Bilan de 2015

Publié le 31 décembre 2015 | Temps de lecture : 1 minute

Les lutins statisticiens de WordPress ont préparé le rapport annuel 2015 de ce blogue.

En voici un extrait :

En 2015, 257 articles ont été publiés, ce qui porte le total des archives du blogue à 1 505 textes.

Le jour le plus actif de l’année a été le 9 janvier 2015 avec 2 278 vues. C’est le record absolu.

L’article le plus populaire ce jour-là fut La Porte de Brandebourg.

Les textes du blogue ont été consultés dans 165 pays. Le nombre de consultations a dépassé mille dans sept pays; ce sont la France (98 823 fois), le Canada (23 685 fois), les États-Unis (9 125 fois), la Belgique (4 531 fois), la Suisse (2 751 fois), l’Algérie (2 517 fois) et le Maroc (1 663 fois).

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les D qui se prononcent T

Publié le 30 décembre 2015 | Temps de lecture : 1 minute

Il arrive qu’une lettre à la fin d’un mot se prononce différemment de son orthographe.

C’est le cas des verbes en ‘…dre’ — comme entendre, fendre, vendre et prendre — au présent, à la troisième personne du singulier, lorsque le sujet est inversé, en posant une question.

Par exemple, on écrit ‘Prend-il son repas ?’ mais on prononce ‘Pren Til son repâ ?’. De la même manière, on écrit ‘Vend-il des pommes ?’ alors qu’on dit ‘Ven Til dè pom ?’

C’est le cas également de certains adjectifs — comme grand — lorsqu’ils précèdent une voyelle. On écrira donc ‘Vivre au grand air’ alors qu’on prononcera ‘Vi vro gran Tèr’.


Pour consulter les textes de ce blogue consacrés à la grammaire et à l’orthographe, veuillez cliquer sur ceci

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’église Saint-Paul-Saint-Louis (1627-1641)

Publié le 29 décembre 2015 | Temps de lecture : 8 minutes

Préambule

L’église Saint-Paul-Saint-Louis fut la première église française que j’ai visitée. C’était en octobre 2003, au début de mon premier voyage en Europe.

Je m’étais acheté des marrons grillés — servis dans un cornet de papier journal — auprès d’un vendeur ambulant, au sortir d’un grand magasin de la rue de Rivoli.

Tout préoccupé à éviter que les morceaux d’écorce ne tombent par terre, j’avais effectué une longue marche, sans m’en rendre compte, jusqu’à la rue Saint-Antoine (un prolongement vers l’Est de la rue de Rivoli).

L’église Saint-Paul-Saint-Louis s’y trouvait, les portes grandes ouvertes.

Il suffisait de lever les yeux pour admirer la richesse de sa façade. Et il suffisait de les baisser pour voir des mendiants assis sur ses marches ou étendus sur son parvis.

Même si j’ai vu depuis à Paris et à Prague des églises encore plus belles, celle-ci demeurera toujours la première qui m’ait émerveillé.

Histoire

Fondée 1534 par un gentilhomme espagnol venu à Paris pour y étudier, la Compagnie de Jésus migre à Rome en 1537 afin d’y obtenir la reconnaissance papale.

Une fois celle-ci obtenue, les prêtres jésuites se tournent principalement vers l’enseignement et s’établiront dans différents pays. Ils ne retourneront à Paris qu’en 1561.

Le 27 décembre 1594, un ex-élève des Jésuites tente d’assassiner Henri IV. Par amalgame, les Jésuites sont accusés d’avoir inspiré son acte. L’ordre est banni de France de 1594 à 1603.

Mais en 1603, Henri IV choisit un prêtre jésuite, Pierre Coton, comme prédicateur. Ce dernier deviendra son confesseur en 1608.

Dès 1603, il convainc le roi de révoquer l’expulsion des Jésuites de France.

Résultat : deux décennies plus tard, la chapelle Saint-Louis, adjacente au siège social de la communauté à Paris, est devenue trop petite.

Son remplacement par une nouvelle église est une occasion de marquer la réussite sociale de l’ordre religieux. Et puisque de nombreux nobles ont élu domicile dans le quartier, on décide d’en faire un lieu de culte dont la décoration ostentatoire est susceptible de les éblouir.

C’est Louis XIII lui-même qui pose la première pierre, le 7 mars 1627. Une fois complétée, la première messe de l’église fut dite par le cardinal de Richelieu en présence de la famille royale.

Architecture

Au moment de son inauguration en 1641, l’église Saint-Louis-des-Jésuites devenait le troisième lieu de culte à dôme de Paris, après l’église Saint-Joseph-des-Carmes (1613-1620) et l’église du couvent des filles de la Visitation (1632-1634). Cette dernière est située à 450m, sur la même rue.

L’église Saint-Louis-des-Jésuites fut réalisée par trois architectes jésuites : Étienne Martellange (qui crée les plans et conduit les travaux jusqu’en 1629), François Derand (qui lui succède et s’occupe principalement de la façade et de la coupole), alors que Charles Turmel s’occupe de la décoration intérieure.

