Le variant Omicron : ce qu’on a appris depuis trois semaines

Publié le 28 novembre 2021 | Temps de lecture : 7 minutes

Qu’est-ce qu’un variant ?

Au moment d’éclater et de libérer son contenu, une cellule infectée par le Covid-19 contient environ cent-mille copies du virus. Au maximum de sa maladie, l’humain infecté produit entre un et cent-milliards de particules virales.

Le mécanisme de réplication des virus est très grossier. En d’autres mots, il est fréquent que des erreurs se produisent au cours de la multiplication du virus, donnant naissance à une copie différente de l’original. Cette copie différente est un mutant.

L’immense majorité de ces mutants ne sont pas viables. Et parmi le petit nombre d’entre eux qui peuvent se reproduire, l’immense majorité ne sont pas plus dangereux que l’original.

Mais il arrive, rarement, qu’un mutant soit plus contagieux ou plus virulent. Ce mutant est alors appelé variant.

Le nom des variants

Au début, on qualifiait les variants selon leur lieu d’origine. Ou plus exactement, selon le lieu de leur découverte; par exemple, le variant était qualifié de brésilien, britannique, indien ou sud-africain.

Depuis, on lui attribue plutôt un numéro. En plus, on lui donne le nom d’une lettre grecque.

Ainsi, il y a eu le variant Alpha (le B.1.1.7), le Bêta (le B.1.351), le Gamma (P.1), le Delta (le B.1.617.2), etc. On en est rendu à la 15e lettre grecque, soit l’Omicron (le B.1.1.529).

C’est le deuxième découvert en Afrique du Sud.

Que se passe-t-il en Afrique du Sud ?

Chaque personne infectée est un incubateur à mutants. Et les pays où le Covid-19 se propage sont des pouponnières à variants.

Parmi les 37 pays au monde qui, actuellement, ont un taux de double-vaccination inférieure à dix pour cent, 32 sont d’Afrique sud-saharienne.

Or avant même le début de cette pandémie, l’Afrique du Sud était le deuxième meilleur endroit au monde quant au séquençage génétique. Voilà pourquoi c’est dans ce pays qu’on a déjà découvert deux variants, dont le dernier est l’Omicron.

D’où vient-il ? On l’ignore. Mais tel un canari dans la mine, l’Afrique du Sud décèle, avant les autres, les variants qui circulent en Afrique australe.

L’échantillon le plus ancien a été trouvé le 9 ou le 11 novembre au Botswana, le pays situé immédiatement au nord de l’Afrique du Sud.

Ses caractéristiques

On en sait peu de choses.

Seulement quant à la composition des spicules à sa surface (jouant le rôle de ‘ventouses’), il possède plus d’une trentaine de mutations en comparaison avec le Covid-19 originel.

Et ce, sans tenir compte des mutations survenues ailleurs dans l’anatomie du virus.

Évolutivement, ce n’est pas le simple mutant d’un variant déjà connu.

Il correspond à un ‘saut mutationnel’. Pour avoir autant de mutations, les savants présument qu’il est né chez une personne immunocompromise, c’est-à-dire chez une personne au sein de laquelle le Covid-19 se réplique depuis longtemps et accumule mutation par-dessus mutation.

Sa contagiosité

Depuis sa découverte au Botswana, on assiste à une résurgence de la pandémie dans la province de Gauteng, en Afrique du Sud.

Dans ce pays, le nombre de cas causés par l’Omicron est passé de 273 le 16 novembre à 1 200 six jours plus tard (selon The Guardian) ou à plus de 2 500 (selon Radio-Canada). De ce nombre, 80 % proviennent de la province en question, où il est déjà devenu le mutant dominant en seulement trois semaines.
 

 
Il y a deux jours, sur un avion en provenance d’Afrique du Sud qui a atterri aux Pays-Bas, 61 des 592 passagers étaient positifs au Covid-19. Depuis, tous les passagers descendus de l’avion ont été mis en quarantaine.

