Les varioles et la collerette

Publié le 12 juin 2022 | Temps de lecture : 3 minutes

La variole simienne

La variole simienne (mieux connue sous le nom de ‘variole du singe’) est une maladie virale à pustules, rarement mortelle, qui est endémique dans le bassin du Congo et en Afrique occidentale.

Son virus peut se développer chez une vingtaine d’espèces animales (dont certains primates et rongeurs).

Chez l’humain, après une période d’incubation de cinq à dix jours, la maladie se manifeste par une forte fièvre, une grande fatigue, des maux de tête, des courbattures et le gonflement prononcé des ganglions, surtout au niveau du cou et dans l’aine.

Deux jours après l’apparition des premiers symptômes, les lésions apparaissent sur la peau. Successivement, ces lésions sont des taches rouges (1 à 2 jours), des boutons solides (1 à 2 jours), des cloques contenant un liquide clair (1 a 2 jours), puis des pustules contenant de grandes quantités de virus (de 5 à 7 jours).

Ces dernières se dessècheront sur une période de deux à quatre semaines. Leur croute finira par disparaitre en laissant parfois une trace visible sur la peau.

La petite vérole

La variole simienne est cousine de la variole (tout court). Appelée autrefois ‘petite vérole’, cette dernière a été éradiquée en 1980 à la suite d’une campagne de vaccination massive orchestrée par l’Organisation mondiale de la santé.

Autrefois, le mot ‘vérole’ se dirait des maladies à pustules ou à vésicules; on connaissait la petite et la grande vérole, de même que la varicelle. Or la science moderne a démontré qu’il s’agissait de maladies différentes.

La petite vérole n’était petite que de nom. Elle fut responsable des pandémies les plus mortelles de l’histoire de l’humanité. Plus que la peste. Plus que le choléra. Plus que la grippe espagnole.

La grande vérole

Ce qu’on appelait autrefois la ‘grande’ vérole désigne aujourd’hui la syphillis.

Cette maladie existait en Europe depuis l’Antiquité mais fit un retour en force durant la Renaissance à la suite de la découverte des Amériques.

Cette découverte fut l’occasion du ‘Grand échange de véroles’; les conquistadors apportent la petite vérole aux Amérindiens (ce qui les décimera par dizaines de millions), alors que les marins européens contaminent l’Europe de la grande vérole (la syphillis) attrapée en violant les femmes des peuples autochtones conquis.

Or, parmi les séquelles cutanées de la grande vérole, il y avait le ‘collier de Vénus’.

Celui-ci était constitué d’une succession de taches brunâtres ou décolorées situées au niveau du cou.

Détail de Portrait de Frans Snyders et son épouse (1621) d’Antoine van Dyck

En raison de son aspect inesthétique, ces taches ont donné naissance à la mode des collerettes à godrons (ou à amples plis empesés), emblème vestimentaire de la Renaissance.

De la seconde moitié du XVIe siècle jusqu’au début du XVIIe siècle, femmes et hommes de la noblesse portaient cette décoration, plus tard remplacée chez les femmes par un col (souvent en dentelle) dressé derrière le cou et qui, cette fois, dégageait la poitrine des personnes épargnées par la grande variole.

Références :
Collerette (costume)
Variole du singe : comment se transmet-elle, quels sont les symptômes ?

Complément de lecture : La Grande peste et le Covid-19

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Quatre, en chiffres romains

Publié le 14 mai 2022 | Temps de lecture : 2 minutes

À l’époque de l’Empire romain, on représentait indistinctement le chiffre quatre par IIII ou par IV. Toutefois, vers la fin du Moyen-Âge, la deuxième graphie était devenue plus courante que la première.


 
Au contraire, en horlogerie, lorsque les heures sont en chiffres romains, quatre est presque toujours représenté par IIII.

Cela se justifie pour deux raisons.

La première est esthétique; lorsque quatre s’écrit IIII, il fait équilibre avec le huit (VIII) situé du côté opposé du cadran.



 
Deuxièmement, sur le cadran d’une montre ou d’une horloge, 4 et 6 sont toujours écrits à l’envers. Si on les représentent respectivement par IV et VI, il est alors très facile de les confondre.

