La campagne électorale au Québec : les 21 et 22 août 2012

Publié le 23 août 2012 | Temps de lecture : 6 minutes


 
Face à face Legault-Marois

Ayant oublié de programmer l’enregistrement du face à face entre monsieur Legault et madame Marois, je n’ai vu que la vingtaine de minutes d’extraits publiés sur le site du réseau TVA.

La confrontation semble avoir été intéressante quoique par moments, elle ressemblait trop à une discussion privée entre collègues qui se sont laissés voilà longtemps sur un différend non résolu.

Le Parti québécois a tort de discréditer la promesse de la CAQ d’offrir un médecin de famille à chaque personne. En elle-même, cette mesure — qui n’est pas si compliquée que cela à mettre en exécution — ne fait pas grand-chose si ce n’est de respecter un droit fondamental : celui du droit à la santé.

Il est inconcevable que le quart de la population québécoise soit privé de l’accès à des soins de première ligne et, conséquemment, doive choisir entre endurer son mal ou attendre des heures pour être soigné à l’urgence d’un hôpital ou dans une clinique sans rendez-vous.

Pauline Marois réplique en disant qu’on ne peut pas demander à des femmes médecins de sacrifier leurs obligations familiales sur l’autel de la volonté de l’État. De plus, au Québec, les médecins sont obligés de travailler à l’hôpital, ce qui diminue d’autant leur disponibilité pour leur cabinet privé.

À mon avis, ce ne sont pas là des arguments contre le droit fondamental à l’accessibilité aux soins médicaux de première ligne : c’est un argument contre le chiffre fixe de 1 000 patients par médecin. Dans les faits, la charge médicale devra être modulée en fonctions de critères à définir.

Quant au chef de la CAQ, il radote lorsqu’il répète ad nauseam qu’un gouvernement péquiste vivrait dans l’obsession d’organiser sournoisement un référendum sur la souveraineté du Québec. Le Parti québécois est un parti responsable qui a déjà été au pouvoir et a donné au Québec plusieurs des meilleurs gouvernements de son histoire.

La Loi sur la citoyenneté québécoise

Pauline Marois a déclaré qu’un gouvernement péquiste adopterait une loi en vertu de laquelle, certains droit fondamentaux — celui de financer un parti politique, d’adresser une pétition à l’Assemblée nationale ou d’être candidat aux élections québécoises, municipales et scolaires — serait nié à quiconque ne possédant pas une connaissance appropriée de la langue française.

Devant le tollé que cette nouvelle a provoqué, les dirigeants du Parti québécois ont corrigé la chef de ce parti en précisant que cela n’affecterait pas la minorité anglophone actuelle, ni les peuples autochtones.

Ainsi, tous les citoyens vivant sur le territoire du Québec au moment de l’adoption éventuelle de la loi obtiendraient automatiquement la citoyenneté québécoise. Toutefois les nouveaux arrivants devraient respecter certaines conditions pour avoir cette citoyenneté.

En somme, le PQ propose une nouvelle catégorie de personne habitant le Québec : le sans-papier. Celui-ci aura des droits moindres. Et pour gérer cette nouvelle classe de citoyens sans « citoyenneté québécoise », on embauchera des fonctionnaires qui évalueront chez le requérant, sa connaissance « appropriée » du français.

Lorsque des néoQuébécois parlant français supportent l’immigration de leurs vieux parents chinois, slaves ou autres, trop vieux pour apprendre notre langue, on fera donc de ces derniers des citoyens de deuxième classe.

Dans les pétitions en ligne du gouvernement québécois, on permettra au signataire de certifier qu’il possède bien la citoyenneté québécoise en cochant une case prévue à cette fin. Et pour éviter les accusations de fraude, les responsables devront prendre des moyens raisonnables pour empêcher qu’une telle pétition ne soit noyautée par des sans-papiers déclarant faussement posséder leur carte. Une simple recherche de noms de famille suspects pourrait suffire, rassurant ainsi les maires xénophobes de l’arrière pays.

Lors des campagnes de financement, les partis politiques devront exiger la présentation de la carte de citoyenneté avant d’accepter le chèque de quelqu’un. Pas de carte, pas de contribution. Celles reçues par la poste devront être accompagnées d’une photocopie de la carte de citoyenneté, à défaut de quoi le chèque devrait être retourné à l’expéditeur. On imagine que la proportion d’argent « sale » versé illégalement aux partis politique pourrait augmenter.

Les personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer se verront refuser le droit de voter si elles ont égaré leur carte de citoyenneté québécoise, comme ce sera le cas pour n’importe quelle autre personne qui l’aura perdue.

Les jeunes adultes qui auront négligé de demander leur carte de citoyenneté lors de leur majorité, se verront également refuser le droit de voter… à moins qu’on prévoie dans chaque bureau de vote, des officiers dotés du pouvoir d’accorder temporairement le droit de vote à ceux qui n’auraient pas leur carte.

En préambule, la Charte québécoise des droits et libertés déclare : « tous les êtres humains sont égaux en valeur et en dignité et ont droit à une égale protection de la loi ». Je vais donc être clair. Afin d’être fidèle à ce principe, je promets de déchirer cette « carte-de-république-de-banane » le jour où je la recevrai si jamais celle-ci m’accorde un statut discriminatoire par rapport à d’autres personnes qui aiment le Québec et qui aspirent à y vivre. Et si jamais ce geste me porte préjudice, je m’engage à en contester la constitutionnalité douteuse.

Pour terminer, je me demande si par hasard, le Parti Québécois aurait oublié que l’objectif cette campagne, c’est de nous débarasser d’un gouvernement pourri et non de diviser la province en vrais et en faux Québécois.

Références :
Charte des droits et libertés de la personne
Citoyenneté québécoise: réactions et réajustements

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La campagne électorale au Québec : le face-à-face Charest-Legault

Publié le 22 août 2012 | Temps de lecture : 10 minutes

Hier soir sur les ondes de TVA se tenait le second des trois confrontations prévues, soit celle qui opposait Jean Charest et François Legault.

La corruption

Mon premier étonnement, c’est la facilité avec laquelle Jean Charest a enfirouapé François Legault au sujet de la corruption.

Monsieur Legault a attaché une importance démesurée à un fait divers : les billets pour un spectacle de Céline Dion qu’une ministre du gouvernement Charest a acceptés de la part d’un promoteur. Il ne fait aucun doute que la ministre aurait dû refuser ce cadeau. Mais tout cela est une niaiserie. On ne répudie pas de gouvernement pour un cadeau insignifiant accepté par un ministre.

De plus, est-ce vraiment le pire cas de corruption rapporté au sujet du gouvernement sortant ?

En contre-attaque, monsieur Charest a évoqué les informations révélées hier soir par Radio-Canada, relativement au financement de la campagne électorale municipale de Jacques Duchesneau en 1998. Voilà le genre de « scandale-de-la-dernière-minute » dont je me méfie et que j’ai déjà critiqué quand ce genre de révélation — qui pue la manipulation — concernait le Parti libéral.

Le décrochage scolaire

Jean Charest : « Le Québec a le meilleur taux de diplomation pour l’ensemble de la population, au Canada et dans les pays de l’OCDE. Ça c’est la population de 20 ans et (plus). Le problème se situe à un niveau très précis : c’est pour les jeunes qui ont moins de 20 ans… »

Pierre Bruneau (animateur): « …Exact, 32% des jeunes garçons de 20 ans sont sans diplôme Taux de décrochage (en) 2009 (pour les) garçons : 21,5% ont décroché.»

Jean Charest : « Et le score est meilleur qu’il l’était, même à l’époque où monsieur Legault était au gouvernement. Nous avons réussi à augmenter le taux de diplomation. Nous avons une politique où l’objectif, c’est d’arriver à un taux de diplomation de 80% pour ces jeunes-là qui sont à l’intérieur du programme. Mais (…) il faut mettre les choses en perspective : le Québec a un des meilleurs taux de diplomation pour l’ensemble de sa population. »

Étrangement, messieurs Charest et Bruneau ont raison tous les deux. Il peut sembler évident que « décrochage scolaire » et « diplomation » soient les contraires l’un de l’autre. Ce n’est pas le cas.