Mais puisque les Pays-Bas ne sont pas aussi bien équipés que l’Afrique du Sud en matière de séquençage génétique, on ne possède pas la certitude que tous ces gens sont atteints du nouveau variant.

Ce qu’il faut retenir, c’est qu’une fois de plus, les mesures de précautions destinées à prévenir l’embarquement de passagers atteints par le Covid-19 sur un avion ne sont pas respectées par les compagnies aériennes ou que ces mesures sont inefficaces.

Puisqu’un vol entre Johannesburg et Amsterdam dure 11h30, on peut difficilement imaginer qu’aucune personne n’était atteinte au départ, mais que dix pour cent des passagers l’étaient à l’arrivée.

Voilà pourquoi une dizaine de pays (dont le Canada) ont décidé de ne pas se fier aux compagnies aériennes et de fermer carrément leurs frontières aux avions transportant des passagers en provenance d’Afrique australe.

Déjà l’Omicron a été décelé en Allemagne, en Belgique (chez un passager à l’issue d’un voyage en Égypte et en Turquie), en Grande-Bretagne (chez un passager en provenance d’Afrique australe), à Hong Kong, en Italie (chez un passager en provenance du Mozambique) et en Israël. Il est suspecté chez des voyageurs arrivés au Danemark et en République tchèque.

La lutte à l’Omicron

Contre le variant Delta — qui possède la moitié moins de mutations à ses ‘ventouses’ — les vaccins actuels sont encore très efficaces à prévenir les cas graves, mais préviennent beaucoup moins l’apparition des cas légers (dont ils abrègent néanmoins considérablement la durée).

Il est donc possible que l’efficacité des vaccins actuels contre le variant Omicron soit moindre que contre le variant Delta. On ne le sait pas.

Par exemple, on ne connait pas le statut vaccinal des 61 passagers atteints sur le vol de KLM, ni sur le pourcentage des autres qui ont été contaminés sur l’avion. Mais le suivi des passagers mis en quarantaine devrait nous l’apprendre dans les jours qui viennent.

Dans tous les cas, la technologie qui a servi à mettre au point les vaccins de Pfizer/BioNTech et de Moderna est très souple. La compagnie allemande BioNTech (partenaire de Pfizer) a fait savoir qu’elle n’a besoin que de cent jours pour créer et commencer la commercialisation d’un vaccin taillé sur mesure contre l’Omicron.

La compagnie affirme également qu’elle saura dans deux semaines si son vaccin est efficace in vitro (c’est-à-dire à partir d’études en éprouvette) contre le nouveau variant.

Quant au médicament oral développé par Merck contre le Covid-19, il ne vise pas spécifiquement le Covid-19 ‘classique’. Il n’est même pas sélectif contre le Covid-19. Il sera donc tout probablement efficace pour retarder l’infection au variant Omicron. Comme il le fait déjà pour le Delta.

Références :
BioNTech says it could tweak Covid vaccine in 100 days if needed
Ce que nous savons du nouveau variant Omicron
Covid-19 : la force du nombre
Here’s why WHO skipped 2 Greek letters to name new variant ‘Omicron’
Les compagnies aériennes, voyous corporatifs
More European countries find Omicron cases as concern grows
Omicron: everything you need to know about new Covid variant
Plus de 60 passagers en provenance d’Afrique du Sud déclarés positifs

Paru depuis :
Two-thirds of passengers on first flight to Covid-free Kiribati diagnosed with virus (2022-01-21)

Postscriptum du 29 novembre 2021 : Parmi les 61 passagers atteints sur le vol pour Amsterdam, on ignore le nombre de ceux dont le prélèvement a été soumis à du séquençage génétique. On sait que treize d’entre eux ont été contaminés par le variant Omicron.

Placée en quarantaine depuis vendredi, une de ces personnes s’est échappée de son hôtel et a été arrêtée dimanche soir alors qu’elle était assise à bord d’un avion qui s’apprêtait à décoller pour l’Espagne.

