Jardins de lumière 2018 à l’heure bleue

Publié le 30 octobre 2018 | Temps de lecture : 1 minute

Il ne reste plus que deux jours pour visiter la 26e édition de l’exposition annuelle de lanternes chinoises au Jardin botanique de Montréal.

J’y suis allé une première fois le 9 octobre et j’y suis retourné hier soir à l’heure bleue, c’est-à-dire à cette période entre le jour et la nuit où le ciel est encore légèrement lumineux.

Voici ce que j’en ai rapporté.

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Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 Mark II, objectif Voigtländer 17,5mm F/0,95
1re photo : 1/100 sec. — F/1,1 — ISO 1250 — 17,5 mm
2e  photo : 1/100 sec. — F/1,1 — ISO 640 — 17,5 mm
3e  photo : 1/100 sec. — F/1,1 — ISO 1250 — 17,5 mm
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6e  photo : 1/100 sec. — F/1,1 — ISO 250 — 17,5 mm
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Écrit par Jean-Pierre Martel


Une gifle au prince héritier saoudien

Publié le 29 octobre 2018 | Temps de lecture : 5 minutes

Introduction

Vision 2030 est un pharaonique projet de diversification de l’économie de l’Arabie saoudite conçu par le prince héritier de ce pays au cout de 500 milliards$.

Ce projet vise la création d’une ville futuriste créée sur le modèle des zones économiques spéciales chinoises.

Afin d’en faire la promotion, la conférence Future Investment Initiative de l’an dernier avait attiré 3 500 participants provenant de 88 pays.

Cette année, le froid créé par l’affaire Khashoggi a fait en sorte que de nombreuses entreprises ont boudé la deuxième édition de cette conférence.

L’Arabie saoudite, exportatrice de capitaux

Le but de Vision 2030 n’est pas d’attirer des investissements étrangers mais de diversifier l’économie saoudienne.

Depuis des décennies, des sociétés d’investissement organisent la fuite des capitaux saoudiens.

Lors des attentats du 11 septembre 2001, des membres de la famille royale saoudienne et de riches entrepreneurs — dont certains provenaient de la famille d’Oussama bin Laden — assistaient justement à une conférence donnée à Washington par des conseillers financiers américains.

Parmi les centaines d’avions qui voulaient quitter le territoire américain ce jour-là, celui transportant ces augustes investisseurs fut le seul autorisé à s’envoler et ainsi échapper aux questions des policiers chargés de l’enquête au sujet de ces attentats.

Les dirigeants de ce pays savent bien qu’un jour une révolution les chassera du pouvoir. Voilà pourquoi la majorité de leur fortune personnelle est investie à l’Étranger.

Ils y ont de grands hôtels, des stations de ski, des clubs sportifs, des compagnies aériennes, des vignobles, de grandes enseignes de commerce au détail, des marques prestigieuses, etc.

On estime que les Saoudiens possèdent 8% de l’économie américaine. Cela équivalut à plusieurs fois les fortunes combinées de Bill Gates et de Warren Buffett.

De plus, si Amazon et Apple sont les deux compagnies qui possèdent la plus grande capitalisation boursière, c’est seulement parce qu’Aramco (la pétrolière de l’État saoudien) n’est pas inscrite en bourse. Si elle l’était, sa valeur capitalisée serait de trois à quatre fois celle d’Apple.

Bref, l’Arabie saoudite est immensément riche et n’a pas besoin de capitaux étrangers.

Le déficit technologique de l’Arabie saoudite

Pour diversifier son économie, l’Arabie saoudite a besoin de combler son abyssal déficit technologique.

L’école publique saoudienne est aux mains du clergé wahhabite. Tout fait scientifique incontestable qui contredit l’interprétation littérale des textes sacrés de l’Islam (vieux de 1 500 ans) est une hérésie dont l’enseignement est passible de la peine de mort.

Voilà pourquoi le système scolaire saoudien forme des hommes de lettres (avocats en droit musulman, écrivains, poètes, fonctionnaires peu qualifiés), mais peu de chercheurs, de scientifiques et de travailleurs qualifiés.

Si bien qu’en Arabie saoudite, les familles aisées envoient leurs adolescents masculins étudier dans les meilleurs lycées occidentaux.

Le régime vante son taux élevé de scolarisation. Dans les faits, le système scolaire saoudien ne forme que des bons à rien que même les entreprises saoudiennes hésitent à embaucher comme travailleurs qualifiés. D’où le taux de chômage d’environ 40% chez les jeunes hommes du pays.

Environ 70% des emplois offerts aux Saoudiens le sont dans la fonction publique.

Le bilan de la Future Investment Initiative

À l’issue de la conférence de cette année, les dirigeants saoudiens se sont empressés de souligner qu’elle avait été un grand succès, permettant la signature de contrats évalués à cinquante-milliards de dollars.

Le message sous-jacent est clair; toute tentative de nous nuire est vaine. Notre influence est telle qu’elle nous permet de triompher de tous les obstacles.

La réalité est toute autre.

À l’édition de cette année, l’assistance a été constituée principalement d’hommes habillés à la manière musulmane, c’est-à-dire des Saoudiens et des alliés régionaux de l’Arabie saoudite.

Environ 68% des contrats signés cette année concernent Aramco, la pétrolière de l’État saoudien.

Les entreprises occidentales qui ont signé des contrats avec elle sont des pétrolières étrangères (dont la française Total), des entreprises américaines spécialisées dans la fourniture d’équipement pétrolier ou la recherche d’hydrocarbures, des banques et des fonds d’investissement spéculatifs.

Bref, rien pour diversifier l’économie du pays.

Le message est clair : si l’Arabie saoudite veut la technologie occidentale, elle devra s’occidentaliser.

Aussi bien dire que ce n’est pas demain la veille.

