Covid-19 : ‘aplatir la courbe’ ne suffit pas

Publié le 4 novembre 2020 | Temps de lecture : 8 minutes

Un objectif voué à l’échec

Dès le début de la pandémie, les autorités sanitaires du Québec se sont donné comme but d’aplatir la courbe de la contagion au Covid-19.

À Paris et à Genève (à l’Organisation mondiale de la Santé), on utilisait la même expression. Aux États-Unis le célèbre Dr Fauci disait la même chose en anglais. Bref, toutes les autorités sanitaires d’Occident se sont passé le mot.

Mais voyez ce qui se passe en Europe ces temps-ci. Partout où on s’est contenté d’aplatir la courbe — c’est-à-dire de la réduire à un plateau qu’on croit gérable — la pandémie fait rage et les autorités sanitaires ne savent plus où donner de la tête.

En Extrême-Orient et en Océanie, on a plutôt cherché à éradiquer le virus du territoire national. Évidemment, cela est plus facile lorsqu’on est une ile ou un archipel comme c’est le cas du Japon, de Taïwan ou de la Nouvelle-Zélande.

Mais même dans les pays entourés de voisins (comme le Vietnam et la Chine), on ne s’est pas contenté d’aplatir la courbe. On a fait disparaitre complètement la pandémie, quitte à reconfiner sélectivement une ville ou une région si le mal y réapparaissait.

En réalité, dès qu’il ferme ses frontières, tout pays devient comparable à une ile.

Là où on a éradiqué le virus ce printemps, les restaurants sont maintenant pleins, les clients affluent dans les boutiques, les rues sont envahies de flâneurs et l’économie roule allègrement. Et les petits commerçants ne vivent pas dans la crainte continuelle qu’une tuile pourrait leur tomber sur la tête.

Le Covid-19 est comme un feu de broussaille. Si l’objectif des pompiers n’est que de réduire la taille des flammes, ils échoueront. Même s’ils réussissent à étouffer le brasier à l’état de tisons, ce n’est pas assez; l’incendie reprendra dès qu’ils auront le dos tourné.

Les pays riches d’Occident sont condamnés à fermer et à rouvrir leur économie de manière cyclique d’ici un an ou deux, tant qu’ils n’auront pas compris le message.

Les clés de la réussite

Le confinement total — comme celui imposé partout le printemps dernier — est extrêmement efficace. Les raisons sont évidentes; il est impossible d’attraper un microbe auquel on n’est pas exposé.

Toutefois, en lui-même, le confinement est un exercice d’utilité restreinte si on ne se prépare pas au déconfinement. Sinon, tout est rapidement à recommencer. Comme ces pompiers qui abandonnent leur combat prématurément.

Or un déconfinement, cela se prépare. Pour ce faire, il faut des millions de tests et des milliers de préposés pour tester la population et trouver les foyers d’infection.

Les pays qui ont réussi ce combat sont connus.

Toutefois, leur faible nombre de morts par million d’habitants ne signifie pas que ces pays ont sauvé des vies; ils ont plutôt différé des morts.

Le principe est de pelleter les morts vers l’avant jusqu’à ce que la pandémie disparaisse. Parce que toutes les pandémies ont une fin. C’est alors que les mortalités différées deviennent des vies sauvées.

Les autorités sanitaires qui déclarent que nous devrons apprendre à vivre avec le virus ne font qu’avouer leur échec à contenir la pandémie. Laisser se développer l’immunité grégaire n’est pas une stratégie; c’est la résignation de l’impotent.

Tous les pays qui ont excellé dans leur lutte contre la pandémie ont suivi la même stratégie.

Pendant à peine quelques semaines, ils ont confiné leur population.

Ce confinement n’est indiqué que lorsque la pandémie fait rage de partout. Si on s’y prend tôt (comme ces jours-ci en Slovaquie), on peut passer directement à l’étape suivante.

L’étape suivante est le déconfinement.

Vers la fin du confinement ou dès que le déconfinement est proclamé, on doit se lancer à la recherche généralisée des ‘tisons’, c’est-à-dire des foyers résiduels d’infection.

Les pays qui ont excellé au printemps dernier l’ont tous fait avec des moyens rudimentaires; à l’époque, les tests salivaires ou sanguins n’existaient pas encore.

Puis ils ont imposé une quatorzaine draconienne aux personnes atteintes et utilisé une multitude d’enquêteurs pour trouver les personnes qu’elles auraient pu contaminer.

En somme, on a tout mis en œuvre pour déceler et éteindre les foyers d’infection.

S’inspirant de la ‘recette asiatique’, la Slovaquie a dernièrement testé ses 5,5 millions d’habitants en deux (2) jours.

À cette fin, plus de quarante-mille testeurs — travailleurs de la Santé, forces de l’ordre et volontaires — œuvrant dans cinq-mille sites de prélèvement, ont trouvé 25 850 foyers d’infection, aussitôt confinés.

Puisque les tests utilisés en Slovaquie possèdent une efficacité située entre 70 et 90 %, on testera toute la population de nouveau dans quelques jours.

La lutte ‘broche à foin’ du Québec

Ici au Québec, on effectue quotidiennement 28 000 tests. Cela correspond à tester 0,5 % de la population par jour (cent fois moins qu’en Slovaquie).

On ne teste que les personnes symptomatiques, laissant les autres personnes contagieuses libres de propager le virus.

Qui s’étonnera du fiasco prévisible ?

Pour prévenir les contacts, les préposés sont tellement débordés qu’ils suggèrent aux personnes atteintes de le faire elles-mêmes…

Alors qu’il faut un millier de préposés dédiés à la recherche de contacts par million d’habitants (soit 8 500 pour le Québec), on n’en a que 750.

Et les délais pour obtenir le résultat des tests sont tellement longs que ces préposés sont découragés, ayant à contacter en moyenne 73 contacts pour chaque cas.

La majorité du temps, les personnes contactées peinent à se souvenir des personnes rencontrées il y a plus de trois jours.

Alors on compte sur des applications téléphoniques (vouées à l’échec) pour prévenir les utilisateurs qui ont été en contact avec des personnes contagieuses et on prie le Ciel pour qu’apparaisse miraculeusement un vaccin efficace à 100 % (ce qui est impossible avec les coronavirus).

Entretemps, on ferme des pans entiers de l’économie — des bars, des restaurants, des salles d’entrainement, des salles de spectacles, des cinémas, des auberges, des hôtels, etc.— sans que ces établissements soient en cause dans la recrudescence des cas.

En adoptant cette stratégie grossière de lutte contre la pandémie, le gouvernement québécois accule à la faillite des centaines de petites ou moyennes entreprises (PME), alors que les PME emploient la grande majorité de la population du Québec.

Puisque les autorités sanitaires du Québec s’entêtent à s’inspirer des pays qui ont foiré dans leur lutte contre la pandémie (les pays riches d’Occident), on devrait peut-être songer à confier cette lutte à des gens désireux de s’inspirer des pays gagnants, soit ceux d’Extrême-Orient et d’Océanie.

Références :
Au Québec, la grippe saisonnière est plus à craindre que le coronavirus, dit Dr Arruda
China is winning the global economic recovery
Covid-19 : évolution en sept mois
Covid-19 : les outils de recherche de contacts
Half of Slovakia’s population tested for coronavirus in one day
Mythes et réalités des vaccins contre le Covid-19

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Écrit par Jean-Pierre Martel