D’où la question : que valent les mesures sécuritaires mises en place par les compagnies aériennes dans le but d’éviter de propager la pandémie aux quatre coins du globe ?

Référence : Dutch Police Arrest Couple Fleeing Quarantine Hotel

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés au Covid-19, veuillez cliquer sur ceci

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4 commentaires à Le variant Omicron : ce qu’on a appris depuis trois semaines

  1. sandy39 dit :

    Je trouvais que vous vous étiez calmé un peu… vos écrits sur le Covid… Je vous attendais, donc.

    Alors, on en est à combien de variants ?

    Et vous, qui suivez les choses de très près… : observe t-on une régularité dans l’apparition de ces nouveaux variants ?

    • Jean-Pierre Martel dit :

      Il y a actuellement onze variants reconnus par l’Organisation mondiale de la Santé, dont cinq sont jugés préoccupants. Parmi ces derniers se trouve l’Omicron.

      Il n’y a pas de régularité dans l’apparition des variants. Mais il y a une constante; ils apparaissent là où le Covid-19 se propage à beaucoup de personnes.

      Il s’agit de pays populeux et peu vaccinés (ou vaccinés à l’aide des vaccins moins efficaces). Dans certains cas, il s’agit tout simplement de pays mieux équipés pour les trouver.

      Référence :
      SARS-CoV-2 Variant Classifications and Definitions

  2. sandy39 dit :

    Ce variant Omicron : on le soigne comme les autres ? On en meurt pas plus ? Les médecins sont-ils moins dépourvus ?

    • Jean-Pierre Martel dit :

      L’Omicron, on le soigne comme les autres, à l’exception du traitement par le Regeneron™ (un mélange d’anticorps) qui devrait être beaucoup moins efficace.

      Tout le reste de l’arsenal thérapeutique demeure le même.

      En accumulant les mutations, plus la génétique d’un variant s’éloigne de celle du Covid-19 ‘classique’, moins les vaccins (taillés sur mesure contre le ‘classique’) sont efficaces contre ce variant.

      De tous les variants actuels, l’Omicron est le plus éloigné du Covid-19 originel. Ce qui ne l’empêche pas d’être le plus contagieux de tous.

      Ses mutations ont donc accru son affinité pour les récepteurs ACE2a, ceux des voies respiratoires supérieures (nez, gorge).

      Mais la virulence d’un coronavirus dépend essentiellement de son affinité pour les récepteurs ACE2b, ceux des voies respiratoires inférieures (poumons).

      À l’heure actuelle, on sait que l’Omicron est remarquablement contagieux puisqu’en quelques semaines, il est devenu le variant dominant en Afrique du Sud.

      Ce qu’on ignore, c’est sa virulence.

      À la toute fin de mon texte d’il y a deux jours, je signalais que le taux de mortalité ne semble pas avoir augmenté jusqu’ici en Afrique australe (où le taux de vaccination n’est que d’environ 25 ). Peut-être la mortalité augmentera-t-elle dans les jours qui viennent.

      Dans une entrevue accordée à la chaine de nouvelles CNN, une docteure d’Afrique du Sud signalait que parmi sa clientèle, ceux atteints par l’Omicron — âgés principalement dans la quarantaine — en éprouvent des symptômes légers.

      Dans tous les pays où des voyageurs atteints qui ont été interceptés aux aéroports (des gens en principe doublement vaccinés), ceux-ci semblent éprouver des symptômes légers eux aussi.

      Bref, il est possible que l’Omicron soit tellement loin du Covid-19 ‘classique’ qu’il soit devenu semblable à un coronavirus grippal, à la place d’être un bêta-coronavirus (ceux qu’il faut craindre).

      Mais cela n’est qu’une hypothèse; c’est ce que nous apprendrons dans les jours ou les semaines qui viennent.

      Complément de lecture : Les mystères du Covid-19 (2e partie)

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