La politique migratoire de la CAQ

Publié le 11 septembre 2018 | Temps de lecture : 5 minutes

Introduction

Le pourcentage d’immigrants au Québec qui choisissent de s’angliciser est passé de 65% à 60% en une décennie. C’est encore trop.

François Legault a raison de dire ‘qu’importer’ un demi-million d’immigrants par décennie qui choisissent à 60% de s’angliciser, c’est compromettre la pérennité à long terme du français au Québec.

Cela ne se voit pas en région ni dans les banlieues montréalaises (massivement francophones). Mais c’est déjà évident à Montréal à la lecture des résultats inquiétants du dernier recensement canadien, alors que tous les voyants lumineux clignotent au rouge.

Si le diagnostic de François Legault est bon, quels sont les remèdes qu’il prescrit ?

Réduire l’immigration au Québec de 24%

Entre autres, la Coalition Avenir Québec se propose de réduire à quarante-mille le nombre d’immigrants accueillis annuellement au Québec, et ce dès 2019.

Selon les données du gouvernement québécois, le Québec aura accueilli cette année 53 900 immigrants.

De ce nombre, 31 800 auront été choisis par Québec à titre de travailleurs qualifiés et 22 100 auront été choisis par Ottawa à titre de réfugiés ou en vertu de sa politique de réunification des familles.

Afin de ne pas assumer seule la tâche de réduire le flot migratoire au Québec, la CAQ espère convaincre le fédéral de contribuer proportionnellement à cette réduction.

Les responsabilités canadiennes en matière d’immigration

Au Canada, la compétence constitutionnelle en matière d’immigration est exclusivement fédérale.

Toutefois, en 1991, le gouvernement fédéral a délégué au Québec le droit de choisir les requérants à titre de travailleurs qualifiés.

Néanmoins, le fédéral a conservé ses prérogatives en matière d’accueil des réfugiés parce qu’il doit répondre de ses obligations internationales à ce sujet.

Quant à ses décisions en matière de réunification des familles, elles peuvent être contestées devant les tribunaux. Afin de s’assurer qu’elles soient prises de manière équitable, celles-ci sont déléguées à des tribunaux administratifs qui jouissent d’une grande autonomie.

L’imposition un quota de réduction de 24% à ces tribunaux administratifs provoquerait un tollé d’autant plus prévisible que cette contrainte serait imposée à la demande du Québec, une province que de nombreux commentateurs anglophones aiment dépeindre comme raciste et xénophobe.

Bref, il n’y a pas la moindre chance que le fédéral accepte de contribuer à une réduction du nombre d’immigrants au Québec à la demande de la CAQ.

La seule manière pour elle d’avoir autorité à ce sujet est de réaliser d’abord l’indépendance du Québec.

La démission de la CAQ en matière migratoire

D’ici là, la CAQ devra se débrouiller seule.

Compte tenu de la part fédérale, pour faire passer de 53 900 à 40 000 le nombre total d’immigrants au Québec, un gouvernement caquiste sera obligé de réduire le nombre d’immigrants qu’il accepte de 31 800 à 17 900.

Des 40 000 immigrants au Québec en 2019, 17 900 seraient donc choisis par Québec et 22 100 (la majorité) seraient choisis par Ottawa.

Les besoins de main-d’œuvre des entreprises québécoises, au lieu d’être assurés principalement par des politiques québécoises spécialement adaptées à cette fin, seront assurés par des politiques migratoires fédérales dictés par des considérations humanitaires totalement étrangères aux besoins économiques du Québec.

De plus, en donnant à Ottawa le contrôle majoritaire de notre immigration, la CAQ espère que la pérennité du français soit assurée dorénavant par des fonctionnaires fédéraux à 92% unilingues anglais.

Parce qu’il faut le dire : la fonction publique fédérale est massivement anglophone. Même les postes ‘bilingues’ à Ottawa sont confiés à des unilingues anglais qui disent vouloir apprendre le français et qui quittent leur poste plusieurs années plus tard sans jamais l’avoir appris.

Bref, c’est sur eux que François Legault compte pour expulser les immigrants qui n’auront pas appris le français après trois ans de séjour au Québec et pour sélectionner des réfugiés majoritairement francophones.

Disons les choses clairement : la politique migratoire de la CAQ est une trahison au profit du gouvernement colonial canadien.

Références :
Accord Canada-Québec relatif à l’immigration et à l’admission temporaire des aubains
Québec prévoit recevoir jusqu’à 53 000 immigrants en 2018
Un fonctionnaire fédéral défend son droit de travailler en français

Paru depuis :
Kafka en Québec (2021-05-03)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’ALÉNA et les élections québécoises

Publié le 10 septembre 2018 | Temps de lecture : 3 minutes

Avant-propos

En 2007, lors de la crise des prêts à haut risque (ou subprimes), Henri-Paul Rousseau — PDG de la Caisse de dépôt et placement du Québec — avait informé confidentiellement le premier ministre Jean Charest des pertes colossales subies par son institution financière.

Jean Charest avait alors décidé de déclencher prématurément des élections.

C’est seulement après l’issue du scrutin qu’on avait appris que la Caisse avait perdu quarante-milliards$ en spéculant sur ce qu’on appelle ‘le papier commercial’.

Grâce à cette ruse, Jean Charest passait d’un gouvernement libéral minoritaire à un gouvernement libéral majoritaire.

L’anguille sous roche

Au sujet de la renégociation de l’ALÉNA, la première date butoir imposée par Donald Trump était le 31 aout 2018.

Tous les observateurs s’entendent pour dire que le Canada devra céder sur la gestion de l’offre, bête noire de Donald Trump.