Maintenant que cette conférence a été un échec, on commence déjà à voir l’intérêt pour l’affaire Khashoggi s’estomper dans nos médias puisque ceux qui en tirent les ficelles ont atteint leur objectif.

Références :
Meurtre au consulat : du fait divers aux ressorts d’une crise internationale
Saudi conference shunned by west secures £39bn in deals
Vision 2030 : la Grande séduction saoudienne

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Face aux Saoudiens, Trudeau plaide l’impuissance

Publié le 26 octobre 2018 | Temps de lecture : 3 minutes

 
Le 8 avril 2016, le gouvernement Trudeau accordait les licences d’exportation concernant 70% du matériel militaire canadien visé par un contrat de vente de chars d’assaut à la dictature saoudienne tout en accusant les Conservateurs de l’avoir fait.

Selon les experts, le partenaire d’affaires de l’Arabie saoudite n’est pas General Dynamics (le constructeur), mais le gouvernement canadien.

En effet, s’il s’agissait d’un simple contrat d’approvisionnement entre l’Arabie saoudite et un fabriquant, il est impossible que ce contrat prévoit des pénalités payées par une tierce partie, indépendante au contrat (soit le gouvernement canadien).

C’est la diplomatie canadienne qui a négocié le contrat et c’est le fédéral qui assure le financement de l’entente. Par ce moyen, le fédéral protège General Dynamics d’une rupture unilatérale de contrat par l’Arabie saoudite.

En vue d’augmenter sa production, la compagnie doit effectuer des investissements qui sont pour elles des pertes lorsqu’un tel contrat est annulé. Ce qui justifie que des dédommagements lui soient accordés.

Le cas échéant, les contribuables canadiens paieraient donc les chars d’assaut refusés — qui seraient alors refilés à l’armée canadienne —ou, à défaut, une pénalité au constructeur.

Une des raisons invoquées à l’époque par le gouvernement fédéral pour justifier cette vente, c’est que si le Canada refusait, de nombreux pays seraient heureux de prendre la relève.

La question qu’on peut se poser est la suivante : s’il était si facile à l’époque pour l’Arabie saoudite de s’approvisionner ailleurs, pourquoi aurait-elle exigé des pénalités importantes en cas de rupture de contrat par le Canada ?

Cela ne tient pas debout.

En raison de l’impuissance totale de Justin Trudeau face aux décisions saoudiennes — pensez ‘Raïf Badawi’ — le constructeur a très certainement exigé des garanties afin de se protéger de l’éventualité où l’Arabie saoudite refuserait d’honorer ses engagements.

Pour se justifier, Justin Trudeau invoque des obligations contractuelles secrètes.

Pourtant, depuis 1947, la Loi sur les licences d’exportation et d’importation interdit, entre autres, de vendre de la marchandise militaire vers des pays :
• qui sont engagés dans un conflit (ex.: au Yémen)
• où les droits de la personne font l’objet de violations graves et répétées de la part du gouvernement, à moins qu’il puisse être démontré qu’il n’existe aucun risque raisonnable que les marchandises puissent être utilisées contre la population civile.

Doit-on comprendre que le respect d’un contrat à préséance sur le respect de la loi ?

Si le premier ministre n’a pas l’intention de rendre public le contrat canado-saoudien, il aurait intérêt à cesser de justifier sa lâcheté derrière ses clauses secrètes.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le biais du fédéral : industrie automobile ontarienne vs industrie aéronautique québécoise

Publié le 23 octobre 2018 | Temps de lecture : 4 minutes

Introduction

Lors de la Grande Récession, le Canada a décidé de soutenir son industrie automobile, durement affectée, comme le faisaient les États-Unis.

Cette décision était justifiée puisque des milliers d’emplois étaient alors en péril.

Et pour contrer les accusations de favoritisme à l’égard de l’Ontario — où est située cette industrie — le gouvernement canadien s’est dit tout aussi déterminé à soutenir l’industrie aéronautique, elle aussi affectée, mais située principalement au Québec.

Au-delà des paroles, la chronologie des faits

En 2009, le plan de sauvetage de l’industrie automobile ontarienne a consisté essentiellement en des prêts remboursables de 13,7 milliards$ consentis à GM et Chrysler, alors au bord de la faillite.

À l’époque, l’industrie aéronautique québécoise n’a pas bénéficié d’un plan de sauvetage analogue.

En juillet 2015, on annonçait un prêt de cent millions$ pour Toyota Canada dont 57,8 millions$ d’Ottawa.

En mai 2016, la même compagnie recevait une subvention — c’est-à-dire un don — de 200 millions$, en bonne partie payée par le fédéral.

Au début de 2017, après avoir investi 5,4 milliards$ en recherche et développement pour la CSeries, Bombardier s’est retrouvé à court de liquidités. En d’autres mots, au bord de la faillite.

Bombardier a donc cogné à la porte du gouvernement canadien. Pour Ottawa, c’était l’occasion de réaliser sa promesse d’aider également l’industrie aéronautique québécoise.

Le fédéral a d’abord exigé que la famille Bombardier-Beaudoin abandonne le contrôle qu’elle exerçait — par le biais d’actions privilégiées — afin que des investisseurs rapaces de Bay Street s’emparent de la compagnie pour une bouchée de pain puisque le prix des actions de Bombardier était à son plus bas.

Face au refus des dirigeants du constructeur, le fédéral a consenti à un prêt remboursable de 372,5 millions$, dont 248 millions$ — les deux tiers — à la condition que Bombardier maintienne ses activités en Ontario (où sont construits ses avions d’affaires Global 7000).

Ce prêt de 372,5 millions$ représente moins de 3% des sommes consacrées au sauvetage de l’industrie automobile ontarienne. En somme, des miettes.

