Introduction
À l’époque où Donald Trump était président des États-Unis, ses partisans avaient cherché à discréditer Joe Biden (l’actuel président des États-Unis) en insinuant que son second fils, Hunter Biden, menait en Ukraine des activités louches, voire illicites.
Ces accusations n’ont jamais été étayées par des preuves sérieuses.
Mais que faisait Hunter Biden en Ukraine ? De 2014 à 2019, il était membre du conseil d’administration de Burisma Holdings, une des plus importantes compagnies pétrolières et gazières ukrainiennes, basée à Kiev.
L’Ukraine, sujet de convoitise
Par le biais d’ONG à sa solde, Washington a dépensé depuis 1991 des milliards de dollars pour convaincre le peuple ukrainien qu’il était dans son intérêt de devenir un ennemi militaire de son puissant voisin.
Cet investissement s’inscrivait dans la politique américaine d’encerclement de la Russie par le biais de l’expansionnisme de l’Otan. Un expansionnisme que Washington voulait pousser jusqu’aux frontières russes.
En plus de son intérêt géostratégique, l’Ukraine représente un intérêt économique pour l’industrie gazière américaine.
Avant la guerre russo-ukrainienne, l’Ukraine consommait annuellement trente-milliards de mètres cubes de gaz fossile, également appelé gaz ‘naturel’ ou méthane (ce sont des synonymes).
De ces trente milliards, vingt étaient extraites dans ce pays alors que le reste, dix-milliards, était importé de Russie.
En raison de son sous-financement, l’industrie gazière ukrainienne n’extrait annuellement qu’une minuscule partie des réserves gazières du pays, estimées à 1 100 milliards de mètres cubes de méthane.
Sur les marchés internationaux, le prix du gaz fossile s’exprime en MBTU (ou million British thermal units). Ce sigle s’écrit indistinctement MMBTU ou MBTU (qui veulent dire la même chose).
Puisqu’on parle d’un gaz, pourquoi ne pas l’exprimer en volume (en million de m³, par exemple) ?
C’est que le gaz fossile est principalement vendu sous forme gazeuse (transporté par des gazoducs), mais aussi, dans une moindre mesure, sous forme liquéfiée (transporté par des méthaniers).
Un mètre cube de GFL (gaz fossile liquéfié) équivalut à 600 m³ de gaz fossile. Mais 1 m³ de GFL et 600 m³ de gaz représentent la même quantité de MBTU (soit 0,0353 MBTU)
Les réserves ukrainiennes de gaz fossile — 1 100 milliards de mètres cubes — représentent 38,84 milliards de MBTU.
À l’époque où Hunter Biden œuvrait en Ukraine, le prix du gaz fossile oscillait entre trois et six dollars du MBTU. Ce qui veut dire que les réserves gazières inexploitées de l’Ukraine valaient entre 116,5 et 233 milliards de dollars américains.
Ces réserves se concentrent dans l’ouest du pays et en mer Noire.
Dans l’ouest du pays, on trouve du gaz de schiste. C’est-à-dire du gaz qui ne peut être extrait que par fracturation hydraulique, une technique brevetée par les pétrolières américaines.
En mer Noire, tous les pays riverains — par le biais de leur zone économique exclusive — chevauchent le gisement qui s’y trouve.
Il y a là un gisement de gaz conventionnel, c’est-à-dire un de ceux où on n’a qu’à forer pour extraire le gaz fossile. Donc, sans fracturation hydraulique.
Malheureusement pour l’Ukraine, la sécession de la Crimée — provoquée par la décision de Kiev d’y retirer à la langue russe son statut de langue officielle — a privé le pays d’une bonne partie du littoral qui lui donnait le droit d’accéder à ce gisement.
Quant à la mer d’Azov, elle est pour l’instant totalement sous contrôle russe.
La capacité d’entreposage
Avant la construction du gazoduc Nord Stream (qui relie directement la Russie à l’Allemagne), la Russie exportait principalement son gaz vers l’Europe en traversant l’Ukraine.
En meilleurs termes qu’aujourd’hui, ces deux pays avaient développé un partenariat très particulier en vertu duquel l’Ukraine stockait des quantités colossales de gaz russe sur son territoire, ou plus précisément dans son sous-sol.
Alors que les réserves stratégiques de l’Allemagne ne correspondent qu’à vingt jours de sa consommation hivernale de gaz fossile, la Russie entreposait dans les gisements épuisés d’Ukraine environ trente-milliards de m³ de méthane (soit l’équivalent d’une année complète de consommation ukrainienne).
Cette capacité de stockage était louée à la Russie qui s’en servait comme tampon pour lui permettre de garantir l’approvisionnement européen, peu importe les variations de la demande.
Le pari américain
Les guerres les moins pénibles — autant pour l’agresseur que pour l’agressé — sont celles qui sont courtes. Leur issue est toujours connue d’avance; c’est le plus fort qui gagne.
C’est seulement à l’occasion de guerres d’usure s’étendant sur plusieurs années que les faibles peuvent l’emporter.
À titre d’exemple, en Afghanistan, les Talibans ont vaincu l’armée américaine après vingt ans de lutte armée. Et au Vietnam, le Viêt Cong a fait de même après une décennie de guérilla.
En réussissant à faire croire aux Ukrainiens qu’il était dans leur intérêt de devenir les ennemis militaires de leur puissant voisin, les États-Unis ont rendu la guerre russo-ukrainienne inévitable.
La fourniture par les États-Unis d’armes sophistiquées et des renseignements de géolocalisation qui leur servent à atteindre leurs cibles, ne change pas l’issue de la guerre; elle prolonge les souffrances du peuple ukrainien.
Même si une partie de ces armes est revendue sur le marché noir par des contrebandiers ukrainiens, les États-Unis parient sur une guerre d’usure destinée à ruiner la Russie. Une longue guerre à l’issue de laquelle l’Ukraine victorieuse aura été transformée en paysage lunaire. Voilà le pari américain.
Il s’agira d’une Ukraine à qui toutes les puissances occidentales promettront des sommes colossales pour sa reconstruction. Mais comme l’Afghanistan et l’Irak à qui on a promis la même chose, l’Ukraine n’en verra pas l’ombre d’un centime.
Pour financer sa reconstruction, l’Ukraine devra se résoudre à laisser les riches pétrolières américaines faire main basse sur les centaines de milliards$ de gaz fossile que son territoire recèle.
On comprendra combien quelques dizaines de milliards$ en armement donné à l’Ukraine auront été un bon investissement…
Références :
Allemagne : les stocks de gaz tombés à un niveau « inquiétant »
Gas pipelines and LNG carriers
Greece plane crash: Cargo aircraft was carrying weapons to Bangladesh – minister
Hunter Biden
La guerre russo-ukrainienne et la vassalisation de l’Europe
L’engrenage ukrainien
L’Europe peut-elle se passer du gaz Russe ? (vidéo)
Résumé de géopolitique mondiale (1re partie)
Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés à la guerre russo-ukrainienne, veuillez cliquer sur ceci.
J’aime ça :
J’aime chargement…