Façade de l’église

La façade actuelle est presque identique à ce qu’elle était originellement.

Seuls quelques petits détails décoratifs ont disparu à la Révolution. Au milieu de la façade, le sceau de la Compagnie de Jésus a été remplacé par une horloge dont les aiguilles sont en attente de dorure. Et les trois statues actuelles datent du XIXe siècle.

Détail de la façade

Au dernier niveau, on trouve une statue de Saint Louis, œuvre d’Eugène-Louis Lequesne (1815-1887), en remplacement de celle d’origine. Il est à noter que l’église porte les noms de Saint-Paul-Saint-Louis depuis la destruction en 1799 de l’église Saint-Paul-des-Champs, située à proximité (voir la gravure au début du texte).

Les deux statues du premier étage représentent Sainte Catherine — à gauche, d’Auguste Préault (1809-1879) — et Sainte Aure, à droite, d’Antoine Étex (1808-1888).


Note : Pour consulter un guide illustré des termes techniques d’architecture religieuse, on cliquera sur ceci.

Aperçu de l’intérieur de l’église

L’intérieur est relativement lumineux, éclairé par des fenêtres translucides plutôt que par des vitraux.

Chaire

En empruntant l’allée principale vers le chœur, on rencontre la chaire, adossée au pilier situé juste avant le transept. La chaire d’origine, disparue à la Révolution, a été remplacée par celle-ci en 1806.

Tambour, coupole et lanterneau

La croisée du transept est surmontée d’un dôme. Les pendentifs qui supportent le tambour et la coupole représentent les quatre évangélistes (aux quatre coins de la photo ci-dessus).

Grisaille représentant Saint Louis

La coupole repose sur un tambour percé de fenêtres et décoré de grisailles peintes en 1873 par Paul-Joseph Blanc. Ce sont quatre représentants de dynasties françaises; Clovis (roi mérovingien), Charlemagne (roi carolingien), et Robert II le Pieux (roi robertien), et Saint Louis (roi capétien).

À la différence de nombreuses églises, ce n’est pas la coupole qui est peinte, mais plutôt son lanterneau.

À la croisée du transept

Sous la coupole, le maitre-autel moderne est décoré d’un bronze doré de François Anguier (1604-1669) intitulé Les Pèlerins d’Emmaüs.

Derrière le chœur, l’abside est décorée de toiles représentant les quatre évangélistes, peintes par Henri de Caisne (1799-1852).

Selon le Grand Dictionnaire géographique historique et critique d’Antoine-Augustin Bruzen de La Martinière (publié en 1732), le chœur de l’église était dominé originellement par un retable monumental à trois étages qui rappelait la façade de l’église.

Décoré de colonnes de marbre noir dont les chapiteaux corinthiens étaient en bronze doré, ce retable de marbre blanc était surmonté d’un crucifix qui montait presque jusqu’à la voûte. Au centre de chacun de ses étages se trouvait une toile qui était remplacée alternativement par d’autres, selon les périodes de l’année.

Sous les arcades donnant accès aux chapelles situées de chaque côté du chœur — appelées chapelles absidiales — deux anges d’argent drapés de vermeil étaient suspendus, présentant à Dieu les cœurs embaumés de Louis XIII (arcade de gauche) et de son fils Louis XIV (arcade de droite).

L’église ayant été saccagée à la Révolution, puis pillée en 1831 et en 1871, tout ce décor a disparu. Le maitre-autel actuel date de 1836.

Bas-côté de gauche

Surmontés d’une tribune, les bas-côtés sont des galeries qui franchissent quatre portes (ou ‘passages’) tapissées de boiseries qui traversent autant de piliers.

Chapelle du Sacré-Cœur

En empruntant le bas-côté gauche, après la troisième de ces portes, on atteint la chapelle du Sacré-Cœur, aménagée dans le bras gauche du transept. La statue du Sacré-Cœur fut sculptée par Jean-Marie Bonnassieux (1810-1892).

Entrée de la sacristie et chapelle absidiale de gauche

Après la quatrième porte, nous voici devant l’entrée de la sacristie et devant la chapelle Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, dont l’autel est surmonté de la statue intitulée La Vierge des douleurs de Germain Pilon (1528-1590), un des plus importants sculpteurs de la Renaissance française.

Chapelle de la Vierge

En empruntant le bas-côté droit, on atteint au transept la chapelle de la Vierge (1828).

À gauche et à droite de son autel, se trouvent les sculptures allégoriques en plâtre La Religion instruisant un jeune Américain (1745) de Nicolas-Sébastien Adam (1705-1778) et L’Ange de la Religion fouettant l’idolâtrie (1745) de Jean-Joseph Vinache (1697-1754).

Chapelle absidiale de droite

Au fond du bas-côté droit est situé un autel sobre, surmonté d’un crucifix.

Orgue

En nous dirigeant vers la sortie de l’église, on admirera l’orgue. Il date de 1871. Les tourelles de son buffet sont surmontées de Saint Paul, entouré de deux anges musiciens.