Détails techniques :
1re photo : Olympus OM-D e-m5 mark II, objectif M.Zuiko 25 mm F/1,2 — 1/400 sec. — F/1,2 — ISO 200 — 25 mm
2e  photo : Olympus OM-D e-m5 infrarouge à spectre complet, objectif M.Zuiko 12-40 mm F/2,8 + filtre vert jaunâtre B+W 061 + filtre bleu B+W KB20 + filtre bleu 80C de Calumet — 1/200 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 17 mm
3e  photo : Olympus OM-D e-m5 mark II, objectif M.Zuiko 40-150 mm F/2,8 — 1/800 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 73 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Antisémitisme : le 800e anniversaire du synode d’Oxford

Publié le 9 mai 2022 | Temps de lecture : 3 minutes

Après l’échec de la croisade qu’il déclencha quelques mois après son accession à la papauté, Innocent III revint à la charge en 1213. Cette nouvelle croisade eut lieu de 1217 à 1221.

Afin d’éviter un nouvel échec, le pape sentit le besoin de préparer les fidèles et d’unir la chrétienté contre ses ennemis internes et externes.

Voilà pourquoi il convoqua un concile en 1215.

Celui-ci ordonna que partout dans la chrétienté, Juifs et Musulmans soient obligés de porter sur eux une marque distinctive.

Officiellement, cela avait pour but d’empêcher que “par erreur, des chrétiens [aient] un commerce intime avec des femmes juives ou sarrasines.

En réalité, l’obligation de porter un signe distinctif découlait de la crainte que cette diaspora ait des sympathies avec l’ennemi.

Bientôt, le Vatican estima que Juifs et Chrétiens devaient vivre séparément. Ce qui donna naissance aux ghettos juifs d’Europe.

Tout comme, de nos jours, la rhétorique de certains influenceurs contre les immigrants donne naissance à des actes hostiles, voire violents, contre les minorités ethniques, l’antisémitisme d’Innocent III fit tache d’huile.

Un synode est comme un concile, mais regroupant des ecclésiastiques sur une base régionale ou nationale.

Ayant autorité sur toute l’Angleterre, celui d’Oxford (créé en 1222) alla plus loin. Il interdit la construction de nouvelles synagogues, imposa la dime (chrétienne) aux Juifs et empêcha ceux-ci d’exercer certains métiers.

Quelques décennies plus tard, on leur interdit la propriété foncière et la transmission d’un legs.

Finalement, un décret royal expulsa tous les Juifs du pays en 1290. Ce décret fut en vigueur pendant 360 ans.

L’Église anglicane est née en 1534 d’un schisme au sein de l’Église chrétienne d’Angleterre. À la suite de ce schisme, les cathédrales anglaises devinrent des temples anglicans.

Dimanche dernier, à l’occasion du 800e anniversaire de la création du synode d’Oxford, l’Église anglicane — en tant qu’héritière de l’Église de Rome en Angleterre — a présenté officiellement ses excuses pour l’antisémitisme des décisions prises par le synode d’Oxford.

Références :
Apology, 800 years on, for laws that expelled Jews from England
Cinquième croisade
Innocent III
Quatrième concile du Latran
Quatrième croisade

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’origine de l’expression : s’en laver les mains

Publié le 18 avril 2022 | Temps de lecture : 3 minutes
Ecce Homo (1871), d’Antonio Ciseri

Introduction

Ponce Pilate était le représentant plénipotentiaire de Rome en Judée à l’époque où celle-ci était une colonie romaine.

C’est devant lui qu’on amena Jésus de Nazareth afin qu’il le juge.

Selon trois des quatre évangélistes, on l’accuse d’avoir provoqué une émeute à proximité du Temple de Jérusalem, émeute au cours de laquelle de nombreux étals de marchands furent renversés.

Les vendeurs du Temple

À l’époque, beaucoup de pèlerins venaient au Temple dans le but d’offrir un animal en sacrifice.

Mais certains d’entre eux trouvaient plus pratique de l’acheter sur place que de l’apporter de chez eux. De plus, tout animal qui tombait malade en cours de route était jugé impropre au sacrifice.

Or justement, certains marchands offraient de petits animaux en parfaite santé, prêts à être utilisés.

D’autre part, au Temple de Jérusalem, les offrandes en espèces ne pouvaient pas inclure de la monnaie romaine, celle qui avait cours légal en Judée.

Pourquoi ? Parce qu’elle était frappée à l’effigie de l’empereur de Rome. Aucune pièce de monnaie à la gloire d’un monarque n’était acceptée.

