Le tsunami de l’Omicron au Québec

Publié le 24 décembre 2021 | Temps de lecture : 6 minutes

Introduction

Si on en juge par l’expérience sud-africaine, la pandémie à l’Omicron est un tsunami; brutal et bref, affectant beaucoup plus sévèrement les personnes qui ne sont pas immunisées contre le Covid-19.

On compte officiellement 38 personnes infectées par le Covid-19 au Québec par cent-mille habitants, soit presque le double de la moyenne canadienne (21 personnes). Toutes les autres provinces sont sous cette moyenne, tirée vers le haut par le Québec.

Comment en sommes-nous rendus là ?

Naviguer à l’aveugle

Le renseignement est le fondement de la stratégie.

En mai 2020, nous avions qualifié de plaisanterie la campagne dite ‘massive’ de dépistage du Covid-19 au Québec, originellement de 14 000 tests par jour (équivalent à 0,16 % de la population québécoise).

En deux ans de pandémie, les autorités sanitaires du Québec ont négligé de se doter d’une capacité de dépistage digne de ce nom.

De nos jours, le nombre maximal de tests effectués par les laboratoires de Santé publique est de 50 000 par jour (équivalent à 0,6 % de la population québécoise).

Ce pouvoir lilliputien de dépistage est incapable de faire face à une crise, peu importe son importance.

Aux rentrées scolaires de 2020 et de 2021, nous avions suggéré qu’à défaut d’imposer le port du masque, il fallait tester tous les écoliers deux fois par semaine.

Cette suggestion s’appuyait sur les recommandations de l’Harvard Global Health Institute et de la Rockefeller Foundation, auxquels s’est ajoutée l’Organisation mondiale de la Santé en 2021.

Si cette suggestion avait été retenue, avec la fermeture des écoles, il aurait été possible de réaffecter cette capacité de dépistage à la population en général à l’arrivée de l’Omicron.

De l’aveu même des autorités sanitaires, elles ont maintenant perdu le contrôle du dépistage et de la recherche de contacts.

Ça fait dur.

Mais d’où provient cette explosion du nombre de cas ?

L’école, creuset de l’épidémie

Lors de la 2e vague — qui correspondait, en gros, à l’année scolaire 2020-2021 — c’est l’école qui fut le lieu principal de la propagation du Covid-19 au sein de la population.

Au cours de la vague actuelle, l’école le fut davantage.

Selon l’INSPQ, la deuxième vague s’étendait du 23 aout 2020 au 20 mars 2011, soit pendant sept mois. Quant à la quatrième vague, elle a cours depuis le 18 juillet 2021, soit depuis cinq mois.


Nombre cumulatif de cas de Covid-19 chez les mineurs au Québec

  2e vague 4e vague
Nombre de cas chez les 0 à 9 ans 21 267 cas 25 200 cas
Nombre de cas chez les 10 à 19 ans 31 656 cas 21 477 cas
Pourcentage représenté par les 0 à 9 ans 8,8 % 18,9 %
Pourcentage représenté par les 10 à 19 ans 13,1 % 16,1 %

En raison de la protection offerte par la vaccination (avant l’apparition de l’Omicron), le nombre cumulatif de cas a été moindre chez les adolescents au cours de la quatrième vague. Par contre, ce fut pire chez les écoliers du primaire, pour lesquels aucun vaccin n’était disponible jusqu’à tout récemment.

La population adulte a également bénéficié de la protection vaccinale. Si bien qu’avant l’arrivée de l’Omicron, les mineurs (surtout les enfants) ont représenté une proportion plus grande des cas, passant de 21,9 % des cas au Québec à 35,0 % (18,9 % + 16,1 %) le 23 décembre 2021.

Et ce, après un sommet de 38,5 % atteint le 13 décembre, avant la fermeture graduelle des classes pour le temps des Fêtes.

Ce qui était vrai de la deuxième vague, l’est encore plus pour la quatrième; l’école a été la plaque tournante de la propagation de l’épidémie.

Ceci étant dit, chez les mineurs, les données de l’INSP sont une grossière sous-estimation. Particulièrement à l’école primaire où on a manqué de tests, de préposés au dépistage, et même de formule de consentement parental.

Un contexte propice à l’explosion des cas

Avec un variant qui se propage aussi rapidement que l’Omicron, la qualité première d’une campagne de dépistage efficace, c’est la réactivité. Seuls des tests dont les résultats s’obtiennent en quelques minutes sont appropriés.

Effectuer des tests analysés en laboratoire dont les résultats sont communiqués deux, trois ou quatre jours après le prélèvement, cela est complètement inutile pour combattre la pandémie.

Combinez premièrement une campagne de dépistage inopérante, deuxièmement une distance sanitaire abolie ou réduite à un mètre, troisièmement l’abolition de l’obligation de porter le masque à l’école primaire (depuis le début) et aux autres écoles (depuis novembre), et vous avez la recette idéale pour permettre l’explosion des cas; les écoliers qui se contaminent entre eux se transforment alors (parce que très souvent asymptomatiques) en chevaux de Troie de la pandémie.

Finalement, toute la lutte sanitaire du Québec contre l’Omicron reposait alors sur le lavage des mains, une mesure d’une efficacité douteuse puisqu’aucune étude n’a réussi à démontrer que dans les faits, le Covid-19 se propage par le toucher.

Références :
Covid-19 : une rentrée scolaire idéale en 2020
Le dépistage ‘massif’ du Covid-19 au Québec : une plaisanterie
«La deuxième vague au Québec, c’est l’école qui l’a déclenchée» -Dr Karl Weiss
Le laisser-faire sanitaire à l’école primaire québécoise
L’« explosion » Omicron balaie le pays
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Écrit par Jean-Pierre Martel