Des puits de pétrole encore opérationnels
J’écoutais hier soir un reportage de la journaliste Marie-Ève Bédard de Radio-Canada au sujet de la politique de terre brulée pratiquée par l’État islamique.
Essentiellement, on y montrait la vie difficile des habitants de Kayara, en Irak, obligés de vivre dans la fumée toxique dégagée par les puits de pétrole auxquels l’État islamique a mis le feu avant de prendre la fuite.
Mais pour moi, ce reportage est un écran de fumée (si j’ose dire) puisqu’il évite de répondre à la question fondamentale : après plus de dix-mille frappes aériennes américaines, comment se fait-il que l’État islamique dispose toujours de sites pétroliers opérationnels qu’il peut, à sa guise, incendier s’il le juge opportun ?
L’incendie des puits de Kayara est une preuve supplémentaire qu’avant l’automne 2015, les États-Unis ne souhaitaient pas véritablement anéantir l’ÉI.
Leur stratégie était de faire perdurer l’insécurité régionale qui amenait les pays voisins à multiplier les contrats militaires auprès d’eux afin de se protéger.
Car la guerre est une bizness. Ruineuse pour ceux qui la font mais payante pour leurs fournisseurs.
La surenchère
L’intervention éclair de la Russie dans le conflit syrien à l’automne 2015 a marqué un tournant dans cette guerre.
En y consacrant seulement 2% du budget militaire russe, l’aviation de ce pays a effectué 9 000 sorties, détruit 209 sites d’extraction pétrolière ou de points de transit d’hydrocarbures, et libéré 400 agglomérations (sur les 25 000 que compte le pays).
Au cours de l’avancée des forces gouvernementales sous le couvert des bombardements russes, des négociateurs russes et syriens ont conclu des centaines de serments d’allégeance au régime de la part des chefs de villages et seigneurs de la guerre. Par le biais de ces ententes, des milliers de combattants ont fait défection des milices islamistes rebelles.
En quelques semaines, la proportion du territoire syrien contrôlé par le régime de Bachar el-Assad est passée de 16 à 20%, soit un gain de 10 000 km².
Indirectement, ce succès était une gifle aux Américains puisque la stratégie marchande de ces derniers, inavouable publiquement, donne une impression d’impuissance puisque son but est précisément de faire durer la guerre.
D’où la nécessité d’une grande victoire qui redonnerait confiance dans la suprématie militaire américaine. Cette grande victoire sera Mossoul, la deuxième ville d’Irak.
Les boucliers humains de l’ÉI
Afin de ternir les succès qu’obtient la Russie en Syrie, les Occidentaux accusent depuis des mois les Russes ne ne pas faire attention aux pertes civiles lors de leurs bombardements, voire de le faire exprès.
Maintenant que les forces occidentales se préparent elles aussi à reconquérir du territoire aux mains de l’ÉI, elles savent que cela occasionnera des ‘dommages collatéraux’. Car toute guerre cause des pertes civiles.
Pour s’en excuser d’avance, la propagande occidentale accuse maintenant l’ÉI d’amener de force des milliers de personnes à Mossoul afin qu’ils servent de boucliers humains. Comme si l’ÉI ne pouvait pas faire pareil quand il s’agissait des Russes.
En réalité, la ville de Mossoul comptait environ 1,5 million de personnes avant sa capture aux mains de l’ÉI. Elle en compte encore des centaines de milliers. Conséquemment, l’ÉI trouve déjà sur place tous les ‘boucliers humains’ dont il pourrait avoir besoin.
Références :
Bataille pour Mossoul : deux semaines de combats cartographiés jour par jour
Des milliers de civils enlevés par l’EI pour servir de boucliers humains à Mossoul
En difficulté en Irak, l’EI perd ses revenus pétroliers
L’Apocalypse selon l’ÉI en Irak
Dans le même ordre d’idée :
Iraqi invasion of Kuwait in 1990 used by UK to boost weapon sales