Aperçu du fonctionnement interne de l’État canadien

Publié le 5 juillet 2019 | Temps de lecture : 9 minutes

Introduction

Le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) est un organisme fédéral qui règlemente et surveille près de 400 institutions financières et 1 200 régimes de retraite fédéraux pour déterminer s’ils sont en bonne santé financière et s’ils respectent les exigences auxquelles ils sont soumis.

En 2015, un de ses fonctionnaires portait plainte devant la Cour fédérale — un tribunal interne du gouvernement canadien — accusant le BSIF d’avoir violé son droit de travailler dans la langue officielle de son choix.

Le plaignant alléguait que durant toute sa carrière au BSIF, il avait été contraint de s’adresser en anglais à ses collègues unilingues de Toronto, de suivre des cours de formation offerts exclusivement en anglais, et d’utiliser des versions anglaises des logiciels nécessaires à l’exercice de ses fonctions.

Ce fonctionnaire pouvait utiliser le français pour s’adresser aux institutions francophones du Québec. Toutefois, l’immense majorité des interactions internes du BSIF se faisaient en anglais, sauf avec ses collèges du bureau montréalais, tous bilingues comme lui.

D’où une plainte logée auprès du Commissaire aux langues officielles. Ce dernier lui avait donné en bonne partie raison. Mais ses recommandations n’ayant été que peu suivies, le fonctionnaire avait résolu de porter l’affaire devant les tribunaux.

Rendu le 3 juillet dernier, le jugement (en excellent français) de l’honorable Peter-B. Annis est moins important par sa décision (défavorable à l’employé) que par le voile qu’il lève sur le fonctionnement du fédéral.

Description du fonctionnement du BSIF

À la page 114 du jugement, on y lit que le BSIF compte près de sept-cents employés répartis dans quatre bureaux : un bureau central situé à Ottawa et trois antennes régionales, situées respectivement à Vancouver, Toronto et Montréal.

Les 320 personnes du bureau central coordonnent les travaux des trois bureaux régionaux.

Mais le plus important de tous est le bureau de Toronto; il emploie 345 personnes, soit davantage qu’à Ottawa.

Alors que les autres bureaux emploient des généralistes, celui de Toronto emploi des spécialistes. Ceux-ci ont une expérience approfondie du monde de la finance (où ils ont œuvré) et en connaissent les secrets.

Dès qu’un dossier complexe exige la consultation d’un expert dans un domaine très précis, cet expert travaille toujours à Toronto. Or tous les postes y sont officiellement ‘unilingues anglais’.

Comme partout au BSIF, le premier critère d’embauche à Toronto est la compétence. Ici, l’étiquette ‘unilingue anglais’ ne signifie pas que seuls des angloCanadiens peuvent y postuler.

Cela indique que le candidat doit accepter d’y travailler exclusivement en anglais. Comme il aurait eu à y consentir s’il travaillait à quelques pas de là, sur Bay Street, où se concentre le secteur financier du Canada.

Dans les faits, il est rare que des Québécois, même bilingues, y soient embauchés.

Et puisque les spécialistes sont responsables de la formation dispensée aux généralistes, toutes les séances de perfectionnement se donnent en anglais. Évidemment, à Montréal, on pourrait offrir la traduction simultanée. Mais comme l’assistance montréalaise est déjà bilingue, on ne s’en donne pas la peine.

Le bureau de Vancouver, le plus petit, emploie 12 personnes unilingues anglaises. Comme les provinces qu’il dessert.

Les 20 postes montréalais sont bilingues pour deux raisons.

Premièrement parce que ce bureau dessert tout l’Est du pays. Or ces employés doivent être capables de s’adresser aux institutions financières dans la langue de leur choix.

Deuxièmement, parce qu’il est rare qu’ils puissent traiter d’un dossier sans avoir à consulter leurs collègues spécialistes de Toronto (qui, rappelons-le, ne parlent pas français).

Nous n’avons peu parlé du bureau central. En raison de leur travail de coordination, les postes de gestionnaires y sont officiellement ‘bilingues’.

À cause de la difficulté à trouver du personnel compétent, il est coutumier, dans l’ensemble de la fonction publique fédérale, de confier ces postes ‘bilingues’ à des unilingues anglais sous promesse d’apprendre le français… un jour.

Alors on les inscrit à des cours de français. Et il est fréquent que ces personnes quittent leur poste des années plus tard sans jamais avoir appris notre langue.

Concrètement, cela n’est pas un problème puisque la connaissance de l’anglais est commune aux angloCanadiens unilingues et aux francoCanadiens bilingues, soit l’ensemble du personnel du BSIF. Donc ces coordonnateurs, même unilingues anglais, font très bien l’affaire.

Le résultat final est que la place des francoQuébécois dans l’ensemble des sept-cents employés du BSIF est marginale et se limite essentiellement aux employés du bureau montréalais.

De plus, dans la fonction publique fédérale, les seules personnes qui peuvent travailler dans leur langue, ce sont les angloCanadiens. De leur côté, les francoCanadiens reçoivent une prime au bilinguisme précisément pour avoir renoncé au droit de travailler dans leur langue.

Voilà pourquoi la Cour fédérale a rendu un jugement défavorable au fonctionnaire occupant un poste bilingue alors qu’il se plaignait de n’avoir jamais pu travailler dans sa langue.

S’il voulait travailler exclusivement en français, il lui fallait postuler à un poste ‘unilingue français’, ce qui n’existe pas au fédéral.

À la page 133 du jugement, on y dit que 55 % des Francophones canadiens sont unilingues. C’est donc quatre-millions de Québécois qui n’ont pas leur place dans la fonction publique fédérale.

À l’opposé, l’unilinguisme anglais n’a jamais empêché personne de faire carrière au fédéral.

Dans ce cas-ci, l’angloCanadien unilingue ne pourrait pas travailler au bureau de Montréal, où se trouvent 2,9 % des emplois du BSIF. Mais il sera le bienvenu partout ailleurs.

Autrement dit, en vertu des exigences linguistiques fédérales, l’angloCanadien unilingue est chez lui presque partout au BSIF alors que le francoCanadien unilingue n’a aucune place au sein de cet organisme.

La traduction

Afin de masquer le fait que l’anglais est la langue interne du BSIF, les généralistes du bureau montréalais rédigent chaque rapport dans la langue de l’institution financière concernée.

Ce qui nécessite la traduction des avis reçus en anglais de Toronto.

Pour ne pas pénaliser les sociétés québécoises dont les projets de financement sont dépendants des rapports du BSIF, les généralistes de Montréal doivent effectuer un travail de traduction qui n’est pas dans leur description de tâche. À défaut de quoi leur rapport sera retardé de plusieurs semaines, sinon de plusieurs mois, en raison de la pénurie de traducteurs.

D’où la frustration encore plus grande du fonctionnaire débouté par la cour.

Références
Bureau du surintendant des institutions financières
Décision de la Cour fédérale
Droit de travailler en français: la requête d’un fonctionnaire rejetée
Être payé pour apprendre le français, puis démissionner
La façade ministérielle de l’État canadien
Le bilinguisme ? So what ?…
Le français s’effrite dans la fonction publique fédérale
L’exigence de bilinguisme au fédéral, un frein à l’avancement professionnel?
Liste des régions bilingues du Canada aux fins de la langue de travail
Ottawa paie ses hauts cadres pour qu’ils apprennent le français
Un fonctionnaire fédéral défend son droit de travailler en français

Parus depuis :
« Bonjour! Hi! » : toujours difficile de franchir la frontière canadienne en français (2019-07-18)
La langue du Canada (2019-09-20)
Le bilinguisme dans la fonction publique [fédérale] relégué au second plan durant la pandémie (2020-10-27)
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Diplomates polyglottes! (2020-12-17)
Une diplomatie appauvrie (2020-12-19)
Les fonctionnaires fédéraux mal à l’aise d’utiliser le français au bureau (2021-01-12)
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Écrit par Jean-Pierre Martel


La vision dépassée de François Legault

Publié le 8 décembre 2017 | Temps de lecture : 7 minutes

Introduction

À l’occasion d’une entrevue accordée à la chaine anglaise de Radio-Canada, le chef de la Coalition Avenir Québec (CAQ) a déclaré au sujet de l’immigration au Québec :

I think we’ve put too much emphasis into knowing French. That’s why at the CAQ, we say we should give three years to pass a French test.

The first and maybe only criteria must be qualification, and answering the needs of the working market.

Traduction libre :

Je crois qu’on accorde trop d’importance à la connaissance du français. Voilà pourquoi la CAQ propose que les immigrants disposent de trois années pour réussir un examen de français.

Le premier (et peut-être le seul) critère devrait être la compétence, de même que l’aptitude à répondre aux besoins du marché du travail.

La majorité des néoQuébécois échouent à apprendre le français ou n’en font pas l’effort. Que ferait la CAQ après trois ans ? Expulser ceux qui ont commencé à prendre racine au pays ? Veut-elle vraiment expulser plus de 20 000 néoQuébécois par année, soit environ 400 par semaine ? Se peut-il que les policiers du CAQuistan aient mieux à faire ?

Évidemment, on peut présumer que la menace d’expulsion suffira à motiver les immigrants à apprendre le français. Sait-on quel est le pourcentage prévu d’échec de cette politique ?