Le taux de diplomation est obtenu en analysant les données des recensements : c’est la proportion de la population canadienne détentrice d’un diplôme universitaire ou collégial. Le Québec n’a pas le plus haut taux au pays — contrairement à ce qu’affirme M. Charest — mais il est plus élevé que la moyenne canadienne, ce qui n’est pas si mal.

Le taux de décrochage concerne les gens qui n’ont pas réussi à obtenir leur diplôme plus d’un certain nombre d’années après l’âge où ils devraient l’avoir. Ce taux ne tient pas compte de tous ceux qui ont abandonné leurs études mais qui ont réussi à obtenir leur diplôme beaucoup plus tard, grâce aux cours pour adultes ou à la suite d’un retour aux études.

Pénurie de médecins vs promesse d’un médecin de famille

Dans ce débat, on a invoqué la pénurie de médecins pour discréditer la promesse de la CAQ de forcer chaque médecin omnipraticien à augmenter la liste de ses patients, de manière à ce que chaque Québécois ait un médecin de famille.

Il est évident que la pénurie de médecins est partiellement responsable du fait qu’une minorité importante de la population québécoise n’a pas accès à un omnipraticien. Signalons que la moitié de ceux qui n’ont pas de médecin de famille admettent ne pas en avoir cherché.

Partout en Occident, il y a une pénurie de médecins. Pourtant la suggestion de la CAQ est déjà en application dans certains pays où une pénurie semblable existe. En Grande-Bretagne, non seulement les médecins se voient attribuer les habitants d’un territoire précis mais on leur offre des incitations monétaires s’ils y améliorent la santé des gens qui y vivent, plus précisément s’ils réduisent leur consommation en médicaments et leur besoin en soins hospitaliers.

Le Québec se classe au 4e rang des provinces canadiennes quant au nombre de médecins par 100 000 habitants mais au dernier rang pour ce qui est du pourcentage de sa population qui possèdent un médecin de famille; seulement les trois quarts des Québécois en ont un. Avec moins de médecins, l’Ontario fait mieux puisque 91% des gens y possèdent un médecin de famille.

Évidemment, la suggestion de la CAQ doit être assortie d’autres mesures — certaines sont déjà au programme de ce parti — afin d’alléger la tâche des omnipraticiens. Sans ces autres mesures, allonger la liste des patients d’un médecin ne fait qu’allonger proportionnellement l’attente de ses patients pour obtenir un rendez-vous avec lui.

Revenu disponible

Tout comme lors du débat des chefs à Radio-Canada, monsieur Charest s’est vanté de l’augmentation du revenu disponible des Québécois au cours des neuf dernières années. Ce que dit monsieur Charest, c’est que, sans tenir compte de l’inflation, le Québécois moyen gagne plus d’argent maintenant qu’il y a neuf ans : le contraire serait étonnant.

Plus significative est la réplique de monsieur Legault. Ce dernier a raison d’affirmer que la croissance économique du Québec a été inférieure à la moyenne canadienne au cours des années où monsieur Charest a été au pouvoir, alors que c’était le contraire au cours de la décennie précédante. Lors de l’arrivée au pouvoir de M. Charest, le Québec était au 4e rang au Canada quant au revenu disponible par personne : il a décliné au 9e rang depuis.

L’affaire Provigo

Accusé d’être responsable de la perte de 20% des sièges sociaux au Québec, monsieur Charest a accusé son adversaire d’être responsable de la vente d’une chaine d’épicerie à des intérêts étrangers alors qu’il était ministre d’un gouvernement péquiste.

Tirons les choses au clair. Le peuple du Québec a puni le Parti québécois pour toutes les erreurs qu’il a commises, en le jetant dans l’opposition. L’opposition, c’est le purgatoire des gouvernements déchus.

Il serait futile de reprocher à monsieur Charest les erreurs commises par les premiers ministres libéraux qu’étaient Jean Lesage et Robert Bourassa. Tout comme un condamné qui a purgé sa peine, les erreurs des gouvernements anciens ne sont plus pertinentes à l’élection présente.

Par contre, en voulant se faire élire en 2003, le Parti libéral a critiqué ces erreurs et a été élu sur la promesse de les corriger. C’est maintenant son bilan à lui qui doit être jugé par le peuple.

Les transferts fédéraux

Jean Charest : « S’il y a eu une chose qui a été prouvée au cours des dernières années, c’est qu’à l’époque où vous étiez au gouvernement péquiste, il y a eu un recul du Québec à l’intérieur du Canada puis dans les relations avec le (gouvernement) fédéral, puis les transferts fédéraux. Vous avez même fait partie d’un gouvernement qui a dit que vous acceptiez les coupures que le (gouvernement) fédéral faisait alors que moi, quand j’étais en politique fédérale, en même temps, je combattais les coupures du Fédéral envers le Québec. Les transferts ont augmenté de 70% depuis qu’on est là…»

Mon Dieu, que de demi vérités.

Au cours de neuf des dix dernières années du gouvernement du Parti québécois, la croissance économique du Québec était supérieure à la moyenne canadienne. Si bien que le Québec était devenu la quatrième province la plus riche du pays quant au revenu par personne. Conséquemment, le gouvernement fédéral avait même diminué légèrement la péréquation versée au Québec. En effet, seules les provinces pauvres peuvent bénéficier de ce mécanisme de redistribution de la richesse canadienne. Lorsqu’une province devient moins pauvre, elle reçoit moins de péréquation.

Dès son accession au pouvoir, le gouvernement Charest s’est mis à couper à tort et à travers dans les dépenses publiques pour dégager des milliards de dollars, afin de réaliser sa promesse de réduire les impôts des riches. Ces coupures — tout comme celles auxquelles procèdent actuellement la Grèce, l’Espagne et l’Italie — provoquèrent une contraction de la croissance économique.

Cette contraction n’a pas été suffisante pour provoquer une récession, mais a suffi à ralentir la croissance économique du Québec et à faire revenir cette croissance sous la moyenne canadienne. Cela fut vrai dès la première année du gouvernement Charest. Et cela n’a pas cessé d’être le cas jusqu’en 2008.

De 2008 à 2011, la croissance a toutefois été de 4,7% au Québec (vs 3,5% pour l’ensemble du pays). Cet avantage d’un pour cent ces dernières années n’a pas été suffisant pour réparer les dommages subis de 2003 à 2008, ce qui a fait chuter le Québec à l’avant-dernier rang canadien (devant l’Île-du-Prince-Édouard) quant au revenu disponible par personne.

Et parce que le Québec s’est appauvri comparativement aux autres provinces, le Québec a reçu plus d’argent de la péréquation fédérale. Donc en se vantant d’avoir obtenu plus d’argent du fédéral, monsieur Charest se vante implicitement d’avoir appauvri le Québec. Faut le faire…

Conclusion

Le grand gagnant de ce débat est monsieur Charest. Par des demi vérités, ce dernier a esquivé à peu près toutes les attaques de son adversaire et l’a contraint à répliquer à des reproches (Provigo, Duchesneau) à la suite desquels monsieur Legault n’a pas su rebondir en attaquant efficacement à son tour.

Quant à monsieur Legault, il a trop fait paraitre son agacement en grimaçant et en fronçant les sourcils, ce qui n’est à l’avantage de personne, surtout sur une télévision en haute-définition. De plus, sa manie de hocher de la tête et de dire « oui » lorsqu’il piaffe d’impatience de parler à son tour, fait qu’on peut avoir l’impression qu’il est d’accord avec les reproches qu’on lui adresse.

Le fait qu’il ait mal performé relativement à un sujet aussi facile que la corruption — dans lequel un champion de l’éthique devrait exceller — n’a pas beaucoup d’importance puisque la grande majorité des électeurs sont déjà convaincus des lacunes du gouvernement sortant. Mais cela jette un doute quant à l’aptitude de monsieur Legault à affronter l’adversité pour défendre les intérêts du Québec. L’impression qu’il laisse est celle d’un homme intelligent, sincère et honnête, mais faible devant l’adversaire.

