Le blocus maritime russe contre l’Ukraine
Dans n’importe quelle guerre, les belligérants tentent de tarir le financement de l’armée ennemie et de nuire à son accès aux ressources dont elle a besoin pour fonctionner.
Il fallait donc s’attendre à ce que la Russie impose à l’Ukraine un blocus maritime en mer Noire de manière à l’empêcher d’écouler sa production agricole puisque les revenus qu’elle en tire servent, entre autres, à soutenir l’économie de guerre.
On estime que 12 % de toutes les calories alimentaires sur Terre — blé, orge, betterave sucrière, pommes de terre, soja, maïs, huile de tournesol, etc.— sont produites à partir des sols fertiles d’Ukraine et de Russie.
Dès le début du conflit, l’Onu a exprimé ses plus vives inquiétudes quant au risque d’effondrement du système alimentaire mondial.
Jusqu’à maintenant, la situation semblait être claire.
D’une part, l’Ukraine était prisonnière d’un blocus maritime russe en mer Noire (par laquelle elle exporte normalement ses denrées).
Par contre, la Russie était libre d’exporter sa propre production agricole en plus de la production ukrainienne confisquée dans les villes conquises puisque les sanctions occidentales évitaient expressément, disait-on, de s’appliquer au secteur agricole.
En somme, si on se retrouvait avec des famines dans le Tiers-Monde, ce serait la faute de la Russie. Cela explique peut-être pourquoi, dans les pays du Tiers-Monde, la majorité de la population est hostile à la rupture des liens économiques avec ce pays.
Le blocus maritime officieux contre la Russie
Fruit de la diplomatie turque, l’accord sur l’exportation des céréales ukrainiennes en mer Noire a été signé par les belligérants le 22 juillet dernier.
Cet accord prévoit que les navires marchands responsables du transport des céréales ukrainiennes seront inspectés à l’aller et au retour à Istanbul par un centre de coordination sur lequel toutes les parties impliquées sont représentées.
Si l’intérêt ukrainien pour cet accord est évident, on se demande pourquoi la Russie y a consenti.
C’est que contrairement à ce que répétait la propagande occidentale, le transport céréalier russe était l’objet d’un blocus économique clandestin.
Officiellement, le système SWIFT — qui facilite les flux financiers — permettait aux banques russes d’encaisser le paiement d’achats de céréales par des pays étrangers et de verser cet argent aux producteurs agricoles.
Toutefois, lorsqu’il s’agissait d’expédier les millions de tonnes de céréales achetées, la marine marchande internationale pouvait difficilement se faire payer. En fait, elle le pouvait, mais hors du système SWIFT.
De plus, par le biais des primes, les compagnies d’assurance occidentales rendaient le transport maritime des céréales russes tellement onéreux qu’il valait mieux que les pays du Tiers-Monde tentent de s’approvisionner ailleurs.
Selon le quotidien Le Monde, l’argument ultime qui a convaincu la Russie de signer est que les États-Unis auraient accepté de lever leur opposition à ce que des bateaux à gros tonnage soient fournis à la Russie pour faciliter l’exportation de ses céréales.
Références :
Democracy Perception Index 2022
L’accord sur les céréales ukrainiennes signé à Istanbul
Le chef de l’ONU met en garde contre « un ouragan de famines » dans le monde
Negative views of Russia mainly limited to western liberal democracies, poll shows
Ports de la mer Noire bloqués : Washington accuse Moscou d’utiliser la faim comme une arme
Quelle récolte pour les fermiers ukrainiens (vidéo)
Sanctions contre la Russie : les impairs d’Ursula von der Leyen
Compléments de lecture :
L’engrenage ukrainien
L’épouvantail russe
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