Alors que j’étais étudiant universitaire en première ou en deuxième année, je m’étais rendu au magasin Import Bazaar de la rue Sainte-Catherine afin de me procurer un cadeau d’anniversaire pour ma sœur Paule.
Ce magasin vendait à prix modique des pièces d’artisanat d’un peu partout à travers le monde.
J’avais donc trouvé une espèce de lanterne en terre cuite, assez jolie, en forme de cruche.
Peinte en noir, cette lanterne était dotée d’une poignée à l’arrière et d’une grande ouverture à l’avant qui permettait d’y placer une chandelle. Aux épaules, deux oiseaux, également peints en noir, ajoutaient un peu de fantaisie à ce sombre objet utilitaire.
Mais j’avais vu autre chose. Il s’agissait d’une tige carrée, haute de cinq centimètres, dont la forme rappelait, en plus petite, celle des bornes qui indiquent le kilométrage des routes de certains pays européens. Taillé en marbre fauve, cet objet poli était décoré de minuscules caractères chinois gravés verticalement.
Ce bibelot n’était d’aucune utilité. Mais il était vraiment mignon.
Malheureusement, une fois la lanterne payée, cet objet — même au coût de 50 cents — était au-delà de mes moyens.
Après une longue hésitation, j’avais résolu de le placer dans le socle à bougie à l’intérieur de la lanterne. Et je m’étais dit que si la caissière ne le voyait pas, c’était son problème à elle. Je l’obtiendrais ainsi gratuitement sans l’avoir vraiment volé. Hé hé.
Effectivement, le tout se passa exactement comme je l’avais souhaité.
J’étais plutôt content de mon coup… jusqu’au moment d’aller au lit.
Dès que les lumières de ma chambre furent éteintes, je me mis à repenser à cette histoire.
« Si elle ne s’en rend pas compte, ce n’est pas de ma faute : mais qu’est-ce c’est que ce raisonnement ? Dans le fond, tu voulais le voler, cet objet. Et c’est exactement ce que tu as fait. Et pourquoi donc ? Parce que tu n’en a pas les moyens. »
« Mais il y a des milliers d’objets que tu n’a pas les moyens d’avoir. Aujourd’hui, c’est ce bibelot. La prochaine fois ce sera autre chose. La fois d’après un objet plus dispendieux. Et ainsi de suite jusqu’au jour où tu te feras prendre. »
« Parce qu’un jour, mon petit garçon, tu finiras bien par te faire prendre. Veux-tu vraiment briser ta vie ? Veux-tu finir en prison, sur la paille avec les rats ? » Et ainsi de suite jusqu’à épuisement. Ah, mon Dieu, quel calvaire.
Le lendemain, je me suis réveillé plus fatigué qu’en allant me coucher. Très vite, je décidai que je ne passerais certainement pas une autre nuit comme celle-ci.
Je retournai donc au magasin en disant : « En arrivant chez moi, j’ai réalisé qu’on n’avait oublié de me calculer cet objet. Puis-je vous le payer ? »
« Évidemment, monsieur » me répondit la caissière en souriant, ne soupçonnant pas les ignominieuses tendances criminelles que je venais de découvrir en moi.
Je suis sorti du magasin soulagé. La nuit suivante (et celles qui suivirent), je dormis comme un bébé.
En vous décrivant ce fait divers, ce qui me frappe, c’est que mon honnêteté — qui finit par triompher comme dans les films de ma jeunesse — ait été exclusivement dictée par mon égoïsme.
Ma seule motivation a été la recherche de mon propre confort. Juste pour dormir la conscience tranquille…
(à suivre)
Un humble aveu qui te grandit à mes yeux.
Bien raconté, ce larcin. Mais attendons la suite avant de se prononcer sur le fond :o) car on ne sait jamais (o: .
Est-ce en rapport avec le vol à l’étalage de la bâtonnière du Québec, Lu Chan Khuong ?
enfin ouffffffffffffffffffff vous avez fini par rejoindre ce que je disais dans le précèdent article. je peux vous rassurez que vous n’êtes pas un égoiste . ; même si vous avez pensé à vous en premier ; vous avez pensé à vos chers parents et à la confiance qu’ils ont placé en vous . bravo vous êtes digne de vos parents que je salue .on attend la suite. ahahahah