Déjà, lors de l’AECG — l’Accord économique et commerciale global entre le Canada et l’Union européenne — les producteurs de fromage du Québec avaient été sacrifiés sur l’autel du libre échange.

Seize-mille tonnes de fromages européens seront autorisées à être importées. Cela représente des pertes de 1,5 milliard$ pour les producteurs québécois, en contrepartie d’une compensation insuffisante de 250 millions$ par le fédéral.

Quant au Partenariat Trans-Pacifique, il fera passer en vingt ans l’importation de lait asiatique de 8 300 tonnes à 57 000 mille tonnes. Et ce, sans compensation financière d’Ottawa.

Le 1er octobre prochain, c’est le jour du vote à l’élection québécoise.

Si le fédéral se trouvait dans l’obligation d’annoncer de nouveaux sacrifices aux agriculteurs du Québec, il aura intérêt à le faire après la fermeture des boites de scrutin.

Dans le cas contraire, si les agriculteurs québécois ont encore le temps de voter, la meilleure manière pour eux de manifester leur colère contre cette nouvelle trahison du fédéral, ce sera de voter massivement pour un parti indépendantiste.

Or la gestion de l’offre touche directement plus de 6 900 fermes — principalement des exploitations familiales — desquelles dépendent 92 000 emplois directs et indirects.

Cela représente un faible pourcentage de l’électorat québécois. Toutefois, ce bloc de citoyens possède une influence considérable en raison de leur habitude d’obéir massivement aux mots d’ordre de leur syndicat professionnel et du capital de sympathie qu’ils ont accumulé auprès du public.

Bref, le gouvernement canadien pourrait très bien déterminer l’issue du scrutin. S’il veut un interlocuteur provincial fédéraliste, il aura tout intérêt à annoncer la défaite cuisante de Trump au sujet de la gestion de l’offre.

Ce qui est très improbable.

Références :
ALENA: les négociations achoppent sur le lait, répète Larry Kudlow
La façade ministérielle de l’État canadien
La gestion de l’offre, un éternel cheval de bataille pour les agriculteurs canadiens
La guerre du fromage complique l’entrée en vigueur de l’accord commercial entre l’Europe et le Canada

Paru depuis :
ALENA : des élus du Congrès se disent «frustrés» des «tactiques» du Canada (2018-09-19)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le désamour de la CAQ pour les ainés

Publié le 7 septembre 2018 | Temps de lecture : 4 minutes

Le ‘scandale du deuxième bain par semaine’ a éclaté grâce aux révélations de la Coalition Avenir Québec (CAQ).

Rappelons que dans certains hospices publics, les préposés se faisaient un revenu d’appoint en donnant un deuxième bain par semaine à ceux qui les payaient pour ce faire.

Que ce bain ait été donné durant les heures au cours desquelles ces préposés étaient rémunérés ou que cette tâche ait été accomplie en dehors de leurs heures de travail, la CAQ était contre.

Le résultat est que tous ces vieillards ne reçoivent plus qu’un seul bain par semaine, faute de personnel (selon le ministre Barrette).

Comme tous les partis de droite, la CAQ voit ceux qui dépendent de l’État comme des boulets économiques, voire des parasites de la société.

Aussi a-t-on été surpris d’apprendre le mois dernier l’intention de la CAQ de construire — au cours de son premier mandat de quatre ans si elle est élue — une trentaine de Maisons des ainés, propres et modernes, capable de loger un maximum de cent-trente personnes chacune, soit un total de 3 900 places en quatre ans. C’est 975 places par année.

Il y a déjà 37 500 places dans les hospices publics du Québec. Ces 975 places représentent trois pour cent des places existantes.

L’intention de la CAQ est donc de remplacer annuellement trois pour cent des places offertes dans les hospices publics par des places plus attrayantes.

Les 37 500 vieillards en perte d’autonomie actuellement hébergés dans nos hospices publics sont la pointe d’un iceberg. Ils représentent des personnes nées avant la fin de la Deuxième Guerre mondiale ou nés au tout début d’une vague de babyboumeurs — dont l’immense majorité est encore très en forme — mais qu’on devra tôt ou tard placer.

Selon le rapport gouvernemental Les aînés au Québec, paru en 2017, il y a 1,6 million de citoyens âgés de 65 ans ou plus dans la province. Ce 1,6 million de vieux est suivi par plus de gens, soit 1,8 million de personnes âgées de 50 à 65 ans qui seront presque tous à la retraite dans vingt ans.

Ce vieillissement de l’ensemble de la population québécoise s’explique par une hausse de l’espérance de vie et par la forte dénatalité qui a succédé au babyboum. Cette dénatalité a diminué l’importance démographique des générations suivantes.

Si la mise à la retraite des vieux est responsable des faibles taux de chômage en Amérique du Nord, cette bonne nouvelle est annonciateur d’une bombe à retardement; leur perte d’autonomie.

Pour faire face à l’accroissement démographique des vieillards d’ici vingt ans, la CAQ ne promet pas d’augmenter le nombre de places disponibles, mais d’améliorer le confort de celles qui seront offertes.

Selon les calculs de Radio-Canada, cette promesse coutera vingt-milliards. À première vue impressionnant, cet engagement s’étendra sur vingt ans. Ce qui signifie une dépense annuelle d’un milliard de dollars, soit une dépense dans le domaine du raisonnable.

D’autant plus raisonnable que seule une partie de cette somme sera dépensée par l’État. En effet, les Maisons des ainés seront financées en mode PPP (partenariat public-privé).

Ce mode de financement, toujours désavantageux pour les contribuables, transforme l’accomplissement d’une mission de l’État en occasion d’affaires, c’est-à-dire d’enrichissement privé.