La confrontation avec madame Marois nous donnera l’occasion de modifier cette mauvaise impression.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le rapport Moisan et sa pertinence actuelle

Publié le 21 août 2012 | Temps de lecture : 8 minutes


 
Lors du débat télévisé sur les ondes de la télévision d’État, monsieur Charest a sorti des boules à mites le Rapport Moisan, dont j’ignorais l’existence et que j’ai lu ce matin.

À la Commission d’enquête Gomery (relative au scandale des commandites), les dirigeants d’une agence de publicité avaient affirmé avoir contribué non seulement à la caisse électorale du Parti libéral fédéral, mais également à la caisse électorale du Parti québécois (à l’époque où ce parti était au pouvoir).

Cette révélation a justifié la création, par le Parti libéral du Québec, d’une Commission d’enquête dirigée par Me Jean Moisan dont le rapport est un document de 23 pages rendu public en 2006.

La corruption du PQ

En gros, le Rapport Moisan nous apprend que de 1995 à 2000, l’agence Groupaction a contribué 96 000$ à la caisse du Parti québécois dans l’espoir d’obtenir des contrats de publicité du gouvernement du Québec.

Limitée par la Loi sur le financement des parti politiques (adoptée par le Parti québécois), cette agence incitait ses employés à faire un chèque au PQ pour le maximum permis par la loi et leur garantissait le remboursement de cette contribution. Les chèques étaient remis de main à main à des collecteurs de fonds du PQ. Dans tous les cas, les chèques ont dûment été inscrits dans les registres du PQ.

Le rapport écrit : « Depuis longtemps, les personnes morales contribuent au financement des partis. Incapables de le faire légalement, elles utilisent le moyen détourné de dons par leurs employés et de contributions à diverses activités payées par les employés et remboursées par l’employeur.»

À la lecture du rapport, il ne semble pas que cet investissement ait été très rentable puisque cette agence n’a reçu qu’un seul contrat du gouvernement provincial, pour une publicité de la Société des alcools du Québec en 1997 (dont le montant n’est pas précisé).

Si les contributions Groupaction au PQ après 1997 n’ont rien donné, c’est peut-être moins parce que le PQ était incorruptible, que le fait que Groupaction était connu pour ses liens avec le Parti libéral du Canada.

Si ma mémoire est bonne, l’autre cas de contribution illégale ou suspecte révélé par monsieur Charest, serait la somme de 2 500$ versée par la fille de madame Marois à sa mère.

La corruption du Parti libéral du Québec

Monsieur Charest attache beaucoup d’importance à préciser que le seul cas de corruption prouvée devant les tribunaux concerne le PQ. Si le Premier ministre n’avait pas refusé pendant deux ans de mettre sur pied la Commission d’enquête relative à la corruption dans l’industrie de la corruption, si Jacques Duchesneau n’avait pas eu à se battre pendant 18 mois pour finalement avoir un bureau à lui et les moyens concrets de mener ses enquêtes, et si les élections n’avaient pas été déclenchées avant la reprise des travaux de la Commission Charbonneau, il est absolument certain qu’on aurait aujourd’hui beaucoup plus de décisions judiciaires relatives à la corruption au Québec.

Seulement pour l’année 2008, 64 des employés de CIMA+ (une entreprise de génie-conseil) ont donné un total de 171 795$ au Parti libéral du Québec. CIMA+ a obtenu des dizaines de millions de dollars en contrats du gouvernement Charest, dont plusieurs millions sans appel d’offres du Ministère des transports du Québec.

En 2010, au cours d’une entrevue avec le journaliste Alain Gravel de Radio-Canada, Me Marc Bellemare, ex-ministre de la Justice du Québec, allègue qu’il a été témoin d’importantes sommes d’argent comptant versées par un influent collecteur de fonds du Parti libéral du Québec à un permanent de ce parti. Rappelons que la loi interdit toute contribution d’argent comptant à un parti politique.

Depuis l’accession au pouvoir du Parti libéral, le Ministère des transports a contourné la loi qui l’oblige à procéder à des appels d’offres pour tout projet dont le budget dépasse un certain seuil, en morcelant les projets en plus petits contrats, de manière à ce que ces derniers soient en deçà de ce seuil. C’est ainsi qu’on a triplé le nombre de contrats accordés sans appel d’offres.

De la même manière, on a créé des Agences de santé — que se propose d’abolir la CAQ — pour soustraire l’État à cette obligation. On a donc pu accorder une série de contrats totalisant 360 millions$ — vous avez bien lu : un tiers de milliard$ — sans appel d’offres à un contributeur à la caisse du Parti libéral du Québec.

Le 11 octobre 2011, le directeur des poursuites pénales dépose trois chefs d’accusation contre Tony Tomassi relativement à des actes qu’il aurait commis à l’époque où il était ministre du gouvernement Charest. Le ministre disposait d’une carte de crédit payée par une agence de sécurité qui obtenait des contrats gouvernementaux.

En 2010, on apprenait que 1 600 places de garderie avaient été accordées à 32 garderies privées, dont les administrateurs ont versé 112 000$ au Parti libéral depuis 2003.

En 2007, la ministre de la Justice nommait quinze juges dont treize étaient des donateurs à la caisse du Parti libéral du Québec.

La Commission Bastarache nous a appris que seuls les avocats dont le dossier transmis au Conseil des ministres portait un auto-collant jaune (en fait, un Post-it note) pouvaient espérer être nommés juges. Or seuls les candidats qui ont fait du bénévolat pour le parti au pouvoir, qui ont contribué à la caisse électorale de ce parti ou qui sont parents avec des collecteurs de fonds du parti, bénéficiaient du précieux collant jaune apposé par Mme Chantal Landry (la Directrice-adjointe du cabinet du premier ministre). En somme, tous les candidats plus compétents étaient exclus — y compris ceux recommandés par le ministre de la Justice — s’ils ne faisaient pas partie de la bande libérale.

Conclusion

On ne peut comparer la « corruption » du Parti québécois avec celle du Parti libéral. On n’est tout simplement pas dans le même ordre de grandeur.

De 1976 à 1985 et de 1994 à 2003, soit pendant près de deux décennies, si les seuls cas de corruption péquiste sont ceux rapportés par monsieur Charest, nous sommes en présence d’un scandale raté.

Dans ses recommandations, le Rapport Moisan imputait le contournement de la Loi sur le financement des partis politiques à la trop grande rigueur de cette loi. Il préconisait une augmentation du plafond que peut verser une entreprise.

À mon avis, Me Marsan n’a pas compris que le but de la loi était de libérer nos politiciens du pouvoir de l’argent et de s’assurer de leur loyauté envers la nation québécoise.

Lors du débat des chefs, dimanche dernier, Mme Françoise David, co-présidente de Québec solidaire, émettait l’opinion qu’en plus de limiter les contributions à la caisse des partis politiques, on devait également plafonner les dépenses électorales.

Ces dépenses permettent aux partis politiques d’organiser des rassemblements et de sillonner le Québec à la rencontre de la population québécoise. Il serait malheureux d’empêcher cette expression de la Démocratie.

Toutefois, je suis d’avis qu’on devrait plutôt interdire toute publicité payée, qu’elle soit télévisée, radiophonique ou écrite. Seules les véritables entrevues seraient permises, de même que le compte-rendu des journalistes.

La tendance actuelle de la publicité électorale, c’est vers le dénigrement et la propagande stupide. Cette forme de manipulation et de lavage de cerveaux est superflue. Conséquemment, elle devrait être interdite.

À l’issue d’une élection, toutes les sommes au-delà de celles nécessaires au bon fonctionnement d’un parti durant les cinq années suivantes, devraient être remises à l’État.

Références :
Copinage et contributions politiques en série
Dur contre les étudiants, mou contre la corruption et le gaspillage
Garderies: la version du ministre Tomassi est contredite
L’argent comptant et la corruption du Parti libéral du Québec
L’argent de la corruption libérale
Le parti de l’exclusion
Le Parti libéral du Québec encore dans l’eau chaude
L’UPAC aux portes de la classe politique
Rapport Moisan
Tony Tomassi

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| 2003-2012 (années Charest), Politique québécoise | Mots-clés : , | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Le débat des chefs à Radio-Canada

Publié le 20 août 2012 | Temps de lecture : 7 minutes

Au cours de la présente campagne électorale, les chefs des principaux partis politiques auront eu l’occasion de s’affronter lors de quatre rencontres télévisées : une à Radio-Canada et trois à Télé-Métropole.