Arrière de la nef

De chaque côté de la sortie principale, on peut voir les statues de Saint Paul (à gauche sur la photo) et de Saint Pierre (à droite), au-dessus des bénitiers en coquillage offerts par Victor Hugo.

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5, hypergone M.Zuiko 8 mm F/1,8 (7e, 10e et 12e photos), objectifs PanLeica 25 mm F/1,4 (4e et 13e photos) et M.Zuiko 12-40 mm F/2,8 (les autres photos)
 1re photo : 1/250 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 15 mm
 2e  photo : 1/320 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 22 mm
 3e  photo : 1/60 sec. — F/2,8 — ISO 600 — 12 mm
 4e  photo : 1/80 sec. — F/1,4 — ISO 400 — 25 mm
 5e  photo : 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 640 — 18 mm
 6e  photo : 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 320 — 40 mm
 7e  photo : 1/80 sec. — F/1,8 — ISO 320 — 8 mm
 8e  photo : 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 5000 — 12 mm
 9e  photo : 1/60 sec. — F/2,8 — ISO 1000 — 12 mm
10e photo : 1/80 sec. — F/1,8 — ISO 400 — 8 mm
11e photo : 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 640 — 15 mm
12e photo : 1/60 sec. — F/1,8 — ISO 800 — 8 mm
13e photo : 1/60 sec. — F/1,4 — ISO 400 — 25 mm
14e photo : 1/60 sec. — F/2,8 — ISO 1600 — 12 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Photos du temps des fêtes

Publié le 27 décembre 2015 | Temps de lecture : 1 minute
Boule à neige, à la Place Ville-Marie
La veille de Noël à la cathédrale du Christ de Montréal
La Fée des étoiles chez Victoria’s Secrets
Guirlandes de papier à la Maison Ogilvy

Le Temps des fêtes est une période de réjouissances qui, traditionnellement, commençait la veille de Noël pour se terminer à la fête des Rois, le 6 janvier.

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5, objectif Lumix Leica 42,5mm F/1,2
1re photo : 1/400 sec. — F/1,2 — ISO 200 — 42,5 mm
2e  photo : 1/100 sec. — F/1,2 — ISO 1600 — 42,5 mm
3e  photo : 1/125 sec. — F/1,2 — ISO 200 — 42,5 mm
4e  photo : 1/400 sec. — F/1,2 — ISO 200 — 42,5 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Message de Noël

Publié le 25 décembre 2015 | Temps de lecture : 1 minute
Prière de cliquer sur l’image pour l’agrandir

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5, objectif PanLeica 42,5mm F/1,2 — 1/160 sec. — F/1,2 — ISO 200 — 42,5 mm (montage de trois photos, le tout modifié en post-production)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le radicalisme des rebelles syriens

Publié le 23 décembre 2015 | Temps de lecture : 3 minutes

La Tony Blair Faith Foundation est une organisation sans but lucratif qui vise à étudier et combattre l’extrémisme religieux.

Le 20 décembre 2015, cet organisme publiait les résultats d’une étude portant sur l’idéologie des groupes rebelles en Syrie (indigènes ou venus de l’Étranger).

Il est à noter qu’il ne s’agit pas d’un sondage effectué auprès de répondants choisis par échantillonnage, mais d’une analyse de la propagande (écrite ou verbale) issue de 48 groupes de rebelles.

L’État islamique (ÉI) et 15 autres groupes — totalisant 96 000 combattants — partagent une idéologie identique. C’est le tiers des groupes étudiés.

Ils combattent afin de reproduire en Syrie le monde musulman idéalisé qui prévalait au temps de Mahomet, soit ce que fait déjà l’ÉI dans le territoire qu’il contrôle.

Parmi eux, huit (excluant l’ÉI) déclarent ouvertement souhaiter commettre des attentats terroristes en Occident. Ces huit groupes comptent 30 000 combattants. Si on ajoute l’ÉI, cela fait 61 000 terroristes potentiels.

À cela s’ajoutent douze autres groupes qualifiés d’islamistes; sans chercher à reproduire les coutumes qui prévalaient il y a 1 500 ans dans cette partie du monde, ils souhaitent néanmoins que le Coran et la charia aient dorénavant force de loi en Syrie.

Douze autres groupes de rebelles luttent pour renverser le régime de Bachar el-Assad, sans professer d’idéologie particulière.

Suivent trois groupes de rebelles qui luttent pour l’indépendance du Kurdistan, et cinq groupes de milices qui ne visent qu’à assurer la protection de leur communauté.

Au total, la majorité des groupes rebelles dits ‘modérés’ (excluant donc l’ÉI et Al-Qaida) visent à remplacer le régime séculier de Bachar el-Assad par un régime où les textes de la doctrine et de la jurisprudence musulmane auront force de loi auprès de l’ensemble de la population.

Seuls 38% des groupes de rebelles souhaitent diriger une démocratie parlementaire.

Et puisque ces groupes s’unissent et s’affrontent selon les circonstances, les auteurs du rapport écrivent : « Toute tentative de faire la distinction entre des rebelles ‘modérés’ d’une part et des extrémistes de l’autre, est impossible. »

Les lecteurs assidus de ce blogue ne seront pas surpris par cette conclusion puisque c’est exactement ce que j’écris depuis deux ans.