La solution péquiste est simple : on ne met pas les pieds au Québec sans connaissance préalable du français.

C’est simple, économique et 100% efficace. Et on évite les sanglots de néoQuébécois expulsés devant les caméras du monde entier.

Rappel historique

Reportons-nous à l’époque encore récente où le gouvernement minoritaire de Mme Marois voulait renforcer la Loi 101. Face à l’opposition systématique du parti libéral, la CAQ disposait alors de la balance du pouvoir.

Or la CAQ exigea une série d’assouplissements et d’exemptions destinées au contraire à affaiblir la Loi 101. Son influence parlementaire se résuma à bloquer le PQ.

La tiédeur de la CAQ peut se résumer, dans la bouche de François Legault, par cette question devenue son leitmotiv : « Oui mais ça va couter combien ? »

Cela en dit long sur l’ardeur de la CAQ à défendre le français. On n’est donc pas surpris d’apprendre la teneur de l’entrevue qu’il vient d’accorder.

Diminuer l’immigration

Une des mesures-phares de la CAQ, c’est la diminution de vingt pour cent des quotas d’immigration. Il s’agit d’une mesure populaire chez nous comme dans de nombreux pays.

Malheureusement, cette mesure est nuisible à l’économie du Québec en raison des difficultés actuelles qu’éprouve le patronat à recruter le personnel dont il a besoin.

Le taux de chômage au Québec atteint des creux historiques. Cette situation s’explique principalement par le vieillissement de la population; les babyboumeurs quittent le marché du travail et exigent de manière croissante des soins et des services.

Inévitablement, arrivée au pouvoir, la CAQ fera exactement le contraire sous la pression des chambres de commerce, des clubs Kiwanis, des Chevaliers de Colomb, et de tous ces petits milieux d’affaires dont elle est très proche.

Qu’elle maintienne les quotas actuels (environ 50 000 immigrants par année) ou qu’elle les diminue à 40 000, tout assouplissement des exigences linguistiques provoquera une augmentation de l’anglicisation de Montréal. Une anglicisation déjà très préoccupante.

Le taux de chômage chez les néoQuébécois

Le refus de reconnaitre l’expérience acquise à l’Étranger et les exigences linguistiques sont deux obstacles majeurs à l’intégration des néoQuébécois.

Pour prendre l’exemple des personnes originaires du nord de l’Afrique et plus particulièrement des pays du Maghreb, leur langue maternelle est souvent le bergère ou l’arabe. En plus, ils connaissent le français comme langue seconde ou tierce. Arrivé au Québec, on exige qu’ils parlent également une troisième ou une quatrième langue, soit l’anglais. C’est beaucoup.

La véritable solution, c’est de revenir à l’essence de la Loi 101, le contraire de ce prêche la CAQ.

La Loi 101 et la langue de travail

Les Francophones unilingues sont victimes de discrimination croissante à l’embauche, au fur et à mesure que le bilinguisme se généralise, notamment à Montréal.

Quels que soient les avantages indéniables de la connaissance de l’anglais, cette discrimination est inacceptable. Ces Francophones unilingues sont chez eux au Québec. Comme les Anglophones unilingues sont chez eux au Canada.

La Loi 101 prescrit que la langue de travail au Québec soit le français. Comme en Allemagne, c’est l’allemand. L’italien en Italie. Et ainsi de suite.

Toutefois, dans une économie tournée vers l’exportation comme la nôtre, il est normal que le service à la clientèle de nombreuses entreprises comprenne suffisamment d’employés parlant anglais pour servir adéquatement les locuteurs anglophones.

Mais entre eux, les employés doivent généralement parler français. Je dis ‘généralement’ parce qu’on ne punira pas deux Anglophones d’avoir parlé anglais entre eux. Sauf cette exception, c’est en français que cela doit se passer. C’est ce que prescrit la Loi 101.

Ce n’est pas ce qui arrive.

Beaucoup d’employeurs trouvent commode d’obliger tout le personnel à être bilingue; c’est ce que révèlent les dernières donnés de Statistique Canada.

Mais cette solution de facilité nuit à l’intégration des néoQuébécois en plus d’aggraver les difficultés de recrutement des entreprises.

Il y a des centaines de millions de Francophones à travers le monde. C’est suffisant pour pourvoir tous les postes vacants du Québec. Mais pour cela, il faut une seule langue de travail.

Diminuer les quotas d’immigration tout en diminuant nos exigences linguistiques pour satisfaire ‘la demande’, c’est un autre exemple de politiques anciennes et dépassées de la CAQ.

Ce sont à la fois des entraves au développement économique du Québec et une mesure qui accentue le déclin démographique du peuple francoQuébécois.

Postscriptum : une anecdote

En prenant le taxi en 2013 dans la capitale cubaine, le chauffeur a remarqué mon accent.

Détentrice d’un certificat en français décerné par l’Alliance française de La Havane, son épouse infirmière avait voulu immigrer au Québec.

Mais à l’ambassade canadienne, on l’a découragée de faire application sous le prétexte qu’elle ne parlait pas anglais.

Il y a des régions du Québec où presque personne ne parle anglais. On aurait été heureux d’accueillir cette infirmière.

En dépit du fait que le fédéral a délégué au Québec le pouvoir de sélectionner les travailleurs qualifiés, il y a des candidatures dont le Québec n’entend jamais parler parce que certaines ambassades ‘filtrent’ les demandeurs.

Voilà ce qui explique peut-être pourquoi tant d’immigrants qualifiés arrivés au Québec ne connaissent que l’anglais.

Références :
François Legault on boosting the birth rate, curbing immigration and ‘bonjour/hi’
La francisation des immigrants au Québec est un échec, selon la vérificatrice générale
L’anglais mieux que le français pour les immigrants
La rondelle ne roule pas pour le français dans la LHJMQ
L’exigence de l’anglais frustre des immigrants francophones
Recensement 2016: le Canada plus bilingue, le Québec plus anglophone

Parus depuis :
La maîtrise du français, nouvel enjeu de management (2021-10-25)
Immigration Canada recrute des agents uniquement anglophones au Québec (2021-11-04)
Ottawa contre l’exigence du français pour la recevoir la citoyenneté au Québec (2022-09-28)

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés à l’anglicisation du Québec, veuillez cliquer sur ceci

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Modifier la Loi 101 et l’effet domino

Publié le 28 août 2017 | Temps de lecture : 6 minutes


 
Le français, une langue assiégée

Sous le titre ‘Coup dur pour la Loi 101’, le quotidien Le Devoir révélait samedi dernier les résultats d’un sondage de la firme Léger & Léger effectué entre 10 et le 13 juillet dernier auprès de 1 006 personnes.

Si on exclut les indécis, 66% des Québécois — dont 58% des répondants francophones — souhaitent qu’on permette un accès plus facile aux écoles anglaises du primaire et du secondaire à ceux qui n’y ont pas droit en vertu de la Loi 101.

Le principe fondamental de la Loi 101 est simple : seule l’école publique française est gratuite au Québec. Comme seule l’école publique italienne est gratuite en Italie. L’allemande en Allemagne. Etc.

La seule exception à cette règle, ce sont les angloQuébécois qui ont un droit constitutionnel à l’école publique anglaise. Cette dernière est donc une école d’exception alors que l’école publique française est la règle.

Le Québec a déjà fait l’expérience de la liberté de choix de la langue d’enseignement. En 1969, le gouvernement de l’Union nationale (un parti politique aujourd’hui disparu) adoptait une loi qui laissait aux parents le libre choix de la langue d’enseignement de leurs enfants.

Le résultat fut immédiat; 90% des néoQuébécois choisirent d’envoyer leurs enfants à l’école publique anglaise. Devant la menace d’une anglicisation rapide du Québec, les gouvernements libéral et péquiste adoptèrent diverses mesures correctives. Ce fut la loi 22 du PLQ puis finalement la Loi 101 du PQ, adoptée en 1977.

Pour contrer la Loi 101, l’ethnie dominante du Canada adopta cinq ans plus tard une nouvelle constitution à l’issue d’une séance ultime de négociation à laquelle le Québec ne fut pas invité.

Dans un de ses jugements, la Cour suprême du Canada a reconnu que l’article 23 de la Canadian Constitution visait à conter les dispositions linguistiques de la Loi 101.

Depuis 1982, les tribunaux utilisent tous les prétextes pour invalider des pans entiers de la Loi 101.

Aujourd’hui, on ne peut pas permettre l’accès à l’école anglaise aux francoQuébécois sans le permettre également aux néoQuébécois. Sinon, la Loi 101 sera jugée discriminatoire, donc anticonstitutionnelle. Avec les conséquences catastrophiques que cela entrainerait.

Ceci étant dit, il y a un écart entre les principes et l’application des principes. Si de nombreux francoQuébécois veulent que leurs enfants aient une meilleure connaissance de l’anglais, on peut très bien enrichir l’enseignement de l’anglais à l’école française.

La manipulation de l’opinion publique

Paradoxalement, selon ce même sondage, seulement 15% des répondants francophones souhaitent un assouplissement général de la Loi 101. Et 61%, son renforcement.

D’où la question : Comment les francoQuébécois peuvent-ils être pour une chose et son contraire ? Peut-être n’y voient-ils pas de contradiction.

Mais pour répondre véritablement à cette question, il faut se rappeler que ce sondage a été effectué avant la publication des données linguistiques du recensement de 2016.

