Immigration : une solution digne du 14 février

Publié le 14 février 2019 | Temps de lecture : 5 minutes

Introduction

De tous les sujets d’actualité, celui m’attriste le plus présentement, c’est la décision du gouvernement québécois d’annuler 18 000 demandes d’immigration en attente d’une décision.

De ces 18 000 demandes, 3 700 ont été présentées par des demandeurs qui vivent déjà sur le territoire québécois tandis que les autres demandes ont été présentées de l’Étranger par des demandeurs qui y sont demeurés.

Cette décision affecte environ 50 000 personnes.

Ce qui me déçoit, ce n’est pas le ministre de l’Immigration, ni le gouvernement Legault, ni les sympathisants de la CAQ qui y consentent.

Ce qui me déçoit, c’est nous tous.

Non pas que j’éprouve la moindre culpabilité à l’égard de cette décision, mais parce que cela jure avec la conception flatteuse que je me fais du peuple francoQuébécois.

Dans l’éventail des décisions que l’opinion publique d’ici juge acceptables, comment cette politique brutale et inhumaine peut-elle trouver le moindre écho favorable ?

L’humanité en régression

En conclusion d’un autre texte, j’écrivais que depuis quelque temps, le monde est entré en régression.

Entre autres, cette régression se caractérise par une déshumanisation des peuples.

Quand l’administration Trump punit les immigrants illégaux en emprisonnant séparément les enfants de leurs mères — alors que ces dernières sont les plus compétente au monde pour déchiffrer le langage non verbal de leurs petits — cela est d’une telle cruauté qu’on s’étonne que le peuple américain tout entier n’en soit pas scandalisé.

Tout ce qu’on a vu aux États-Unis, c’est un regret après que quelques enfants soient morts parce que les agents de l’État ont mal interprété l’expression par ces enfants de leurs besoins les plus élémentaires (dont la soif).

Ce résultat était la conséquence inévitable d’une telle politique.

De manière analogue, quand le gouvernement québécois se propose de détruire d’un trait de crayon tous les efforts accomplis par cinquante-mille personnes pour refaire leur vie au Québec, je m’attends à une indignation beaucoup plus vive que la petite controverse que cette nouvelle suscite au sein de la classe politique.

Parmi ces gens, 3 700 couples ont déménagé au Québec et meublé un appartement ou la maison qu’ils ont achetée. Ils occupent des métiers depuis des mois ou des années. Ils paient des impôts. Certains de leurs enfants sont nés au Québec tandis que d’autres vont à l’école française et n’ont d’amis que d’autres petits Québécois.

Qui voudrait être à la place de ces parents, paniqués et plongés dans les limbes, qui doivent cacher cette nouvelle à leurs enfants pour ne pas les inquiéter ?

Une alternative plus humaine

Les fonctionnaires sont les bras de l’État. Un gouvernement peut adopter n’importe quelle politique, mais celle-ci demeurera lettre morte s’il n’y a pas d’employés de l’État pour la mettre en application.

Les 18 000 dossiers en attente sont le résultat de l’austérité libérale. En somme, le ministère de l’Immigration manque de bras.

Cela ne veut pas dire que l’embauche de nouveaux fonctionnaires soit la seule issue à l’accumulation des dossiers non traités.

La seule autre solution est la simplification draconienne du processus d’approbation des demandes.

Aux États-Unis, à chaque mois de mai depuis 1995, cent-mille candidats à l’immigration sont choisis au hasard parmi les vingt millions de demandeurs. Les gagnants de la Green Card Lottery voient leurs dossiers traités de manière prioritaire.

Le Québec pourrait s’inspirer de cette idée pour accepter aveuglément tous les dossiers en attente s’ils remplissent les conditions suivantes :
• les personnes concernées vivent déjà au Québec depuis un nombre minimal de mois,
tous les membres de la famille parlent couramment français,
• cette famille ne doit pas avoir été dépendante de l’aide publique depuis plus de 10% du temps vécu ici, et
• aucun des membres de cette famille ne soit sous le coup d’une accusation portée devant les tribunaux du Québec.

Cela ne supprimerait pas tous les cas en attente, mais en réduirait immédiatement le nombre. Et elle supprimerait l’injustice criante qui est exercée à l’égard de gens qui sont déjà parfaitement intégrés au Québec.

En ce jour de la Saint-Valentin, une telle suggestion mériterait d’être envisagée.

Références :
Cafouillage et insensibilité dans les dossiers d’immigration annulés
Etats-Unis: une loterie à 900 millions de dollars
Immigration : le ministre Jolin-Barrette clarifie la situation

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