En s’alliant aux pétromonarchies et à la Turquie pour renverser Bachar el-Assad, les pays occidentaux sont en train de commettre une grave erreur; celle de transformer un régime séculier brutal par un régime islamiste tout aussi brutal, voire barbare.

Références :
Most Syrian rebels sympathise with Isis, says thinktank
If the Castle Falls: Ideology and Objectives of the Syrian Rebellion


Compléments de lecture :
L’ABC de la guerre syrienne (1re partie)
L’ABC de la guerre syrienne (2e partie)
L’ABC de la guerre syrienne (3e partie)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Qui aime Donald Trump ?

Publié le 18 décembre 2015 | Temps de lecture : 4 minutes


 
De propriété privée et située au New Jersey, l’université Monmouth est une maison d’enseignement universitaire fréquentée par plus de six mille étudiants.

Parmi les organismes qui logent sur son campus se trouve le Monmouth University Polling Institute (MUPI), ce qui signifie l’Institut de sondage de l’université Monmouth.

Ses sondages sont renommés pour leur précision et leur exactitude.

Entre le 10 et le 13 décembre dernier, cet organisme a effectué un sondage téléphonique auprès de 1 006 adultes américains, dont 385 sympathisants républicains. Ce sondage portait sur la popularité des candidats à la chefferie du Parti républicain.

En comparant ses résultats à ceux des sondages antérieurs effectués par le MUPI, on apprend que le meneur de la course républicaine, Donald Trump, a accru de treize points son avance sur ses rivaux à la suite du scandale provoqué par sa suggestion d’interdire temporairement l’immigration de Musulmans aux États-Unis.

En d’autres mots, en dépit de la condamnation universelle de ses propos, Donald Trump est encore plus populaire qu’il l’était auprès de l’électoral républicain, passant d’une intention de vote de 28% (à la mi-octobre 2015) à 41% (la semaine dernière).


 
Au-delà du millionnaire extravagant et de l’homme politique qui agit comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, Donald Trump est un phénomène social.

Pour essayer de le comprendre, voyons quelles sont les caractéristiques de ses partisans.

Les intentions de vote en sa faveur (41%) se retrouvent un peu plus chez les hommes (44%) que chez les femmes (37%).

Il existe une relation directe entre la sympathie pour le mouvement radical américain appelé Tea Party et l’appui à Donald Trump, passant de 36% chez les Républicains qui n’aiment pas le Tea Party, à 52% chez ceux qui en sont de fervents partisans.

Les résultats les plus étonnants du sondage du MUPI concernent la relation entre le niveau de scolarité et l’appui à Donald Trump.

Chez ceux qui ont fait des études collégiales — l’équivalent des CÉGEPs au Québec ou des lycées en France — sans toutefois s’être rendus à l’université, entre 31% et 34% appuient Donald Trump. Mais cette popularité grimpe à 54% chez les détenteurs de diplômes universitaires.

Pour tenter d’expliquer cette popularité, j’émettrais l’hypothèse suivante.

Le système éducatif américain se distingue de tous les autres à travers le monde par son ‘USA-centrisme’.

Il forme des citoyens parfaitement aptes au travail, capables d’un esprit critique et de beaucoup de créativité.

Mais les Américains ne connaissent à peu près rien du monde à l’extérieur de leurs frontières. Ils ne s’intéressent à un autre pays que lorsque leurs armées décident d’y faire la guerre.

Et le peu qu’ils connaissent de l’histoire récente du monde ne leur permet pas de tirer des leçons de leurs erreurs tant la machine de propagande républicaine est efficace à déformer les faits et à brouiller les esprits.

En somme, même les Américains les plus intelligents sont en fait des abrutis lorsqu’il s’agit de politique étrangère.

Selon un autre sondage, réalisé par Public Policy Pooling, 41% des partisans de Donald Trump sont favorables à ce qu’on bombarde l’Agrabah. Seulement 13% s’y opposent.

Les 46% d’indécis ont bien raison car le royaume arabe d’Agrabah n’existe pas. Il a été créé par les studios Disney pour étoffer le scénario du film d’animation Aladin, ce personnage fictif des Mille et une nuits.

Aux États-Unis, d’innombrables groupes de réflexion conservateurs, très bien financés, attirent les intellectuels dans le but de créer une idéologie simple qui contribue à cet abrutissement collectif, illustré par les résultats de ce deuxième sondage.

Depuis des années, cette idéologie simpliste se répand grâce à Fox News, à la démagogie primitive des radio-poubelles, aux forums de discussion noyautés par ses adeptes, et aux films hollywoodiens où la rigueur historique cède la place à la romance et aux sentiments patriotiques.

Voilà pourquoi aujourd’hui les Républicains sont heureux d’entendre enfin un homme politique qui leur dit ce qu’ils veulent entendre et qui partage avec eux leur vision simpliste du monde. Faut-il s’en étonner ?