Quel était l’état de l’opinion publique avant que soient connus les résultats de ce recensement ?

Dans les mois qui ont précédé le 35e congrès des jeunes libéraux (qui s’est tenu les 12 et 13 aout dernier), les associations des comtés anglophones ont fait savoir qu’elles se proposaient de faire adopter une résolution demandant un assouplissement de l’accès aux écoles primaires et secondaires anglaises.

Afin de stopper la montée de la CAQ dans les intentions de vote des angloQuébécois, les dirigeants du PLQ voyaient d’un bon œil l’adoption de cette résolution favorable aux angloQuébécois sans qu’il s’agisse d’un engagement formel du PLQ.

Afin de préparer le terrain, le ministre Jean-Marc Fournier (responsable de la propagande libérale) multipliait les déclarations jovialistes au sujet de la situation de français au Québec et au Canada, dissipant toute inquiétude à ce sujet.

Parallèlement, le gouvernement Couillard se disait préoccupé par le déclin démographique des angloQuébécois en région.

Bref, la table était mise pour l’adoption de cette résolution.

Et comme le gouvernement jouit d’un accès aux médias beaucoup plus facile que les partis d’opposition, cet exercice de propagande a eu pour résultat d’amener de nombreux francoQuébécois à croire que ce serait une bonne idée.

Mais voilà que Statistique Canada publie ses données originelles, très inquiétantes, au sujet de français au Québec à quelques jours du congrès des jeunes libéraux. Avec le résultat que ceux-ci rejetèrent avec sagesse les propositions des comtés anglophones. Un rejet bien accueilli par les dirigeants du PLQ, conscients que prétendre le contraire était devenu indéfendable.

La peur de faire des vagues

Les résultats de ce sondage ne montrent pas seulement la puissance de la machine de propagande libérale. Devant le silence intéressé de la Coalition Avenir Québec, aucun des partis indépendantistes n’a réussi à faire réaliser aux francoQuébécois qu’on ne doit pas toucher à la Loi 101.

Pourtant, il suffit de dix secondes aux actualités télévisées pour passer le message suivant : « Si on ouvre l’école publique anglaise aux francoQuébécois, il faut l’ouvrir aux néoQuébécois. Et si on fait ça, c’en est fini du français au Québec

La firme Léger & Léger ne manque jamais une occasion de répéter que ‘les Québécois haïssent la chicane’. Ce qu’elle oublie de dire c’est que si Camille Laurin (le père de la Loi 101) avait craint cet avertissement, le Québec serait probablement devenu majoritairement anglophone aujourd’hui. On ne fait pas d’omelettes sans casser d’œufs.

À craindre la controverse, les partis indépendantistes se condamnent à la castration idéologique.

Nos voisins du Sud doivent nous servir d’exemple; ils acceptent que des leurs meurent sous les drapeaux à l’Étranger lorsqu’on leur fait croire que c’est pour défendre la Liberté.

Il est temps qu’on nous dise qu’il y a un prix à payer pour la défense de notre langue et notre culture.

Références :
De ROC et de francophonie
La sage décision des jeunes Libéraux
Québec inquiet de voir des communautés anglophones assimilées
Sondage Léger-Le Devoir au sujet de la Charte de la langue française

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le PQ et la francisation des immigrants

Publié le 13 janvier 2017 | Temps de lecture : 16 minutes

Introduction

Sur le site du Devoir et de Radio-Canada, on apprenait hier que le Conseil national du Parti Québécois présentera demain une nouvelle politique relative à la francisation des immigrants.

Deux fois par année, un Conseil national réunit deux délégués provenant de chacune des circonscriptions du Québec.

Cet hiver, les propositions présentées à cette réunion feront l’objet de discussions parmi les membres de chaque circonscription. Et s’il y a des amendements, ceux-ci seront soumis à un congrès en septembre 2017.

Les propositions, amendées ou non, deviendront alors la position officielle du Parti québécois.

Francisation des immigrants

Parmi les candidats à l’immigration, le PQ fait la distinction entre les travailleurs qualifiés et les réfugiés.

Les travailleurs qualifiés

Les dirigeants du PQ veulent que 100% des travailleurs qualifiés parlent français avant d’arriver au Québec.

En d’autres mots, avant de recevoir un certificat de sélection, le candidat à l’immigration et son conjoint doivent démontrer une connaissance intermédiaire ou avancée du français. Sinon, leur demande sera rejetée.

Ce faisant, le PQ s’inspire de la Grande-Bretagne. Dans ce pays, l’immigrant ne peut pas mettre le pied sur le sol britannique s’il n’a pas déjà la connaissance de l’anglais. De manière conséquente, un citoyen britannique ne peut pas faire venir son conjoint de l’Étranger si cette personne ne parle pas l’anglais.

Ce qui distingue le Canada de la Grande-Bretagne, c’est que la Cour suprême du Canada a déjà fait savoir — dans son jugement relatif aux écoles passerelles — que la réunification des familles est de la plus haute importance à ses yeux. Conséquemment, il est probable que les tribunaux canadiens invalideront tout refus d’accorder la citoyenneté à un conjoint pour des motifs linguistiques. Alors qu’en Grande-Bretagne, la Cour suprême de ce pays a déjà reconnu la validité du refus de permettre l’immigration du conjoint qui ne parle pas l’anglais.

Tout cela pour dire que le PQ a raison d’étendre l’exigence de la connaissance du français au conjoint du requérant.

En comparaison, la Coalition avenir Québec propose d’obliger tous les membres d’une même famille à suivre un programme de francisation une fois qu’ils sont accueillis au Québec.

L’idée est excellente. Malheureusement, elle est anticonstitutionnelle; la Canadian Constitution de 1982 consacre le droit absolu de tout citoyen canadien de s’assimiler au groupe linguistique de son choix. Or la célèbre cause du niqab nous a appris que même les immigrants reçus ont des droits constitutionnels. En d’autres mots, même si on n’est pas encore citoyen canadien, on est protégé par cette constitution dès qu’on est admis au pays, ce qui invalide la proposition de la CAQ.

Une fois au Canada, l’immigrant ne peut donc pas être forcé à parler français. Alors que, demeuré à l’Étranger, il ne peut invoquer les dispositions de la Canadian Constitution.

Les réfugiés

Il serait cruel d’obliger un requérant en danger de mort dans son pays à demeurer chez lui jusqu’à ce qu’il ait appris le français.

Dans le cas des réfugiés, ceux-ci seraient admis au Québec et rémunérés pendant plusieurs mois pour apprendre le français. Un échec n’entrainerait cependant pas leur expulsion (contrairement à ce que propose la CAQ).

Les propositions extramigratoires

Dans sa tournée des salles de rédaction et des médias, le chef du PQ a également présenté des éléments de la politique linguistique de son parti qui dépassent le cadre strict de la francisation des immigrants.

La francisation des petites entreprises

M. Jean-François Lisée a réitéré l’intention du PQ d’étendre l’obligation d’obtenir un certificat de francisation aux entreprises de 25 à 49 employés. Cette obligation existe déjà pour les entreprises de cinquante employés et plus.

Cette mesure ferait d’une pierre deux coups.

Elle créerait une incitation majeure à apprendre le français puisqu’il deviendrait à peu près impossible pour un immigrant qui ne connait pas le français de décrocher un emploi au Québec.

De plus, elle règle les difficultés des Francophones québécois à être servis dans leur langue au Québec. En effet, la grande majorité des plaintes à l’Office de la langue française relatives à la langue de service concernent des petites entreprises (notamment des restaurants) dont le personnel ne parle pas le français.

Le Parti libéral s’y oppose catégoriquement. Quant à la CAQ, elle préfère émettre le vœu que les entreprises s’y soumettent volontairement alors qu’elles ont déjà toute la liberté de se franciser volontairement.

Pas de diplôme universitaire sans connaissance du français

Selon M. Lisée, vingt pour cent des jeunes angloQuébécois se déclarent unilingues. Plus précisément, le pourcentage d’étudiants anglophones qui connaissent le français diminue progressivement de la fin du secondaire à la fin des études universitaires. Selon le chef du PQ, aux CÉGEPs et aux universités anglophones, les jeunes angloQuébécois désapprendraient le français.

Cet unilinguisme constitue un handicap sur le marché du travail et pousse ces jeunes diplômés à s’exiler à la fin de leurs études. Cela constitue un gaspillage des fonds publics puisque la société québécoise paie la grande majorité du financement de ces maisons d’enseignement et perd alors les fruits de cet investissement.

Au niveau des CÉGEPs anglophones, le PQ exigera que tous les finissants réussissent un examen de français avant de recevoir leur diplôme. Conséquemment, le français devient alors l’équivalent d’une matière obligatoire.

Au niveau universitaire, les choses se compliquent.

Les universités anglophones du Québec accueillent des centaines d’étudiants étrangers (notamment américains) qui viennent recevoir dans une institution comme McGill une formation de très grande qualité à un cout substantiellement inférieur à celui exigé par les universités de leur pays.

Chacun d’eux investit annuellement plus de 17 000$ dans l’économie québécoise sous forme de frais de subsistance, ce qui correspond à un investissement annuel de millions de dollars dans l’économie québécoise pour l’ensemble de ceux-ci.