Certains des marchands étaient des agents de change permettant de se procurer des pièces d’or ou d’argent respectueuses de la rectitude religieuse.

D’autres étals offraient tout simplement des breuvages et des collations aux passants.

Bref, ces marchands et le Temple vivaient en parfaite symbiose.

N’étant pas familiarisé avec les us et coutumes de la capitale, Jésus avait été scandalisé par cette bruyante foire commerciale, irrespectueuse du caractère sacré des lieux.

Après sa violente colère (qui avait incité ses fidèles à l’émeute), les grands prêtres du Temple se sont empressés d’arrêter ce fauteur de troubles.

Mais n’ayant pas le pouvoir de le mettre définitivement hors d’état de nuire, ils référèrent Jésus à Ponce Pilate, seul autorisé à imposer la peine de mort.

Une ruse qui échoue

L’interrogatoire devant Ponce Pilate ne s’étant pas révélé concluant, ce dernier décide d’utiliser une ruse plutôt que d’innocenter Jésus et ainsi provoquer la contrariété des autorités religieuses qui insistent pour qu’il le condamne.

La coutume voulait qu’à Pâque, on gracie un prisonnier. Il offre donc à la foule réunie devant son palais de gracier soit Jésus ou Barabbas (un accusé de meurtre). D’avance, Ponce Pilate est persuadé du résultat.

Mais cette foule est celle réunie par les autorités religieuses. Elle comprend de nombreux marchands qui ont subi d’importantes pertes à l’occasion de cette émeute.

À la grande surprise du procureur romain, la foule réclame que Barabbas soit gracié et que Jésus périsse.

Surpris et dégouté par la réaction de la foule, Ponce Pilate décide malgré lui de livrer Jésus au supplice de la croix tout en se lavant publiquement les mains afin de symboliser qu’il se dégage de toute responsabilité dans cette décision qu’il prend à contrecœur.

Voilà l’origine de cette expression.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le verbe caviarder

Publié le 7 mars 2022 | Temps de lecture : 2 minutes

Lorsque le journaliste Thomas Gerbet de Radio-Canada a invoqué la loi d’accès à l’information afin d’obtenir une copie de l’avis des experts sanitaires qui justifiait (selon la CAQ) le couvre-feu décrété en décembre 2021, voici le document de deux pages que le gouvernement lui a fait parvenir.
 

 
Le verbe caviarder est apparu en France dans les années 1890 pour décrire ironiquement la censure tatillonne pratiquée en Russie depuis l’empereur Nicolas Ier (qui régna sur son pays de 1825 à 1855).

À l’époque, en plus de confisquer les imprimés — ce qu’on faisait dans les cas graves, comme dans beaucoup d’autres pays — la censure russe avait la particularité d’obliger les imprimeurs, dans les cas ‘legers’, à recouvrir d’un enduit noir — aussi noir que le caviar — le moindre passage d’un article ou d’un livre qui déplaisait aux autorités. Une tâche longue et fastidieuse.

Dans ce pays, la crainte de la censure était telle qu’on s’est abstenu de plaisanter à ce sujet. Si bien que même aujourd’hui, il n’y a pas de traduction littérale de ce verbe français.

Parmi les équivalents russes, soit barrer, biffer, éditer ou censurer, c’est évidemment ce dernier qui s’en rapproche le plus.

En anglais, on ne retrouve pas cette allusion au caviar. Le verbe se dit ‘to redact’ et l’adjectif caviardé se traduit par ‘blacked’ (c’est-à-dire noirci).

Le verbe caviarder est un des milliers d’exemples qui illustrent la richesse du français.

Références :
Caviardage excessif : la FPJQ redemande une refonte de la loi d’accès à l’information
Définitions de « caviarder »

Paru depuis : Demande d’accès à l’information — Pas de réponse avant 2028 à la Défense nationale (2024-08-19)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La Grande peste et le Covid-19

Publié le 6 mars 2022 | Temps de lecture : 10 minutes

L’origine

Dans l’histoire de l’humanité, il y eut plusieurs pandémies de peste noire. Mais aucune ne fut plus mortelle que la Grande peste.

Pendant des siècles, on crut que cette pandémie était née en Chine et qu’elle s’était propagée le long de la route de la soie.


 
Depuis quelques décennies, on croit plutôt qu’elle serait apparue en Asie centrale, dans les rangs des Mongols qui assiégeaient en 1346 le port de Caffa, situé en Crimée.