Références :
Monmouth University Polling Institute
Trump Lead Grows Nationally; 41% of His Voters Want to Bomb Country From Aladdin; Clinton Maintains Big Lead
Les Mille et Une Nuits

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’ABC de la guerre syrienne (3e partie et fin)

Publié le 16 décembre 2015 | Temps de lecture : 8 minutes

Histoire de l’État islamique

En 2006, l’État islamique (EI) nait de la cristallisation de plusieurs groupes rebelles autour de la branche irakienne d’Al-Qaida.

À ses débuts, l’ÉI vivote. Harcelé par les bombardements américains, privé de financement appréciable, il se discrédite aux yeux de la population irakienne par ses méthodes brutales qui s’attaquent autant aux Musulmans chiites qu’aux tribus sunnites jugées complices de l’occupant américain.

Au printemps de 2011, la Syrie — le pays voisin — devient l’Eldorado des rebelles sunnites.

Les pétromonarchies veulent en finir avec Bachar el-Assad. Elles font pleuvoir les dollars sur tous ceux qui veulent renverser le gouvernement de ce pays. Et les convois de camions turcs — officiellement chargés d’aide humanitaire — transportent en réalité tout le matériel militaire dont les rebelles ont besoin.

L’ÉI, réduit à quelques dizaines de combattants, quitte l’Irak afin de se ressourcer en Syrie; il en profite pour faire le plein d’armement, de devises et de mercenaires qui acceptent de combattre dans ses rangs.

En orange, territoire aux mains de l’État islamique en 2015

En mars 2013, l’ÉI est devenu suffisamment puissant pour s’emparer de Racca — au centre de la Syrie et peuplée de plus de 200 000 habitants — qui devient alors la première ville importante à tomber entre ses mains.

L’ÉI fait la conquête du centre de la Syrie, principalement désertique, où se concentrent ses champs pétroliers.

À la fin de 2013, de nombreuses tribus sunnites de révoltent contre le gouvernement irakien, qu’elles jugent discriminatoire à leur égard. Tablant sur ce contexte insurrectionnel, une partie des milices de l’ÉI retournent faire la conquête du nord et de l’ouest de ce pays.

Alors que l’ÉI avait quitté l’Irak discrédité, il y revient en héros, apportant du ravitaillement pour la population.

Le 10 juin 2014, l’ÉI s’empare de Mossoul, 2e ville d’Irak. À cette occasion, l’ÉI prend possession des réserves de devises de la Banque centrale de Mossoul, estimées à 492 millions$, devenant ainsi l’organisation terroriste la plus riche au monde.

Et ce, en plus de la quantité colossale de matériel militaire abandonné par l’armée irakienne, ce qui comprend 250 jeeps blindés Humvee, trente chars M1-Abrahams et des chars de combat M1129 Stryker.

Fier de cette conquête, le 29 juin 2014, l’ÉI annonce la création d’un califat sur le territoire qu’il contrôle (215 000 km²), à cheval entre la Syrie et l’Irak, soit presque autant que le Royaume-Uni (243 610 km²).

Après une progression fulgurante depuis 2013, l’ÉI commence cette année à essuyer ses premiers revers en Irak, notamment par la perte de la ville de Sinjar (à l’ouest de Mossoul), de même que Tikrit et Baïji (au sud de Mossoul). Selon le secrétaire d’État américain John Kerry, l’ÉI aurait perdu 25% des territoires qu’il occupait en Irak depuis 2014.

Parallèlement, l’ÉI s’internationalise; des milices rebelles dans d’autres pays lui prêtent allégeance. Les territoires éloignés qu’ils contrôlent sont qualifiés de ‘provinces’ par le califat.

De plus, l’ÉI réalise ses premiers attentats terroristes à l’étranger.

Le 18 mars 2015, l’ÉI revendique l’attentat au musée du Bardo, dans la capitale tunisienne : 24 morts. Le 26 juin 2015, l’ÉI commet un attentat près de la ville tunisienne de Sousse : 39 morts. Le même jour, l’ÉI fait exploser une mosquée chiite au Koweït : 27 morts. Le 31 octobre 2015, un avion russe à destination de Saint-Pétersbourg explose dans le Sinaï égyptien : 320 morts. Le 12 novembre 2015, l’ÉI commet un attentat-suicide en banlieue de la capitale libanaise : 43 morts. Le lendemain, c’est le carnage de Paris : 130 morts. Le 23 novembre 2015, l’ÉI fait exploser un autobus dans la capitale tunisienne : 13 morts.

L’ÉI, une occasion d’affaires

Né en Irak, l’ÉI n’est devenu puissant qu’après quitté ce pays pour la Syrie, bénéficiant là-bas des largesses des pétromonarchies, aveuglées par leur hostilité à l’égard de Bachar el-Assad.

Les dirigeants américains sont conscients que l’ÉI illustre le fiasco de leur intervention militaire au Moyen-Orient. Indéniablement, l’ÉI est né contre leur gré.

Toutefois, les dirigeants américains sont des gens pragmatiques. Très vite, ils comprennent que cette organisation terroriste constitue une occasion d’affaires pour leur complexe militaro-industriel.