Selon Radio-Canada, M. Lisée entend dialoguer avec les universités anglophones du Québec afin de les convaincre que tout étudiant d’origine québécoise doit être appelé à démontrer sa capacité de travailler en français dans son domaine pour obtenir son diplôme. Dans le cas des étudiants étrangers, ils se verraient plutôt proposer un cours d’initiation au français.

On peut présumer de l’enthousiasme des universités anglophones à servir de police de la langue pour le compte du gouvernement péquiste et leur motivation crépusculaire à séparer le bon grain québécois de l’ivraie étrangère. Je vois déjà les caricatures postées sur les médias sociaux montrant les étudiants universitaires angloQuébécois décorés d’une fleur de lis jaune brodée à la poitrine pour les distinguer des autres…

Pour ne rien vous cacher, je crois que cette proposition est superflue.

Étendre la Loi 101 à toutes les entreprises d’au moins 25 employés fera en sorte qu’il sera très difficile pour l’étudiant unilingue anglais de trouver un emploi d’été lui permettant de financer ses études. D’où une motivation nouvelle à maintenir ses connaissances du français.

Les stages scolaires dans l’autre langue officielle

Selon Le Devoir, pour contrer l’attrait du CÉGEP anglais chez les étudiants provenant des écoles francophones, les CÉGEPs français seraient appelés à leur fournir un parcours d’anglais enrichi qui pourra comporter une session dans un CÉGEP anglais.

Voilà une idée très intéressante.

De nos jours, la langue anglaise est l’équivalent de ce qu’était la langue romaine au sein du clergé chrétien du Moyen-Âge. La connaissance de l’anglais est un atout incontestable. Conséquemment, la grande majorité des parents québécois souhaitent que leurs enfants puissent comprendre et s’exprimer en anglais.

Pour répondre à cette préoccupation, le Parti libéral a décidé que la sixième année du primaire serait une année d’immersion en anglais pour tous les étudiants du Québec. Cette mesure rencontre d’énormes difficultés d’application.

Dans beaucoup de classes du Québec, un seul professeur est responsable de l’enseignement de toutes les matières en sixième année, sauf la gymnastique et peut-être l’enseignement religieux. Pour l’enseignant, il y a un gouffre entre s’exprimer en anglais et tout enseigner dans cette langue, ce qui signifie la maitrise de tous les termes techniques utilisés en physique et en sciences naturelles, par exemple.

Proposer que les élèves francophones effectuent un ou plusieurs stages dans un CÉCEP anglais — et réciproquement, un ou plusieurs stages des élèves anglophones dans un CÉGEP francophone — serait un moyen efficace de favoriser la cohésion sociale de tous les Québécois, peu importe leur langue d’origine.

Permettre l’école anglaise aux enfants des soldats canadiens

Selon ce que j’apprends de l’éditorialiste Michel David du Devoir, la CAQ aurait fait tout un scandale en 2013 dans la région de Québec (où elle est influente) à propos de la petite Sandra, la fille d’un militaire blessé en Afghanistan. Celle-ci faisait partie d’une poignée d’enfants de soldats francophones auxquels le gouvernement Marois voulait retirer le privilège de fréquenter l’école anglaise.

Pour la CAQ et ses partisans, les sacrifices consentis sur les champs de bataille justifiaient le privilège de se soustraire à une règle applicable à tous les autres francophones du Québec.

Dans un pays étranger, les envahisseurs se donnent tous les droits. Mais pas à leur retour dans leur pays d’origine.

Le principe fondamental de la Loi 101, c’est que seule l’école publique française est gratuite. Comme l’école publique italienne est la seule gratuite en Italie. Ou l’école publique allemande en Allemagne. Font exception à cette règle, les angloQuébécois qui ont le droit acquis et constitutionnel d’accéder à l’école publique anglaise.

Tous les autres parents — qu’ils soient francophones ou allophones — peuvent, s’ils le désirent, faire instruire leurs enfants en anglais à la condition que ce soit à leurs frais, c’est-à-dire en les envoyant à l’école privée anglaise. Mais il n’ont pas droit à l’école publique anglaise, réservée aux seuls angloQuébécois.

Le principe est simple; le peuple francoQuébécois refuse de financer sa propre extinction en payant l’école publique anglaise aux enfants des néoQuébécois.

Toutefois, en 1982, les provinces anglophones ont adopté la Canadian Constitution à l’issue d’une ultime séance de négociation à laquelle le Québec n’a pas été invité.

Depuis ce temps, tous les moyens sont bons pour tenter d’invalider des pans entiers de la Loi 101. Multiplier les cas d’exception — comme c’est le cas au sujet de ces militaires francophones — ne fait que donner des arguments à ceux qui soutiennent que la Loi 101 est une législation discriminatoire et injuste.

Le désir de M. Lisée de supprimer les irritants qui divisent les Québécois est légitime surtout, dit-il, lorsque cela ne concerne que très peu de personnes. C’est là une attitude pragmatique.

Toutefois, on doit réaliser qu’il existe une distinction fondamentale entre favoriser l’apprentissage d’une langue seconde par les étudiants francophones et autoriser la transformation d’un jeune québécois en citoyen anglophone. Je ne vois aucune raison de faciliter la tâche aux familles francophones qui veulent s’assimiler à l’anglais.

Qu’il s’agisse de trois enfants ou d’un demi-million de personnes, le PQ ne peut favoriser l’anglicisation du Québec. Cela est une hérésie idéologique.

Afin de favoriser l’élection du PQ, on peut transformer la Loi 101 en fromage gruyère parce que les sondages montrent que beaucoup de Québécois le souhaitent. C’est la stratégie adoptée lors de cette élection basée sur la Charte de la laïcité. Avec le résultat qu’on sait.

Une règle d’or en politique est de ne jamais saper sa base électorale. Or celle du PQ est composée de farouches défenseurs de la Loi 101. Il est donc préférable, même si le temps presse, d’entreprendre une campagne qui vise à transformer l’opinion publique en espérant recueillir les fruits de ce labeur aux prochaines élections.

Défendre ou promouvoir le français ?

Aux prochaines élections, les Québécois qui voudront chasser le Parti libéral du pouvoir auront le choix entre la CAQ et le PQ. Pour simplifier ce choix, le PQ devra se distinguer de cette formation politique.

Or la CAQ a pris un virage qui se veut nationaliste, dans le but évident de gruger la clientèle des Indépendantistes ‘mous’, tout en butinant les fédéralistes déçus du PLQ. Cette stratégie est brillante et sera gagnante si le PQ tarde à se décaquiser.

Le PQ a accompli un pas important dans cette voie en abandonnant sa charte de la laïcité.

Sur le plan linguistique, les mesures préconisées par la CAQ reposent sur la promotion de français sans l’assortir de mesures coercitives.

Nos amis angloCanadiens n’ont pas eu la naïveté de miser sur la séduction irrésistible de la langue de Shakespeare. L’anglais a été imposé aux Métis et aux minorités francophones du Canada par l’abolition des écoles françaises et la punition des écoliers qui parlaient français entre eux dans les cours de récréation. Quant aux peuples qui parlaient une langue autochtone, c’est le kidnappage de leurs enfants dans des pensionnats anglophones qui les a anglicisés.

Ceux qui veulent qu’on entreprenne une campagne de promotion du français oublient que des milliers de scénaristes, de cinéastes, de dramaturges, de comédiens, de paroliers, de chanteurs, de romanciers et de poètes s’affairent déjà depuis plus d’un siècle à faire aimer notre langue.

Si on tient compte des émissions de télévision et de radio, des films, des pièces de théâtre, des chansons, des romans, des bandes dessinées et des livres de poésie, le cout des moyens utilisés pour rendre notre langue attrayante peut être évalué à plusieurs centaines de millions de dollars annuellement.

Peut-on faire mieux ? Il serait tentant de répondre cette lapalissade selon laquelle on peut toujours faire mieux. Mais en réalité, nos créateurs sont déjà acclamés partout à travers le monde. Il nous faut donc reconnaitre qu’on pourrait difficilement faire mieux.

Pour une nation de huit-millions de personnes, cet effort promotionnel en faveur du français est herculéen.

Et pourtant, de 2006 à 2011 (date du dernier recensement publié), la proportion de Francophones a reculé de 1% sur l’ile de Montréal et presque autant dans ses banlieues.

Une telle diminution, en aussi peu de temps, est extrêmement préoccupante.

On juge un arbre à ses fruits. Le laisser-faire libéral mène directement à l’extinction du peuple francoQuébécois. Et les moyens incitatifs de la CAQ aboutiront au même résultat.

C’est cela qu’il faut démontrer aux Québécois et non occulter les menaces qui planent sur notre avenir par un discours jovialiste et faussement rassembleur.

Conclusion

À l’exception de l’anglicisation des enfants des militaires canadiens (un détail auquel je suis farouchement opposé), je partage les principales mesures proposées par la nouvelle direction du PQ.

Plus précisément, l’assujettissement de toutes les entreprises de 25 employés ou plus à la Loi 101 et l’adoption de la solution britannique en matière d’immigration sont deux mesures d’une redoutable efficacité pour stopper l’anglicisation de Montréal.

Justement pour cette raison, le PQ ne pourra pas échapper à la controverse. Toutefois, plus la CAQ criera au scandale, plus elle révèlera la superficialité de son virage nationaliste. Quant au PQ, il lui sera facile de rallier une bonne partie des Québécois francophones (notamment dans la région de Montréal) à l’importance de défendre le français.