Concrètement, la volonté de la CAQ est de réduire en vingt ans le nombre de places abordables dans nos hospices de 37 500 à 18 000 et que la différence — 19 500 places — soient offertes dans des établissements semi-privés dont les couts d’hébergement seront plus onéreux, selon l’appât du gain des investisseurs tentés par l’aventure.

C’est une réduction de l’offre de places abordables, au cout de vingt-milliards$ et d’une somme indéterminée de frais d’hébergement pour les vieillards placés dans les Maisons des ainés de la CAQ.

En somme, la CAQ promet moins pour beaucoup plus cher.

Références :
La Vérif : les maisons des aînés de la CAQ coûteraient 20 milliards d’ici 2038
Le partenariat public privé (PPP) et la corruption libérale
Les aînés du Québec

Paru depuis :
Maisons des aînés : « Pari perdu », les nouveaux prix sont encore plus élevés (2022-05-04)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Internet : le chant des sirènes libérales

Publié le 6 septembre 2018 | Temps de lecture : 3 minutes


 
Dans la mythologie, les sirènes étaient des animaux aquatiques, mi-femmes mi-poissons, qui menaient à leur perte les marins qui étaient séduits par leurs chants.

Au cours de la présente campagne électorale, lorsque j’entends les promesses électorales du premier ministre Philippe Couillard, ma première réaction est de remarquer que ce sont souvent de très bonnes idées.

Et aussitôt, je me pose la question : « Ils sont au pouvoir depuis seize ans : pourquoi ne l’ont-ils pas fait plus tôt ?»

La raison invoquée est qu’il faillait d’abord rétablir les finances publiques. Maintenant que cela est fait, un gouvernement libéral peut accomplir ce qu’il n’a pas eu les moyens de faire jusqu’ici.

Cette raison serait plus convaincante si le Parti libéral du Québec n’avait pas pris le pouvoir en 2003 alors que le budget de l’État était équilibré.

En effet, c’est le premier ministre Lucien Bouchard du Parti québécois qui a rétabli l’équilibre budgétaire de l’État québécois en 1997.

Pendant une décennie, le budget de l’État québécois a été équilibré. En d’autres mots, au cours de la première moitié du régime libéral de Jean Charest, le gouvernement québécois a continué de faire des surplus budgétaires.

Mais lors de la Grande récession de 2007-2008, tous les gouvernements occidentaux ont volontairement fait des déficits afin de stimuler l’économie. Ce qu’a fait aussi le gouvernement Charest.

Il faudra dix ans aux Libéraux pour revenir à l’équilibre budgétaire.

Le peu d’empressement à revenir au déficit zéro instauré par le gouvernement Bouchard ne peut donc pas servir de prétexte à l’inaction d’agir dans certains domaines depuis seize ans.

Lundi dernier, M. Couillard a promis de brancher 100% des Québécois à l’internet à haute vitesse d’ici deux ans.

Voilà une promesse très intéressante.

Effectivement, le développement économique de certaines régions du Québec est handicapé par le fait que les entrepreneurs ne peuvent y offrir leurs biens et services sur l’internet à haute vitesse.

Au lendemain de sa victoire aux élections générales de 2003, le premier ministre libéral Jean Charest avait promis que l’internet à haute vitesse serait disponible dans toutes les régions du Québec avant la fin de son premier mandat. Or rien ne fut fait.

Treize ans plus tard, le premier ministre libéral Philippe Couillard annonçait la création du programme quinquennal Québec branché dont l’objectif était d’offrir l’internet à haute vitesse à tous les Québécois. De 2016 à 2018, les deux premières années de ce plan de cinq ans se sont écoulées. Or jusqu’ici, personne au Québec n’a profité de ce programme.

Après n’avoir rien fait pour réaliser sa promesse de 2016, M. Couillard espère que les Québécois le croiront capable de réaliser la même promesse cette fois-ci. Et ce sur deux ans au lieu de cinq.

D’où la question : Combien de fois un gouvernement libéral doit-il prendre un engagement avant d’entreprendre de le réaliser ?

Références :
La Vérif : les libéraux n’ont branché aucun Québécois à Internet depuis deux ans
Le PLQ promet à son tour l’accès à Internet pour toutes les régions

Sur le même sujet :
Bilan économique du gouvernement Couillard
Bilan économique de Jean Charest

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Écrit par Jean-Pierre Martel


‘Shame!’ ou l’expression du mépris

Publié le 6 juillet 2018 | Temps de lecture : 6 minutes

Introduction

C’est sous les huées et aux cris de ‘Shame!’, que les personnes venues assister au spectacle SLĀV ont été prises à partie récemment par des jeunes anglophones devant le Théâtre du Nouveau Monde.

Indépendamment de savoir qui a tort et qui a raison, on doit se demander qu’est-ce qui motive un groupe majoritairement blanc à dénoncer violemment une ‘appropriation culturelle’ alors que, dans ce cas-ci, cela ne les concerne pas ?

L’explication simpliste, qu’on lit partout ces jours-ci, c’est qu’il agit de ‘gauchistes extrémistes’ auxquels on attache trop d’importance.

Au contraire, je pense que l’agressivité des protestataires repose sur quelque chose de plus profond et qu’il y aurait tout lieu de s’en inquiéter.

Le formatage des esprits

Ceux qui participent à des forums de discussion les choisissent en fonction des sujets qu’ils abordent.

Dans le cas des forums d’idées, ils sont une occasion de rencontrer des alter ego, c’est-à-dire des personnes avec lesquels il est facile d’établir une communion d’esprit.

L’intervenant est incité à adopter l’opinion dominante du groupe par l’attribution de ‘J’aime’. Ceux-ci correspondent à une rétroaction positive comme l’est la friandise donnée au caniche méritoire.

