Évolution démographique avant l’indépendance
Avec l’Estonie au nord et la Lituanie au sud, la Lettonie fait partie des pays baltes. On les appelle ainsi parce qu’ils sont limitrophes de la mer Baltique.
Sauf à l’occasion des deux guerres mondiales, la population lettone s’est accrue continuellement de 1863 à l’indépendance (en 1990). Depuis ce temps, elle a diminué de 29 % pour atteindre un creux de 1,9 million d’habitants en 2023.
Devenue république soviétique en 1945, la Lettonie s’est fortement industrialisée au cours des deux décennies suivantes. Ce qui a entrainé un afflux important de Russophones (de Russie, d’Ukraine et de Biélorussie) qui ont modifié la composition ethnique du pays.
Notamment, l’arrivée d’ingénieurs, d’ouvriers et de paysans russes, de même que le transfert de militaires et de fonctionnaires communistes, ont provoqué une diminution de l’importance démographique des Lettophones.
Si bien que les Russophones du pays sont passés de 8,8 % en 1935 à 34 % la veille de l’indépendance.
Évolution démographique depuis l’indépendance
Depuis 1990, les élites politiques du pays ont voulu créer une nation homogène par le biais d’un accès très restrictif à la citoyenneté.
En vue des premières élections législatives, le Conseil suprême de Lettonie a adopté en 1991 une loi qui accorde la citoyenneté lettone aux seules personnes qui étaient déjà citoyens de Lettonie au moment de l’invasion russe de 1940, ainsi qu’à leurs descendants.
Toutes les personnes naturalisées depuis cinquante ans (essentiellement des Russophones) se trouvaient donc apatrides du jour au lendemain.
Aux yeux des dirigeants lettons, il s’agissait d’une politique de ‘décolonisation’ qui visait à motiver la minorité russophone à quitter le pays. Ce que très peu d’entre eux ont fait, attachés au territoire où ils sont nés ou sur lequel ils se sont installés durant leur enfance.
En vue de son intégration à l’Union européenne (survenue en 2004), la Lettonie a été obligée d’atténuer la rigueur de sa législation linguistique.
En 1994, elle adoptait une nouvelle loi qui se voulait une démarche vers l’intégration. En vertu de celle-ci, les locuteurs d’une langue minoritaire pouvaient acquérir la citoyenneté du pays s’ils réussissaient un examen visant à s’assurer qu’ils parlent couramment le letton.
Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, la Lettonie a décidé d’interdire progressivement, à partir de 2025, l’enseignement de toutes les langues minoritaires sur son territoire. De plus, elle a durci ses règles de résidence à l’égard de sa minorité russe.
C’est ainsi que les Lettons russophones doivent désormais obtenir un permis de séjour permanent afin de pouvoir demeurer en Lettonie. À cette fin, ils doivent réussir un examen de letton. S’ils échouent, c’est l’expulsion vers la Russie.
Sur les 11 301 Russes qui ont passé cet examen avant septembre 2023, 61 % ont échoué lors de leur premier essai. Ils ont eu le droit à une seconde chance. Mais ce délai n’a pas suffi pour certains d’entre eux.
Le 20 septembre 2023, trois-mille Lettons russophones ont été informés qu’ils avaient deux mois pour réussir les tests linguistiques du pays, à défaut de quoi ils seraient expulsés.
Le couvent de la Sainte-Trinité-Saint-Serge
Le cas qui a suscité le plus d’indignation concerne les religieuses d’un couvent situé à Riga, la capitale lettone.
Il y a deux semaines, elles ont appris qu’elles disposaient de six mois pour apprendre le letton, à défaut de quoi elles seraient expulsées du pays.
Admises au couvent à l’époque soviétique, ces religieuses parlent un dialecte ancien similaire mais différent du russe moderne. En plus d’observer les règles monastiques, elles sont connues pour la soupe populaire qu’elles distribuent quotidiennement aux pauvres de la capitale depuis des années.
Cette renommée explique pourquoi Vaira-Vilke-Freigerga, présidente de la Lettonie de 1999 à 2007, s’est publiquement portée à leur défense.
En vain jusqu’ici.
Références :
Latvia (CIA World Factbook)
Les russophones entre intégration et repli identitaire
Lettonie
Loi sur la citoyenneté (1998)
Minorités. Trois mille citoyens russes âgés en instance d’expulsion de la Lettonie
Test de langue, déboulonnage des statues… Comment la Lettonie acte sa dérussification
Zakharova compared the coercion of nuns to check their knowledge of the Latvian language with the practices of the Nazis