Compte tenu du morcèlement des allégeances politiques, de nos jours, il n’en faut pas plus pour prendre le pouvoir.

Ceci étant dit, on doit se rappeler qu’une politique de francisation des immigrants n’est pas destinée à couvrir tous les aspects d’une politique linguistique.

La langue de travail, la langue de service et l’affichage commercial sont d’autres volets d’une telle politique. Or ils ne sont pas abordés ici ou ils le sont indirectement.

Si on passe sous silence certaines propositions extramigratoires controversées, la nouvelle politique de francisation des immigrants est la plus sérieuse et la plus efficace jamais proposée au sein de cette formation politique.

Références :
Cap sur la « francisation 100% » pour le Parti québécois
Données linguistiques de Montréal selon le recensement de 2011
Franciser sans diviser
Immigrants’ spouses must speak English before entering UK
La CAQ veut rendre la francisation obligatoire pour les immigrants
La Charte de la laïcité : un mauvais départ
L’augmentation des frais de scolarité
Le français en péril — Deuxième de trois volets
Le souvenir de Sandra

Parus depuis :
Laval s’anglicise (2018-01-16)
Un immigrant belge dénonce le recrutement à l’étranger du Nouveau-Brunswick (2018-04-25)
Quand il faut parler anglais pour travailler à Montréal (2021-03-10)
Augmentation des résidents non permanents dans les écoles anglaises (2021-03-19)
Une vision pour demain (2021-03-20)
La maîtrise du français, nouvel enjeu de management (2021-10-25)
Immigration Canada recrute des agents uniquement anglophones au Québec (2021-11-04)
La francisation des immigrants suffit-elle pour assurer la pérennité du français au Québec ? (2022-03-01)
Rejet des étudiants francophones : le ministre du Travail du Québec interpellé (2022-03-31)
Des élèves qui peinent à parler français malgré les classes d’accueil (2023-02-02)
Italian government seeks to penalize the use of English words (2023-04-01)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le nationalisme de peccadille de la CAQ

Publié le 25 novembre 2016 | Temps de lecture : 6 minutes
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Introduction

Conformément à son actuel virage nationaliste, la CAQ a fait paraitre cette semaine sur sa page Facebook un montage photographique accusant MM. Couillard et Lisée d’avoir consenti au projet de loi 62 « qui ouvre toute grande la porte au tchador dans nos écoles.»

Contrairement à ce qu’affirme la CAQ, rien ne s’oppose actuellement au port du tchador à l’école. La loi 62 enfonce une porte déjà ouverte.

La post-vérité caquiste, inspirée de celles de Trump, s’inscrit dans une campagne en vue de prouver que la CAQ est la défenderesse des valeurs fondamentales du Québec.

Compte tenu du rôle que jouent les médias sociaux dans la diffusion de l’intolérance religieuse et du racisme, il apparait opportun d’inciter la CAQ à la plus grande prudence lorsqu’il s’agit de désigner des femmes à la vindicte publique.

Les valeurs ‘québécoises’

La séparation entre l’État et l’Église, de même que l’égalité entre les hommes et les femmes, sont des valeurs occidentales auxquelles le Québec a adhéré assez tardivement.

Ce sont des valeurs que nous partageons de nos jours avec le reste de l’Occident. Mais cela n’a pas toujours été le cas.

La séparation entre l’État et l’Église a été instaurée en France lors de la Révolution alors qu’il a fallu attendre la fin du duplessisme, 178 ans plus tard, pour qu’elle se concrétise au Québec.

Quant à l’égalité entre les sexes, les femmes québécoises n’ont obtenu le droit de vote que dans les années 1940 et n’ont cessé juridiquement d’être des mineures qu’au début des années 1960, soit bien après les femmes d’autres pays.

La nation québécoise existait antérieurement à son adhésion récente à ses valeurs. Celles-ci ne sont donc pas des caractéristiques qui la définissent.

L’histoire et la culture sont le ciment de cette nation. Mais ce qui nous définit, c’est une langue, un territoire et un parlement.

Sans la langue, ni l’occupation du territoire ni son parlement ne suffiraient à le définir comme nation, pas plus qu’on peut parler de la nation ontarienne.

En somme, la nation québécoise se résume à une collectivité parlant majoritairement français sur le territoire qu’elle occupe, et régie par un parlement qui lui est propre. Le jour où sa population parlera anglais, elle aura cessé d’exister.

D’ici là, il pourrait se colorer les cheveux en vert, porter le tchador ou se promener nu et ce serait encore la nation québécoise.

La CAQ et la défense du français

Si le français est à ce point fondamental à l’identité québécoise, peut-il compter sur la CAQ ?

Pour en juger, reportons-nous à l’époque encore récente où le gouvernement minoritaire de Mme Marois voulait renforcer la Loi 101.

Face à l’opposition systématique du parti libéral, la CAQ disposait alors de la balance du pouvoir.

Or la CAQ exigea une série d’assouplissements et d’exemptions destinées au contraire à affaiblir la Loi 101. Son influence parlementaire se résuma à foirer entre les mains du PQ et à le poignarder dans le dos.

La tiédeur de la CAQ à défendre le français peut se résumer, dans la bouche de François Legault, par cette phrase célèbre : « Oui mais ça va couter combien ? »

Parce que le français est un poste budgétaire dans le nationalisme de peccadille de la CAQ.

Si les députés de la CAQ passent si facilement de la CAQ au PLQ, c’est qu’ils s’y sentent comme chez eux.

Entre un gouvernement libéral qui ne fait rien depuis une décennie pour défendre le français et la CAQ heureuse de voir que l’anglicisation de Montréal est gratuite, il n’y a qu’un pas.

En invitant les Québécois à foncer sur le tchador comme le taureau fonce sur la muléta, la CAQ suscite une crainte de la différence, crainte représentée par un vêtement féminin jugé symbolique de l’exploitation faite aux femmes.

La CAQ ne s’attaque pas à l’exploitation faite aux femmes; elle s’attaque au vêtement qui en serait le symbole. Comme s’il suffisait d’obliger une femme battue à se dévêtir pour qu’elle cesse de l’être.

Il m’apparait évident qu’une femme qui porterait le tchador contre son gré a plus de chance de se libérer de cette contrainte si elle gagne un revenu que si on jette à la rue, vouée à la dépendance économique d’un conjoint dominateur.

À mes yeux, le montage photographique de la CAQ est de la xénophobie cachée sous le masque hypocrite de la défense des valeurs ‘québécoises’.

Voilà pourquoi la CAQ aurait intérêt à dissiper le flou et à préciser la substance derrière le nouvel article 1 de sa constitution.

Par le serment de citoyenneté canadienne, le néoQuébécois prête allégeance à la reine d’Angleterre et jure de respecter les lois du Canada. Rien d’autre. En plus, la CAQ souhaite que les néoQuébécois aient à répondre à un questionnaire relatif à la laïcité. Cette mesure ne les oblige pas à en suivre les préceptes. Les y obliger serait anticonstitutionnel.

Conséquemment, il y a présentement un contraste entre les idéaux vaguement nationalistes de la CAQ d’une part, et d’autre part la médiocrité des mesures qu’elle propose et la xénophobie gluante qui suinte de sa page Facebook.

Postscriptum (ajouté le lendemain)

La majorité des femmes voilées au Québec sont des adolescentes.

Au contraire de la CAQ, le message que j’aimerais qu’on envoie à l’étudiante québécoise, c’est le suivant :

« Voilée ou non, si tu es compétente, nous serons heureux de te donner une chance de réussir et te fournir l’occasion de mettre tes talents au profit de la société québécoise.

Le Québec est un pays évolué qui ne juge pas les autres selon leur apparence. Donc ta façon de t’habiller ne me regarde pas.


Et si certains soufflent sur les tisons de l’intolérance à ton égard, sache que bien des femmes avant toi ont ouvert des portes à celles qui les ont suivies, au grand scandale de ceux qui voulaient les soumettre à leurs préjugés mesquins.»

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Écrit par Jean-Pierre Martel


À quel jeu joue la CAQ ?

Publié le 2 mai 2013 | Temps de lecture : 9 minutes

L’idéologie de la CAQ se précise

Compte tenu de l’obstruction presque systématique du principal parti d’opposition, soit le Parti libéral du Québec, la Coalition Avenir Québec (CAQ) possède la balance du pouvoir à l’Assemblée Nationale; avec ses 19 députés, cette formation politique est la seule qui permet aux 54 députés du gouvernement minoritaire du Parti Québécois de former une majorité parmi les 125 députés du parlement québécois.

Par réalisme politique, tous les gouvernements minoritaires au Monde sont condamnés au compromis. En principe, pour le gouvernement Marois, cela ne devrait pas être un problème insurmontable; il n’a qu’à consulter le programme de la CAQ et de réaliser tout ce qui lui parait acceptable.

Ce qui complique les choses, c’est que la CAQ est une formation politique très jeune, née en avril 2012. Elle a réussi en quelques mois à élaborer un programme politique dont j’ai à plusieurs reprises vanté les mérites au cours de la dernière élection.