Après ce refus d’aider significativement notre industrie, Ottawa accordait en mars 2017 une subvention — encore un don — de 102,4 millions$ à Ford Canada.

Par contre, en février 2018, le fédéral bousillait un contrat de vente d’hélicoptères civils représentant des retombées économiques de 2,7 milliards$ pour le Québec.

Et voilà qu’hier, on append que le fédéral va radier le prêt consenti à Chrysler dans le cadre du plan de sauvetage de l’industrie automobile lors de la Grande Récession. Ce prêt et ses intérêts représentent la somme de 2,6 milliards$.

En effaçant cette dette, le fédéral transforme rétroactivement le prêt à Chrysler en subvention.

Conclusion

Du strict point de vue du développement économique, l’impôt payé par les contribuables québécois sert principalement à édifier l’État pétrolier canadien; un pays qui produit des voitures à essence en Ontario et qui extrait du pétrole dans l’ouest canadien.

Jamais notre tour vient de recevoir notre juste part des impôts que nous payons au fédéral autrement que sous forme d’une péréquation qui vise — tel l’os jeté au chien — à nous faire tenir tranquille.

Ce retour d’ascenseur, il n’arrive jamais parce qu’Ottawa n’est qu’un gouvernement colonial à la tête d’un État pétrolier.

Plus tôt le Québec passera de colonie canadienne à pays indépendant, plus tôt notre argent servira à construire le premier État post-pétrolier de l’Amérique du Nord.

Références :
Andrew Scheer promet de relancer Énergie Est
Bombardier: de l’aide pour un avion construit en Ontario
Le gouvernement libéral radie un prêt de plus de deux milliards consenti à Chrysler
Les miettes fédérales à Bombardier
Les usines de Toyota Canada obtiendront une mise à niveau de 1,4 milliard de dollars
Ottawa accorde 100 millions en subventions au secteur automobile ontarien
Peut-on comparer l’aide à Bombardier à celle du secteur de l’automobile? Épreuve des faits
Une aide de 100 millions pour Toyota d’Ottawa et de l’Ontario

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés au prix que nous payons pour appartenir au Canada, veuillez cliquer sur ceci.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Une entrée de métro parisienne… à Montréal

Publié le 22 octobre 2018 | Temps de lecture : 5 minutes
Place Victoria

L’Art Nouveau au purgatoire

C’est en 1908 que l’architecte Hector Guimard réalise les édicules de style Art Nouveau pour le métro de Paris.

Mais bientôt ce style est démodé, jugé décoratif et féminin. Il sera remplacé par le style Art déco, solennel, symétrique et tellement plus viril.

Le discrédit dont souffre le ‘style nouille’ atteint son paroxysme en France au sortir de la Deuxième Guerre mondiale.

Délivré par les États-Unis de l’occupation allemande, on est alors en admiration avec tout ce qui vient de l’autre côté de l’Atlantique. On estime que la supériorité technologique de l’Amérique s’expliquerait, entre autres, parce qu’elle n’a pas à trainer un lourd passé culturel.

C’est à l’époque où l’extraordinaire décoration intérieure du restaurant Le Train Bleu disparait derrière des faux murs afin de lui donner l’aspect dépouillé d’une cafétéria moderniste.

Quant aux édicules de Guimard, pourtant modulables, on les juge trop étroits en raison de l’explosion démographique de Paris et du nombre d’usagers de son métro.

Des 167 ouvrages de Guimard, il n’en restait plus bientôt que 86.

C’est seulement dans la deuxième moitié des années 1960 que l’Art Nouveau sortira de son long purgatoire quand les expériences psychédéliques permettront de voir l’extravagance de ce style sous un nouvel éclairage et qu’apparaissent des pochettes de musique s’en inspirant.

En 1965, les accès à quelques stations de métro de Paris sont classés monuments nationaux. Tous les autres ne seront protégés qu’en 1978.

Mais juste avant cette réhabilitation, le maire de Montréal entreprend une démarche étonnante.

La tour Eiffel, s’il vous plait

Lorsqu’en 1962 Moscou renonce à tenir l’exposition universelle de 1967, Montréal accepte de prendre la relève. Ce qui donnera l’Expo67.

Le maire d’alors, Jean Drapeau, est un geyser d’idées. Il prend l’initiative d’écrire au président de la République française pour lui demander s’il ne serait pas possible de démanteler la tour Eiffel pour l’installer à Montréal durant l’exposition.

Dans l’entourage du président du général de Gaulle, on croit d’abord à un canular. Et lorsqu’on se rend compte que la requête est authentique, on la transmet au général en anticipant un rire sonore du général, pourtant peu extraverti.

Mais à la surprise de tous, le général se dit favorable à la demande de Montréal.

À la mairie de Paris, c’est la consternation. On voit déjà les barricades des insurgés parisiens s’élever contre un démantèlement que les Nazis eux-mêmes n’ont pas osé exiger.

Mais la diplomatie française étant ce qu’elle est, on répond au maire de Montréal que l’idée est excellente, que le président de la République est heureux d’accéder à sa demande… à la seule condition que Montréal garantisse l’intégralité des soixante tonnes de peinture, des 18 038 pièces de métal, des 2,5 millions de rivets, et que les ouvriers montréalais déménagent cela et reconstruise le tout parfaitement à l’identique après l’Expo67.

Comme un séduisant bonbon acidulé, la réponse ‘favorable’ de la France sortit le maire de sa rêverie.

Mais Jean Drapeau n’était jamais à court d’idées. Lors d’une visite à Paris, il voit, stupéfait, la démolition d’un édicule Guimard à la station Charles de Gaulle–Étoile. Il demande s’il serait possible que le métro de Montréal en ait un.

En 1966, la Régie autonome des transports parisiens (RATP) trouve un prétexte pour commémorer la coopération d’ingénieurs français et québécois lors de la construction du métro de Montréal.