Or ces médias sociaux sont autopurificateurs. Dès qu’un intervenant publie un point de vue anticonformiste, la confrontation des idées n’est pas perçue comme stimulante mais plutôt comme une agression qui met en péril l’harmonie de la meute.

Sous les propos désobligeants, les insinuations malveillantes et les insultes, le déviant quittera finalement les lieux au grand soulagement de tous.

Et ceux qui auront le plus efficacement attaqué l’intrus seront perçus comme des héros.

Résultat : le forum de discussion, au lieu d’être une occasion d’élargir son esprit, devient un moyen d’ancrer ses préjugés.

Il est significatif que l’action militante des protestataires contre SLĀV ait pris forme sur les médias sociaux.

Le mépris envers les francoQuébécois

À juste titre, les jeunes angloQuébécois estiment qu’ils ont le droit d’être servis en anglais. Mais ils sont nombreux à oublier que leur droit de parler leur langue n’a plus préséance lorsque ce sont eux qui servent un client francophone.

Le Parti libéral est au pouvoir au Québec de manière presque continue depuis seize ans. Au cours de cette période, il n’a rien fait pour défendre et promouvoir le français au Québec.

Si bien qu’un nombre croissant de jeunes angloQuébécois ont perdu de vue leur statut minoritaire au Québec et se considèrent plutôt comme membre de la majorité anglophone du pays (ce qui est également vrai).

Ces jeunes ont entendu ad nauséam les propos regrettables tenus au soir d’une défaite référendaire. Au point d’ignorer à quel point tous les Québécois — y compris eux — sont redevables au premier ministre qui les a prononcés.

Ils ont lu tout le mal qu’on peut en dire du projet de Charte de la laïcité du PQ (auquel je me suis moi-même opposé).

Et ils ont appris avec horreur la nouvelle de l’attentat terroriste antimusulman de Québec.

Bref, depuis leur enfance, on leur décrit le peuple francoQuébécois comme consanguin, arriéré, xénophobe et raciste.

Dans leur esprit, la défense du français au Québec est associée à une lutte tribale contre le progrès.

Pour eux, l’extinction du peuple francoQuébécois est inévitable. Et dès que nous y serons résignés, la voie de la modernité deviendra plus harmonieuse pour tous.

À mon avis, c’est ce mépris profondément ancré qui explique la haine de ces jeunes anglophones contre les spectateurs francophones du TNM.

Le choix des mots est significatif : ‘Shame!’ se traduit littéralement par ‘Honte à vous’. Mais en réalité, il signifie ‘Je vous estime honteux, c’est-à-dire méprisables’.

L’agression n’est pas survenue à n’importe quel moment. On n’a pas défilé contre le TNM en matinée ou dans l’après-midi; on a choisi délibérément le moment précis où les abonnés se présentent pour le spectacle.

Certains spectateurs ont dû pénétrer au TNM sous escorte policière. Ce genre d’intimidation est inacceptable.

Derrière les spectateurs du TNM, c’est tout le peuple francoQuébécois qui est visé par le crachat des protestataires.

Conclusion

Si on m’apprenait que des idéologues fédéraux monitorisent les écrits publiés sur ce blogue, je leur adresserais le message amical suivant : retenez bien les chiens enragés qui tentent de nous intimider dans notre vie privée et notamment lorsque nous nous rendons au théâtre accompagnés d’un être cher. Ce n’est pas vrai que nous allons nous laisser traiter ainsi chez nous.

Nous avons encore de travers dans la gorge la constitution que vous nous avez imposée et qui nous empêche de mettre en application une laïcité minimaliste parfaitement acceptable aux yeux de la plupart des pays occidentaux.

Ceux à qui vous avez affaire, ce n’est plus de pauvres paysans illettrés traumatisés par une conquête militaire et le pillage de soldats anglais. Ce sont des citoyens parfaitement capables de former leur propre pays si vous les poussez à bout.

Sur le même sujet :
La controverse au sujet de SLĀV (2018-06-27)
Appropriation culturelle et racisme anglo-saxon (2018-07-08)
Un nouveau conformisme à l’ère des médias sociaux (2019-01-29)


Annexe : Le dénigrement par The Montreal Gazette :
Opinion: SLĀV: Whose songs are these to sing? (2017-11-30)
Dunlevy: Jazz fest cancels SLĀV, but questions remain (2018-07-04)
Jazz fest review: SLĀV misses the mark, and precious opportunity (2018-07-04)
Jazz Fest: SLĀV isn’t cultural appropriation, singer Bonifassi says (2018-07-04)
Dunlevy: SLĀV director Robert Lepage just doesn’t get it (2018-07-06)
Opinion: Why SLĀV’s cancellation was the right decision (2018-07-06)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’OTAN et les élections québécoises

Publié le 5 juillet 2018 | Temps de lecture : 3 minutes

Tout se tient.

En 2014, le gouvernement Harper s’est engagé à doubler les dépenses militaires du pays d’ici 2024.

C’est ainsi que le budget de la Défense passera de 1% à 2% du Produit intérieur brut canadien. En clair, c’est une dépense récurrente de quinze-milliards$ par année.

Comme le défunt contrat des chasseurs F-35, il est à prévoir qu’il s’agira pour le Canada d’acheter du matériel militaire américain pour lequel notre pays n’obtiendra que très peu de retombées économiques.

Pour une famille de quatre personnes, cela équivaut annuellement à 2 000$ de taxes et d’impôts supplémentaires. Et ce, alors que le risque de guerre mondiale est nul (la force militaire américaine étant cinq à dix fois supérieure à celle de la Russie).