Mais aussi détaillées que se voulaient ses politiques, celles-ci comportaient de vastes zones d’ombre. C’est ainsi qu’on apprend maintenant que la CAQ défend les écoles passerelles. J’ai bien suivi la dernière campagne électorale et je ne rappelle pas que la CAQ en ait dit un seul mot.

De manière plus générale, depuis quelques temps, la CAQ multiplie les précisions à son programme qui s’inscrivent en contradiction avec les intentions gouvernementales, obligeant le gouvernement Marois à reculer. Certaines de ces précisions sont des détails : d’autres le sont moins, particulièrement sur la question linguistique.

Les exigences de la Loi 101

En matière d’enseignement, la Charte de la langue française — surnommée Loi 101 — est claire : seuls les enfants nés de parents anglophones ont droit à l’école publique anglaise. En France, l’école gratuite est française. En Italie, c’est l’école italienne. En Allemagne, c’est l’école allemande. Et au Québec, c’est l’école française. Sauf pour ce qui est de la minorité anglophone, dont les droits ancestraux à l’école publique anglaise sont respectés.

En d’autres mots, le droit à l’école publique anglaise n’existe pas au Québec. Il est accordé exceptionnellement à notre minorité anglophone en vertu d’un droit acquis.

Les parents francophones ou néoquébécois peuvent néanmoins envoyer leurs enfants dans une école privée de leur choix.

Le Québec a déjà fait l’expérience du libre choix de la langue. En effet, en 1969, le gouvernement québécois de l’Union nationale (un parti politique aujourd’hui disparu) adoptait une loi qui laissait aux parents le libre choix de la langue d’enseignement de leurs enfants.

Le résultat fut que les immigrants au Québec choisirent massivement d’envoyer leurs enfants à l’école anglaise. Les Québécois francophones ont alors réalisé que s’ils ne voulaient disparaitre comme peuple, ils devaient cesser de financer, par le biais de l’école publique anglaise, leur propre extinction. D’où la Loi 101.

Évidemment on pourrait modifier la Loi 101 de manière laisser le choix aux Francophones tout en l’interdisant aux néoQuébécois. Mais il n’y a pas une chance sur un million qu’une telle discrimination résiste à des contestations juridiques.

Donc la seule politique linguistique qui soit conforme au droit international, c’est de faire comme tous les autres pays du Monde, c’est-à-dire de laisser les gens parler la langue qu’ils voudront mais de ne leur permettre que l’accès gratuit à l’école publique de la langue de la nation ou de la zone linguistique dans laquelle ils se sont établis.

La politique linguistique de la CAQ

La CAQ a fait savoir qu’elle s’opposait à ce qu’on retire aux militaires francophones leur privilège d’inscrire leurs enfants à l’école anglaise. Ceci est une question mineure qui ne concerne qu’une poignée de familles. N’insistons pas.

Le retrait du statut bilingue des municipalités majoritairement peuplées de Francophones est également une question sans grande importance autre que sentimentale.

Toutefois, la CAQ ne veut pas qu’on touche aux écoles passerelles. On les appelle ainsi parce qu’elles s’appuient sur des dispositions de la Constitution du Canada anglais de 1982 pour conférer le droit — après un passage aussi bref que quelques semaines dans leurs murs — à l’école publique anglaise à tout enfant qui y a séjourné et, automatiquement, à tous ses frères et sœurs, de même qu’à tous leurs descendants. La CAQ souhaite que cette anglicisation se poursuive.

Présentement, l’obligation faite aux Francophones et aux néoQuébécois d’envoyer leurs enfants à l’école publique française ne concerne que l’école primaire. Le PQ a songé à étendre cette obligation aux CÉGEPs (c’est le nom des lycées au Québec) mais ce parti hésite. Pas la CAQ : celle-ci est contre, tout comme le Parti libéral.

La Loi 101 oblige la francisation des entreprises de plus 49 employés. Le projet de loi 14 veut étendre cette obligation à celles qui comptent entre 26 et 49 employés. Or la CAQ s’inquiète des coûts que peut représenter, pour les chefs de ces entreprises, l’obligation de respecter le droit des employés francophones à travailler dans leur langue. Du bout des lèvres, la CAQ est d’accord avec le principe, mais se refuse à toute mesure coercitive, ne souhaitant que des mesures incitatives, soit celles sur lesquelles le Parti libéral a compté pendant huit ans, avec les résultats qu’on sait.

Or il est important de souligner que ces entreprises sont également celles qui embauchent le plus de néoQuébécois et conséquemment, sont potentiellement un lieu privilégié de leur francisation. Mais la CAQ hésite…

Pendant ce temps…

On apprend que des regroupements d’angloQuébécois proposent l’abolition de la Loi 101. Leurs porte-paroles comparent la situation des Anglophones québécois à celle des Noirs victimes de l’apartheid en Afrique du Sud. Les politiques linguistiques du Québec seraient inspirées du Nazisme et le Québec se comparerait au IIIe Reich. Etc., etc.

Face à la montée de l’extrémisme chez certains Anglophones — montée qui a trouvé son expression ultime jusqu’ici dans l’attentat terroriste au Métropolis — il y place à l’apaisement mais pas au compromis.

Grâce au laxisme de l’ex-gouvernement libéral, le français a périclité sur l’île de Montréal. L’ouest de l’ile de Montréal est toujours aussi anglophone. Le Plateau Mont-Royal, presqu’entièrement francophone il y a dix ans, s’est beaucoup anglicisé. Même chose pour Hochelaga-Maisonneuve. Bref, lorsqu’on lit les analyses basées sur les recensements de Statistiques Canada, on est étonné de voir le gouffre entre ces données, et la réalité concrète observable sur la rue.

Quant au mythe selon lequel le recul démographique des Francophones sur l’île de Montréal s’expliquerait par un exode vers les banlieues, il n’est basé sur aucune donnée. Si les Francophones se réfugiaient massivement dans les banlieues, leur pourcentage (déjà très élevé) augmenterait. Or cela n’est pas le cas.

Bref, la situation du français sur l’ile de Montréal est critique. À partir de quand sera-t-il trop tard ? Je l’ignore. Mais ce dont je suis certain, c’est que le temps alloué aux hésitations, aux scrupules, aux intrigues de Palais et à la politicaillerie, achève.

Conclusion

Il peut sembler amusant pour la CAQ d’humilier des membres du Conseil des ministres en les obligeant à renoncer à des projets qui leurs sont chers. Mais lorsque le sort de la langue française au Québec dépend de la réalisation de ces projets, la CAQ a le choix entre se rallier ou trahir le peuple dont elle est issue.

Déjà l’action du gouvernement québécois est handicapée par les dispositions en matière linguistique de la Constitution du Canada anglais de 1982.

Afin d’endiguer la progression de l’anglais, nos gouvernements en sont réduits à adopter une succession ininterrompue de lois linguistiques anticonstitutionnelles depuis trente ans — lois invalidées les unes après les autres par le plus haut tribunal du pays.

Si les dirigeants des différents partis politiques sont incapables de mettre de côté la partisannerie politique et de s’unir lorsque nous sommes en danger, alors nous méritons vraiment de disparaitre.

Les dirigeants de la CAQ devraient y songer sérieusement avant que l’insécurité linguistique gagne l’ensemble des Québécois et qu’une élection soit déclenchée sur ce thème : si cela devait survenir, je crains fort que l’électorat juge sévèrement les hésitations et les byzantines préoccupations de la CAQ quant aux coûts-bénéfices de défense du français au Québec.

Références :
Du plomb dans l’aile
Élection générale québécoise de 2012
La CAQ, entre opportunisme et responsabilité
Le projet de loi 14 et les militaires – Aucune torture
Office québécois de la langue anglaise
Une question de fierté

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Pour une réforme majeure de l’Office québécois de la langue française

Publié le 3 mars 2013 | Temps de lecture : 10 minutes

Avant-propos : On trouvera à la fin du texte, un rappel historique du contexte qui a amené le Québec à se doter d’une politique linguistique.

Mission de l’Office

Sous sa forme actuelle, l’Office québécois de la langue française est né avec la Charte de la langue française (communément appelée la Loi 101). Cet organisme gouvernemental est chargé d’assurer le respect de la Loi 101 et de surveiller l’évolution de la situation linguistique au Québec.

Essentiellement, la mission de l’Office est de faire en sorte que les Québécois francophones soient chez eux au Québec. Il en découle :
• qu’ils puissent y travailler dans leur langue,
• qu’ils y reçoivent tout naturellement des services en français sans avoir à l’exiger et
• que le Québec demeure peuplé majoritairement de Francophones.

Les services en français

Depuis une dizaine de jours, les médias se sont lancés dans une critique virulente — et justifiée — des inspections de l’Office. Précisons de cet organisme n’a que cinq inspecteurs à temps plein.

L’affaire débute avec un reportage de Radio-Canada concernant le Buonanotte. À la suite d’une inspection, ce restaurant s’est vu sommé de traduire plusieurs mots italiens (dont Pasta) sur son menu français.

Le deuxième cas concerne la Brasserie Holder. Dans son article, le journaliste Yves Boivert (un des meilleurs de La Presse) y décrit une inspectrice tatillonne qui s’attarde aux mots anglais sur les touches des téléphones, mais qui semble avoir perdue de vue l’essentiel de son mandat.

Le troisième exemple est relatif au Restaurant Joe Beef. Là encore, l’inspection semble avoir portée sur des détails insignifiants de la décoration de ce restaurant.