Au cours de ce blocus terrestre (et non maritime) qui dura deux ans, des milliers de soldats mongols moururent de la peste.

Constatant leur impossibilité de conquérir la ville, l’armée mongole décida d’utiliser des trébuchets afin de catapulter les cadavres des pestiférés par-dessus les murailles de Caffa.

C’est un des tout premiers exemples de guerre bactériologique.

Atteints à leur tour par la peste, les assiégés signèrent une trêve avec les Mongols à la suite de quoi les premiers abandonnèrent la ville maudite pour se disperser dans les ports méditerranéens.

Réservoirs de la peste, les rats qui infestaient la cale de leurs bateaux propagèrent la peste dans tous les ports où on fit escale.

La propagation en Europe

En cinq ou six ans, plus précisément de 1347 à 1353, la Grande peste fit vingt-cinq-millions de victimes en Europe, soit entre 30 et 50 % de la population du continent.

Présentée comme une punition divine, la Grande peste provoqua un regain de ferveur religieuse au sein de la population médiévale, déjà encline à une grande religiosité.

Cette époque fut l’âge d’or des charlatans et des illuminés.

Les processions expiatoires de flagellants au torse ensanglanté déambulaient dans les villes, frappant l’imagination des spectateurs en prière et contribuant à l’anxiété générale.

Et bientôt les populations se laissèrent convaincre que les Juifs, les lépreux, les sorcières et les mendiants étaient la cause de la Grande peste.

En raison de la dépopulation, de nombreux villages furent abandonnés, les moins bonnes terres retournèrent en friche et les forêts s’étendirent.

D’outre-tombe, écoutons la voix du poète et compositeur Guillaume de Machaut. En 1349, sous le titre du Jugement du roi de Navarre, il écrit une chronique qui témoigne de son temps.

En voici un extrait (en français moderne) :

Nul ne faisait les champs labourer
ni les blés faucher ni les vignes faire,
même en donnant triple salaire, (…)
tant nombreux étaient les morts. (…)

Dans les champs, les bêtes mues
gisaient toutes éperdues.
Çà et là, elles paissaient (note : du verbe paitre)
partout où elles le voulaient.

Il n’y avait ni seigneur, ni berger,
ni homme qui leur allait autour.
Personne ne les réclamait.
Ni pour siennes, les revendiquait.

Des héritages, il y en eut plusieurs
qui restèrent sans seigneur.
Dans les manoirs, nul n’osait pénétrer
là où les morts avaient été…

Avant la pandémie, les gens s’étaient résignés à leur vie de misère. La pandémie bouleversa les mentalités.

La rareté de la main-d’œuvre agricole força les propriétaires terriens à améliorer les conditions de travail de leurs travailleurs et, dans certains pays, à abolir le servage.

La Grande peste en Angleterre

En Angleterre, la moitié de la population était serf. Ce qui signifie qu’on était tenu au travail forcé pour un propriétaire terrien (habituellement un noble ou un membre du clergé issu de la noblesse).

Dans la première moitié de la pandémie, plus précisément de 1348 à 1350, la pandémie provoqua d’importantes perturbations économiques; le prix des biens de consommation (sauf les céréales) augmenta de 27 %.

Et puisque la main-d’œuvre agricole se faisait plus rare, les travailleurs qui n’étaient pas liés par le servage exigèrent de meilleurs salaires. À défaut de quoi, ils partaient là où ils étaient mieux traités.

Cette hausse du cout de la main-d’œuvre agricole réduisit les profits des propriétaires terriens. Ce qui, à leurs yeux, était inacceptable.

Afin de combattre le ‘chaos’, le parlement de Londres — dont la chambre haute est peuplée exclusivement de propriétaires terriens — adopta en 1349 une loi destinée à plafonner les salaires à leur niveau d’avant la peste.

Peu appliquée, cette loi n’empêcha pas les conditions de vie du peuple anglais de s’améliorer en dépit de l’inflation. Mais elle rendit le pouvoir royal très impopulaire, apparemment à la solde des ennemis du peuple.

En 1381, soit plusieurs années après la fin de la pandémie, Richard II adopta une succession de taxes de plus en plus lourdes afin de financer la guerre de Cent Ans.