On offrit donc à Montréal un authentique édicule Art Nouveau de Guimard. Il sera installé en 1967 — l’année de l’expo — à la station Victoria.

Je soupçonne qu’il s’agissait d’un édicule qu’on avait entreposé quelque part depuis longtemps.

Cette hypothèse vient du fait qu’on ne s’était pas rendu compte que les globes orange de cet édicule étaient des originaux en verre — les seuls au monde — alors qu’à Paris, ils avaient été remplacés par des copies en polycarbonate.

Globe de l’édicule

Lors d’une restauration en 2001-2002, c’est là qu’on s’est rendu compte que les globes étaient des originaux. Depuis, ils ont été remplacés, eux aussi, par des copies. L’un des originaux a été donné à la RATP, l’autre au Musée des Beaux-arts de Montréal.

Voilà comment un peu de la désinvolture de la Belle Époque s’est retrouvée à Montréal… devant une austère statue de la reine Victoria.

Références :
After 29 flamboyant years, the mayor of Montréal is retiring
Édicule Guimard
Hector Guimard
Quand Montréal a voulu emprunter la tour Eiffel

Détails techniques : 
Olympus OM-D e-m5 mark II, objectifs M.Zuiko 25 mm F/1,2 (1re photo) et M.Zuiko 12-40 mm F/2,8 (2e photo)
1re photo : 1/2500 sec. — F/1,2 — ISO 200 — 25 mm
2e  photo : 1/500 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 40 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Laïcité et droits constitutionnels

Publié le 21 octobre 2018 | Temps de lecture : 4 minutes

Introduction

Les moyens répressifs de l’État sont la police, l’armée, les tribunaux et les prisons.

Leur but est de faire en sorte que les citoyens respectent l’ordre établi, un ordre protégé par un encadrement législatif dont le socle est la constitution du pays.

En défendant le respect des lois, la profession juridique est donc le gardien de l’ordre établi.

Aussi n’est-on pas surpris de voir plus de soixante-dix juristes s’indigner de l’intention du nouveau gouvernement québécois d’invoquer la clause dérogatoire de la constitution afin d’instituer une laïcité à la québécoise. Une laïcité qui, autrement, serait anticonstitutionnelle.

Pour les protestataires, les droits constitutionnels sont sacrés. Conséquemment, le recours à la clause dérogatoire pour les suspendre est un abus de pouvoir intolérable.

Les droits fondamentaux

Les avocats ne sont pas les seuls à croire que rien n’est plus sacré qu’un droit constitutionnel.

Pourtant, grâce à l’internet, chaque citoyen peut découvrir que certains droits constitutionnels au Canada ne le sont pas dans d’autres pays démocratiques.

Pour prendre un exemple précis, le port du niqab est un droit fondamental au Canada. Pourtant, des pays comme l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, et la France ont adopté des législations bannissant le port du niqab. Des législations qui furent validées par les plus hautes instances juridiques européennes.

Dans ces pays, la pratique religieuse est un droit fondamental lorsqu’il s’exerce dans la sphère domestique. Dans ce sens, ces pays respectent leurs obligations internationales.

Voile_islamique
 
Il y a moins d’une semaine, l’Algérie interdisait le port du niqab aux employés de sa fonction publique. Le Maroc interdit déjà la vente de la burka.

Pourquoi le Canada fait-il bande à part ?

La Canadian Constitution de 1982 a été adoptée par les provinces anglophones du Canada à l’issue d’une séance ultime de négociation à laquelle le Québec n’a pas été invité.

Les idéologues qui l’ont rédigée voulaient consacrer la suprématie absolue des droits individuels afin de bloquer les dispositions les plus importantes de la Loi 101. En effet, cette dernière proclamait la préséance de certains droits collectifs — ceux nécessaires à la pérennité de la langue française au Québec — sur certains droits individuels, notamment celui de s’assimiler au groupe linguistique de son choix.

En vertu de cette constitution illégitime, toutes les formes de laïcité préconisées par les partis politiques du Québec sont anticonstitutionnelles. Même le parti le moins exigeant à ce sujet (le Parti libéral du Québec) doit céder devant l’ordre constitutionnel canadian.

L’accommodement raisonnable le plus pernicieux exigé du peuple francoQuébécois, c’est d’être constamment en deçà de ce qu’il aspire à être dans le but de se soumettre à l’idéologie de l’ethnie dominante du pays, imposée par le biais d’une camisole de force constitutionnelle.

Voilà le prix du fédéralisme.

En matière de laïcité, la question à se poser est simple : voulons-nous capituler devant un ordre constitutionnel étranger ou invoquer une clause dérogatoire qui nous donne une idée de la liberté dont nous jouirions en nous affranchissant de l’État pétrolier canadien…

Références :
Denmark passes law banning burqa and niqab
La CEDH juge «nécessaire» l’interdiction du voile intégral dans l’espace public
La laïcité républicaine
L’Algérie interdit le port du niqab sur le lieu de travail
L’Allemagne interdit le voile intégral dans la fonction publique
Le Danemark veut interdire le voile intégral dans les lieux publics
Le Maroc interdit la fabrication et la vente de la burqa
Neutralité religieuse : un juge suspend l’application de l’article clé de la loi
Signes religieux et neutralité de l’État
Sondage: les Canadiens et les Québécois favorables au projet de loi 62
Zunera Ishaq, who challenged ban on niqab, takes citizenship oath wearing it

Parus depuis :
Switzerland to ban wearing of burqa and niqab in public places (2021-03-07)
Islamic authorities in Russia’s Dagestan ban women from wearing niqab after attacks (2024-07-03)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Quand le Labrador était gouverné par François Martel, sieur de Brouage

Publié le 18 octobre 2018 | Temps de lecture : 7 minutes
Carte de l’Amérique du Nord, réalisée en 1689 (© — Musée Stewart)

Introduction

Il y a plusieurs lignées de Martel au Québec.