Mais Le Devoir de samedi dernier apporte des précisions sur le premier de ces cas, à l’origine du « Pastagate » qui a embrasé les médias sociaux. Le restaurant Buonanotte possède deux menus bilingues : l’un italo-français, l’autre italo-anglais.

Il y a quelques mois, un client s’est fait présenter le menu italien-anglais. Outré de n’y voir pas un seul mot de français, ce client a porté plainte à l’Office. Clairement, la plainte portait sur la présence de l’anglais sur un menu, pas de l’italien.

Après avoir pris rendez-vous, l’inspecteur de l’Office se présente à ce restaurant et demande à voir le menu : on lui montre l’autre menu, celui italo-français, sur lequel prédomine l’italien. Et c’est cette prédominance qui a attiré (à tort) l’attention de l’inspecteur de l’Office.

Pour prévenir ce genre d’incident, la solution est très simple : il suffit que la défense du français au Québec soit remise entre les mains du peuple. Plus précisément, je suggère que les clients francophones servis en anglais aient le droit de porter plainte devant la Cours des petites créances et que l’amende imposée par le tribunal soit versée au plaignant.

Finie l’époque où la promotion du français était laissée au pouvoir discrétionnaire d’un gouvernement mollement convaincu de l’opportunité de la défendre, comme ce fut le cas sous le gouvernement libéral de Jean Charest. Donnons à la population québécoise le pouvoir de défendre elle-même le français en lui confiant des pouvoirs dissuasifs. Imaginez ce que serait la défense du français si au lieu d’avoir cinq inspecteurs au Québec, il y en avait des millions…

Précisons que ce transfert de pouvoir ne concernerait pas les infractions relative aux raisons sociales, mais exclusivement quant à la langue utilisée lors de la dispensation des services. Cette limite vise à éviter la multiplication inutile des recours judiciaires concernant une seule et même offense.

La langue de travail

Ce n’est pas en surprenant quelques mots échangés entre des employés qu’un client peut juger de la langue de travail au sein d’une entreprise. De plus, peu de citoyens risqueront de perdre leur travail en portant plainte devant les tribunaux contre leur employeur.

Donc l’Office devra conserver intact son rôle dans l’application des dispositions de la Loi 101 qui vise à défendre le droit des Francophones de travailler en français au Québec.

La surveillance de l’évolution linguistique

Toutes les études commandées par l’Office auprès de chercheurs, sont principalement des analyses des données obtenues lors des recensements effectués par Statistiques Canada.

Après avoir lu la principale de ces études, soit l’étude Paillé, je ne comprenais toujours pas la dichotomie entre les résultats des recensements et ce que j’entends concrètement dans les rues de Montréal.

Je terminais mon texte à ce sujet en me proposant de lire les quatre autres études disponibles sur le site de l’Office afin d’essayer de comprendre pourquoi.

Ce que je ne vous ai pas dit, c’est que je me suis tapé depuis les 132 pages de l’étude de Robert Bourbeau, Norbert Robitaille et Marilyn Amorevieta-Gentil. J’en n’ai jamais rédigé de compte-rendu tout simplement parce qu’après l’avoir lue, je n’étais pas plus avancé.

J’en arrivais toujours à la même conclusion : ça ne se peut pas. En d’autres mots, si les recensements de Statistique Canada sont à l’effet que seulement le quart (ou même le tiers) des Montréalais parlent anglais, ce n’est pas ce que j’entends lorsque je promène dans la métropole canadienne. Donc, ou bien j’hallucine ou bien il y a quelque chose qui cloche dans ces données.

Je ne veux pas laisser entendre que les recensements de Statistique Canada soient mal faits. Bien au contraire, je suis absolument convaincu du caractère irréprochable de leur méthodologie et de l’intégrité de ceux qui les font.

Toutefois, ce ne sont que des sondages. Or voyez les résultats de la dernière élection en Italie. Les partisans de Silvio Berlusconi avaient apparemment honte de révéler leur préférence aux sondeurs : mais une fois dans l’isoloir, ce fut différent.

Dans une certaine mesure, on peut également dire que plus grand monde n’osait se vanter d’être un partisan du Parti libéral du Québec au cours de la dernière campagne électorale. Or pourtant, ce parti a presque été reporté au pouvoir.

Peut-on imaginer qu’en remplissant les questionnaires de Statistique Canada, les néoQuébécois puissent être sujets à la rectitude politique et répondre ce qu’ils imaginent être ce qu’on attend d’eux ?

Or la lecture de cette deuxième étude ne fut pas vaine puisque j’ai découvert que le Québec possède les moyens de valider, du moins en partie, les recensements canadiens.

À la page 26 de cette étude, on y apprend qu’il existe un « Bulletin des naissantes vivantes ». En réalité, il s’agit d’un registre dans lequel sont colligées des données relatives à tous les bébés qui naissent de mères résidentes au Québec, que cette naissance ait lieu ici, dans n’importe quelle autre province canadienne, ou même aux États-Unis.

De plus, à la page suivante de la même étude, on apprend qu’il existe un « Fichier des décès ». Encore là, il s’agit d’un registre produit lui aussi par le ministère de la Santé et des Services sociaux.

En exigeant que toute demande de carte d’assurance maladie soit faite par le requérant lui-même (ou à défaut par un mandataire qui devra justifier son intervention), le Québec pourrait se doter d’outils qui lui permettrait de savoir précisément la langue parlée et comprise par l’ensemble de la population québécoise.

Mais pour cela, les préposés gouvernementaux devront être parfaitement bilingues, afin de s’assurer que les requérants choisissent la langue dans laquelle ils sont les plus confortables.

Si la langue autrefois parlée par un décédé n’a pas d’importance, la fusion de ces trois registres en vue de la création d’un Registre national de la population québécoise donnerait à l’État un outil lui permettant de connaitre en tout temps la démographie linguistique du Québec.

De plus, les politiques destinées à assurer la survie du français au Québec cesseraient de dépendre totalement de données canadiennes colligées périodiquement par un autre gouvernement.

Références :
Buonanotte: la plainte originale ne portait pas sur l’italien
Du steak aux W.-C.
La situation du français au Québec : l’étude Paillé
Le doux sommeil de l’Office de la langue française
L’émigration de Québécois aux États-Unis de 1840 à 1930
Les composantes de la dynamique démolinguistique régionale au Québec (1996-2006)
Office québécois de la langue française
Pour en finir avec le pastagate
Pour la francisation de toutes les entreprises québécoises de plus de cinq employés
Un autre restaurant dénonce le zèle de l’Office de la langue française
Un « excès de zèle » met l’OQLF dans l’embarras


Post-scriptum : Rappel historique

Le Québec est un îlot français dans une mer anglo-saxonne. Les États-Unis sont le pays le plus puissant et le plus riche au monde.

Ce pays est le plus inventif et le plus créatif, tant au point de vue technologique que culturel. Même en excluant sa population hispanique, la population anglophone des ÉU est 40 fois plus nombreuse que la population francophone du Québec.

De 1840 à 1930, fuyant la misère, plus d’un million de Québécois ont immigré en Nouvelle-Angleterre afin d’y travailler dans des usines de coton. Parmi leurs descendants, presque plus personne ne parle français.

Au Canada, le français a survécu grâce à l’isolement des Francophones, regroupés dans des villages et petites villes peu exposés à l’anglais. Au XIXe siècle, Montréal — une ville majoritairement anglophone à l’époque — est devenue francophone grâce à l’arrivée massive de paysans chassés par la misère mais s’entassant plutôt dans les logements surpeuplés et insalubres de l’est de la métropole.

Dans les années 1920, alors que la prohibition américaine incite de nombreux millionnaires à venir faire la fête dans les clubs de jazz de Montréal, cette ville comptait le taux le plus élevé de tuberculose et un des taux les plus élevés de mortalité enfantine en Amérique du Nord.

Tout au cours du XXe siècle, les Francophones du Québec se sont heurtés à des politiques discriminatoires d’embauche.

En 1944, au moment de son étatisation, la Montreal Light, Heat and Power compte une majorité d’employés unilingues anglais. Parmi son personnel technique, on ne compte aucun ingénieur francophone.

Au début des années 1960, la Trans-Canada Airlines (devenue Air Canada en 1964) préfère embaucher des Anglophones unilingues à des Francophones bilingues.

Pour mettre fin à cette discrimination et à la frustration des Montréalais, incapables d’être servis en français dans certains grands magasins du centre-ville de Montréal, le Québec adopte la Loi 101 en 1977.

Afin de se soustraire à cette loi, lorsque la société de fiducie Sun Life déménage son siège social du Québec l’année suivante, 85% de ses employés montréalais sont toujours unilingues anglais.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’unilinguisme anglais des Messageries DHL

Publié le 4 janvier 2012 | Temps de lecture : 3 minutes


 
J’ai reçu hier après-midi des DVD importés, essentiellement les deux premières saisons de la série policière « Nicolas Le Floch ».

Je ne sais pas par quel mécanisme une entreprise de livraison se voit attribué la tâche de dédouaner un colis et de l’acheminer au destinataire, mais dans ce cas-ci, c’est un livreur des messageries DHL Express qui s’est présenté à ma porte.