La plus importante avait lieu hier soir. Après une brève présentation, les chefs devaient débattre de quatre thèmes, puis terminer par une courte conclusion.

Au départ, les chefs m’ont laissé les impressions suivantes :
• Françoise David m’est apparue calme et rassurante,
• Jean Charest avait les yeux roses comme s’il avait pleuré juste avant le débat,
• François Legault s’exprimait simplement et clairement,
• Pauline Marois utilisait une voix feutrée (qu’elle a conservée durant presque tout le débat) et avait l’air décidée.

Premier thème : Les enjeux économiques

Le premier échange qui m’a plu est celui relatif à la croissance économique du Québec.

Jean Charest : « Tous les Québécois ont un revenu disponible plus élevé aujourd’hui (que celui) qu’ils avaient depuis 2003, incluant la classe moyenne ».

Ceci est une demi-vérité. Depuis la crise des années 1930, les salaires ont toujours été plus élevés dix ans plus tard que dix ans plus tôt. La réplique suivante remet les pendules à l’heure.

François Legault : « Pendant que le Québec marche, les autres provinces courent. La réalité, c’est que quand monsieur Charest est arrivé au pouvoir en 2003, le Québec était la 4e province pour son revenu disponible (par personne). Aujourd’hui, c’est rendu le 9e. Il y a seulement l’Île-du-Prince-Édouard qui a un revenu disponible (par personne) bas que le nôtre. »

Monsieur Legault a raison. Sous la gouverne de monsieur Charest, la croissance économique du Québec a été, dans l’ensemble, inférieure à la moyenne canadienne, alors que c’était le contraire au cours de la décennie qui a précédé son accession au pouvoir.

Cette vérité est fondamentale. Pourtant, je lis partout les textes d’éditorialistes qui répètent comme des perroquets que le Québec a bien traversé la crise économique (ce qui est vrai) mais qui oublient de dire que dans l’ensemble des neuf années du gouvernement Charest, celui-ci a été une calamité du strict point de vue économique.

Une autre chose qui a attiré mon attention, c’est l’obstination à promettre que les redevances minières serviront au remboursement de la dette.

Quand j’entends un chef de parti promettre que la totalité de ces redevances y seront consacrées, ma réaction est de me dire : « Mais d’où viendra l’argent pour la restauration des sites abandonnés par les compagnies minières ? Les redevances actuelles sont à peines supérieures au coût des restaurations.»

Doit-on comprendre que si le prix des matières premières devait s’effondrer alors que les autres secteurs de l’économie seraient en plein essor, on cessera de rembourser la dette parce qu’on ne reçoit plus de redevances ?

En réalité, tous les items au budget de l’État sont des vases communicants. Les redevances devraient être versées au Trésor public et l’État allouera ses revenus de manière appropriée, incluant le remboursement de la dette. Ce qui compte, c’est l’engagement à rembourser la dette et non de préciser un pourcentage des redevances minières qu’on pourrait y consacrer.

Deuxième thème : La gouvernance

À mon avis, l’intervention la plus remarquable a été celle de la chef de Québec Solidaire.

Françoise David : « J’aimerais ça rappeler qu’il y a déjà deux ans, on a publié une première recherche qui a conduit en fait à la mise à l’amende de la compagnie Axor pour avoir utilisé des prête-noms pour envoyer de l’argent aux trois partis politiques qui étaient en poste depuis bien des années : le Parti libéral, le Parti québécois et l’Action démocratique du Québec.»

« On est revenu ce printemps avec un autre rapport très fouillé qui démontre sans l’ombre d’un doute qu’effectivement depuis 30 ans, il y a collusion et corruption dans les partis politiques. Nous proposons de réduire de façon importante les dépenses électorales pour qu’il y ait moins de tentation à l’avenir.»

En réponse à cette accusation (et à celles de ses autres adversaires), monsieur Charest a sorti des boules à mite le rapport Moisan, que je n’ai pas lu mais que je me propose de lire. D’ici là, j’ai comme l’impression qu’argumenter au sujet de ce rapport, c’est utiliser l’arbre pour cacher la forêt. Et la forêt, c’est que le gouvernement Charest est corrompu à l’os.

Troisième thème : Les politiques sociales

Dans l’ensemble, j’ai trouvé que les interventions de Françoise David démontraient chez elle une vision globale plus cohérente et moins anecdotique que celle de ses collègues.

La discussion a beaucoup portée sur la promesse de la CAQ de garantir un médecin de famille à chaque Québécois.

J’aimerais profiter de l’occasion pour réfuter un argument que monsieur Charest répète inlassablement depuis qu’il est au pouvoir.

Jean Charest : « Il en manque mille médecins de famille au Québec. (…) Pourquoi il en manque mille ? Parce que monsieur Legault avec madame Marois ont passé la scie à chaine dans le système de santé quand ils étaient là. Puis ils ont mis des médecins à la retraite. Et des infirmières. Et des techniciens. Et nous en payons encore le prix aujourd’hui.»

En 1996, lorsque le gouvernement fédéral a coupé de manière importante ses transferts aux provinces relativement aux dépenses de santé, celles-ci ont coupé en catastrophe dans leurs budgets respectifs. L’Ontario a fermé des hôpitaux et le Québec a mis à la retraite une partie de ses médecins. Était-ce la meilleure décision à prendre ? J’en doute. Toutefois, lorsque cette mesure a été prise, les médecins mis à la retraite étaient déjà âgés. Aujourd’hui une partie d’entre eux sont décédés et l’autre partie se déplace en marchette.

À moins que les médecins décédés soient morts de chagrin, insinuer que s’ils n’avaient pas été mis à la retraite, ces vieux médecins seraient là, 16 ans plus tard, à prêter main forte aux médecins d’aujourd’hui, cela est une insulte à l’intelligence de ceux qui veulent croire monsieur Charest

Troisième thème : Question nationale et identité

Il s’agit d’une question importante. Mais je n’ai pas trouvé intéressante la discussion s’y rapportant, trop axée sur de belles professions de foi.

Conclusion

Dans ce débat, Françoise David a été excellente. Je lui donnerais la première étoile.

Pauline Marois a axé sa conclusion sur l’aptitude de son équipe à gouverner. Je lui donnerais la deuxième étoile.

J’aurais aimé que la conclusion de monsieur Legault soit moins critique envers ses adversaires et qu’il en profite pour parler comme un chef d’État. Malgré cela, je lui donnerais la troisième étoile.

Jean Charest a bien présenté les sujets favoris de sa campagne, dont l’importance de réélire un gouvernement dédié à l’économie afin traverser le mieux possible un contexte mondial incertain. Je lui donnerais une mention d’honneur pour son habilité à défendre si vaillamment son gouvernement.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La campagne électorale au Québec : le samedi 18 août 2012

Publié le 19 août 2012 | Temps de lecture : 4 minutes

Parce qu’ils se préparent au premier débat contradictoire télévisé, les candidats des principales formations politiques ont pris congé hier.

Seul monsieur Charest a fait une promesse en matinée, celle de créer 11 500 nouvelles places de stationnement incitatif dans la grande région de Montréal (dont 1 500 sur le territoire de Laval), afin de favoriser l’utilisation du transport en commun.

Je profite donc de ce répit pour parler de la confrontation de la semaine, celle qui a opposé le maire de la ville de Saguenay, Jean Tremblay, à la candidate du PQ dans le comté de Trois-Rivières, Djemila Benhabib, sur les ondes de Radio-Canada.

L’intégrisme qu’on ne voit pas

Il y a quelques années, agacés par ce qu’ils percevaient comme étant de la propagande chrétienne, des Américains d’autres confessions religieuses avaient convaincu des grands magasins de cesser d’utiliser le mot « Christmas » (qui veut dire « Noël » mais qui se traduit littéralement « Messe du Christ ») et de parler plutôt de la « Saison du temps des Fêtes » (« Holiday Season »).

