
Majority of Latinos Say Skin Color Impacts Opportunity in America and Shapes Daily Life (2021-11-04)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Tire Sainte-Catherine et autoflagellation

14 octobre 2021

Historique

Depuis le Xe siècle, la fête de la Sainte-Catherine est célébrée par les Catholiques le 25 novembre de chaque année.

Au Québec, c’était la fête des vieilles filles, c’est-à-dire des femmes de plus de 32 ans qui n’avaient pas encore trouvé un mari à leur gout.

Dans le premier quart du XXe siècle, mon grand-père paternel créa une confiserie qui, au fil des années, devint la principale entreprise de ce type des comtés de Joliette, de l’Assomption et de Montcalm.

Le 25 novembre était une des principales occasions d’affaires de l’année.

Puisque les trois premiers de ses enfants à atteindre l’adolescence furent des filles, ce sont trois de mes tantes qui eurent pour tâche de préparer la tire Sainte-Catherine.

Après avoir ajouté une grande quantité de sucre à de la mélasse, le tout devenait tellement épais que la seule manière d’en mélanger les ingrédients était de l’étirer dans le sens de la longueur pour en faire un gros câble, de suspendre ce câble collant à un mur par le moyen d’un crochet de métal, de l’étirer par les deux bouts, de le torsader, de suspendre par le milieu le câble torsadé au crochet, de l’étirer de nouveau, et ainsi de suite jusqu’à l’obtention d’une texture blonde relativement uniforme.

Puis il fallait couper le tout pour en faire des papillotes.

À l’époque, on appelait ces papillotes des klondikes en raison de leur couleur, semblable (avec un peu d’imagination) à celle de pépites d’or.

L’origine de cette coutume remonterait au XVIIe siècle. Selon la légende, c’est Marguerite Bourgeois, fondatrice de la Congrégation des sœurs de Notre-Dame, qui aurait institué cette coutume.

Sur le site du Réseau de diffusion des archives du Québec, on peut lire : “ Fait légendaire ou historique, on raconte qu’elle en aurait fabriqué pour attirer les enfants à son école, surtout les petites «sauvagesses».

Ainsi, comme la sorcière du conte ‘Hansel et Gretel’, Marguerite Bourgeois aurait utilisé cette friandise pour attirer des jeunes Autochtones à l’école, pour les séquestrer, les priver de leur culture, et leur imposer une autre religion. Et, selon cette légende, ils en sortaient aussi différents que les biscuits sortant du four de la méchante sorcière.

Apprenant cela, il n’en fallait pas plus pour que les dirigeants du Centre de santé communautaire du Grand Sudbury décident de bannir cette coutume, dans un effort de réconciliation avec les peuples autochtones du Canada.

Les politiques génocidaires anglo-saxonnes

L’idée qu’en Nouvelle-France, la tire Sainte-Catherine servait à piéger sournoisement les enfants Autochtones en vue de leur emprisonnement dans des pensionnats est le comble du ridicule. Pas un seul historien, même Autochtone, ne supporte cette thèse farfelue.

Tenter d’exterminer les peuples Autochtones pour ensuite assimiler les survivants furent des objectifs du colonialisme anglo-saxon.

Aux États-Unis, on a tué des millions de bisons dans le but précis d’affamer à mort les Sioux dont les troupeaux de bisons étaient le garde-manger.

Puis on a enfermé les survivants dans des prisons à ciel ouvert qu’étaient les réserves indiennes. Situés sur les terres les moins fertiles (préférablement désertiques) des États-Unis, ces réserves servaient à limiter leur croissance démographique.

On fit l’équivalent au Canada et en Australie.

Au Canada, on ne comptait pas sur des friandises pour attirer les enfants Autochtones dans des pensionnats. Il était tout simplement illégal pour les mères Autochtones de refuser d’envoyer leurs enfants au pensionnat. En clair, la police canadienne venait arracher les enfants des bras de leur mère.

D’autre part, en Nouvelle-France, il est vrai que les missionnaires se donnaient comme mission de convertir les Autochtones. C’était leur rôle. Comme aujourd’hui les preachers américains. Un missionnaire demeure un missionnaire.

Mais les missionnaires en Nouvelle-France n’utilisaient pas la force, ni la menace (autre que celle du purgatoire). Ont-ils utilisé des friandises ? C’est possible. Mais quelle importance ?

Va-t-on mettre sur le même pied les sévices subis par les enfants Autochtones dans les pensionnats financés par Ottawa et une offre de friandises par Marguerite Bourgeois ?

Ce qui intéressait la France en Nouvelle-France, c’était le commerce des fourrures. Paris y envoyait des commis-voyageurs appelés coureurs des bois.

Par troc, chacun d’eux devait se procurer les fourrures accumulées par les peuples Autochtones depuis sa dernière visite. Et s’il devait se quereller avec eux, il ne pouvait pas ‘appeler la police’; il était complètement à leur merci. Ce qui l’obligeait à bien s’entendre avec eux.

Conclusion

Si l’ethnie dominante du Canada se sent coupable des crimes commis par la colonisation anglaise, c’est son problème.

Grâce au Ciel, on ne nous a pas exterminé comme les Béothuks. On ne nous a pas enfermé non plus dans des réserves.

On a simplement exercé un colonialisme économique destiné à nous appauvrir. Ottawa a subventionné grassement l’annexe québécoise de la majorité anglo-canadienne par le biais des politiques destinées à soutenir les ‘minorités’ officielles du pays. Alors que la principale minorité linguistique du Canada, c’est nous.

Et pour nous forcer à adopter l’idéologie de l’ethnie dominante du pays — notamment le tribalisme anglo-saxon qui interdit toute forme de laïcité — cette ethnie nous a imposé une camisole de force constitutionnelle en 1982.

À cette occasion, les provinces anglophones ont tenu une séance ultime de négociation à l’insu du Québec et ont adopté le lendemain la Canadian Constitution sans nous.

Par des moyens très différents, Autochtones et nous devons lutter contre notre assimilation, entourés que nous le sommes d’un océan de gens qui ne partagent ni nos coutumes, ni notre manière de penser, et ni notre manière de vouloir vivre ensemble.

Du coup, nous les Québécois, n’avons pas à partager la culpabilité de l’ethnie dominante du Canada pour les crimes contre l’Humanité commis par son gouvernement colonial.

En conclusion (et pour revenir au sujet principal), si on veut éviter de manger de la tire Sainte-Catherine, que ce soit parce que cet aliment n’est pas inscrit au guide alimentaire canadien et non parce que nous devons expier une faute prétendument commise par Marguerite Bourgeois.

Références :
De coutume en culture
Fête de la Sainte-Catherine
Gabriel Sagard en Huronie
Le colonialisme économique ‘canadian’
Le génocide des Béothuks à Terre-Neuve
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes
Pensionnats autochtones : la honte canadienne
Réconciliation avec les Autochtones – Le miroir australien
Vérité et réconciliation : devrait-on cesser de fêter la Sainte-Catherine?

Paru depuis :
Ottawa a versé des milliards pour l’anglais au Québec (2023-11-27)

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Écrit par Jean-Pierre Martel