Les paysans se révoltèrent. Ils marchèrent sur Londres et y tuèrent toutes les personnes associées à l’autorité royale qu’ils rencontrèrent.

Cette révolte fut écrasée dans le sang quelques mois plus tard.

Covid-19 et guerres

La guerre culturelle américaine

Au cours de la pandémie actuelle, les opposants et les partisans des mesures sanitaires se sont affrontés aux États-Unis à coup d’insultes et de menaces de mort.

Au Moyen-Âge, les boucs émissaires de la Grande peste étaient les Juifs, les lépreux et les sorcières.

De nos jours, des millions d’Américains se sont laissé convaincre que leur belle ‘race blanche’ était en train d’être remplacée par les Juifs et les personnes à la peau foncée.

Ils avaient mis tous leurs espoirs dans un président messianique. Malheureusement pour eux, ce dernier devait perdre le pouvoir en raison des maléfices de sorciers ‘woke’ qui réussirent à imposer au pays un président illégitime.

Et les charlatans, de même que les illuminés du Moyen-Âge, renaissent aujourd’hui sur les médias sociaux.

La Grande démission

Cette guerre civile culturelle a entaché de nombreux milieux de travail d’un climat toxique.

Si bien que des millions de travailleurs américains ont quitté leur emploi pour un meilleur alors des millions d’autres, principalement des femmes, ont tout simplement abandonné le marché du travail.

Tout comme la pénurie de travailleurs agricoles au XIVe siècle, la Grande démission pousse actuellement les salaires à la hausse.

Pénuries et inflation

La congestion des ports américains donnant sur le Pacifique a raréfié l’approvisionnement de biens asiatiques.

Or il s’agit non seulement de biens de consommation courants, mais également d’items essentiels à la fabrication de produits américains.

C’est ainsi que l’industrie automobile a connu des ralentissements de production liés à une pénurie de semiconducteurs taïwanais.

S’ajoutent les sanctions économiques prises récemment contre la Russie qui font grimper le prix des matières premières dont ce pays est un important exportateur.

Tout cela a provoqué la plus importante hausse du taux d’inflation depuis quarante ans.

Alors que la mondialisation baignait dans l’huile depuis des décennies, aucun grand groupe industriel n’est aujourd’hui à l’abri de bouleversements économiques.

La guerre télévisée


 
La Grande peste n’a duré que cinq ou six ans, de 1347 à 1353. Mais elle fut accompagnée de la guerre de Cent Ans (de 1337 à 1453).

En France, celle-ci fut une guerre de pillage au cours de laquelle les armées anglaises ont méticuleusement détruit le bétail et les instruments de production agricole de centaines de villages français.

Au cours de ce conflit, les paysans étaient exposés aux horreurs de la guerre au fur et à mesure de l’avancée des chevauchées anglaises.

Par contre, de nos jours, des milliards de personnes assistent en temps réel aux reportages concernant le conflit russo-ukrainien.

Si bien que le jovialisme de nos autorités sanitaires, annonçant un peu vite la fin de la pandémie, a cédé le pas à une autre angoisse; celle de la guerre.

Le Yo-yo sanitaire

Le fiasco de la lutte sanitaire dans tous les pays occidentaux a sérieusement ébranlé la confiance des populations à l’égard de ceux qui ont pour mandat de les protéger.

Au lieu de dépister les personnes infectées et de les placer en quarantaine — comme on l’a fait en Extrême-Orient — on a adopté la stratégie du Yo-yo.

Celle-ci consiste à élaborer de savantes modélisations basées sur l’évaluation des contacts et sur les effets de leur réduction.

Concrètement, la politique du Yo-yo consiste à limiter la capacité d’accueil ou à fermer les petits commerces, les restaurants et les salles de spectacle lorsque les hôpitaux se remplissent. Et, au contraire, à jeter du lest lorsque les choses s’améliorent.

Et puisque le relâchement des mesures sanitaires occasionne toujours un rebond des hospitalisations, on se voit bientôt dans l’obligation de resserrer la vis. Ce qui diminue les hospitalisations…

Et ainsi de suite.

Cette succession de pénalités cycliques est l’équivalent moderne de la série de taxes imposées par Richard II au Moyen-Âge. Avec le même résultat.

Les propriétaires de milliers de petites ou moyennes entreprises ont été appauvris au cours de la pandémie : restaurants, salles d’exercice, salons de coiffure, salles de spectacles, créateurs de produits culturels, agences de voyages, etc.