Cette nouvelle souleva l’indignation des milieux fondamentalistes chrétiens du Sud des États-Unis qui menacèrent de boycotter tous les magasins qui, au contraire, cesseraient d’utiliser le mot controversé.

Coincées entre ces deux groupes, les magasins ont préféré opter pour le groupe majoritaire et continuer d’utiliser « Christmas », mais de manière plus discrète, le mot étant noyé dans les décorations tappe-à-l’oeil du temps des Fêtes.

Il y quelques jours, j’écoutais l’entrevue que donnait Monsieur Jean Tremblay à l’animateur radiophonique Paul Arcand. Le maire de la ville de Saguenay y qualifiait la candidate péquiste Djemila Benhabib d’intégriste.

Condamnée à mort par les Islamistes algériens, sa famille a quitté le port d’Oran en 1994 pour se réfugier en France en 1994. Au Québec depuis 1997, Mme Benhabib y a écrit deux livres dénonçant le fondamentalisme musulman (Ma vie à contre-Coran et Une femme témoigne sur les islamistes).

Mais voilà que Mme Benhabib est traîtée elle-même d’intégriste par le maire de Saguenay. Ce qui nous amène à nous demander c’est quoi, l’intégrisme.

Ce terme désigne une intransigeance extrême en vue d’imposer ses règles à la totalité de la société et régenter la vie de chacun selon celles-ci.

Le maire Jean Tremblay a été condamné à payer une amende et des frais totalisant la somme de 33 500$ pour avoir imposé une prière publiquement à l’ouverture des séances de son Conseil municipal.

Les tribunaux estiment que dans l’exercice de ses fonctions, un représentant de l’État ne peut imposer à quiconque l’obligation d’assister à un rituel de nature religieuse, quel qu’il soit. Par opposition, on peut imposer un moment de recueillement que chacun pourra utiliser à sa manière.

Malgré cette condamnation, le maire de Saguenay persiste à réciter sa prière, plaçant la Volonté présumée de Dieu au-dessus des lois humaines. Cette attitude a été qualifiée de courageuse par le ministre et candidat libéral de la région, Serge Simard.

Monsieur Tremblay serait sans doute insulté d’être qualifié d’intégriste mais la triste vérité c’est qu’il répond parfaitement à la définition du terme. Évidemment, il y a intégrisme et intégrisme. Le sien est une forme mineure, un peu folklorique, qui ne menace pas la vie de personne, et qu’on pourrait qualifier également de zèle religieux excessif et déplacé, tenté d’une xénophobie stupide.

Parce que tout cela est anodin, l’intégriste léger ne se perçoit pas comme intégriste. En fait, même l’intégriste pur et dur ne se perçoit pas comme tel parce que pour lui, il est impossible de trop aimer Dieu et qu’il n’y a rien de répréhensible à vouloir ardemment réaliser sa Volonté.

En somme, l’intégrisme, c’est comme l’accent. Les autres parlent avec un accent : jamais nous.

Si Mme Benhabib réclamait qu’on remplace le crucifix de l’Assemblée nationale par un croissant musulman, ce serait de l’intégrisme. À titre personnel, elle croit que ce crucifix devrait être retiré. C’est également mon avis. Mais à titre de candidate du PQ, elle épouse la politique de cette formation politique, qui est de ne pas toucher au crucifix.

Si, comme je présume, monsieur le maire de Saguenay est un homme d’honneur, lui doit donc des excuses publiques.

Références :
Djemila Benhabib
La prière publique aux assemblées municipales

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La campagne électorale au Québec : le vendredi 17 août 2012

Publié le 18 août 2012 | Temps de lecture : 6 minutes


 
Le Parti libéral présente son cadre financier

Le programme électoral du PLQ fait 28 pages dont les trois dernières représentent le cadre financier de ses engagements électoraux. On y présente les grandes lignes du budget projeté pour l’année 2013-2014 et le détail des dépenses et pertes de revenus occasionnées par ces promesses lors de la cinquième année d’un quatrième mandat libéral.

Puisque monsieur Charest ne s’est jamais rendu à la cinquième année de ses trois mandats précédents, je ne commenterai pas les deux pages spéculatives du budget de l’an 5. Il reste donc la page concernant l’année 2013-2014.

En manchette : le Parti libéral compte atteindre l’équilibre budgétaire en 2013-2014. Rappelons que cet équilibre existait déjà avant l’accession de monsieur Charest au pouvoir.

En 1996, le premier ministre péquiste Lucien Bouchard faisait adopter la « Loi sur l’équilibre budgétaire » (surnommée Loi du déficit zéro). En mars 1999, le ministre des Finances Bernard Landry annonçait fièrement que le gouvernement du Québec avait réalisé son premier surplus financier depuis quarante ans. Cette orientation fut maintenue lorsque Pauline Marois succéda à Bernard Landry aux finances du Québec.

Lors de la crise économique mondiale, le gouvernement Charest avait fait adopter — sous le bâillon — son projet de Loi 40 (qui suspendait l’application de la Loi du déficit zéro).

De nos jours, les trois principaux partis politiques se proposent d’atteindre l’équilibre budgétaire au cours des prochaines années. Mais, comme on vient de le voir, monsieur Charest a bien tort de laisser entendre que seul un gouvernement libéral peut y parvenir.

Le Parti libéral évalue le coût de ses promesses électorales à 1,2 milliards$ qui, réparties sur cinq ans, donnent une moyenne annuelle de 245 millions$. Pour financer cela, monsieur Charest abaissera la croissance de l’ensemble des dépenses de l’État à 2% alors que le présent budget de l’État prévoit une croissance de 3% : ce ralentissement de croissance dégagera une marge de plus de 600 millions de dollars$ annuellement… à la condition que la croissance des revenus de l’État se maintient au niveau actuel, soit 2% par année.

Quant à cette croissance anticipée des revenus, elle se fonde sur une croissance économique anticipée de 2% annuellement pour les cinq prochaines années, ce qui est extrêmement douteux, du moins dans un avenir prévisible. Bref, de la foutaise.

Références :
Budget du gouvernement québécois pour l’année 2000-2001
Budget du gouvernement québécois pour l’année 2001-2002
Dévoilement du programme électoral et du cadre financier
Cadre financier : Jean Charest joue la carte de la rigueur

La CAQ présente son cadre financier

Tout comme le chef libéral, François Legault présentait hier le cadre financier de ses promesses électorales, les plus couteuses des trois principales formations politiques. Ce document de six pages porte exclusivement sur ce cadre financier : il est donc plus détaillé que celui du Parti libéral, qui n’en réservait que trois à cette fin. Pour être franc, il est admirablement bien présenté.

À l’exclusion de l’année 2014-2015, la CAQ prévoit des surplus budgétaires pour chacune des cinq ans d’un gouvernement caquiste.

Puisque les promesses caquistes ne seront pas toutes mises en œuvre dès la première année, on trouvera ci-dessous que le sommaire pour l’année 2013-2014 seulement.

Afin de financer ces engagements, la CAQ prévoit près d’un milliard$ de revenus supplémentaires :
• 416 millions$ en diminuant de moitié l’exonération sur le gain en capital (sauf pour le secteur agricole et la vente d’une propriété principale),
• 127 millions$ en réduisant les crédits d’impôt pour dividendes,
• 200 millions$ en réduisant les crédits d’impôt aux entreprises,
• 150 millions$ en augmentant les redevances minières.

Cette formation politique prévoit également des coupures importantes dans les dépenses de l’État :
• 110 millions$ grâce à des gains d’efficacité chez Hydro-Québec (en fait, des coupures de postes),
• 250 millions$ à la réduction des honoraires des pharmaciens,
• 50 millions$ à la diminution de la consommation des médicaments,
• 30 millions$ à l’abolition des agences de santé et des services sociaux,
• 10 millions$ à l’amélioration de la gestion des achats et des immobilisations effectués par les maisons d’enseignement.

