Covid-19 : la diplomatie des vaccins

Le 13 septembre 2020
Contagion actuelle par le Covid-19

Introduction

Le 22 juillet, la Chine a annoncé qu’elle accorderait un prêt d’un milliard de dollars aux pays d’Amérique latine et des Caraïbes afin de leur permettre d’acheter un vaccin chinois dès qu’il sera prêt.

L’offre a été présentée lors d’une réunion virtuelle présidée par le ministre des Affaires étrangères du Mexique et à laquelle participaient ses homologues d’Argentine, des Barbades, du Chili, de Colombie, de Costa Rica, de Cuba, d’Équateur, de Panama, du Pérou, de la République dominicaine, de Trinité-et-Tobago et de l’Uruguay.

La course aux cas positifs

Avant sa commercialisation, la dernière étape que doit franchir un vaccin, c’est la phase III.

Au cours de cette phase, des dizaines de milliers de volontaires sains sont répartis en deux groupes : l’un recevant le vaccin et l’autre recevant un injectable identique mais dépourvu d’ingrédient actif.

Aucun des volontaires ne doit savoir à quel groupe il appartient.

Et on laisse les sujets poursuivre leur vie normale tout en les testant fréquemment pour savoir s’ils ont attrapé le virus.

Dès qu’on atteint un nombre suffisant de cas positifs, on peut arrêter l’expérience, comparer les deux groupes, puis publier les résultats.

Préalablement déterminé, le nombre de cas est jugé suffisant quand il permet de déceler une protection statistiquement significative dans le groupe ayant été réellement vacciné.

En Chine, treize compagnies tentent de découvrir un vaccin contre le Covid-19. La moitié de ces vaccins sont rendus en phase III.

Dans cette course, la Chine est désavantagée par rapport aux États-Unis.

En phase III, plus les sujets vivent dans un environnement contaminé au Covid-19, plus vite ils l’attrapent, et plus vite on atteint un nombre suffisamment de cas positifs pour pouvoir clore l’expérience et compiler les résultats.

Or en Chine, la prévalence du virus est trop faible pour permettre aux fabricants de vaccins de gagner la course contre leurs concurrents américains.

Les fabricants chinois se tournent donc vers l’épicentre actuel de la pandémie : l’Amérique du Sud.

Le soft power chinois

En participant à l’effort de recherche de la Chine, les pays d’Amérique du Sud aident cette dernière à recruter des volontaires à risque élevé. En contrepartie, il est facile d’imaginer que Beijing puisse remercier les pays participants en leur donnant de grandes quantités de vaccins parmi ceux qui se seront avérés efficaces.

Même dans le cas des pays qui ne participeront pas à cette recherche — en d’autres mots, même s’ils ne fourniront pas de volontaires sains — ceci est un exemple de soft power chinois; sans obligation de leur part, tous les pays d’Amérique du Sud se voient offrir des vaccins chinois à crédit.

Ils sont libres de préférer les vaccins américains. Mais quelle garantie ont-ils que les États-Unis, très atteints par la pandémie, accepteront de leur vendre leurs précieux vaccins…

Références :
China offers $1 billion loan to Latin America and the Caribbean for access to its COVID-19 vaccine
Essai clinique

Parus depuis :
Le Brésil, terrain d’expérimentation pour les vaccins contre le Covid-19 (2020-09-15)
Infecter des gens volontairement pour le développement d’un vaccin, est-ce éthique? (2020-10-26)

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2 commentaires à Covid-19 : la diplomatie des vaccins

  1. sandy39 dit :

    J.Pierre : vous nous aviez dit qu’il fallait attendre de passer l’Eté, pour voir comment le virus se comporterait avec la chaleur, car il n’y avait pas beaucoup de cas, en Afrique.

    Et, comme votre mappemonde date de septembre, quelles leçons (méthodes) pourrait-on en tirer vu que l’Afrique reste très peu exposée au virus, contrairement au Brésil ?

    • Jean-Pierre Martel dit :

      En mai dernier, j’écrivais : « Il n’est pas prouvé scientifiquement que la saison estivale protège du Covid-19. En effet, la pandémie se répand aussi en Amérique du Sud en dépit du fait que les saisons sont inversées dans l’hémisphère austral.»

      C’est ce que suggérait un texte paru un mois plus tôt, dans lequel on comparait l’évolution de la pandémie dans trois pays d’Amérique Sud à l’évolution au Québec et dans le reste du Canada.

      La faible contamination des pays africains s’explique par deux choses.

      Premièrement, peu de personnes dans ces pays appartiennent à une bourgeoisie qui a les moyens d’effectuer des voyages internationaux et d’en rapporter le virus chez eux. Donc originellement, les foyers d’éclosion sont moins nombreux.

      Deuxièmement, ces pays sont moins urbanisés. Hors des villes, indépendamment des saisons, les interactions sociales extra-familiales se font à l’air libre, où la contamination est moins facile. Cela nuit à la propagation de la pandémie.

      Peu à peu cette dernière se reprendra l’Afrique à partir des villes. Mais cela prendra plus de temps.

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