L’engouement collégial pour l’anglais

Publié le 30 novembre 2020 | Temps de lecture : 4 minutes

Tout en respectant le droit des angloQuébécois à l’enseignement dans leur langue, la Loi 101 prescrit l’unilinguisme français au Québec.

Selon cette loi, l’école publique française est ouverte à tous. Par contre, l’école publique anglaise est réservée aux angloQuébécois; ceux-ci y ont droit en vertu de la constitution du pays.

Ceci étant dit, à leurs frais, les parents québécois peuvent envoyer leurs enfants à l’école privée de leur choix.

Mais aussi révolutionnaire que fût la Loi 101 en 1977, celle-ci n’impose cet unilinguisme qu’au primaire et au secondaire.

Pourquoi les rédacteurs de la Loi 101 se sont-ils abstenus d’imposer l’unilinguisme français à l’ensemble du système scolaire québécois ?

Peut-être ont-ils jugé qu’après s’être imprégné de français toute sa vie, l’adolescent québécois avait peu de chance de remettre en question son appartenance linguistique en poursuivant ses études au niveau collégial et/ou universitaire.

Au-delà du secondaire, si un étudiant francophone voulait poursuivre ses études en anglais mais était empêché de le faire au collégial par une loi, cela ne ferait que différer sa décision au moment d’aller à l’université. Ce qui reviendrait un peu au même.

Depuis l’adoption de la Loi 101, les choses ont évolué.

De 1995 à 2018, le pourcentage de cégépiens qui poursuivent leurs études en anglais dès le collégial a augmenté substantiellement, passant de 14,9 % à 19 % dans l’ensemble du Québec.

À Montréal, c’est évidemment pire; cette proportion est de 40 %. Au point que depuis 2001, les angloQuébécois sont minoritaires dans leurs propres cégeps.

Avec ses huit-mille étudiants, le Collège Dawson est non seulement devenu le plus gros lycée anglophone de Montréal; c’est le plus fréquenté du Québec, toutes langues confondues.

Voilà pourquoi le projet d’agrandissement du Collège Dawson — subventionné par Québec à hauteur de 50 millions$ — suscite la controverse.

La question qu’il faut se poser est la suivante : pourquoi tant d’adolescents francophones tiennent-ils à ce point à étudier en anglais ?

La réponse est évidente : à l’embauche, l’anglais est exigé dans 40 % des entreprises du Québec. Et ce, même lorsque cela n’est pas nécessaire. Une proportion qui grimpe à 63 % à Montréal.

Tant que la connaissance de l’anglais est jugé nécessaire non seulement pour réussir, mais simplement pour gagner sa vie, on devra considérer la motivation d’une bonne partie des cégépiens d’apprendre l’anglais comme étant parfaitement légitime.

Toute tentative de l’État de s’opposer à une volonté populaire aussi répandue est vouée à l’échec.

Conséquemment, si le gouvernement québécois désire sérieusement assurer la pérennité du français, il devra fonder sa politique linguistique sur l’unilinguisme français au travail. Un unilinguisme généralisé à l’ensemble du territoire national. Sauf lorsque la connaissance de l’anglais est strictement nécessaire.

Voilà exactement ce que voulait Camille Laurin, le père de la Loi 101.

Références :
Incapable d’être servi en français
L’enseignement en anglais a le vent dans les voiles
Quatre-millions de Québécois victimes de discrimination à l’embauche

Parus depuis :
Ottawa verse des millions pour des programmes d’enseignement en anglais au Québec (2020-12-21)
Quand il faut parler anglais pour travailler à Montréal (2021-03-10)
Augmentation des résidents non permanents dans les écoles anglaises (2021-03-19)
Une vision pour demain (2021-03-20)
La maîtrise du français, nouvel enjeu de management (2021-10-25)
« Nous courons vers l’assimilation », disent des profs en faveur de la loi 101 au cégep (2022-04-09)

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés à l’anglicisation du Québec, veuillez cliquer sur ceci

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3 commentaires à L’engouement collégial pour l’anglais

  1. André dit :

    Ce qui nous proposez me parait plus osé, voire utopique, que l’interdiction pour les Francos dialler à Dawson

  2. Laurence Lloyd dit :

    C’est très choquant. Il ne faut pas être supérieurement intelligent pour comprendre l’avantage d’être bilingue ?
    N.B. Je ne comprends pas le terme « cégépiens ». Merci pour votre réponse.

    • Jean-Pierre Martel dit :

      Au Québec, les lycées portent le nom de cégeps (l’abréviation de collège d’enseignement général et professionnel). Et les lycéens sont appelés ‘cégépiens’).

      Je m’excuse de ne pas l’avoir précisé et je vous remercie de m’avoir posé la question.

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