Bref, le total de ces économies et de ces nouveaux revenus financerait les dépenses caquistes. Toutefois, tout ce bel échafaudage repose sur une croissance anticipée de 2% annuellement pour l’économique québécoise pendant les cinq prochaines années, ce qui est totalement irréaliste, du moins dans un avenir prévisible. Bref, de la comptabilité sous l’influence du LSD.

Référence : Legault ne reniera aucune promesse

Le PQ dévoilera son cadre financier plus tard dans la campagne

Jusqu’à maintenant, le Parti Québécois est celui qui a promis le moins de nouvelles dépenses. Madame Marois a indiqué que sa formation politique dévoilera plus tard au cours de la campagne électorale, le cadre financier de ses promesses.

Puisqu’il n’y a rien à dire, on me permettra de commenter une déclaration de François Legault relative au PQ. Le chef de la CAQ a affirmé : « Contrairement au Parti Québécois, on n’est pas obsédé à gagner le prochain référendum puis à faire des compromis avec tous les groupes de pressions pour les mettre de notre côté.»

Depuis le début de la campagne, le parti qui s’expose le plus à l’accusation de chercher à acheter le vote par des promesses dépensières, c’est la CAQ et non le PQ.

De plus, le Parti libéral et le PQ, minimisent tous deux l’impact de leurs coupures budgétaires — purement administratives, disent les Libéraux — alors que la CAQ souligne, au contraire, qu’il s’agit d’un grand ménage, au grand plaisir d’un électorat ulcéré par le gaspillage et la corruption.

On peut donc anticiper qu’une fois au pouvoir, un gouvernement caquiste aurait plus de mal à rassurer ses partenaires sociaux et à leur faire accepter ses réformes. Le chef du Parti libéral n’a donc pas complètement tort en accusant la CAQ d’être le parti de la chicane, une accusation inusitée de la part d’un Premier ministre qui comptait sur le conflit étudiant pour se faire réélire.

Référence : Marois fera pour 1 milliard de promesses

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La campagne électorale au Québec : le jeudi 16 août 2012

Publié le 17 août 2012 | Temps de lecture : 5 minutes


 
Le PQ favorisera l’indépendance énergétique du Québec

Sans annoncer d’engagements précis, le Parti Québécois promet de favoriser l’indépendance énergétique du Québec. En particulier, le PQ se propose de réduire de 30% l’importation de pétrole d’ici 2020 et de 60% d’ici 2030. Les importations d’hydrocarbures sont principalement responsables du déficit commercial du Québec.

Historiquement, le Québec a toujours dégagé d’importants surplus dans ses échanges internationaux. En 2004, pour la première fois de son histoire, le Québec s’est retrouvé avec un déficit commercial de 600 millions$. Puis, avec un déficit de 6 milliards$ en 2005, 17 milliards$ en 2008, 12 milliards$ en 2009 et 16,4 milliards$ en 2010.

Dans le but s’arrêter cette saignée, le PQ entend prioriser l’économie d’énergie et l’efficacité énergétique, de même que le développement des énergies vertes et du transport en commun.

Conséquemment, un gouvernement péquiste abandonnerait le projet d’un terminal méthanier à Lévis, démantèlerait la centrale nucléaire de Gentilly-2 et décréterait un moratoire sur les gaz de schiste.

À mon avis, tout cela est très bien. Toutefois, un gouvernement péquiste serait sage de faire cesser également la recherche d’hydrocarbures là (et seulement là) où il est hostile à leur exploitation : il est inutile de laisser les minières gaspiller des millions à chercher une ressource si l’industrie n’aura jamais l’autorisation gouvernementale de s’en servir.

Références :
Faut-il réparer Gentilly-2 ?
Pauline Marois veut l’indépendance énergétique

Jean Charest : 500 millions$ pour Montréal

Le chef du Parti libéral a annoncé ses engagements pour Montréal, promettant d’y injecter 500 millions$ sur cinq ans, dont la majorité pour l’amélioration du transport en commun :
• 35 millions$ pour faire passer de 180 à 480 le kilométrage de voies réservées aux autobus, taxis et véhicules de covoiturage,
• 50 millions de subventions pour l’achat de véhicules électriques ou hybrides destinés à servir de taxis, et
• 325 millions (qui s’ajoutent aux sommes déjà prévues) pour la rénovation des stations de métro : remplacement des escaliers mécaniques, amélioration de la sonorisation des stations, aménagements pour les personnes à mobilité réduite, et mise à niveau des infrastructures pour accueillir les nouveaux wagons.

Le reste de ce 500 millions$ serait principalement constitué d’améliorations à l’offre touristique de la métropole :
• création d’un cinquième écosystème au Biodôme,
• nouvelle serre au Jardin botanique,
• agrandissement de l’Insectarium (qui en a bien besoin),
• aménagement d’une promenade riveraine panoramique le long du fleuve, au Parc Jean-Drapeau,
• construction d’une lucarne d’observation au sommet de l’Oratoire Saint-Joseph,
• construction d’un nouveau pavillon au Musée des beaux-arts de Montréal, et
• mise en valeur des derniers sites historiques du Vieux-Montréal.

Puisque d’une dépense de 100 millions$ par année pour une ville de l’importance de Montréal, cela n’a rien d’extravagant, je ne veux pas commenter les détails de cette annonce qui, globalement, m’apparait bonne.

Référence : Jean Charest promet un demi-milliard de dollars pour Montréal

Engagements agricoles de la CAQ

Précisant les détails de sa politique agricole, la Coalition avenir Québec a promis qu’Investissement Québec consacrerait une partie de ses placements (deux milliards$ de capital-actions) à soutenir la modernisation et la croissance des fermes du Québec.

Implicitement, le secteur agricole ferait donc exception à la politique de la CAQ qui, le 10 août, souhaitait qu’Investissement Québec serve à créer des emplois à 20, 30, ou 40$ de l’heure (puisqu’il n’y a pas de ferme au Québec ayant les moyens de payer de tels salaires).

Il a promis également de faire en sorte que l’exonération de 750 000 $ sur le gain en capital s’applique aux parents agriculteurs qui vendent leur exploitation à leurs enfants. Cette promesse ne coûtera rien au Trésor public puisque c’est déjà le cas, si j’en juge par la promesse du Parti libéral, faite le 13 août, de hausser ce plafond d’exonération à un million$ dans le cas du secteur agricole.

En plus de maintenir le monopole syndical de l’Union des producteurs agricoles, monsieur Legault prône un étiquetage plus voyant des produits alimentaires et effectuerait une vaste campagne pour promouvoir l’achat de produits locaux.

Même sur le site de la CAQ, je n’ai pas réussi à savoir dans quelle mesure « prôner » serait ici coercitif. Si c’est seulement facultatif, on a affaire à un vœu pieux puisque l’industrie agroalimentaire peut déjà nous informer au sujet de la provenance des aliments et de la présence d’OGM. Elle ne le fait pas parce ce qu’elle refuse obstinément de donner suite au souhait de la très grande majorité des consommateurs québécois.

Références :
La CAQ veut un meilleur étiquetage des aliments québécois
Legault maintiendrait le monopole de l’UPA
Legault veut traiter les agriculteurs comme des entrepreneurs

Complément de lecture : Pour un registre des semences de maïs transgénique

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La campagne électorale au Québec : le mercredi 15 août 2012

Publié le 16 août 2012 | Temps de lecture : 5 minutes


 
Le Parti libéral propose dix heures de bénévolat en 5e année du primaire

En fait, l’annonce du Parti libéral comprenait deux volets :
• dix heures de bénévolat obligatoire à la cinquième année du primaire et
• un cours d’entreprenariat en 4e et 5e années.

Le bénévolat obligatoire est inscrit au programme scolaire de l’Ontario et de certains états américains. Quant au cours d’entreprenariat, il vise à favoriser l’émergence d’une nouvelle génération d’entrepreneurs. Dans ce dernier cas, il s’agit d’une promesse faite également par la CAQ le 10 août dernier.

Référence : Charest jette les gants le premier

Pauline Marois veut électrifier le transport

Concrètement, d’ici 2020, le PQ promet :
• de créer 300 kilomètres de voies réservées pour les autobus et le covoiturage dans la région de Montréal,
• de prolonger la ligne bleue du métro vers l’Est, de l’arrondisement de Rosemont à l’arrondissement d’Anjou, et
• de prolonger le train de l’Est vers Mascouche.