Selon toutes les apparences, le gouvernement Trudeau entend respecter les engagements pris par le gouvernement Harper à ce sujet. Cela changera profondément la nature du Canada.

Puisque les États-Unis viennent de réduire substantiellement l’impôt des entreprises, l’État canadien n’aura pas d’autres choix que de diminuer le filet de protection sociale qui constitue une caractéristique fondamentale du pays.

Quel est donc le rapport avec les élections québécoises ?

Peu importe le parti qui remportera les prochaines élections provinciales, celui-ci devra renoncer à une bonne partie de ses projets lorsque le fédéral lui coupera progressivement les vivres d’ici 2024.

D’où la stupidité aberrante de toutes ces promesses de réduction de taxes par les partis de droite du Québec plutôt que de l’investir dans la réfection des écoles et des hôpitaux pendant que nous en avons encore les moyens.

Les compressions devenues nécessaires dans notre système de santé arriveront à un bien mauvais moment.

Le faible taux de chômage actuel au Québec s’explique par la mise à la retraite des babyboumeurs (ce qui rend leurs emplois disponibles à d’autres).

Mais dans cinq ou dix ans, débutera leur perte d’autonomie. D’où l’explosion des couts que leur état de santé requerra.

Un nombre croissant d’entre eux devront être placés dans des centres d’hébergement qui sont déjà en décrépitude et que nous n’auront pas restaurés, préférant profiter de réductions de taxes promises par certains politiciens.

En manque d’argent, peut-être regrettons-nous alors notre négligence à nous intéresser au gaspillage militaire du pays quelques années plus tôt…

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les services gouvernementaux à visage découvert : la perte des illusions

Publié le 4 juillet 2018 | Temps de lecture : 5 minutes

Introduction

Selon la loi 62 du gouvernement Couillard, adoptée le 18 octobre 2017, toute demande et toute prestation de service gouvernemental doit s’effectuer à visage découvert.

En matière de laïcité, cette loi correspond au plus petit dénominateur commun de tous les partis politiques du Québec. On peut souhaiter que la législation soit plus exigeante. Mais on ne peut pas vouloir moins.

Voilà pourquoi je suis d’accord avec cette loi. Toutefois, j’ai toujours soutenu que cette loi était anticonstitutionnelle.

C’est ce que confirme le jugement rédigé en anglais rendu le 29 juin dernier par le juge Marc-André Blanchard de la Cour supérieure du Québec.

Une gifle pour les fédéralistes québécois

La Canadian Constitution de 1982 a été adoptée par les provinces anglophones du Canada à l’issue d’une séance ultime de négociation à laquelle le Québec n’a pas été invité.

C’est une constitution ethnique qui reflète l’idéologie dominante au pays et à laquelle le Québec doit se soumettre.

Les idéologues qui l’ont rédigée voulaient consacrer la suprématie absolue des droits individuels afin de bloquer les dispositions les plus importantes de la Loi 101. En effet, cette dernière proclamait la préséance de certains droits collectifs — ceux nécessaires à la pérennité de la langue française au Québec — sur certains droits individuels, notamment celui de s’assimiler au groupe linguistique de son choix.

En consacrant la suprématie absolue des droits individuels, ces idéologues n’ont pas su prévoir la montée de l’intégrisme islamique, résultat des sommes colossales que la dictature saoudienne consacre à sa promotion.

Si bien que, par exemple, le port du niqab sur la voie publique est un droit constitutionnel au Canada, mais ne l’est pas ni en France, ni en Belgique, et ni en Allemagne. Et ce n’est même pas un droit constitutionnel au Maroc, pourtant pays musulman.

En raison de cette constitution dysfonctionnelle, toutes les formes de laïcité préconisées par les partis politiques du Québec sont anticonstitutionnelles. Même le parti le moins exigeant à ce sujet (le Parti Libéral du Québec) devra céder devant l’ordre constitutionnel canadian.

L’accommodement raisonnable le plus pernicieux exigé du peuple francoQuébécois, c’est d’être constamment en deçà de ce qu’il aspire à être dans le but de se soumettre à l’idéologie de l’ethnie angloCanadienne, imposée par le biais d’une camisole de force constitutionnelle.

Voilà le prix du fédéralisme.

Dans ce sens, la décision du tribunal est une gifle — infligée en anglais, s’il-vous-plaît — à ceux qui croient toujours que le Québec peut mettre en application la plus rudimentaire des laïcités tout en demeurant au sein du Canada.

L’espoir en la clause dérogatoire

L’ultime espoir des fédéralistes québécois, c’est dans le recours à la clause dérogatoire de la constitution.

On ne doit pas se faire trop d’illusion à ce sujet.

La Canadian Constitution, c’est du Common Law et non du droit civiliste. Son interprétation peut varier selon les époques, selon les juges et selon la météo.

Autrefois, les Canadiennes n’étaient pas des personnes au sens constitutionnel du terme. Puis elles le sont devenues en 1929. Et ce, en vertu de la même constitution.

Lorsqu’un mot du texte constitutionnel signifie le contraire du sens qu’il a dans le dictionnaire, c’est que les juges en ont décidé ainsi. Tout simplement.

Autre exemple. Le texte de la constitution ne nous oblige qu’à traduire les lois québécoises après leur adoption et à les publier dans les deux langues. Mais surprise; la Cour suprême du Canada a estimé que l’adoption dans les deux langues était une exigence constitutionnelle ‘implicite’; c’est écrit nulle part mais c’est ça qui est ça.

Ce n’est donc qu’une question de temps pour que la Cour suprême décrète que pour invoquer la clause dérogatoire, il faut convaincre cette cour — composée majoritairement de juges qui appartiennent à l’ethnie dominante du pays — du bien fondé de cette démarche.

