La fresque de la voute de l’abside
Vue d’ensemble
Fresque de la voute de l’abside
Guido Nincheri a peint la voute de l’abside entre 1930 et 1935. Plus de deux-cents personnes y sont représentées.
Celle-ci comprend trois niveaux :
• la Gloire céleste de Marie,
• des saints,
• des représentants religieux et civils.
• La partie supérieure
La Gloire céleste de Marie
Guidée par la Sagesse de Dieu — représentée par la colombe du Saint Esprit au-dessus de sa tête — voici la mère du Christ, resplendissante de gloire, qui offre à tous son manteau protecteur.
Nincheri accentue son rayonnement en drapant une bonne partie des anges qui l’entourent de robes soyeuses dont les teintes sont composées de jaune (c’est-à-dire l’orange et le vert).
Ici, la Vierge emprunte les traits de Giulia Bandinelli.
Mais qui est donc cette personne ? C’est celle que Nincheri a épousée en 1913, alors qu’elle avait seize ans, lui 28.
Les anges ont les cheveux courts et ondulés. Comme c’était la mode à l’époque où cette fresque a été peinte. Elles ont la tête et les épaules nues, ce qui était interdit aux paroissiennes.
Certaines sont couronnées de fleurs. Elles font penser aux modèles qui ont inspiré le peintre Alfons Mucha. Toutes dansent autour de la Vierge alors que les autres personnages de la fresque adoptent une posture figée.
En périphérie, une zone bleue marque les limites du ciel.
• La partie centrale
Symétriquement, trois groupes de personnages sont disposés de part et d’autre d’un calvaire qu’on distingue au loin.
Voyons-les, de gauche à droite.
Les confesseurs
Se tenant debout, devant une haie d’oliviers, se trouvent saint Ignace de Loyola, un saint non identifié, saint Thomas d’Aquin, un autre personnage inconnu, et saint Félix de Valois.
Au premier plan, il s’agit de saint Philippe Néri et saint Vincent de Paul.
Les martyrs
Le deuxième groupe à partir de la gauche est celui des martyrs de l’Église, représentés devant un palmier.
On y voit, debout, saint Étienne, saint Pierre, saint Ignace de Loyola et saint Georges.
Au premier plan, il s’agit de saint Laurent de Rome, et de deux saints non identifiés.
Les patriarches
Le dernier groupe à gauche est celui des patriarches.
Debout, on voit sainte Anne, saint Joachim (les lys à la main), saint Jean le Baptiste (au centre) et saint Joseph (à droite)
Devant eux, le roi David, de même qu’Adam et Ève.
Les apôtres
Nincheri n’a pas cru bon caractériser les apôtres (notamment les évangélistes) ce qui rend difficile leur identification. Sauf Pierre, ici en rose, les clés de l’Église en main.
Les évêques et docteurs de l’Église
Il y a 36 docteurs de l’Église. Nincheri en a représenté quelques-uns.
Autour d’une fontaine, on distingue les deux papes à leurs mitres (Léon Ier et Grégoire Ier), des évêques catholiques romains à leurs crosses spiralées, Basile le Grand (?) à sa crosse à serpents, et saint Thomas d’Aquin (en tunique brune).
Devant un évêque agenouillé en habit sacerdotal jaune, un autre religieux agenouillé a été ajouté maladroitement devant lui; il est tourné vers un personnage à cheval qu’il semble remercier. Nous reparlerons de ce cavalier dans quelques instants.
Les fondateurs de l’Ordre des Servites de Marie
Devant une haie de vignes, à l’extrême droite de la fresque, Nincheri a représenté les sept fondateurs de l’Ordre des Servites de Marie, de même que saint François d’Assise (les bras au ciel).
• La partie inférieure
La partie basse de la fresque est la plus riche en personnages.
Les autorités religieuses
Au plein centre, Nincheri a représenté les autorités religieuses de l’époque. Sur son trône, le pape Pie XI.
Parmi les archevêques, cardinaux et évêques, le premier cardinal en rouge à partir de la gauche, portant des lunettes, est Eugenio Pacelli (qui deviendra pape sous le nom de Pie XII).
Guido Nincheri s’est représenté en porteur soutenant la chaire papale, à l’avant, à la droite du pape. Son fils ainé, Gabriel Nincheri, est le porteur à l’avant, à la gauche du pape. À l’extrémité droite de l’image, l’enfant qui porte un cierge est Georges, fils cadet de Nincheri.