Malgré mes demandes répétées, ce livreur ne savait pas — ou ne voulait pas — parler français. Ce n’est pas la première fois que cette entreprise m’envoie un livreur unilingue anglais. Or porter plainte à l’Office de la langue française est une perte de temps depuis que le Parti libéral du Québec est au pouvoir.

En effet, depuis des années, l’Office ne fait plus respecter la loi 101. Celui-ci reçoit annuellement environ 400 plaintes relativement à la langue de service. Malgré le fait que 82% d’entre elles sont fondées, l’Office impose des amendes ou procède à des poursuites dans seulement 2% des infractions observées. Donc, tant que les Libéraux seront au pouvoir, Montréal continuera de s’angliciser.

Ceux parmi les Francophones qui jugent inacceptable de payer pour être servi en anglais au Québec, doivent donc prendre en main la défense du français. Lorsqu’on a affaire à une institution financière, on peut toujours retirer l’argent qu’on y a placé et le déposer ailleurs. C’est ce que j’ai fait relativement à la Banque Nationale : mes REER n’y sont plus.

Lorsqu’il s’agit d’un livreur de restaurant, je règle cela de manière très simple : je donne un pourboire dérisoire ou rien du tout.

Mais dans le cas des messageries, on n’a pas de pourboire à laisser, alors que faire ? J’ai passé la soirée à me demander ce que j’aurais dû faire et j’ai trouvé la solution.

C’est très simple : c’est de refuser d’accepter le colis. Cela oblige la messagerie à réexpédier le colis par un livreur qui parle français ou, en cas d’entêtement, à retourner le colis à l’expéditeur. C’est ce que j’aurais dû faire et ce que je ferai à l’avenir. À suivre…

Post-scriptum : À la livraison suivante par DHL, quelques semaines plus tard, celui qui m’a livré le colis parlait très bien français.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le français au Québec : l’exemple chinois

Publié le 23 décembre 2011 | Temps de lecture : 3 minutes

 

Fabrique d’objets en jade à Xi’an

Lors de mon premier séjour en Chine, je faisais partie d’un groupe d’une trentaine de Québécois francophones. Parmi les nombreuses visites organisées par notre agence de voyage, nous avons eu l’occasion d’aller dans une fabrique d’objets précieux en jade.

Ce qui m’avait surpris, c’est qu’au moment de cette visite, tous les employés de cette entreprise parlaient français. Certains le parlaient un peu, d’autre bien d’avantage, mais tous pouvaient se débrouiller dans notre langue.

En fait, les coûts de la main-d’œuvre chinoise étant très bas, cette entreprise possédait plusieurs équipes de vente. Lorsqu’un groupe de touristes allemands débarquaient à l’usine, on mettait à leur disposition une équipe de vendeuses parlant leur langue. Dès leur départ, si l’autobus suivant amenait des touristes italiens, l’équipe de vendeuses germanophones était remplacée par une équipe de vendeuses parlant l’italien. Et ainsi de suite.

Toutefois, tous ces employées étaient chinoises. À l’interne, les directives, les réunions, les rapports, bref toutes les communications entre employés se faisaient en mandarin (c’est-à-dire en chinois). Mais dès qu’on devait traiter avec un client, on faisait tout pour que ce soit dans sa langue à lui.

Ici, ce devrait être pareil.

Au Québec, un employé unilingue anglais — tout comme un employé unilingue français — est une personne handicapée. Il y a tellement d’Anglophones bilingues et de Francophones bilingues au Québec qu’il est injustifiable qu’une entreprise comme la Banque nationale ou Bombardier — dont j’ai parlé dans mon billet d’avant-hier — embauche des dirigeants unilingues anglais.

Parce que le résultat d’une telle embauche, c’est que les Francophones subalternes sont alors obligés de parler en anglais pour accommoder cet officier qui ne parle pas notre langue. C’est le cas de la comptabilité et des services informatiques de la Banque nationale et de milliers de personnes au siège social de Bombardier.

Jusqu’ici, le gouvernement Charest ne s’est pas illustré par la défense du français au Québec. Ses nominations politiques à l’Office de la langue française ont eu pour effet que cet organisme a distribué les dispenses à la loi 101 comme si c’était des bonbons. Il est grand temps que cela change.

Il est anormal qu’on ne puisse pas travailler en français au Québec. Que la charge de travail d’un employé francophone prévoit qu’il doivent parler anglais à la clientèle anglophone, c’est normal. Mais qu’il lui soit interdit de communiquer en français avec un autre employé francophone et, de manière générale, qu’il doive s’exprimer en anglais à l’interne, cela est totalement inacceptable.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’anglais vient d’en haut

Publié le 21 décembre 2011 | Temps de lecture : 5 minutes

Des patrons de la Caisse de dépôt incapables de comprendre leurs employés francophones

Ivanhoé Cambridge est la filiale immobilière de la Caisse de dépôt et placement du Québec. C’est l’un des dix plus grands propriétaires immobiliers du monde, avec un actif de plus de 30 milliards de dollars comprenant la Place Ville-Marie, le Centre Eaton de Montréal, et la Place Laurier de Québec. Environ 1600 employés y travaillent dont la moitié au Québec.

Ce printemps, ses dirigeants ont choisi David Smith, un unilingue anglophone, pour occuper le poste de Vice-président principal ressources humaines et services corporatifs. Quelques mois plus tard, plus précisément en juillet 2011, c’était le tour d’un autre unilingue anglophone, Kim McInnes, d’être choisi à un poste encore plus important, soit celui de Président de l’exploitation d’Ivanhoé Cambridge.

Depuis ce temps, les réunions du comité d’investissement d’Ivanhoé Cambridge se déroulent en anglais et tous les employés francophones qui ont à s’adresser à l’un ou l’autre de ces dirigeants, ici même à Montréal, doivent le faire dans la langue de Shakespeare.

La Banque nationale hostile aux francophones

Un unilingue anglophone, John B. Cieslak, a été embauché en 2007 comme Premier vice-président des technologies de l’information de la Banque nationale. Or les services informatiques de cette banque occupent deux étages complets au siège social de Montréal et des centaines d’employés.

Dès son arrivée, M. Cieslak aurait demandé à ses subalternes francophones faire leurs présentations techniques en anglais au Conseil d’administration de la banque, de façon à ce qu’il puisse les comprendre. Cette politique de l’anglais au travail s’est étendue aux entrevues de sélection des candidats pour des postes à pourvoir, qui se déroulent entièrement en anglais. Les évaluations aussi seraient faites en anglais.

Pire encore, l’échange de courriels en français entre employés francophones est maintenant sujet à des réprimandes officielles. Conséquemment, plusieurs employés ont dû quitter cette banque pour trouver un emploi en français.

C’est aussi le cas de la vérification interne des marchés financiers et de la trésorerie. Un comptable qui a quitté cette banque dernièrement a confié que tout ce qu’il faisait était en anglais, ici même à Montréal. Tous les rapports de son service étaient en anglais et une grande partie des gens qu’il côtoyait ne parlaient pas français.

Les porte-parole de la banque font valoir qu’en tant qu’institution de compétence constitutionnelle fédérale, la Banque nationale n’est pas soumise aux dispositions de la loi 101 mais qu’elle a la bonté de s’y soumettre lorsque cela lui convient.

Pour cette raison, plus tôt ce mois-ci, j’ai transféré tous les REER que je détenais à la Banque nationale vers une autre institution financière québécoise.

Post-scriptum : Après discussions avec la direction de la Banque nationale, la Société St-Jean-Baptiste et le Mouvement Québec français ont levé, en février 2012, l’appel lancé deux mois plus tôt au boycottage de cette banque.

Progression de l’anglais chez Bombardier

L’article 144 de la loi 101 permet à une entreprise québécoise de ne pas avoir à se soumettre aux dispositions de cette loi relativement à la langue de travail. Renouvelable, cette dispense n’est bonne que pour cinq ans. Chez Bombardier, la connaissance fonctionnelle du français n’est un critère d’embauche que depuis 2010. Si bien que beaucoup d’employés sont unilingues anglophones.

Afin de compenser pour cet état de fait, Bombardier dispose d’une entente particulière avec l’Office québécois de la langue française qui lui permet d’utiliser l’anglais comme langue de fonctionnement à son siège social de Dorval. La dernière entente date de 2006 et est en voie d’être renouvelée. Celle-ci portait sur 2454 employés. La demande de renouvellement présentée cet automne englobe 4022 employés, soit une augmentation de 64%.

Références :
Caisse: David Smith préféré à deux francophones bilingues
Des patrons unilingues anglais à la Caisse de dépôt
Français au travail: la Banque Nationale réagit
Loi 101: Bombardier veut une dispense pour 4022 employés
L’appel au boycottage de la Banque Nationale est levé
La Société Saint-Jean-Baptiste appelle à boycotter la Banque nationale
Louis Vachon ne demandera pas la démission d’un vice-président unilingue
Unilinguisme anglais à la CDPQ : inacceptable, dit Jean Charest
Français à la Caisse de dépôt: 10 ans de cours for nothing

Publiés depuis :
L’ex-patron unilingue de la Caisse de dépôt s’est trouvé un emploi (2013-07-13)
La rondelle ne roule pas pour le français dans la LHJMQ (2017-08-26)
Canadien National : Les francophones écartés de la table du C.A. (2022-04-21)

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Écrit par Jean-Pierre Martel