Cela verrouillerait complètement la camisole de force constitutionnelle imposée au Québec par l’ethnie angloCanadienne en 1982.

Conclusion

La décision du juge Marc-André Blanchard est une victoire pour les Indépendantistes.

Il prouve que la seule façon pour le Québec de définir sa propre conception de la laïcité et de la vivre, c’est en devenant un pays indépendant.

Références :
À visage découvert, ou l’ordre canadien
Le projet de loi libéral au sujet de la neutralité de l’État (dernière partie : les quiproquos)
Loi 62 (Québec)

Paru depuis : Islamic authorities in Russia’s Dagestan ban women from wearing niqab after attacks (2024-07-03)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


À quelques mois des élections québécoises…

Publié le 1 juillet 2018 | Temps de lecture : 2 minutes

Ces jours-ci, les formations politiques procèdent à leurs dernières assemblées d’investitures et peaufinent leur programme électoral.

Pendant ce temps, des centaines de bénévoles sollicitent des dons en vue de financer les différentes campagnes électorales.

Depuis le début de l’année, 19 773 de ces dons ont permis d’amasser près de deux-millions de dollars.

Cliquez sur l’image pour l’agrandir

Le Parti québécois possède plus de membres que toutes les autres formations politiques réunies. On ne sera donc pas surpris qu’il ait recueilli à lui seul 42,2% des sommes versées cette année.

Le Parti libéral se classe au deuxième rang quant aux sommes réunies (près d’un demi-million).

Mais c’est Québec Solidaire qui occupe le deuxième rang quant au nombre de donateurs : 4 131, soit davantage que le Parti libéral (3 641) et bien plus que la Coalition Avenir Québec (2 331).

Présentement, ce sont les partis de droite (CAQ et PLQ) qui mènent majoritairement dans les sondages. Mais ce sont les partis de gauche (PQ et QS) dont les sympathisants sont les plus motivés à voir gagner leur formation politique.

Si les donateurs aux partis de droite sont moins nombreux, ils sont toutefois plus fortunés et/ou plus généreux; plus un parti est à droite, plus grande est la proportion des dons élevés qu’il reçoit.

C’est ainsi que les dons d’au moins 100$ représentent 88,7% du total pour la CAQ, 71,0% pour le PLQ, 50,2% pour le PQ et 46,7% pour QS.

En moyenne, un don pour la CAQ est de 129,02$, 115,62$ pour le PLQ, 85,08$ pour le PQ et 72,58$ pour QS.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le derrière miraculeux de la ministre

Publié le 7 juin 2018 | Temps de lecture : 7 minutes

 
Dans un texte publié le 7 mars dernier, je suggérais que la meilleure manière de lutter contre le protectionnisme américain, c’est d’en tirer parti.

Par exemple, lorsque l’administration Trump impose une surtaxe de 10% sur notre aluminium, il suffit d’aller voir nos alumineries, d’obtenir les noms de leurs meilleurs clients américains et de proposer à ces derniers de délocaliser une partie de leur production au Québec, celle destinée au marché international.

Ils jouiront ici de tous les avantages qu’ils ont déjà aux États-Unis mais, en plus, d’une matière première —  l’aluminium — 10% moins chère qu’aux États-Unis, d’un tarif d’électricité probablement le plus économique en Amérique du Nord, d’une main-d’œuvre qualifiée qu’ils peuvent compléter, si nécessaire, de l’Étranger (alors que les frontières américaines se ferment à l’immigration).

Le 31 mai dernier, à l’Assemblée nationale du Québec, le député péquiste Nicolas Marceau interrogeait Dominique Anglade, ministre de l’Économie, de la Science et de l’Innovation.

Le député cherchait à savoir les mesures concrètes qu’entendait employer le gouvernement Couillard pour contrer les effets du protectionnisme de Donald Trump.

Dans la première de ses trois réponses, la ministre parle des nombreuses rencontres auxquelles elle a assisté et proclame son intention de défendre bec et ongles les intérêts des travailleurs des secteurs de l’acier et de l’aluminium.

Sans douter des intentions de la ministre, le député veut connaitre les mesures concrètes qu’entend adopter le gouvernement.

Dans sa deuxième réponse, la ministre réaffirme sa volonté de tout mettre en œuvre pour faire en sorte qu’il n’y ait pas de perte d’emplois.

Revenant à la charge, le député insiste pour aller au-delà des bonnes intentions et demande de savoir précisément ce que la ministre compte faire.

C’est alors que la ministre révèle l’arme secrète qu’elle hésitait à divulguer jusque là; elle va s’assoir avec les travailleurs.

Parce qu’il faut le dire : la ministre Anglade règle les problèmes en s’assoyant.

Les Américains voulaient taxer notre bois d’œuvre. La ministre s’est assisse et cette intention est devenue réalité. Sans qu’elle n’ait eu besoin d’intervenir. Comme par magie.

Une chaine américaine de matériaux de construction voulait acheter Rona, un fleuron de l’économie québécoise. La ministre s’est assise et contre toute attente, c’est plutôt Rona qui a été vendu à cette chaine américaine.

De la même manière, Loblaws voulait acheter les épiceries Provigo. La ministre est demeurée assise et miraculeusement c’est Provigo qui a été vendu à Loblaws.

Une entreprise ontarienne voulait acheter les Rôtisseries St-Hubert. La ministre n’a pas hésité à s’assoir et c’est au contraire St-Hubert qui a été vendu à cette entreprise ontarienne. Qui l’eut cru ?

Contrairement à la volaille des rôtisseries, la ministre a une réputation de dure à cuire.

Après de tels succès, celle-ci aurait pu se reposer sur ses deux lauriers. Mais le meilleur s’en venait.

