Les États-Unis sont une semi-démocratie.
La Révolution américaine est antérieure à la Révolution française. La première est née du refus de marchands américains de payer une taxe anglaise sur le thé destinée à amortir les couts de la guerre de Sept Ans.
Même si le préambule de la Constitution américaine débute par les mots ‘We the People…’, ce ‘We’, ce sont ces bourgeois (dont faisaient partie les signataires de la constitution).
Ce sont eux qui se proclament comme étant le peuple; ni les femmes ni les esclaves n’en font partie. Ceux-ci n’avaient aucun droit de participer à la vie politique ou à l’exercice du pouvoir.
Selon le texte de la Constitution américaine, ce peuple (de bourgeois) n’a le droit de voter que pour ses dirigeants locaux.
Constitutionnellement, le pouvoir de choisir le président appartient aux parlements des États. Ils le font par l’intermédiaire de représentants (appelés Grands électeurs) qui sont obligés de voter selon l’ordre reçu.
Au cours des siècles, les États ont adopté des lois qui délèguent ce pouvoir à leurs citoyens. Voilà pourquoi, de nos jours, les citoyens américains votent indirectement pour leur président.
Contrairement à d’autres pays, ce pouvoir populaire n’a donc pas d’assise constitutionnelle; il ne fait que découler d’anciennes lois locales qu’on peut abroger sans préavis si on jugeait que la situation l’exige.
Par exemple, il suffirait de prétexter une fraude généralisée, même si c’est faux. Dans un tel cas, le gouverneur d’un État pourrait ordonner à ses Grands électeurs de voter sans tenir compte de la préférence populaire.
Au XXe siècle, par des amendements constitutionnels, on a étendu à l’ensemble de la population le droit d’élire des officiers locaux.
Dans les faits, les suprémacistes blancs ont infiltré toutes les couches du pouvoir et s’activent lors de chaque scrutin à décourager le vote des ‘Noirs’ par l’intimidation et par différentes mesures discriminatoires.
Un nombre déterminé de Grands électeurs est attribué à chaque État selon son poids démographique. Au total, le nombre de Grands électeurs est fixé à 538.
Pour être élu président, il en faut au moins 270 (sur ces 538) car à 269, les deux candidats seraient à égalité. Ce qui déclencherait une crise politique exacerbée, on s’en doute, par la rhétorique outrancière de Trump.
Le système électoral tarabiscoté des États-Unis fait en sorte que depuis presque trente ans, il n’est arrivé qu’une seule fois qu’un candidat républicain a été porté à la présidence grâce à une majorité des voix exprimées; c’est lors de la réélection de George-W. Bush.
Mais à son élection, de même qu’à celle de Trump, ces deux candidats républicains ont pris le pouvoir contre la volonté du peuple américain.
Voilà pourquoi ce pays est une semi-démocratie.
Références :
America Is Not a Democracy
Article Two of the United States Constitution
Trump could stay in power even if he doesn’t win the election. The Constitution allows it.
We’ve been fighting over who gets to vote since 1787
Why the Right Keeps Saying That the United States Isn’t a Democracy
Paru depuis :
Counted out: Trump’s desperate fight to stop the minority vote (2020-11-17)
Vous devriez ajouter que c’est comme notre système à nous. La plupart de nos élections nous amènent des gouvernements qui ne sont pas élus par la majorité des votes. Il est arrivé souvent que le parti au pouvoir ait eu moins de vote que le principal parti d’opposition. Il faut ajouter que nos comtés ruraux moins populeux que les comtés urbains donnent plus de poids aux électeurs des régions. Si ce n’était pas le cas les libéraux seraient toujours au pouvoir et on pourrait dire adieu à la loi 101. Mais ça reste une entorse à la démocratie.
Vous avez parfaitement raison, M. Cardinal.
Dans tous les pays inspirés par le parlementarisme britannique, le peuple choisit son représentant local. Et ce sont ces choix locaux qui déterminent qui sera porté au pouvoir.
C’est ainsi qu’on ne vote pas pour le premier ministre du Canada; on vote pour son député. Et le parti qui a fait élire le plus de députés s’empare du pouvoir… ce qui détermine celui qui devient premier ministre du pays.
Une fois au pouvoir, il peut faire ce qu’il veut. Même le contraire de ce qu’il a promis. Si ne peuple n’est pas content, il n’a qu’à porter au pouvoir un autre parti des années plus tard. Entretemps, il doit ronger son frein.
À moins de perdre un vote de confiance — ce qui est impossible pour un gouvernement majoritaire — le parti au pouvoir exerce une dictature temporaire, limitée à la durée de son mandat.
Voilà essentiellement ce qu’est la démocratie parlementaire; une suite de petites dictatures dont la seule contrainte est de respecter la loi (qu’on peut modifier à sa guise).
Le Canada est donc, lui aussi, une semi-démocratie.
Certains politiciens fédéralistes ont même l’audace de faire campagne au sujet du ‘danger’ des référendums alors qu’en réalité, rien n’est plus démocratique qu’un référendum. Un référendum, cela consiste à confier au peuple le pouvoir de décider.
C’est une des raisons qui m’incitent à vouloir l’indépendance du Québec; parce que cela nous donne l’occasion de faire table rase de ces vieilles traditions plus ou moins démocratiques et de bâtir à neuf un pays moderne, laïque, équitable et vert.
Pour terminer, je vous souhaite, M. Cardinal, la bienvenue sur ce blogue.