Conclusion

Jusqu’ici, le Covid-19 a fait près d’un million de morts aux États-Unis et y a fait chuter l’espérance de vie, particulièrement chez les Américains à la peau très pigmentée.

D’une certaine manière, la pandémie au Covid-19 ressemble un peu à la Grande peste. Non seulement en raison de son pouvoir pathogène, mais également en raison des bouleversements économiques qu’elle a occasionnés.

Tout comme l’Église s’est avérée impuissante à combattre la peste, il en fut de même de nos gouvernements. Face à la pandémie, ils se sont empressés de jeter la serviette, déclarant qu’il fallait laisser se développer l’immunité ‘naturelle’ ou apprendre à vivre avec le virus.

Pour la population assiégée de Caffa, c’était l’équivalent de lui dire qu’elle devait apprendre à vivre avec ses conquérants.

La pandémie a révélé les faiblesses de notre filet de protection sociale, notamment dans le système hospitalier, et provoqué un retard académique chez nos enfants (dont on a volontairement provoqué la contamination sans que des catapultes aient été nécessaires).

D’autre part, le sous-investissement chronique dans le logement social fait actuellement flamber le prix des loyers.

Face à cela, les pays occidentaux ne trouvent rien de mieux à faire que de battre le tambour de la guerre afin de faire oublier le fiasco de leur lutte sanitaire.

Il est douteux que ceux qui nous ont si mal protégés depuis deux ans puissent échapper à l’âge des révoltes…

Références :
Covid-19 : du Yo-yo à la roulette russe
Guerre de Cent Ans
In Medieval Europe, a Pandemic Changed Work Forever. Can It Happen Again?
La Grande démission aux États-Unis
Ordonnance des Travailleurs
Peste noire
Révolte des paysans
Siège de Caffa

Paru depuis : The source of the Black Death in fourteenth-century central Eurasia (2022-06-15)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Margaret Thatcher, le secret des Exocet, et la menace nucléaire

Publié le 3 mars 2022 | Temps de lecture : 3 minutes

L’archipel des Malouines est formé principalement de deux iles au large des cotes de l’Argentine.

Depuis le XIXe siècle, ce pays en disputait en vain la souveraineté à l’Angleterre.

En avril 1982, la junte militaire argentine décide d’envahir les Malouines afin de détourner l’opinion publique de la crise économique qui sévit dans le pays.

La guerre qui s’en suivit ne dura que du 2 avril au 14 juin suivant. Elle opposait donc la cinquième puissance économique mondiale, la Grande-Bretagne, à la vingt-huitième.

Fait à noter : entre ces deux alliés des États-Unis, le président Reagan penchait en faveur de l’Argentine puisque ce pays jouait un rôle-clé dans sa lutte obsessionnelle contre le communisme en Amérique latine.

Les porte-avions argentins transportaient, entre autres, cinq chasseurs Super-Étendard équipés de missiles Exocet. Leur nom fait référence aux exocets, les poissons volants.

Les missiles français, à la surprise des Anglais, s’avérèrent d’une redoutable efficacité.

Secrètement, ils étaient dotés d’un dispositif qui permettait de les inactiver à distance. C’était une précaution prise par la France au cas où elle vendrait ces missiles à un pays qui se retournerait contre elle.

Le 7 mai 1982, la première ministre britannique appelle le président français. Elle est furieuse. Trois jours plus tôt, un missile Exocet, largué à basse altitude, rase les flots et frappe mortellement le contretorpilleur HMS Sheffield.

Au moment de l’appel, les photos du navire en feu sont à la une de tous les journaux britanniques. Il mettra six jours à sombrer.

Nous sommes à un an des élections. Mme Thatcher somme alors le président français de lui révéler le code d’inactivation des Excocet, menaçant de recourir à l’arme nucléaire contre l’Argentine si Mitterand refuse.

Ce récit fait partie des confidences que le président français aurait faites à son psychanalyste Ali Magoudi et qui se retrouvent dans Rendez-vous, un livre paru en 2005.

Les documents déclassifiés en 2012 par Archives nationales britanniques — trente ans après les faits, comme c’est son habitude — révèlent une foule de détails quant à la coopération secrète entre la France et la Grande-Bretagne afin d’empêcher l’Argentine d’acquérir d’autres Excocet.