La coalition anti-ÉI est dirigée par des pays producteurs d’armements. En bombardant l’ÉI de manière à limiter son expansion territoriale sans toutefois chercher à l’anéantir, les pays de cette coalition font perdurer l’insécurité qui amène les pays voisins à multiplier les contrats militaires auprès d’eux afin de se protéger.

Les trois principales sources de financement de l’ÉI sont les suivantes :
• la vente de pétrole extraite du califat,
• les taxes et impôts collectés auprès des résidents du califat, et la saisie des biens de ceux qui fuient à l’Étranger, et
• la vente des objets antiques pillés sur les sites archéologiques.

De ces trois sources de financement, la première est la seule sur laquelle il est facile d’agir; il suffit de bombarder les sites d’extraction pétrolière situés sur le territoire que contrôle l’ÉI.

Pourtant, la coalition anti-ÉI a très peu ciblé cet objectif. Entre aout 2014 et octobre 2015, la coalition a procédé à 10 600 frappes aériennes dont seulement 196 — moins de deux pour cent — ont ciblé les infrastructures pétrolières de l’ÉI.

Au contraire, en bombardant des villes syriennes densément peuplées, on a contribué à la pire crise migratoire depuis la Deuxième Guerre mondiale.

Si la coalition avait ciblé le pétrole, cela aurait causé très peu de pertes civiles et les coffres de l’ÉI seraient vides depuis longtemps.

Alors pourquoi ne l’a-t-on pas fait ? Pour plusieurs raisons.

Premièrement parce que l’objectif de la coalition n’a jamais été de détruire l’État islamique, du moins jusqu’à la récente série d’attentats terroristes en Occident.

Deuxièmement, parce ce qu’on ne voulait pas irriter la Turquie, principale bénéficiaire du pétrole de contrebande exportée à l’Étranger.

Troisièmement, pour ne pas nuire aux rebelles islamistes dits ‘modérés’.

Que viennent faire les autres milices islamistes là-dedans ?

C’est que les rebelles ne reçoivent pas de pétrole de l’Étranger; le pétrole consommé par leurs véhicules et leurs génératrices est du pétrole de contrebande provenant indirectement du califat. Sans le vouloir, ces rebelles enrichissent l’ÉI chaque fois qu’ils font le plein.

Si on détruisait tous les sites d’extraction pétrolière de l’ÉI, on paralyserait non seulement l’ÉI, mais également toutes les autres milices rebelles qui dépendent de son pétrole.

Bref, on arrêterait cette guerre, ce qui constituerait une catastrophe pour les marchands de canons qui dictent la politique étrangère de nos gouvernements.

Références :
Attentat de Sousse
Attentat revendiqué par l’EI, «un mode opératoire nouveau au Liban»
Au Koweït, 27 morts et 222 blessés dans un attentat anti-chiite dans une mosquée
Bataille de Mossoul (2014)
Crash de l’Airbus russe en Egypte : ce que l’on sait, ce qu’on ignore
Enemy of Enemies: The Rise of ISIL
État islamique (organisation)
Guerre Iran-Irak
Guerre d’Irak
Irak – La main mise des groupes américains
ISIS Has Lost 25 Percent of Territory It Once Held in Iraq, US Says
Isis Inc: how oil fuels the jihadi terrorists
Is Vladimir Putin right to label Turkey ‘accomplices of terrorists’?
L’État islamique – Une histoire violente
Maliki est responsable de la prise de Mossoul par Daech
Mosul commander was on vacation despite warnings of attack, report says
Un journal turc publie les images d’armes livrées par la Turquie aux djihadistes en Syrie

Parus depuis :
If the Castle Falls: Ideology and Objectives of the Syrian Rebellion (2015-12-21)
US-led airstrikes against Islamic State in Syria and Iraq – interactive (2016-01-08)
Frédéric Pichon : « L’avenir de l’Occident se joue en Syrie » (2017-03-10)
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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’ABC de la guerre syrienne (2e partie)

Publié le 14 décembre 2015 | Temps de lecture : 8 minutes

Importance géostratégique de la Syrie

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Au Moyen-Orient, qui dit guerre dit hydrocarbures.

Situés de part et d’autre du Golfe persique, le Qatar est rival de l’Iran dans l’exploitation d’un des principaux champs gaziers du monde, situé à cheval entre ces deux pays.

Le projet ‘sunnite’ du Qatar (en rouge sur la carte)

Le Qatar projetait la construction d’un gazoduc partant de ce pays et qui aurait traversé l’Arabie Saoudite, la Jordanie, la Syrie et la Turquie afin d’approvisionner l’Europe en gaz naturel.

Au Proche et au Moyen-Orient, ce trajet n’aurait traversé que des pays dont la population est majoritairement musulmane sunnite.

Désireuse de bénéficier des retombées économiques de la construction d’un gazoduc traversant son territoire et soucieuse d’avoir l’Europe à sa merci, la Turquie soutenait le projet qatari. De plus, cela lui aurait permis de s’affranchir de la Russie, responsable de 60% de ses approvisionnements en gaz naturel.