Le PQ fait donc sien les projets de développement de la Société de transport de Montréal (STM), annoncé dans son plan stratégique de décembre 2010.

Pour financer ces promesses, ce parti modifierait le plan québécois d’investissement en transport déjà en place jusqu’en 2016 en déplaçant une partie des sommes prévues pour le transport routier (près de 16 milliards$) au profit du transport en commun (qui ne devait recevoir que 3 milliards$).

Il peut sembler étonnant que le rapport des déboursés actuellement prévues d’ici 2016 (16 vs 3 milliards$) soient si défavorables au transport en commun mais on doit comprendre qu’il est difficile de départager quelle partie de l’amélioration du système routier profite aux automobiles et quelle partie profite au transport en commun (autobus et taxis). La réalité est donc un peu plus nuancée que ce que suggèrent ces chiffres.

Ce qu’on doit retenir, c’est que le PQ entend promouvoir le transport en commun. Le Québec n’a pas le choix.

Historiquement, le Québec a toujours dégagé d’importants surplus dans ses échanges internationaux. En 2004 — soit un an après l’arrivée au pouvoir de M. Charest — pour la première fois de son histoire, le Québec s’est retrouvé avec un déficit commercial de 600 millions. Puis, avec un déficit de 6 milliards en 2005, 17 milliards en 2008, et 12 milliards en 2009. En 2010, ce déficit fut de 16,4 milliards, soit 5% du PIB.

Une partie importante de ce déficit est lié aux importations d’hydrocarbures. En effet, les importations de pétrole et de gaz ont passées de sept milliards$ en 2000 à 18 milliards$ en 2008, soit une augmentation de près de 257% en huit ans seulement, en dépit des politiques vertes du gouvernement québécois.

Or un déficit commercial, c’est de l’argent qui quitte le Québec pour aller créer des emplois ailleurs. Il n’y a qu’une manière de stopper cette hémorragie, c’est de développer le transport en commun.

Références :
Transports : quand le PQ s’inspire de plans stratégiques existants
Vers un choc économique

La CAQ veut que l’État gère tous les fonds de pension obligatoires

Les Québécois épargnaient 12% de leurs revenus en 1993, alors que cette proportion qui est tombée à 2% l’an dernier. Le chef François Legault a dénoncé le faible taux d’épargne des Québécois.

Ce que la CAQ oublie de dire, c’est que les taux d’intérêt réel étaient de 4,43% en 1993, et de -0.3% en 2010. Pour stimuler l’économie en dépit de la stagnation des revenus du citoyen moyen, les gouvernements ont favorisé son endettement. En d’autres mots, dans notre société de consommation, on a stimulé l’économie actuelle grâce à des revenus dépensés d’avance.

Mais la conférence de presse de la CAQ portait moins sur l’épargne en général et plus spécifiquement sur l’épargne-retraite.

Afin de remédier au fait que les Québécois n’épargnent pas assez en vue de leur retraite, le gouvernement libéral a permis la création des Régimes volontaires d’épargne-retraite (RVER). Ce programme, qui entrera en vigueur en janvier, oblige chaque employeur ayant au moins cinq employés à créer, d’ici à 2015, un fonds auquel lui-même ne sera pas tenu de cotiser. Dans la formule actuelle, les fonds seront confiés à des gestionnaires privés.

Un gouvernement caquiste confierait plutôt la gestion du régime à la Régie des rentes du Québec. La CAQ estime que les frais de gestion des sociétés d’État québécoises sont quatre fois moins élevés que ceux des gestionnaires de fonds privés. Si un travailleur épargne 4% de son salaire pendant 35 ans, cette seule différence de frais se traduirait par une économie supplémentaire de 35 000$ en vue de sa retraite.

Il est plaisant d’entendre la CAQ reconnaître que, dans certains domaines, l’État peut être plus efficace et moins coûteux que l’entreprise privée. Cela nous change du discours monolithique de la Droite québécoise pure et dure.

Références :
Les Québécois doivent épargner davantage, dit Legault
Taux d’intérêt réel en 1993

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La campagne électorale au Québec : le mardi 14 août 2012

Publié le 15 août 2012 | Temps de lecture : 8 minutes


 
Charest : 395 millions$ pour des infrastructures dans la région de Québec

S’il est réélu, monsieur Charest promet de dépenser 395 millions$ pour des infrastructures dans la région de Québec.

On consacrera 95 millions$ aux infrastructures de proximité — un stade de soccer, deux gymnases, une piscine et un centre communautaire — et 200 millions$ au prolongement de la promenade Samuel-de-Champlain, qui longe le fleuve Saint-Laurent, l’amenant jusqu’aux chutes Montmorency.

Référence : Charest dit «oui» aux demandes d’infrastructures de Labeaume (quotidien Le Soleil)

Le PQ propose une charte de la laïcité

Enfin une promesse qui ne coûtera pas cher.

À une cinquantaine de kilomètres d’Hérouxville — dont le code de vie à l’intention des néoQuébécois avait fait grand bruit en 2007 — madame Marois promet l’adoption d’une Charte de la laïcité.

Tout comme la Charte de la langue française (connue sous le nom de Loi 101), un gouvernement du Parti québécois adopterait une super loi destinée à affirmer la neutralité religieuse de l’État et la suprématie de l’égalité entre les femmes et les hommes.

La liberté de religion ne pourrait plus être invoquée pour enfreindre l’égalité hommes-femmes, ni pour nuire au bon fonctionnement des institutions publiques et parapubliques. Ainsi, on ne pourrait plus (pour des motifs religieux) refuser de payer une contravention sous le prétexte que celle-ci a été délivrée par une policière.

En vertu de cette charte, les employés de l’État ne pourraient pas porter de signes religieux ostensibles, comme le hijab ou le turban. Ils ne devraient pas non plus accommoder un usager qui refuserait de se faire servir par une personne du sexe opposé. Réciter la prière avant l’ouverture d’un conseil municipal ne serait pas toléré non plus.

J’inviterais le PQ à la prudence à ce sujet.

La France possède déjà une législation qui interdit à tout représentant de l’État auprès de citoyens (cela va du fonctionnaire au professeur d’école) d’afficher des signes ostentatoires d’appartenance religieuse.

Dans ce pays, les principes fondamentaux qui soutiennent l’État sont hérités de la Révolution française. Lors de cette révolution, on abolissait non seulement la monarchie, mais également la religion. C’est ainsi qu’une église pouvait devenir un « Temple à l’Amour filial », à moins de déchoir en entrepôt de munition ou de céréales. C’est donc sans hésitation qu’on a détruit les vitraux de la basilique Saint-Denis (qu’on n’a jamais retrouvés) parce qu’on avait besoin de plomb pour faire des balles.

Le Québec est différent. Nous sommes régis par une constitution à l’anglaise, où les droits individuels ont beaucoup plus d’importance. Interdire les signes ostentatoires d’appartenance religieuse, c’est un euphémisme pour permettre le petit crucifix doré porté en pendentif mais interdire les signes de modestie musulmane, beaucoup plus visibles. En somme, il s’agit d’une mesure discriminatoire déguisée qui révèle les contradictions internes d’une société déchirée à ce sujet. Avec une constitution différente, la France peut se le permettre, pas le Québec.

À mon avis, le principe qui doit nous guider, c’est « vivre et laisser vivre ». Si quelqu’un est coiffé d’un turban ou d’une calotte juive, cela ne me regarde pas. Tant que cette personne n’exige pas que moi aussi, je porte sa coiffure, je ne vois pas où est le problème.

Pour certains, la neutralité de l’État exige qu’on ne puisse pas deviner l’appartenance religieuse de ses représentants. Pour moi, cette neutralité peut s’affirmer d’une autre manière, soit en laissant la liberté de chacun de vivre sa religion comme il l’entend, du moment que cela ne porte pas atteinte aux droits des autres de vivre selon leurs principes à eux. C’est donc une autre forme de neutralité : en n’intervenant pas.

