Le chemin Roxham vu des États-Unis
Le chemin Roxham est cette voie terrestre qui relie à pied le Québec à l’État de New York. Elle est empruntée annuellement par des dizaines de milliers de demandeurs d’asile.
L’admission au Canada de réfugiés en provenance des États-Unis est régie par l’Entente sur les tiers pays surs (ETPS), conclue entre ces deux pays en 2002.
Elle s’applique aux réfugiés qui se présentent à un des postes frontaliers officiels du Canada. S’ils accèdent au pays par un point d’entrée non officiel (comme le chemin Roxham), l’entente ne s’applique pas à eux.
Depuis des semaines, on nous répète l’importance de colmater cette faille de l’ETPS. De plus, on presse le premier ministre canadien d’aborder cette question lors de la visite du président américain au Canada prévue le mois prochain.
En réalité, les États-Unis se servent du Canada comme déversoir pour atténuer la crise migratoire à laquelle ils sont confrontés. Que le Canada aime cela ou non, il devra ronger son frein puisque nos voisins du Sud ne voient pas l’intérêt de revoir cette entente qui, renégocié ou non, ne changera rien à leur situation.
La défense de la frontière canadienne
Ottawa feint d’ignorer que les traités internationaux ne servent pas à protéger les frontières; ce qui protège les frontières, ce dont les douaniers et les garde-frontières… de préférence, armés.
Pour la personne qui veut échapper à la guerre, à la persécution, à la misère, ou pour celle qui souhaite tout simplement quitter un pays où ses enfants n’ont aucun avenir, les rêves sont irrépressibles.
Voilà pourquoi, au péril de leur vie, des millions de personnes entreprennent des odyssées au cours desquelles ils traverseront des pays ou des mers dans le but d’atteindre une terre où, selon la Bible, coulent le lait et le miel. C’est, dit-on, le cas du Canada.
Tous les pays au monde aimeraient que leurs demandeurs d’asile se présentent à un point d’entrée unique (officiel ou non). Ce qui leur éviterait de dépenser une fortune à la surveillance de la migration transfrontalière.
La frontière sud du Canada (ce qui exclut celle avec l’Alaska) est longue de 6 414 kilomètres. Elle est facilement franchissable d’un bout à l’autre.
Au lieu de passer par le chemin Roxham, si les demandeurs d’asile pénétraient au Canada de partout, il faudrait des milliers de garde-frontières.
Si ces agents sont distants d’un kilomètre, tout réfugié qui passerait au milieu de deux d’entre eux aurait, dès le départ, un demi-kilomètre d’avance.
Sans compter que le garde-frontière qui se lancerait à sa poursuite devrait alors quitter son poste et laisser un trou (de deux kilomètres de frontière sans protection) entre son collègue à l’ouest et celui à l’est.
Bref, à deux gardes par kilomètre, et à trois duos qui se relaient sur 24 heures, il en faudrait plus de 64 000 pour protéger la frontière canadienne.
Sans compter les pilotes des hélicoptères et les appareils de surveillance sophistiqués à acheter pour traquer les malfaiteurs.
À un salaire de seulement 60 000$ par année, c’est une somme de 3,8 milliards qu’il faudrait dépenser annuellement pour remplacer ce qu’une poignée de garde-frontières font au chemin Roxham. Et ce, à un cout dérisoire.
Et puisque la frontière canado-américaine sera toujours une passoire, peu importe les moyens qu’on consacrera à la protéger, aucun parti politique au pouvoir n’acceptera de porter le blâme des lacunes qu’on constatera à répétition.
Donc, ce que fera Ottawa, c’est de privatiser le contrôle des frontières. Comme la sécurité des aéroports américains était assurée par des agences privée avant les attentats du 11 septembre.
Pour le prix du contrat, l’agence de sécurité (probablement américaine) acceptera implicitement de servir de bouc émissaire pour les lacunes qui, inévitablement, surgiront.
Conclusion
Il y a douze ans, au sujet du blogueur Raïf Badawi (emprisonné en Arabie saoudite), le ministre des Affaires étrangères du Canada ne ratait jamais une occasion de dire qu’il était en discussion avec le ‘gouvernement’ (sic) d’Arabie saoudite et qu’il avait bon espoir qu’il serait libéré par ‘Sa Majesté’ (sic) le prince ben Salmane.
Finalement, Raïf Badawi a purgé l’intégralité de sa peine de dix ans d’emprisonnement et il est toujours incapable de quitter son pays.
L’échec diplomatique du Canada à l’égard de l’Arabie saoudite donne un avant-gout de son impuissance anticipée à forcer les États-Unis à aller à l’encontre de leurs intérêts; en vérité, chaque demandeur d’asile qui emprunte le chemin Roxham est un problème de moins pour les États-Unis.
Plutôt que d’affronter l’opinion publique et de travailler à convaincre les Canadiens que le chemin Roxham est un moindre mal et qu’une bonne partie de ces demandeurs d’asile seront utiles à l’économie canadienne, Ottawa a choisi de nous faire croire qu’il a le pouvoir de convaincre les États-Unis d’aller à l’encontre de leurs intérêts.
Références :
Chemin Roxham: Legault augmente la pression sur Trudeau
Chemin Roxham: Ottawa doute qu’un accord soit conclu lors de la visite de Joe Biden
Des délais d’attente jusqu’en 2025: plus de 25 000 demandeurs d’asile sans permis de travail
Le ministre François-Philippe Champagne, paillasson de l’Arabie saoudite
Le Québec aurait franchi le cap des 300 000 immigrants temporaires
Roxham Inc.
Parus depuis :
Déshabiller Roxham pour habiller l’aéroport Trudeau (2023-12-22)
Un sommet de passages clandestins, mais un creux de policiers à la frontière (2024-06-29)
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