Introduction
Adoptée l’an dernier, la Loi sur la laïcité de l’État (ou loi 21) interdit le port de signes religieux par les fonctionnaires en position d’autorité et les enseignants du secteur public.
Dans une entrevue accordée il y a quelques jours, la cheffe du Parti libéral du Québec (PLQ) a rappelé que dans l’éventualité où sa formation était portée au pouvoir, elle refuserait de renouveler la protection accordée à la cette loi par l’invocation de la clause dérogatoire.
L’importance de la clause dérogatoire
La Canadian Constitution a été adoptée par le fédéral et les provinces anglophones à l’issue d’une séance ultime de négociation à laquelle le Québec ne fut pas invité.
Les idéologues qui l’ont rédigée voulaient consacrer la suprématie absolue des droits individuels afin de bloquer les dispositions les plus importantes de la Loi 101.
En effet, la Loi 101 proclamait la préséance de certains droits collectifs — ceux nécessaires à la pérennité de la langue française au Québec — sur certains droits individuels, notamment sur celui de s’assimiler au groupe linguistique de son choix, clé de voute de l’anglicisation du Québec.
C’est l’adoption de la Loi 101 par le Québec qui a créé l’urgence pour le Canada de se doter d’une nouvelle constitution.
Celle-ci était également une occasion de protéger le pays de dangers qui n’existaient pas lors de l’adoption de la constitution de 1867, nommément l’influence laïque européenne.
Voilà pourquoi cette nouvelle constitution consacre le multiculturalisme anglo-saxon comme valeur fondamentale du pays. Ce faisant, elle hisse au rang de droit constitutionnel le droit de porter des parures à caractère religieux, c’est-à-dire des breloques et des bouts de chiffon.
Ces ‘caprices constitutionnels’ sont ici des droits au même titre que le droit à la vie, le droit à la santé, etc.
Au contraire, la loi 21 interdit le port de ces parures aux représentants de l’État en position d’autorité. Et ce, uniquement dans l’exercice de leurs fonctions.
Logiquement, l’État québécois est laïque et veut donc que ses représentants reflètent la neutralité religieuse de l’État. Pour l’ethnie dominante du pays, cela est inacceptable.
Les interdits de la loi 21 sont ceux qu’on trouve déjà dans des lois analogues adoptées par de nombreuses démocraties européennes. Des interdits déjà validés par leurs plus hautes instances juridiques.
Cette conformité de la loi 21 aux normes internationales quant aux droits de la personne ne change pas le fait qu’elle est contraire aux dispositions de la Canadian Constitution.
Heureusement, cette dernière prévoit une mesure d’exception; c’est la clause dérogatoire. Celle-ci permet à une assemblée législative de protéger une loi jugée dans l’intérêt public, mais qui, autrement, irait à l’encontre d’une disposition constitutionnelle.
En somme, invoquer la clause dérogatoire rend toute loi conforme au droit canadien. Cette protection n’est valable que pour cinq ans.
Un effet de la prise du pouvoir par le PLQ
Élu, le PLQ s’abstiendrait de renouveler cette protection, laissant les tribunaux invalider la loi 21 à l’échéance des cinq ans prévus.
Cette prise de position n’est pas nouvelle; à l’époque où elle était candidate à la chefferie du PLQ, Mme Anglade avait déjà annoncé ses couleurs.
En s’y opposant, le PLQ veut la soumission du Québec à la camisole de force constitutionnelle que lui a imposée l’ethnie dominante du pays en 1982.
À l’exclusion de quelques chefs plus nationalistes, le Parti libéral du Québec a toujours été le cheval de Troie de l’impérialisme culturel canadian. Sa décision de laisser les tribunaux invalider la laïcité québécoise n’est donc pas une surprise.
Références :
Anglade prête à défendre le français à tout prix… mais pas la loi sur la laïcité
Course libérale : Dominique Anglade ôterait la disposition de dérogation de la loi 21
Laïcité et droits constitutionnels
Laïcité : juges contre démocratie
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes