La victoire électorale de Donald Trump a été une surprise pour presque tous les analystes politiques. Ces derniers se basaient sur les sondages d’opinion, unanimes à prédire la victoire d’Hilary Clinton.
Effectivement, celle-ci a obtenu deux à trois-millions de votes de plus que son adversaire. Pourtant, elle a perdu cette élection en raison d’un système électoral vicié.
En premier lieu, il est vicié par le rôle joué par le Collège électoral. Celui-ci est le verrou mis en place au XVIIIe siècle par les élites révolutionnaires pour se protéger, en cas de besoin, de l’immaturité politique du peuple américain (dans lequel ils n’avaient pas confiance).
Deuxièmement, il est vicié par une multitude de mesures adoptées pour enrayer la démocratie américaine. Sans ces mesures, l’écart entre les deux candidats aurait été encore plus grand et la victoire de Mme Clinton plus certaine.
À la lecture de la section intitulée ‘Ending Voter Suppression’ du livre ‘Our Revolution’ de Bernie Sanders, on apprend quelques-uns des moyens utilisés par les Républicains pour faire obstacle à tous ceux qui ont tendance à voter contre eux.
Sous le prétexte de lutter contre la fraude (à peu près inexistante), certains États exigent la présentation d’une pièce d’identité sur laquelle apparait la photo du détenteur. Cette carte est émise par l’État.
Invoquant l’austérité, l’Alabama a raréfié les bureaux où les Noirs se présentaient afin d’obtenir cette carte, ce qui complique leurs démarches afin de l’obtenir.
Dans les États où cette exigence s’applique, on a calculé que cela fait perdre aux candidats démocrates 8,8% de leurs appuis et aux candidats républicains 3,6%.
Au Québec, l’inscription sur les listes électorales se fait automatiquement lors des recensements. Aux États-Unis, il faut s’inscrire.
En éliminant le vote anticipé et la possibilité de s’enregistrer sur place lors du scrutin, les Républicains ont rendu plus compliqué l’exercice du droit de vote pour les catégories de citoyens négligents dans l’exercice de leurs devoirs civiques, les jeunes et les pauvres notamment.
De plus, on a diminué le nombre de bureaux de vote et de préposés à la votation dans les quartiers ‘noirs’.
Le résultat, c’est qu’à l’élection de 2012 (on n’a pas les données pour 2016) le temps d’attente pour voter dans les quartiers ‘blancs’ a été de 11,6 minutes alors qu’il a été de 23,3 minutes dans les quartiers ‘noirs’.
Dans des cas extrêmes, il faillait attendre six ou sept heures pour voter.
Contrairement au Canada où la loi oblige l’employeur à permettre à ses employés d’exercer leurs devoirs civiques, toute élection américaine qui a lieu à un autre moment que lors d’un congé ou d’un jour férié rend l’exercice du droit de vote impossible aux Américains qui cumulent plusieurs emplois pour joindre les deux bouts.
Au Canada, on estime que l’incarcération seule est la punition du condamné. Dans certains États américains, on a ajouté à cette punition la suppression de leur droit de vote.
Ce droit n’est pas automatiquement restauré lorsqu’une personne sort de prison; l’ex-prisonnier doit s’inscrire.
Cela ne peut se faire qu’après avoir effectué un certain nombre de démarches préalables comme avoir trouvé un domicile.
Le résultat est qu’environ 13% des Noirs américains (dont ceux qui ont été emprisonnés pour des délits mineurs) sont privés du droit de vote. Cela représente deux-millions de citoyens.
Voilà pourquoi la prédiction des résultats du scrutin est toujours très hasardeuse aux États-Unis lorsque les candidats sont presque nez à nez.
Croire que l’écart entre le vote et les sondages s’explique par la volatilité du choix des indécis est simpliste. Cet écart s’explique plutôt par le fait qu’on répond aux sondages beaucoup plus facilement qu’on y vote.
Les Américains aiment proclamer que leur pays est un modèle de démocratie. On conviendra qu’il s’agit-là d’un modèle très améliorable…
Références :
Élection de Trump: la colère d’un grand électeur
Le mensonge des statistiques
Our Revolution: A Future to Believe In