Le projet ‘chiite’ de l’Iran (en vert sur la carte)

De son côté, afin d’acheminer le gaz de ce même gisement à partir de son territoire, l’Iran projetait la construction d’un gazoduc traversant plutôt l’Irak et la Syrie. Le gaz naturel liquéfié aurait finalement atteint l’Europe par bateau, sans passer par la Turquie.

Ce projet ne traversait que des pays dont les dirigeants sont des musulmans chiites.

À l’époque où le président syrien Bachar el-Assad dirigeait son pays avec une main de fer, ces deux projets concurrents de gazoducs attendaient son approbation.

Le feu vert en 2010

Bachar el-Assad aurait pu autoriser les deux. Mais à la fin de 2010, son gouvernement décida de ne permettre qu’un seul projet, celui de son allié iranien. Cette décision était également un pied de nez à la Turquie, avec laquelle la Syrie entretient des relations conflictuelles depuis plus d’un demi-siècle.

Ce fut une grave erreur.

Cumulativement, au cours de la durée totale de son fonctionnement, le gazoduc qatari devait rapporter des revenus de l’ordre de centaines de milliards de dollars au Qatar. Furieux du refus syrien, les dirigeants de cette pétromonarchie décidèrent de renverser le régime de Bachar el-Assad.

À la merci de la Russie pour son approvisionnement en gaz naturel, l’Europe occidentale ne gagnait rien à se libérer de la Russie si c’était pour devenir dépendante du gaz iranien. Voilà pourquoi, les pays occidentaux, avec la complicité de la Turquie, décidèrent de soutenir discrètement les visées subversives des pétromonarchies.

Le printemps arabe en 2010-2011

Quelques semaines après le feu vert donné au projet de gazoduc iranien, éclate un événement totalement imprévu dont l’importance historique est considérable : le Printemps arabe.

Déclenchée en Tunisie le 17 décembre 2010, cette révolte se solde par la démission du chef d’État tunisien moins d’un mois plus tard, le 13 janvier 2011.

En janvier et février 2011, une série de manifestations d’une ampleur inégalée se déroulent en Égypte. Les manifestations les plus importantes de déroulent le vendredi — le jour de la prière chez les Musulmans — au sortir des mosquées.

En effet, l’Arabie saoudite utilise son influence sur le clergé égyptien pour transformer les prêches du vendredi en discours incendiaires où les imams incitent les fidèles à la révolte. Le 11 février 2011, le chef de l’État égyptien démissionne.

Comme une trainée de poudre, le Printemps arabe atteint la Syrie en mars 2011. Les premières manifestations antigouvernementales y sont organisées. Celle de Deraa, le 23 mars, est la première réprimée dans le sang; 50 à 100 opposants sont tués.

Le vendredi suivant, le 25 mars, le clergé sunnite de Syrie appelle les fidèles à la révolte; c’est le Jour de la colère. Quatre jours plus tard, le gouvernement syrien présente sa démission au président Bachar el-Assad (qui lui, demeure en poste).

Dans les mois qui suivent, les manifestations se succèdent, toujours réprimées brutalement par l’armée. Parallèlement, dès le mois d’avril, on assiste à l’apparition de groupes rebelles armés.

La guerre en Syrie

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Alors que le Printemps arabe piétine en Syrie, les pétromonarchies se voient obligées d’adopter une autre stratégie; celle d’y transformer ce début de guerre civile, en guerre par procuration où des milices financées par elles — provenant de n’importe où — combattront le régime de Bachar el-Assad.

En 2011, s’il était possible de parler de rebelles ‘modérés’, cela n’est plus possible aujourd’hui. Comme dans toute guerre qui s’éternise, les scrupules et principes de départ ont fait place depuis longtemps à une haine impitoyable; tous les moyens sont bons pour tuer l’ennemi.

À l’époque de la répression du Printemps arabe, la grande majorité des pertes civiles ont été causées par le régime de Bachar el-Assad. Cet argument a souvent été utilisé pour prouver la barbarie de ce dernier. En réalité, cela ne faisait que refléter la supériorité militaire du régime en ce début de guerre.

Si les avions, les bombes et les gaz toxiques de l’armée syrienne avaient été aux mains des rebelles — notamment ceux qui se sont ultérieurement joints à Al-Qaida ou à l’État islamique — ce serait eux qui auraient causé la majorité des morts parmi la population civile dès le début de la guerre.

Territoires contrôlés par les forces en présence

De nos jours, chaque fois qu’une ville ou qu’un village syrien tombe entre les mains des rebelles islamistes dits ‘modérés’, les Alaouites (le groupe confessionnel auquel appartient Bachar el-Assad) y sont systématiquement massacrés.

Contrairement à ce que soutient la propagande officielle de nos pays, la guerre en Syrie n’oppose pas le méchant régime de Bachar el-Assad à de bons rebelles luttant pour la démocratie parlementaire; elle oppose un régime brutal à des mercenaires étrangers pires que lui.