En d’autres mots, les employés de l’État reflèteraient la diversité de la Nation. Cela signifie plusieurs pigmentations de la peau, des personnes de sexes différents, des croyants de diverses dénominations religieuses, des tenues vestimentaires variées, des colorations capillaires semblables à ce qu’on voit dans la rue, et des accents linguistiques qui reflètent mon pays. Voilà comment l’État peut être neutre sans imposer une homogénéité artificielle.

Malgré tout, afin de refléter les limites de notre propre tolérance, il serait interdit aux serviteurs de l’État d’être masqués lorsqu’ils exercent leurs fonctions. De plus, la croix au sommet du Mont-Royal resterait là, de même que les grands crucifix qui décorent déjà nos routes de campagne. Quand au crucifix de l’Assemblée nationale (qui date des années 1930), à part les députés, tout le monde ignorait son existence avant qu’on fasse un drame de la possibilité qu’il soit retiré. Il devrait donc être confié à un musée, tant il s’est avéré inefficace à guider nos élus dans la voie de l’éthique et de l’intégrité…

Références :
La prière publique aux assemblées municipales
Le PQ propose une charte de la laïcité

Paru depuis :
Charte de la laïcité – Quand un séparatiste se sépare (2012-09-22)

Le scandale des propos que François Legault n’a pas tenus

À table dans la maison d’un citoyen, sous le regard des caméras de télévision, le chef caquiste a déclaré : « Si les Asiatiques sont très travaillants, puis que nous, on se dit qu’on veut faire la belle vie, on va mal se réveiller.»

Ces propos anodins ont soulevé une tempête médiatique. Les adversaires politiques de M. Legault se sont offensés qu’il traite ainsi, selon eux, les jeunes de paresseux. Malheureusement, strictement parlant, ce n’est pas ce qu’il a dit.

Précisant sa pensée, le chef caquiste déclare : « C’est un blâme à l’égard des valeurs que nous, parents, transmettons à nos enfants.(…) Au Québec, on ne valorise pas assez l’éducation et l’effort.»

C’est vrai. Les études ont démontré que la principale raison qui explique que le taux de décrochage soit plus élevé dans les milieux défavorisés, est d’ordre culturel; on y sous-estime grandement la valeur de l’enseignement supérieur. « Oh, je connais plein de personnes qui ont des diplômes longs comme le bras et qui sont en chômage quand même.»

En réalité, le taux de chômage chez les détenteurs de baccalauréat est moindre que celui de la population en général. Mais, dans les milieux défavorisés, on se plait à soutenir le contraire, peut-être pour minimiser inconsciemment sa propre responsabilité dans sa condition socio-économique.

Parmi les parents néoquébécois, au contraire, on est convaincu de l’importance de la compétence pour réussir. Ceux-ci sont d’importants motivateurs dans la réussite scolaire de leurs enfants.

Selon le recensement de 2011, 35% des Québécois détiennent un diplôme professionnel ou collégial (le 2e taux le plus élevé au pays) et 20% possèdent un diplôme universitaire (le 4e rang canadien), soit une diplomation totale de 55% (deux points de plus que la moyenne canadienne). Toutefois, dans le cas précis de la diplomation universitaire, le taux est plus élevé parmi les néoCanadiens que dans la population canadienne en général.

L’exemple donné par François Legault est donc juste et approprié. Il faut toutefois éviter de généraliser son reproche à l’ensemble des étudiants.

Quant à «…nous, parents…», j’y vois davantage une figure de style qui consiste à s’auto-blâmer afin de ne heurter la susceptibilité de personne. Bref, une tempête dans un verre d’eau.

Référence :
Effort à l’école : Legault fait la leçon aux parents; Marois et Charest le rabrouent

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La campagne électorale au Québec : le lundi 13 août 2012

Publié le 14 août 2012 | Temps de lecture : 5 minutes


 
Charest : un cadeau pour les entrepreneurs qui contournent les lois anticorruption

Lorsque le propriétaire d’une entreprise se prend un salaire (ce qui est légitime), il doit payer de l’impôt. Toutefois, s’il se prend un salaire plus modeste et choisit de réinvestir la différence dans son entreprise, cette différence n’est pas imposable puisqu’il n’en a pas joui. En principe, cela n’a pas d’importance puisque lorsqu’il vendra son entreprise, le fisc prend alors sa revanche : l’entrepreneur devra payer de l’impôt sur ses gains de capital (c’est-à-dire sur l’augmentation de la valeur de son entreprise).

Dans les faits, les gens d’affaires ont obtenu une exonération d’impôt — jusqu’à concurrence de 750 000$ — sur la vente à une personne qui n’a pas de lien avec eux (mais pas dans le cas où il veut vendre son entreprise à ses enfants). Monsieur Charest promet de réparer cette « injustice » et d’étendre l’exonération d’impôt sur les gains en capital lors de la vente d’une entreprise aux membres d’une même famille.

Cette mesure existe déjà dans le secteur agricole, étant donné le caractère typiquement familial de la plupart des fermes du Québec. Pour ce secteur, le plafond d’exonération d’impôt serait porté à un million$ sous un gouvernement libéral réélu.

Voyons cela avec un certain recul. On a affaire à un gouvernement qui répète haut et fort que tout le monde doit faire sa juste part. Sauf le cas particulier des cultivateurs (avec lequel je suis entièrement d’accord), on apprend que non seulement monsieur Charest exempte d’impôt les millions$ de profit que font les riches en vendant leurs entreprises à des investisseurs étrangers mais en plus, il voudrait étendre ce passe-droit à toutes les ventes d’entreprises ? Est-ce bien cela, « payer sa juste part » ?

Il y a quelques jours, les journaux nous apprenaient qu’après avoir renommé ses compagnies de construction afin de pouvoir continuer à obtenir des contrats du gouvernement Charest, un entrepreneur condamné par le gouvernement fédéral pour fraude, avait décidé de vendre ses entreprises à sa fille. Voilà qu’aujourd’hui, le chef libéral annonce qu’il va d’exempter d’impôt les profits réalisés lors de la vente d’une entreprise entre les membres d’une même famille. Décidément, monsieur Charest ne manque pas d’audace…

Référence : Le Parti libéral compte favoriser le transfert familial d’entreprises

PQ : Gel du tarif des garderies

Le réseau de garderies publiques a été mis sur pied en 1997 par Pauline Marois, alors Ministre de l’éducation au sein du gouvernement péquiste de Jacques Parizeau.

Quinze ans plus tard, Mme Marois promet 15 000 nouvelles places en garderies, s’ajoutant aux 15 000 déjà annoncées dans le budget libéral de 2011-2012. De plus, elle promet de compléter le réseau d’ici quatre ans, soit 250 000 places au total, en privilégiant les Centres de la petite enfance — des institutions sans but lucratif — pour l’octroi de nouvelles places. Le coût de cette mesure est évalué à 177 millions$.

Références :
Le Parti québécois promet une place en garderie par enfant

CAQ : privilégier les soins à domicile pour les ainés

Monsieur Legault veut favoriser le maintien à domicile des personnes âgées. Ultimement, il aimerait que 80% des ressources gouvernementales destinées aux ainés aille à ceux qui vivent à domicile, et 20% à ceux dans les centres d’hébergement. Cette proportion est l’exact contraire de ce qui prévaut actuellement au Québec, a-t-il fait valoir.

Pour le chef de la CAQ, cette promesse ne représente pas l’annonce d’une nouvelle dépense gouvernementale, mais plutôt d’un moyen d’économiser.

François Legault déclare : « On le sait, ça a été démontré : ça coûte moins cher offrir des services à domicile que de placer une personne âgée dans un centre d’hébergement. Donc, à long terme, on est même gagnant financièrement.» Des centres d’hébergement seront toujours nécessaires, mais ils doivent être réservés aux cas les plus lourds, a précisé le chef caquiste.

Selon ce dernier, 16 400 ainés québécois attendent actuellement de recevoir des services à domicile (sans compter ceux qui se résignent à ne pas en demander) alors que 4 300 ainés attendent actuellement une place en centre d’hébergement.

Référence : Legault préconise de meilleurs soins à domicile pour les ainés

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Écrit par Jean-Pierre Martel