Celle dont je suis descendant est d’origine parisienne.

Apparues dans la colonie quelques années plus tard, deux autres lignées sont dites ‘de Brouage’.

Elles sont issues de deux frères nés d’une famille originellement installée à Brouage. Ce port est situé dans le sud-ouest de la France, dans une commune d’où provient Samuel de Champlain.

Bien avant leur naissance, les Martel de Brouage avaient quitté ce port pour la ville de Bastide-Clairence, située à 360 km plus au sud.

Ces deux frères sont Pierre-Gratien et Raymond Martel de Brouage. Ce dernier, le plus jeune, abandonnera son nom ‘de Brouage’ à son arrivée dans la colonie.

Voici quelques personnages qui marqueront l’ascension sociale des Martel de Brouage, de leur arrivée dans la colonie jusqu’à la fin du régime français.

François Bissot (1613-1673)

Sur ordre de Louis XIII, une première seigneurie fut créée en 1636 sur la rive sud du Saint-Laurent.

C’était la seigneurie de Lauzon. Son territoire correspondait aux limites de l’actuelle ville de Lévis, en face de Québec.

Pendant longtemps, aucun colon français n’y demeurait puisque ce territoire était périodiquement le théâtre de razzias d’Iroquois venus de ce qui est aujourd’hui l’État de New York.

Tout au plus, y venait-on pêcher l’anguille sur ses rives.

En 1647, un premier colon s’y installa, suivi de François Bissot l’année suivante.

Le 25 octobre de cette année-là, ce dernier épousa la petite-fille de Louis Hébert, premier apothicaire de la colonie.

François Bissot était plein d’audace et s’illustra rapidement par son sens de l’entreprise en construisant un moulin en 1655 et, grâce aux revenus qu’il en tira, la première tannerie de Nouvelle-France en 1668.

On y travaillait les peaux de bœufs, d’élans, de chevreuils, et même de marsouins et de phoques.

L’entreprise approvisionnait en bottes et souliers les troupes de la colonie. On estime que sept ans après sa fondation, la manufacture fabriquait huit-mille paires de souliers par année.

En 1670, sa fille Catherine Bissot (son 4e enfant) épouse Étienne Charest (dont nous parlerons dans quelques instants).

Deux ans après le décès de François Bissot en 1673, sa fille Claire-Françoise Bissot (son 5e enfant) épouse Louis Jolliet, qui deviendra le plus grand explorateur de l’Amérique du Nord.

Étienne Charest (1635-1699)

À son mariage avec Catherine Bissot en 1670, Étienne Charest est déjà l’associé et l’homme de confiance de son beau-père.

Lorsque ce dernier décède trois ans plus tard, c’est Étienne Charest qui prend ses affaires en main. Si bien qu’à son propre décès, 26 ans plus tard, Étienne Charest a acquis l’essentiel de la fortune de François Bissot.

Mais entretemps, en 1687, la plus âgée de ses filles, Marie-Charlotte, épouse Pierre-Gratien Martel de Brouage (1662-1696). Elle a alors 14 ans, lui 25.

Le jeune couple s’installe à Québec où tout le monde se connaissait.

Étienne Charest habitait une maison (située sur la rue du Sault-au-Matelot) qui avait une vocation commerciale puisque c’était également un des commerces les plus florissants de la capitale.

Non seulement y venait-on pour trouver chaussure à son pied, mais le commerce offrait une grande variété de produits.

Et pour approvisionner son commerce de Québec et sa manufacture de Lévis, Étienne Charest brassait des affaires jusqu’au Labrador où il s’occupait de la pêche de la morue et de la chasse aux phoques.

Sans avoir obtenu de concession du roi, Pierre-Gratien Martel de Brouage avait pris l’initiative d’y construire un poste de traite, acheter des goélettes et procéder à des aménagements à divers endroits le long de la côte de Labrador afin d’approvisionner le commerce de son patron Étienne Charest.

C’est d’ailleurs au cours d’une de ses tournées au Labrador que Pierre-Gratien Martel de Brouage disparut, le 1er septembre 1696.

Il laisse orphelin son fils, François Martel de Brouage (1692-1761), alors âgé de quatre ans.

Augustin Le Gardeur de Courtemanche (1663-1717)

L’année suivante, en 1697, sa veuve épouse en secondes noces Augustin Le Gardeur de Courtemanche. Ce denier était un brillant militaire et un diplomate.

Après ce mariage, Augustin Le Gardeur de Courtemanche décida de prendre en main les intérêts au Labrador de son épouse.

En 1702, il se fait accorder pour dix ans des concessions royales qui légalisent les activités qu’on y mène déjà.

En 1714, ces concessions sont transformées en concessions à vie alors que Louis XIV le nomme ‘Commandant pour le roi de la côte de Labrador’.

À sa mort, quatre ans plus tard, son beau-fils François Martel de Brouage lui succède grâce aux représentations que Philippe de Rigaud de Vaudreuil, gouverneur de Nouvelle-France, effectue en sa faveur auprès du duc d’Orléans, Régent du royaume depuis la mort de Louis XIV.

Dans les documents officiels signés à Versailles, François Martel de Brouage est appelé ‘le sieur de Brouage’. Ni son prénom ni son véritable nom de famille ne sont mentionnés.

François Martel, sieur de Brouage

À 25 ans, François Martel devient donc commandant du roi de la côte du Labrador, poste qu’il occupa de 1718 à 1761.

Ses fonctions l’obligent à revenir régulièrement à Québec pour se ravitailler et faire rapport de ses activités. Puis à regagner le Labrador de mai à novembre, quand les icebergs ne sont plus une menace à la navigation. Durant l’été, il est rejoint par son épouse et ses cinq filles.

