Comme toutes les fins de semaine, des artistes exposent leurs créations le long du Prado. Après avoir obtenu la permission de photographier une peintre à l’œuvre, j’ai fini par lui acheter ce qu’elle était en train d’exécuter.
Ici et là, des professeurs en dessin enseignent bénévolement aux enfants du quartier.
Je me rends en taxi à Miramar afin de terminer ma visite de la cinquième avenue et de ses environs. Sur la 7e avenue, près de la 28e rue, je prends le repas du midi à la Casa Española. Six tapas savoureuses et verre de vin blanc pour 8,50$ (sans le pourboire).
Sur la 14e rue, je passe devant l’ambassade de France, située dans un édifice néo-classique austère auquel on accède sur rendez-vous seulement.
Puis je prends le taxi pour la place de la Révolution, plus précisément pour le Théâtre national. Pour trois représentations, on y présente, pour la première fois à Cuba, le Vaisseau fantôme de Richard Wagner.
J’y vais par curiosité. Le prix de l’admission n’est que de 10$.
Je m’attends au pire. L’an dernier, au Festival de ballet donné au Gran Teatro (situé sur le Prado), les danseurs étaient extraordinaires mais l’orchestre jouait faux. La majorité des galas étaient présentés — Dieu merci — sur de la musique enregistrée. Je tiens pour acquis que la musique symphonique (et l’opéra par ricochet) est un art bourgeois qui, de ce fait, serait négligé par le régime.
Je suis au centre, dans la deuxième rangée, en dépit du fait que mon billet a été acheté deux jours avant la représentation. L’assistance est clairsemée.
La salle est affreuse. Mat, le rideau de scène est de couleur tabac. À l’avant, les murs jaune sale semblent en tôle ondulée. En réalité, ils sont en bois, rythmés par des lisières verticales (également en bois) espacées avec une parfaite régularité. À l’arrière, les murs sont en béton granuleux, peint en bleu royal. Les sièges, du même bleu, sont très confortables.
Première surprise : l’orchestre est assez bien. Toutefois, il semble manquer de puissance. Plus tard je découvrirai que cela est dû à la profondeur de la fosse d’orchestre puisqu’on l’entend mieux au fond de la salle que tout près, séparé par le muret qui l’isole des premiers sièges où je suis situé.
Décors et costumes sont faits avec des moyens de fortune. La scène semble recouverte de sacs à poubelle étendus à plat. Les souliers à semelle caoutchoutée d’un des barytons y crisseront à chacune de ses présences sur scène.
Les chœurs sont d’une grande justesse et surtout — deuxième surprise agréable — d’une puissance extraordinaire; on les croirait trois fois plus nombreux. Je soupçonne qu’ils sont composés de chanteurs qui mériteraient d’être en vedette mais qui manquent d’occasions de l’être.
Troisième surprise, les solistes sont de très bon niveau. Certains ne sont que convenables (avec une diction allemande améliorable) : d’autres sont exceptionnels. Je ne serais pas étonné d’apprendre que dans quelques années, il adviendra des chanteurs d’opéra cubains ce qu’il est advenu de ceux du Bloc soviétique, dont on n’avait jamais entendu parler à l’époque du Rideau de fer mais qui, aujourd’hui, brillent sur toutes les grandes scènes lyriques du monde.
En dépit du fait que je me souvienne vaguement du livret, je ne me rappelle pas que dans l’histoire de cet opéra, il y ait matière à ce qu’on agite une banderole où serait écrit ¡ Viva la Patria !.
Alors qu’on l’accuse d’avoir incité l’Allemagne des années 1930 à toutes sortes de dérives idéologiques, j’apprends donc qu’à La Havane, Wagner est le chantre de la Révolution cubaine. Décidément, je vais de surprise en surprise…
Commencé à 17h, l’opéra se termine à 20h.
Je saute dans un taxi me changer et pour aller au Théâtre Karl-Marx, à Miramar. On y présente à 21h un Homemaje a Los Beatles. Je m’attends à un spectacle où on personnifie le quatuor britannique. En fait, c’est un gala au cours duquel des groupes rock cubains sont invités à présenter, pour deux chansons du quatuor, leur version de la musique des Beatles.
Le théâtre Karl-Marx est une grande salle, comparable à la Place des Arts (à Montréal) ou à la Bastille (à Paris). Ici la salle est presque pleine. Surtout des jeunes. Étonnamment, les gens sont ici habillés en tenue plus soignée que ceux rencontrés à l’opéra. Moi qui a été me changer à la maison — de la chemise et de la cravate au gaminet en hommage à Che Guevarra (croyant que ce serait plus approprié à une salle de spectacle nommée en l’honneur de Karl Marx) — je me sens tout à fait ridicule.
Enregistré par trois caméras de télévision, le concert sera précédé par un discours interminable, prononcé par un barbu ressemblant à Fidel Castro, mais avec trente ans de moins. À Montréal, sa « conférence » aurait été huée après quelques minutes. Ici, tout le monde l’écoutera respectueusement jusqu’à la fin.
Les éclairages sont très professionnels. La sonorisation adéquate. Les artistes sont très bons. Parfois excellents. La diction anglaise est, disons, exotique…
Bref, une bonne soirée.
Post-scriptum : Ce texte est le millième article publié sur ce blogue.
Détails techniques : Appareil Olympus OM-D e-m5, objectifs M.Zuiko 40-150 mm R (la septième photo) et Lumix 12-35 mm F/2,8 (les autres photos)
1re photo : 1/1250 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 23 mm
2e photo : 1/640 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 21 mm
3e photo : 1/60 sec. — F/2,8 — ISO 1600 — 12 mm
4e photo : 1/400 sec. — F/5,6 — ISO 200 — 17 mm
5e photo : 1/60 sec. — F/2,8 — ISO 4000 — 12 mm
6e photo : 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 4000 — 12 mm
7e photo : 1/100 sec. — F/5,6 — ISO 1250 — 49 mm
8e photo : 1/500 sec. — F/5,6 — ISO 200 — 12 mm
9e photo : 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 35 mm
Pour lire les comptes-rendus du premier ou du deuxième voyage à La Havane, veuillez cliquer sur l’hyperlien approprié.
COSTUME RIDICULE POUR UNE SOIREE EXOTIQUE…