Après que le gouvernement Couillard ait investi 1,3 milliard$ dans la CSeries de Bombardier, celle-ci a été acquise gratuitement par Airbus sans que la ministre ait eu besoin de se lever de son siège.

Dans toute l’histoire du Québec, jamais personne n’a fait autant avec si peu d’effort.

Et de triomphe en triomphe, la ministre passe pour invulnérable.

Même Donald Trump en personne ne pourrait pas la graber par le poucis puisqu’assise, cela est impossible. Il s’agit donc d’une stratégie défensive réfléchie, soigneusement adaptée au protectionnisme américain.

En conséquence, les travailleurs de l’acier et de l’aluminium peuvent être rassurés; la ministre défendra leurs intérêts jusqu’au bout et n’hésitera pas à s’assoir pour eux s’il le faut.


Annexe : Transcription des réponses de la ministre
Note : Les caractères gras sont de nous.

• Première réponse :

Nous n’avons pas évidemment attendu aujourd’hui pour agir sur le dossier de l’aluminium et de l’acier.

Il y a déjà plusieurs semaines que nous avons rencontré les présidents d’entreprises, les représentants, pour nous assurer d’avoir une cohérence dans la manière de défendre les intérêts du Québec.

On parle de quoi ? On parle de plus de 30 000 travailleurs dans ce domaine. Tant dans l’acier que dans l’aluminium. 30 000 travailleurs. Et nous avons dit dès le départ que nous allions défendre leurs intérêts bec et ongles.

Nous avons rencontré les leadeurs du secteur. Lundi de cette semaine, lundi qui s’en vient, nous avons à nouveau une rencontre en marge du G7 pour discuter des enjeux.

Et nous avons dit dès le départ que nous allions (…) défendre les intérêts avec les Américains et présenter notre position.

Il faut se rappeler la chose suivante : la décision, qui est prise par les Américains, ne dessert ni les intérêts américains ni les intérêts québécois.

Il fait le rappeler systématiquement et c’est ce que nous allons continuer à faire.

D’autre part, Raymond Chrétien [ex-ambassadeur du Canada aux États-Unis] a été nommé sur ce dossier particulier. À partir du moment où nous avons su qu’il y avait un enjeu, Raymond Chrétien a été nommé pour nous assurer de développer en détail l’argumentaire que nous allons avoir auprès des Américains pour la suite des choses.

• Deuxième réponse :

Dans les dossiers concernant les négociations avec les États-Unis, jamais nous n’avons laissé les travailleurs québécois tomber. Jamais. Au contraire.

Tant dans le bois d’œuvre, tant dans le dossier de l’aérospatiale, nous avons défendu les intérêts des travailleurs.

Alors, nous allons tout mettre en œuvre pour faire en sorte qu’il n’y ait d’emplois qui soient perdus. Au contraire, qu’on continue d’exporter.

Je vous rappelle que malgré les situations aujourd’hui qui varient aux États-Unis, on constate que les exportations continuent d’augmenter sur le marché américain.

Donc nous allons continuer à utiliser la technique qui fait en sorte que, jusqu’à présent, l’économie du Québec se porte bien.

• Troisième réponse :

Lorsque l’on dit qu’on fait des choses concrètes, on l’a fait encore une fois dans les dossiers du bois d’œuvre. On l’a fait dans les dossiers de l’aérospatiale.

Nous allons nous assoir avec les travailleurs et nous assurer de représenter les intérêts avec… Premièrement, les représenter auprès des Américains. Mais deuxièmement de nous assoir et de faire en sorte qu’il n’y ait pas de perte d’emplois, qu’il y ait quoi que ce soit qu’on soit capable de protéger. D’avoir un plan de match qui va faire en sorte qu’on va défendre les intérêts des travailleurs jusqu’au bout.


 

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Trans-Mountain vs Énergie-Est

Publié le 3 juin 2018 | Temps de lecture : 7 minutes

Introduction

Trans-Mountain est le nom de ce pipeline que la pétrolière américaine Kinder Morgan veut construire pour acheminer le pétrole albertain vers l’océan Pacifique.

Afin de désenclaver ce pétrole — dont le seul débouché actuel se trouve vers les États-Unis — le gouvernement canadien veut lui permettre l’accès à d’autres marchés d’exportation, notamment en Asie.

Cet objectif est évidemment partagé par les provinces de l’Ouest (où l’industrie pétrolière canadienne est installée). Il est également appuyé par les institutions financières ontariennes; celles-ci ont massivement investi dans les sables bitumineux et sont impatientes d’obtenir un retour maximal de leurs investissements.

La Colombie-Britannique et les pipelines

Le projet de Trans-Mountain soulève beaucoup d’opposition parmi les citoyens de Colombie-Britannique.

Ce combat suscite de la sympathie chez nous, particulièrement auprès des Québécois qui ignorent que nos amis britannocolombiens étaient majoritairement d’accord avec les pipelines jusqu’au jour où il a été question qu’ils passent chez eux.

Le projet concurrent d’Énergie-Est devait traverser tout le Québec sans y créer d’emplois permanents et soumettait des centaines de plans d’eau québécois à un risque environnemental considérable.

Jusqu’à ce que ce projet soit abandonné parce que trop couteux, 54% des citoyens de Colombie britannique étaient d’accord avec la construction de ce pipeline.

De la même manière, l’opposition des maires de la région montréalaise au passage d’Énergie-Est ne recueillait la sympathie que de 48% des gens de Colombie-Britannique.

Il faut toutefois préciser que si Énergie-Est était supporté par toutes les provinces anglophones du pays, c’est en Colombie-Britannique que cet appui était le moins enthousiaste. On peut même dire que c’était un appui mou.