Contrairement à la vallée du Saint-Laurent où règne l’harmonie depuis la Grande Paix de Montréal de 1701, les relations sont conflictuelles entre les Esquimaux et les pêcheurs venus de France écumer les riches bancs de poissons du Labrador.

De plus, des conflits surgissent entre les marins qui évacuent les frustrations accumulées en mer en se battant dans les débits de boissons où ils s’entassent. Sans compter les capitaines frustrés de rester en retrait en mer parce que les quais sont encombrés.

Malgré le confort relatif dont il s’entoure, François Martel connait une difficulté croissante à convaincre ses filles de passer tout l’été au Labrador.

Si bien qu’il multipliera ses absences à Québec, surtout à partir de 1754.

Informé que des capitaines français procurent illégalement des armes et des munitions aux Esquimaux, Louis XV écrit en 1759 au gouverneur Vaudreuil pour l’informer des lacunes du travail du sieur de Brouage.

À la veille de la conquête, le blocus qu’imposait la flotte anglaise empêcha cette lettre d’atteindre son destinataire.

Si bien que François Martel conserva son poste jusqu’à la fin du régime français.

Références :
François Bissot
Jean Talon
La famille Martel de Brouage
Martel, Raymond
Sarrazin J. Quand le Labador était français… Forces 1970; no 13: 4-18.
Seigneurie de Lauzon

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’allégeance à la reine et les périls du PQ

Publié le 18 octobre 2018 | Temps de lecture : 3 minutes

Pour tout peuple conquis, rien n’est plus révélateur de son assujettissement que d’être obligé de prêter allégeance à ses conquérants ou à leurs descendants.

Dans un commentaire publié par Le Devoir en 2015, j’avais déclaré que je n’hésiterais pas à revêtir le niqab — ce vêtement féminin qui ne laisse visibles que les yeux de celle qui le porte — si j’avais l’obligation de prêter serment à la reine d’Angleterre.

C’est un peu ce qu’ont fait hier les nouveaux députés de Québec Solidaire (QS).

En vertu de la Canadian Constitution, tout nouvel élu doit prononcer le serment suivant afin de pouvoir siéger à l’Assemblée nationale :

Je, (nom du député), jure que je serai fidèle et porterai vraie allégeance à Sa Majesté la reine Élisabeth II.

À cela, une loi adoptée en 1982 sous le gouvernement de René Lévesque a fait ajouter :

Je, (nom du député), déclare sous serment que je serai loyal envers le peuple du Québec et que j’exercerai mes fonctions de député avec honnêteté et justice dans le respect de la constitution du Québec.

Après s’être entendus avec le secrétaire général de l’Assemblée nationale (devant qui le serment doit être prêté), les députés de QS ont juré fidélité à la reine, en privé, dans une salle adjacente au Salon rouge.

Puis, en public dans le Salon rouge, ils ont déclaré leur loyauté à la population du Québec.

Autrefois, les députés péquistes avaient l’habitude de compléter le texte du serment par des ajouts qui en ridiculisaient la teneur. On ignore ce qu’ils ont fait cette fois-ci.

Dans un texte récent, je me réjouissais d’avance de la surenchère que se livreraient QS et le PQ pour rallier les Québécois à la cause indépendantiste.

La séance d’assermentation d’hier a donné une idée — anodine, il est vrai — de cette nouvelle rivalité.

Non seulement le PQ doit-il craindre que QS lui glisse le tapis sous les pieds mais il aurait bien tort de présumer qu’un gouvernement de la Coalition Avenir Québec (CAQ) sera aussi servile à l’égard du gouvernement fédéral que le gouvernement invertébré de Philippe Couillard.

On doit se rappeler que le méfiance à l’égard d’Ottawa — sous forme d’une vague hostilité à l’égard des ‘Anglais’ — fait partie de l’ADN du peuple francoQuébécois.

Or le Québec profond a voté caquiste. Il serait raisonnable de penser que la députation caquiste se fasse l’écho de ce ressentiment, ce qui compliquera les efforts péquistes de se faire une nouvelle clientèle électorale.

Au-delà de cette compétition à trois, on doit réaliser que la défaite cuisante du PQ aux dernières élections, loin d’annoncer la fin du mouvement indépendantiste, dresse la table pour son renouveau.

Références :
Le serment d’allégeance selon les députés péquistes
Québec solidaire prête serment à la reine en cachette

Sur le même sujet :
Un conseiller municipal autochtone refuse de prêter serment à la reine et abandonne son siège (2018-12-03)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les peuples autochtones du Québec

Publié le 16 octobre 2018 | Temps de lecture : 4 minutes

Le territoire québécois est habité par treize peuples : les francoQuébécois, les angloQuébécois et onze peuples autochtones.

Ces derniers comptent environ cent-mille personnes, soit 1,5% de la population québécoise.

Ils sont plus nombreux au Canada anglais. Leur importance démographique est de l’ordre de cinq pour cent dans les provinces anglophones du pays, pour une moyenne canadienne (incluant donc le Québec) de quatre pour cent.

Dix peuples autochtones ont été reconnus par l’Assemblée nationale sous René Lévesque en 1985. Un onzième s’est ajouté quatre ans plus tard sous le gouvernement péquiste de Pierre-Marc Johnson.

En ordre alphabétique, ces onze peuples autochtones sont :
• les Abénaquis (près de Trois-Rivières)
  les Algonquins -> voir les Anishnabés
• les Anishnabés (en Abitibi et en Outaouais)
• les Attikameks (en Haute-Mauricie)
• les Cris (région de la Baie-James)
  les Hurons -> voir les Wandats
• les Innus (au Lac-Saint-Jean, sur la Côte-Nord et à Schefferville)
• les Inuits (au Nunavik)
• les Malécites (Bas-du-Fleuve)
• les Micmacs (en Gaspésie)
• les Mohawks (près de Montréal)
• les Naskapis (à Schefferville)
• les Wandats (à Québec).