Mais elles sont muettes au sujet de l’appel du 7 mai. D’où la question : Margaret Thatcher, a-t-elle vraiment menacé de recourir à l’arme nucléaire ?

Ce qui rend douteuses les affirmations du psychanalyste, c’est qu’il précise que Mitterrand aurait cédé à la pression. Or cela est contredit par la suite de la guerre.

Le 25 mai, deux missiles Excocet coulent le MV Atlantic Conveyor. Le 11 juin, c’est au tour du HMS Glamorgan d’être atteint par un missile Exocet.

Ces deux autres frappes n’auraient pas eu lieu si Mitterrand avait révélé le code d’inactivation des Exocet à Mme Thatcher.

Finalement, la Guerre des Malouines, comme toutes les guerres, servit de réclame publicitaire en faveur des armes qui s’avérèrent les plus efficaces.

Dès l’année suivante, le nombre de commandes d’Exocet augmenta de manière importante.

Références :
Falklands: “The Sphinx and the curious case of the Iron Lady’s H-bomb”
Guerre des Malouines
Maggie’s war with treacherous Mitterrand over Exocet missile: Archive files reveal ‘James Bond’ plot to hijack aircraft carrying French-made weapons
Thatcher ‘threatened to nuke Argentina’

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Histoire du square Saint-Louis

Publié le 18 février 2022 | Temps de lecture : 3 minutes
L’Institut du tourisme et d’hôtellerie du Québec
Du 301 au 317 de la rue du square Saint-Louis
Vespasienne du square Viger (transformée l’été en marché aux fleurs)
Du 336 au 324 de la rue du square Saint-Louis
Du 316 au 324 de la rue Cherrier (un peu à l’est du square)

Mieux connu sous le nom de ‘Carré Saint-Louis’, ce square est situé un peu au nord de la rue Sherbrooke, entre les rues Saint-Denis (à l’est) et l’avenue Laval (à l’ouest).

Au XVIIIe siècle, le territoire au nord des fortifications, de la rue Saint-Antoine à l’actuelle rue Duluth, porte le nom de Côte-à-Baron.

Plusieurs grands propriétaires terriens se succèderont sur cette superficie à vocation agricole.

Le développement résidentiel y débute en 1844 quand trois promoteurs — dont Louis-Hippolyte La Fontaine — entreprennent le lotissement de terres agricoles contigües qu’ils viennent d’acquérir.

Un peu à l’ouest, ils font bâtir des maisons en rangée.

En 1848, sur ce qui deviendra le square Saint-Louis, la ville de Montréal achète un terrain pour y construire un réservoir d’eau potable à ciel ouvert. Il sera inauguré en 1851.

Mais dès l’année suivante, un incendie d’une rare intensité détruit presque la moitié des maisons de Montréal.

La ville entreprend alors de grands travaux en vue de créer un immense réservoir situé sur les flancs du mont Royal. C’est le réservoir McTavish, inauguré en 1856.

Désaffecté, l’ancien réservoir de la Côte-à-Baron est partiellement remblayé en 1876 pour devenir un bassin peu profond au milieu duquel est installée une fontaine. L’été, ce bassin sert de grande pataugeuse aux enfants du quartier.

Ce nouveau parc, situé au cœur d’un quartier ouvrier, sera bientôt entouré de maisons cossues de style victorien faites en pierre décorée d’éléments en bois ouvragé.

Après la migration de la bourgeoisie francophone vers Outremont, le square entreprend un long déclin.

Dans les années 1960, le bassin est à sec et les vieilles maisons autour du square — souvent transformées en appartements ou en maisons de chambres — ont perdu beaucoup de leur valeur marchande.

Le faible cout d’acquisition de ces demeures attire bientôt un grand nombre d’artistes aujourd’hui célèbres. Dans toute la ville, le parc est connu pour la vie de bohème qu’on y mène.

Entre autres, la chanteuse Pauline Julien et son conjoint (le poète et politicien Gérald Godin) habitèrent au 336 de la rue du square Saint-Louis (la maison de gauche sur l’avant-dernière photo).

De nos jours, ce parc est redevenu un endroit charmant, planté de feuillus séculaires.