Il serait donc injuste de leur porter rancune pour si peu. Mais on doit avoir tout cela à l’esprit, sinon la devise du Québec ne serait pas ‘Je me souviens’.

Le spectre d’Énergie-Est

Puisque le pipeline Trans-Mountain dresse entre elles les provinces de l’Alberta et de la Colombie-Britannique, le fédéral a décidé de trancher la question et d’investir dans ce projet.

Déjà, le maire de Moncton et les dirigeants de la raffinerie d’Irwing au Nouveau-Brunswick crient à l’injustice et réclament que le fédéral ressuscite également le projet Énergie-Est.

Malheureusement pour eux, une fois Trans-Mountain construit, on n’aura pas besoin d’un pipeline semblable à Énergie-Est avant 2030.

En somme, au risque de manquer de rectitude politique, on peut affirmer que Trans-Mountain est, dans l’immédiat, une protection pour le Québec.

Par ailleurs, le combat des Britannocolombiens est de nature à révéler ce qui nous attend en 2030 si la consommation mondiale de pétrole justifie qu’on ressuscite Énergie-Est.

Les pouvoirs constitutionnels d’Ottawa

Selon la Canadian Constitution de 1982, les gouvernements provinciaux sont les intendants régionaux du gouvernement central canadien.

Ottawa possède les pouvoirs économiques les plus importants tandis que les provinces assurent des services de proximité (santé, éducation, réseau routier provincial, etc.).

Par le biais de leurs représentants provinciaux aux discussions constitutionnelles de 1982, les citoyens de la Colombie-Britannique ont consenti à cette concentration inouïe de pouvoirs à Ottawa. Voilà que maintenant cela se retourne contre eux.

Le transport interprovincial de marchandise (dont celui du pétrole) est un domaine de compétence exclusif du gouvernement canadien.

Ce dernier possède donc tous les pouvoirs constitutionnels qui lui sont nécessaires pour imposer le passage de Trans-Mountain en Colombie-Britannique.

De plus, le gouvernement Harper a modifié la loi de manière à ce que toute action citoyenne qui aurait pour effet de nuire à la construction d’infrastructure pétrolière réponde dorénavant à la définition d’un acte terroriste.

Le gouvernement Trudeau invoque l’intérêt national pour accroitre l’acceptabilité sociale à ce projet. Mais cela n’est pas nécessaire. Intérêt national ou non, la Colombie-Britannique devra capituler devant Ottawa.

Une leçon pour le Québec

Le sort qui attend les Britannocolombiens, c’est qui attend les Québécois à l’avenir. Selon les prévisions, le pipeline Trans-Mountain ne suffira plus au-delà de 2030.

Beaucoup de Québécois — notamment parmi nos amis fédéralistes — surestiment les pouvoirs des provinces au sein de la fédération canadienne. Même si la jurisprudence à ce sujet est déjà éloquente, une confrontation très médiatisée entre la Colombie-Britannique et Ottawa permettra d’ouvrir bien des yeux.

De plus, très peu de Québécois se rappellent de la violence des expropriations de Mirabel et du parc national de Forillon, dans les années 1970.

Dans ce dernier cas, l’État a donné aux 225 familles expropriées — presque tous fermiers qui vivaient en parfaite autarcie — une somme moyenne équivalente à 30 000$ d’aujourd’hui en échange pour leur maison, leurs bâtiments et leur terre.

Dans le cas de l’expropriation qui sera nécessaire au passage de Trans-Mountain, on ignore qui procèdera aux expropriations.

L’évaluation pourrait être faite par des fonctionnaires et cela prendra une éternité. Non pas parce que les fonctionnaires sont lents de nature, mais parce que le néolibéralisme a entrainé l’atrophie de la fonction publique des États.

Sinon, l’évaluation pourrait être faite par les pétrolières elles-mêmes. Dans ce cas, celles-ci offriront une bouchée de pain aux expropriés afin de maximiser leurs profits.

Des histoires déchirantes inonderont nos écrans de télévision et les médias sociaux.

La seule manière de nous soustraire à la répétition éventuelle de ce drame au Québec, c’est de faire l’indépendance d’ici là et de nous séparer du pétro-État canadien.

Le référendum de 2022 sera notre dernière chance. Et cette dernière chance ne nous sera pas offerte si le PQ n’est pas porté au pouvoir en octobre prochain.

Conclusion

S’il est vrai que la production de pétrole influence sa consommation par son effet indirect sur les prix, il faut réaliser que les gaz à effet de serre sont essentiellement causés par la consommation d’hydrocarbures et non leur production.

Quand la production d’une ressource est à l’origine de quelques unes des plus grandes fortunes du monde et que cette ressource est un enjeu géostratégique de première importance, il est enfantin de penser qu’on peut s’y opposer par des pétitions…

La seule manière de combattre l’industrie pétrolière, c’est en changeant nos habitudes de vie.

Le pouvoir des pétrolières, on l’accroit chaque fois qu’on fait le plein d’essence ou qu’on préfère acheter des aliments qui viennent de l’autre bout du monde.

Références :
Dépossession fédérale, sale boulot provincial
Most say governments will agree to new emissions targets, less convinced Canada will meet them
Réseau d’oléoducs Trans Mountain
2 inconvenient facts make Energy East pipeline revival unlikely
La vengeance des expropriés de Forillon

Paru depuis : Ottawa reprend un prêt pour réduire les intérêts de Trans Mountain (2025-02-10)

Au sujet de la dangerosité environnementale des pipelines :
Keystone pipeline raises concerns after third major spill in five years (2022-12-21)

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Écrit par Jean-Pierre Martel