Leur population varie beaucoup d’un peuple autochtone à l’autre, passant de vingt-mille Cris à quelques centaines d’Abénaquis, de Malécites et de Naskapis.

Si on exclut le cas particulier de l’ile de Montréal, seule l’Estrie était complètement inhabitée à l’arrivée de Champlain car cette région était le théâtre d’une longue guerre que se livraient les Innus et les Anishnabés (qui vivaient au nord du Saint-Laurent) contre les Mohawks (qui habitaient le nord de l’État de New York actuel).

Juridiquement, les peuples autochtones se divisent en trois catégories.

Le premier groupe comprend les signataires des traités modernes que sont la Convention de la Baie-James (les Cris et les Inuits) et la Convention de Nord-Est québécois (les Naskapis).

En échange de la renonciation à leurs droits ancestraux, ces peuples ont reçu d’importantes compensations financières qui leur assurent un niveau de vie plus élevé que la plupart des autres peuples autochtones au Canada.

Ils jouissent également d’une autonomie exceptionnelle qui leur permet de gouverner, par le biais d’institutions publiques où ils sont majoritaires, de vastes territoires à l’extérieur de leurs villages. Ces territoires représentent environ le tiers du Québec.

Contrairement à la loi fédérale sur les Indiens, basée sur la race, les traités québécois sont conformes aux Droits de la personne; rien ne s’oppose, par exemple, à ce que des citoyens non autochtones soient élus à la tête des institutions autonomes de ces territoires si ce n’est que les Autochtones forment 90% de la population.

Un deuxième groupe comprend des peuples autochtones qui étaient présents sur leurs territoires actuels, mais qui n’ont pas signé de traité avec le gouvernement du Québec : les Anishnabés, les Attikameks, les Innus, les Malécites et les Micmacs.

Le dernier groupe est celui des Abénaquis, des Mohawks et des Wendats. Ceux-ci n’étaient pas présents au Québec à l’arrivée des colonisateurs français.

Originaires des États-Unis actuels, certains Mohawks se sont établis près de Montréal en fuyant l’hostilité des autres Mohawks après leur conversion au catholicisme.

De manière analogue, les Wendats se sont réfugiés au Québec après avoir fui l’Ontario.

Les Abénaquis sont originaires de la Nouvelle-Angleterre.

Les droits de ces peuples découlent des chartes seigneuriales accordées à des communautés religieuses qui leur ont permis de s’installer au Québec.

Il est donc inexact de croire que le territoire montréalais est un territoire mohawk non cédé.

Références :
Binette A. Le droit des peuples autochtones et l’indépendance du Québec. L’Action Nationale 2017; vol 57 no 9: 24-50.
Droits ancestraux et issus de traités à Montréal
Montréal n’est pas un territoire mohawk non cédé
Montréal, un territoire mohawk ?

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Meurtre au consulat : du fait divers aux ressorts d’une crise internationale

Publié le 15 octobre 2018 | Temps de lecture : 8 minutes

Un meurtre sordide

Jamal Khashoggi est un dissident saoudien qui, après sa fuite en Occident en septembre 2017, est devenu journaliste au Washington Post.

Pour les amateurs de potins, c’est aussi le cousin de feu Dodi Fayed, le dernier compagnon de la princesse Diana.

Le 2 octobre dernier, il s’est rendu au consulat saoudien d’Istanbul afin d’y obtenir un document dont il avait besoin pour se marier.

Selon toutes les apparences, il y était attendu par une escouade d’agents venus spécialement de la capitale saoudienne pour l’assassiner, le démembrer et évacuer ses restes hors du pays dans des colis diplomatiques (non sujets à la fouille dans les aéroports).

Quelques litres de sang de plus

L’Arabie saoudite a financé à hauteur d’au moins 85% les milices de mercenaires islamistes qui sont venus de partout mettre la Syrie à feu et à sang au cours d’une guerre de procuration qui a fait plus de 350 000 morts.

Au Yémen, les bombardements saoudiens ciblent volontairement les populations civiles. Selon Wikipédia, la très grave crise humanitaire qui y menace la vie de millions de personnes est principalement due au blocus maritime, aérien et terrestre imposé par la dictature saoudienne.

Rappelons également que, selon les dépêches diplomatiques révélées par WikiLeaks, l’Arabie saoudite est la plaque tournante du financement du terrorisme international.

Dans la mer de sang que la dictature saoudienne répand autour d’elle, qu’est-ce qui fait que toute la planète s’intéresse soudainement au cas anecdotique de Jamal Khashoggi ?

La réponse est simple : tout le monde en parle parce que tout le monde a intérêt à en parler.

La rivalité entre la Turquie et l’Arabie saoudite

Depuis le début de cette crise, le maitre du jeu est Erdoğan. Par le biais de révélations et de rumeurs, la Turquie entretient le suspense et le mystère autour de cette affaire.

Même si la Turquie n’est pas un pays arabe (on y parle principalement le turc), c’est un pays musulman. Or la Turquie et l’Arabie saoudite sont rivales dans la lutte d’influence qu’elles se livrent au sein du monde sunnite.

Les dérives autoritaires d’Erdoğan ont fait pâlir le rayonnement international de la Turquie. Par ailleurs, l’ascension en 2017 du prince héritier saoudien a été une occasion pour son pays de tenter de refaire son image.

Déjà en 2015, l’Arabie saoudite avait acheté un siège au Conseil des droits de la personne de l’ONU puis en 2017, à la Commission de la condition de la femme des Nations unies.

Selon France24, la dictature saoudienne est cliente des deux plus importantes firmes de relations publiques de France.