Les autorités civiles
Parmi les autorités civiles, le cavalier est Benito Mussolini. Durant la Seconde Guerre mondiale, cette représentation justifia, aux yeux des autorités canadiennes, l’emprisonnement préventif de Guido Nincheri, souçonné d’être un sympathisant fasciste.
À l’origine, le dictateur italien ne devait pas y être.
Mais en 1929, le Vatican et l’État italien signent l’Accord de Latran.
Depuis des siècles, le pape régnait sur un vaste territoire au milieu de la péninsule italienne appelé États pontificaux (en jaune sur la carte).
Au milieu du XIXe siècle, les États pontificaux, de par leur position géographique, étaient devenus un obstacle à l’unification de l’Italie que la Maison de Savoie, maitre du royaume de Sardaigne (en vert), était en train de se réaliser.
En 1860, les États pontificaux sont envahis, à l’exclusion de Rome. Cette dernière sera à son tour conquise dix ans plus tard.
Interdit d’entrée dans le territoire italien qui lui est hostile, le pape sera prisonnier du territoire du Vatican pendant un demi-siècle.
En 1929, Mussolini signe avec le Vatican les accords de Latran qui normalisent les relations entre les deux États.
Mussolini jouit alors d’une immense popularité. Sous sa gouverne autoritaire, l’Italie est alors une grande puissance européenne qui fait la fierté de la diaspora italienne de Montréal.
Dans les croquis qu’il a fait approuver, Nincheri doit représenter de nombreux personnages contemporains. Mais Mussolini n’y apparait pas.
Les autorités religieuses demandent à Nincheri — qui a commencé à peindre sa fresque — d’y ajouter quelque part Mussolini et d’autres dirigeants fascistes.
Quelques années plus tôt, les fascistes avaient détruit une fresque réalisée par Nincheri pour une mutuelle d’ouvriers communistes.
Pour sa défense, Nincheri a toujours soutenu avoir été menacé de perdre un des plus gros contrats de sa vie s’il ne cédait pas aux exigences des autorités religieuses montréalaises.
Lorsque le Canada et l’Italie sont entrés en guerre, Nincheri a été emprisonné dans un camp à Petawawa. Ce n’est que plusieurs décennies plus tard qu’on a retiré la toile qui masquait cette partie de la fresque depuis le début de la guerre.
En plus de trois généraux fascistes, les personnes qui entourent le Duce sont Guglielmo Marconi (l’inventeur de le télégraphie sans fil, portant une écharpe tricolore aux couleurs de l’Italie), l’aviateur Otalo Balbo (à sa droite, portant une écharpe blanche), l’explorateur Louis-Amédée de Savoie (à la gauche de Marconi, portant une écharpe bleu poudre), et le sénateur Lawrence Wilson (derrière Marconi).
Conclusion
Cœur de la communauté italienne montréalaise depuis un siècle, l’église Notre-Dame-de-la-Défense a conservé son importance culturelle en dépit du fait que cette communauté est beaucoup moins concentrée dans la Petite Italie qu’elle l’était autrefois.
Restaurée dans les années 1960 au cout de cinq-millions de dollars, ce lieu de culte est un éclatant exemple de l’excellence dont sont capables ses meilleurs artisans.
Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II, objectifs PanLeica 8-18 mm (1re photo), M.Zuiko 25 mm F/1,2 (2e et 3e photos) et M.Zuiko 75 mm F/1,8 (les autres photos)
1re photo : 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 800 — 8 mm
2e photo : 1/60 sec. — F/1,2 — ISO 320 — 25 mm
3e photo : 1/80 sec. — F/1,2 — ISO 200 — 25 mm
4e photo : 1/160 sec. — F/1,8 — ISO 2000 — 75 mm
5e photo : 1/160 sec. — F/1,8 — ISO 1250 — 75 mm
6e photo : 1/160 sec. — F/1,8 — ISO 1250 — 75 mm
7e photo : 1/160 sec. — F/1,8 — ISO 1000 — 75 mm
8e photo : 1/160 sec. — F/1,8 — ISO 1250 — 75 mm
9e photo : 1/200 sec. — F/1,8 — ISO 3200 — 75 mm
10e photo : voir la deuxième photo
11e photo : 1/160 sec. — F/1,8 — ISO 4000 — 75 mm
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