Introduction
Après treize mois d’intenses négociations, l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACÉUM) est entré en vigueur le premier juillet 2020 pour une durée de six ans.
Tout comme l’accord qui l’a précédé (l’ALÉNA), l’ACÉUM devait protéger les produits et services canadiens contre les taxes douanières américaines.
C’est ça, un accord de libre-échange.
Malheureusement, dès que cela ne leur convient plus, les États-Unis n’hésitent jamais à renier leur parole.
En voici quelques exemples.
La Crise des missiles à Cuba
En 1962, les États-Unis jugèrent intolérable que la Russie installe des missiles hostiles dans leur cour arrière, soit à Cuba. Washington instaura alors un blocus maritime contre l’ile et menaça de faire sombrer tout navire russe qui s’approcherait des côtes cubaines.
Cette crise fut résolue par un accord en vertu duquel la Russie retirait ses missiles antiaméricains de Cuba en contrepartie de quoi les États-Unis retiraient leurs missiles antirusses de la Turquie.
Bien des années plus tard, après que la poussière de cette crise fut retombée, les États-Unis redéployèrent leurs missiles en Turquie, faisant de ce pays le plus important dépositaire de leurs ogives nucléaires hors du territoire américain.
Par la suite, ces missiles furent rapprochés de Moscou en les redéployant en Roumanie, une décennie après l’adhésion de ce pays à l’Otan.
Et le but de l’adhésion éventuelle de l’Ukraine à l’Otan était de les rapprocher encore davantage. D’où la guerre russo-ukrainienne.
La réunification de l’Allemagne
En 1990, les États-Unis s’étaient engagés verbalement à ne pas élargir l’Otan vers l’est en contrepartie du consentement russe à la réunification de l’Allemagne.
Techniquement, cette promesse n’a pas été faite par l’Otan (qui n’était pas signataire de l’accord), mais par les États-Unis. Ce qui revient au même puisque ceux-ci ont droit de véto sur l’élargissement de l’Alliance.
Longtemps, les États-Unis ont nié avoir pris un tel engagement. Mais dans leurs mémoires publiés depuis, les diplomates présents lors de ces négociations ont confirmé la véracité de cette promesse américaine.
La Convention contre la torture
Lorsque les dirigeants d’un pays signent un traité, celui-ci doit être ratifié (ou confirmé) par le parlement de ce pays.
Les États-Unis ont signé la Convention de l’Onu contre la torture en 1988 et l’ont ratifiée en 1994.
Toutefois, à la suite des attentats du 11 septembre 2001, l’administration de G.W. Bush a signé en 2002 trois mémorandums qui autorisaient la torture à la base militaire de Guantánamo.
L’accord sur le nucléaire iranien
En 2015, les États-Unis signaient l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien à la suite d’une longue négociation lors de laquelle toutes les parties avaient consenti à des compromis.
Mais trois ans plus tard, Donald Trump annonce la décision des États-Unis de sortir de cet accord, c’est-à-dire de rétablir les sanctions contre l’Iran tout en exigeant que l’Iran respecte le compromis qu’il avait accepté en échange de la levée de ces sanctions.
L’Accord de Paris sur le climat
En 2016, les États-Unis ont signé cet accord.
Quatre ans plus tard, sous la première administration Trump, ils s’en sont retirés. Sous l’administration de Joe Biden (qui lui a succédé), ils l’ont réintégré en 2021 avant de s’en retirer de nouveau en 2025, à l’arrivée au pouvoir de l’administration Trump-II.
Dans ce cas-ci, les États-Unis n’ont pas renié leur parole puisque l’accord prévoyait qu’un pays puisse s’en retirer.
Mais ce chachacha démontre qu’on ne peut jamais se fier aux États-Unis.
Conclusion
En février dernier, dans le texte Déchiffrer Donald Trump, nous écrivions :
Donald Trump est obsédé par le déficit de la balance commerciale américaine.
À ses yeux, les États-Unis se comparent à une compagnie dont les dépenses sont supérieures à ses revenus. Or il sait qu’en pareil cas, l’entreprise se dirige vers la faillite.
Il s’attaque donc à tous les pays — amis ou non — dont la balance commerciale est excédentaire à l’égard des États-Unis.
Dans certains milieux, on n’a pas encore compris que l’époque de la mondialisation heureuse du commerce international est révolue… du moins pour l’instant.
L’aveuglement des politiciens canadiens est tel qu’ils s’imaginent qu’une nouvelle entente commerciale mettra fin aux barrières tarifaires alors que l’ACÉUM (encore en vigueur) avait précisément pour but de les empêcher.
En d’autres mots, une entente de libre-échange avec les États-Unis, ça ne donne rien tant que Donald Trump est au pouvoir.
En effet, si Trump n’hésite pas à violer l’ACÉUM qu’il a lui-même signé, pourquoi respecterait-il une autre entente du même genre ?
Dring ! Dring !
Références :
Accord Canada‒États-Unis‒Mexique (ACEUM)
Accord de Paris sur le climat
Accord de Vienne sur le nucléaire iranien
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
Crise des missiles de Cuba
« L’OTAN ne s’étendra pas d’un pouce vers l’est »
Renouvellement de l’ACEUM : Ottawa peaufine sa stratégie
Torture aux États-Unis