Au Canada, elle a bénéficié des reportages extrêmement complaisants de la journaliste Marie-Ève Bédard sur les ondes de Radio-Canada.

Mais voilà que ce meurtre donne l’occasion à Erdoğan de prendre sa revanche.

Vision 2030

En temps normal, la puissance économique de l’Arabie saoudite et son importance géostratégique dispensent ce pays de l’obligation de soigner son image publique.

La chirurgie esthétique de l’image saoudienne a donc un but très précis.

Il y a un an se tenait la conférence Future Investment Initiative.

Le deuxième volet de cette rencontre doit avoir lieu le 23 octobre prochain, toujours dans le but de faire la promotion de Vision 2030, un ambitieux projet de 500 milliards$ en Arabie saoudite.

Il vise à combler l’abyssal déficit technologique de ce pays. En effet, celui-ci est captif d’un régime obscurantiste qui fait fuir ses plus brillants sujets à l’Étranger lorsqu’ils ne pourrissent pas en prison comme c’est le cas de Raïf Badawi.

Pour diversifier son économie et réaliser ce projet futuriste, l’Arabie saoudite n’a pas besoin du capital étranger, mais du savoir des grandes entreprises de haute technologie.

Et c’est là où beaucoup de pays l’attendaient.

En sabotant cette conférence, les pays occidentaux profitent de cette vulnérabilité pour infliger une leçon de modestie à l’insolente dictature saoudienne.

Un prince héritier menaçant

Comme tous les pays arabes du Moyen-Orient, l’Arabie saoudite est une société féodale qui repose, dans ce cas-ci, sur l’allégeance de tribus à la dynastie des Saoud.

En concentrant tous les pouvoirs entre ses mains, l’impétueux prince Mohammed ben Salmane indispose un grand nombre de princes saoudiens (il y en a plus de mille) et de chefs de clans.

Sous le prétexte de la lutte contre la corruption, le prince héritier a dépouillé certains membres de la famille royale de milliards de dollars à son profit.

De plus, en donnant l’impression qu’il veut mettre fin à l’intégrisme de son pays, le prince hériter inquiète le clergé wahhabite, jaloux de ses pouvoirs et de son influence.

Rappelons que ce clergé influence les foules par ses prêches du vendredi et sa mainmise complète sur le système éducatif saoudien.

Après le bourbier saoudien au Yémen, le refus du Qatar se soumettre à son autorité et la victoire inéluctable de Bachar el-Assad en Syrie, Mohammed ben Salmane va de revers en défaites.

L’Arabie saoudite et le monde

L’Europe

Si les pays européens peuvent toujours prétendre ne pas avoir anticipé la crise migratoire qui a accompagné la guerre en Syrie, ils devraient se douter que la guerre que l’Arabie saoudite prépare contre l’Iran mettra de nouveau leurs frontières à dure épreuve.

Ils ont donc intérêt à calmer les ardeurs guerrières du prince héritier et à favoriser l’affaiblissement de son pouvoir. Tout cela dans un exercice périlleux qui consiste à vendre des armes à la dictature saoudienne sans qu’elle s’en serve.

Depuis des semaines, le gouvernement de Mme May tente de détourner l’attention du public anglais des conflits internes de son parti au sujet du Brexit.

La tentative d’empoisonnement par la Russie d’un ex-agent double russe lui donnait le prétexte d’une enflure verbale digne de la guerre froide.

Mais voilà que l’Arabie Saoudite fait pareil. En fait, elle fait pire puisque Khashoggi n’est même pas un espion.

Talonnée par son opposition travailliste (très à gauche), Mme May s’empresse donc de se scandaliser d’un fait divers.

En Amérique du Nord

Toute comme les autres fournisseurs d’armements à l’Arabie saoudite, le Canada n’a aucune intention d’indisposer un important client.

Le gouvernement Trudeau se réjouit donc de la désapprobation des médias canadiens envers la dictature saoudienne, désapprobation dont il peut plaider officiellement qu’il n’y est pour rien.

Quant aux États-Unis, si les attentats du 11 septembre 2001 n’ont pas nui aux bonnes relations américano-saoudiennes, il est douteux que ces deux pays se brouillent aujourd’hui pour si peu.

Mais ce n’est pas le cas du milieu journalistique américain qui vient de perdre un des leurs. En déchainant l’opinion publique sur les médias sociaux, les médias américains font pression sur les entreprises américaines soucieuses de leur image publique afin qu’elles annulent leur participation à Vision 2030.

Conclusion

À la fois partenaire officiel de la lutte antiterroriste et financier clandestin du terrorisme islamique, l’Arabie saoudite mène depuis longtemps un double-jeu.

Par cet assassinat sordide, l’Arabie saoudite donne à tous l’occasion d’exprimer publiquement son ressentiment contre une dictature misogyne et obscurantiste devant laquelle nos chefs d’État font la courbette depuis trop longtemps.

Références :
Arabie saoudite : un vent de réforme qui ne fait pas l’unanimité
Jamal Khashoggi
Guerre civile yéménite
La Grande séduction saoudienne
La promotion de l’Arabie saoudite au Conseil des droits de l’homme fait débat
L’Arabie saoudite ne peut défendre les droits des femmes à l’ONU
Transformer l’Arabie saoudite
Turks tell U.S. officials they have audio and video recordings that support conclusion Khashoggi was killed
Que sait-on sur l’empoisonnement de l’ex-agent double russe au Royaume-Uni ?

Parus depuis :
Saudi Arabia pays UK firms millions to boost image (2018-10-20)
La guerre des nerfs (2018-10-24)
Ben Salmane aurait envoyé des assassins au Canada pour tuer un haut responsable (2020-08-06)
Assessing the Saudi Government’s Role in the Killing of Jamal Khashoggi (2021-02-11)

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Écrit par Jean-Pierre Martel