Détails techniques : Panasonic GX1 infrarouge à spectre complet, objectif Lumix 14-42mm + filtre Grün Rollei + filtre bleu B+W KB20 + filtre bleu 80A d’Hoya
1re photo : 1/60 sec. — F/9,0 — ISO 400 — 14 mm
2e  photo : 1/200 sec. — F/4,0 — ISO 160 — 17 mm
3e  photo : 1/200 sec. — F/4,0 — ISO 160 — 17 mm
4e  photo : 1/160 sec. — F/4,0 — ISO 160 — 18 mm
5e  photo : 1/100 sec. — F/4,6 — ISO 160 — 21 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les rennes du père Noël

Publié le 20 décembre 2021 | Temps de lecture : 2 minutes


 
Ce qu’on appelle ‘renne’ en Europe porte le nom de ‘caribou’ au Québec.

C’est la seule espèce de cervidé où le mâle et la femelle portent des bois (réservés aux mâles chez les cerfs, les chevreuils, les orignaux, etc.).

En Amérique du Nord, les caribous vivent à l’état sauvage. Mais dans le nord de l’Europe, les rennes sont domestiqués depuis le 5e siècle.

En Laponie, on en élève des troupeaux entiers pour la viande, de même que pour le lait. La fourrure sert à la confection des vêtements; autrefois, elle servait également à la fabrication des tentes. Les os et les bois servaient à créer des ustensiles et des outils divers.

Avant l’embargo continental décrété par Napoléon, les chantiers navals anglais s’approvisionnaient en bois auprès des pays scandinaves. Les rennes servaient alors comme animaux de trait pour transporter les billots vers les scieries de ces pays.

Dans les régions subarctiques d’Europe et d’Asie, les rennes attelés à des traineaux ont transporté des passagers pendant des siècles.

C’est cette coutume nordique qui est à l’origine de la légende selon laquelle le père Noël procède à la distribution des cadeaux grâce à un traineau attelé à des rennes.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La propagande haineuse contre les Autochtones doit cesser

Publié le 10 novembre 2021 | Temps de lecture : 3 minutes

En 1623, lorsque Gabriel Sagard se rend en Huronie — située à l’époque au cœur de la région des Grands Lacs — il est accompagné de deux autres frères récollets, dont Nicolas Viel.

À son retour vers Québec en 1625, le canoë du frère Viel chavire dans les rapides de la rivière des Prairies où il se noie.

En raison de sa rivalité avec les Hurons-Wendats, le chef algonquin Tessouat a fait répandre dès 1634 la rumeur selon laquelle cet accident aurait été volontaire. En d’autres mots, qu’il s’agirait d’un homicide commis par les Hurons-Wendats.

Cela est improbable pour deux raisons. Premièrement, au cours de son séjour contemporain en Huronie, Gabriel Sagard (confrère de Viel) décrit l’extraordinaire hospitalité dont il fut l’objet. Et deuxièmement, les Hurons-Wendats ont ramenés sains et saufs les deux autres confrères de Nicolas Viel, Gabriel Sagard et Joseph Le Caron.

Malgré cela, l’accusation du chef Tessouat fut reprise par le père jésuite Paul Le Jeune dans son récit de voyage de 1634.

Le monument au frère Viel
Socle du monument au frère Viel
Socle du monument à Ahuntsic

Dans le quartier montréalais d’Ahuntsic, devant l’église de la Visitation, on peut voir deux monuments dont le socle reproduit un extrait du récit de voyage du jésuite Paul Le Jeune.

Cet extrait pue la haine raciale.

D’autre part, le 28 octobre dernier, on apprenait l’intention du pape François de visiter au Canada dans le cadre d’un processus de guérison et de réconciliation avec les victimes des pensionnats autochtones.

D’ici là, il serait souhaitable que cette propagande religieuse d’une autre époque soit supprimée. Non seulement parce qu’elle est préjudiciable à la démarche du pape, mais surtout parce qu’il s’agit pour l’instant d’une calomnie (jusqu’à preuve du contraire) qui est profondément choquante.

On s’étonne que cela n’ait pas été enlevé plus tôt.

Références :
Gabriel Sagard en Huronie
Nicolas Viel
Paul Le Jeune
 

Postscriptum du 27 aout 2023 :

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Depuis la parution de ce texte, on a ajouté une plaque qui masque le texte offensant. Lors d’une courte entrevue accordée par le curé de la paroisse, celui-ci révélait qu’on envisage la possibilité d’y inscrire un texte qui replace mieux cet incident dans le contexte de l’époque.

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Écrit par Jean-Pierre Martel