Ainsi va la Vie

Publié le 24 avril 2020 | Temps de lecture : 2 minutes
Maschere (ou Masques) de Cesare Sofianopulo (1930)

Du bout du monde,
Le vent l’a amené jusqu’à nous.

Empruntant des doigts distraits
Ou porté par le souffle des autres,
Il franchit sournoisement
Le pas de notre porte.

Comme un cheval de bois
Abandonné sur la rive,
Que les citoyens imprudents
Font entrer dans la cité.

Mais dans le creux des muqueuses,
À l’abri des regards,
Il s’installe d’abord
Et prolifère lentement.

Devenu million,
Puis bientôt milliard,
Il enraie le cours des choses
En révélant sa fureur meurtrière.

Quand la rumeur atteint les puissants,
Ceux-ci n’osent y croire.

« Je pourrais détruire le monde,
Et on tremble à mes menaces.
Comment une si petite chose
Pourrait-elle ternir ma gloire ? 
»

Mais voilà :
La colère des dieux se révèle ainsi.

Et pendant que les plaintes
S’élèvent parmi le peuple,
On se presse en vain
Sur le parvis des temples.

Les prières tardives
Montent tel l’encens vers les cieux.
Alors qu’au loin
La Nature reprend ses droits.

Le sol déjà verdit
Aussitôt la neige fondue.
Et les arbres hier endormis
Se garnissent de bourgeons.

Les oiseaux reviennent au nid.
Leur gazouillis orchestrent le vent
Alors que s’est tue
Le concert des klaxons.

Et la vie tout autour
Nous rappelle doucement
Que depuis la nuit des temps,
Toute épreuve a une fin.

Ainsi va la Vie.

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Écrit par Jean-Pierre Martel