En excluant Al-Qaida et l’État islamique (dont on connait bien l’idéologie barbare), les autres milices rebelles, si elles prenaient le pouvoir, se proposent toutes d’implanter la charia (autrement, elles ne seraient pas financées par l’Arabie saoudite) et d’exterminer les Alaouites, soit 12% de la population syrienne (c’est-à-dire deux millions de personnes).

Évidemment, dans une telle éventualité, beaucoup d’Alaouites fuiraient à l’étranger. Mais ceux restés sur place seraient l’objet d’un génocide.

Dans un pays divisé — non pas par des rivalités interconfessionnelles — mais plutôt par des haines interconfessionnelles (attisées par des pays étrangers), la seule manière de pacifier ce pays est de le soumettre au joug d’un régime brutal. Or ce régime existe déjà, c’est celui de Bachar el-Assad.

En claquant des doigts, si on pouvait faire cesser cette guerre et tenir des élections demain, Bachar el-Assad serait réélu facilement parce que les dirigeants des milices rebelles sont soit des étrangers ou de parfaits inconnus.

Les pays occidentaux le savent très bien. Impuissants le renverser militairement, ils insistent pour que Bachar el-Assad quitte volontairement ses fonctions. Un vœu que le dirigeant syrien a ignoré jusqu’ici.

On peut remplacer l’homme. Mais remplacer son régime autoritaire signifie livrer le pays au chaos, à l’anarchie et au carnage.

Références :
Declassified Department of Defense Report (2012-07-30)
La Syrie, pays de tous les enjeux
Qatar-Turkey pipeline
Révolution tunisienne de 2010-2011
Syria’s Pipelineistan war

Parus depuis :
If the Castle Falls: Ideology and Objectives of the Syrian Rebellion (2015-12-21)
“Échanges entre militaires” : les révélations de Seymour Hersh sur la Syrie (2015-12-28)
Report on Syria conflict finds 11.5% of population killed or injured (2016-02-11)
Russia is the big winner in Syria’s flawed ‘truce’ (2016-02-12)
Des rebelles islamistes accusés de crimes de guerre (2016-07-05)
Revealed: the £1bn of weapons flowing from Europe to Middle East (2016-07-27)
Les forces françaises ont tué au moins 2 500 djihadistes de l’EI en Irak et Syrie (2016-12-13)
Syrie : la guerre des intérêts (2017-04-10)
DGSE, Espions, Secrets des Affaires, Crises mondiales (vidéo) (2018-04-07)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’ABC de la guerre syrienne (1re partie)

Publié le 12 décembre 2015 | Temps de lecture : 7 minutes

Présentation de la Syrie

La Syrie est un pays arabe situé au Moyen-Orient. Ce pays possède une superficie 185 180 km², soit l’équivalent du tiers de la France.

Environ 22% du territoire est désertique ou semi-désertique. Le reste est composé de pâturages (44,6%), de terres arables servant à des cultures provisoires (25,4%) et de terres agricoles permanentes (5,8%).

Depuis 1964, la superficie des terres arables a diminué de 34,9% à 25,4% en raison de la désertification.

En juillet 2014, le pays était peuplé de 17 millions de personnes, urbanisées dans une proportion de 57,7%. L’âge moyen y est de 23,8 ans en raison de l’importance démographique des jeunes de moins de quinze ans (32,5%). L’alphabétisation y est de 90% chez les garçons et de 80% chez les filles.

Les Arabes y forment 90,3% de la population. Le reste est composé de Kurdes, d’Arméniens et d’autres minorités ethniques.

L’État syrien, se voulant laïc, ne procède à aucun recensement confessionnel. Officieusement, on estime que les principales confessions religieuses sont les suivantes :
• 75,0% Musulmans sunnites
• 12,0% Alaouites (Musulmans chiites)
• 10,0% Kurdes (Musulmans à 80% sunnites)
•   5,4% Syriaques (Catholiques orthodoxes)
•   3,0% Druzes (Mulsulmans chiites)

Selon le CIA Word Factbook, en 2014, le secteur tertiaire (soit les services) représentait 62,9% du produit intérieur brut. Suivaient le secteur industriel avec 19% (pétrole, textile, agroalimentaire, tabac, phosphate, ciment, extraction des huiles alimentaires, assemblage automobile), et l’agriculture proprement dite avec 18,1% (blé, orge, coton, légumineuses, betterave à sucre, élevage du mouton, œufs, volaille et production laitière).

Le produit intérieur brut par personne était de 5 100$US en 2011, ce qui plaçait la Syrie au 165e rang mondial. Depuis, la situation s’est considérablement dégradée.

Les sanctions économiques internationales contre le régime de Bachar el-Assad ont fait chuter officiellement les exportations de 98%, passant de 11,3 milliards$ en 2010 à 185 millions$ en 2012. Toutefois, cela ne tient pas compte de la contrebande de pétrole dont l’importance est estimée entre 120 et 500 millions de dollars, selon les sources consultées.

Présentation des pays voisins de la Syrie

Carte de la Syrie

Au nord, le pays voisin est la Turquie. La Turquie et la Syrie entretiennent une relation conflictuelle pour différentes raisons, mais surtout depuis le rattachement en 1939 d’une province syrienne à la Turquie.

Cette bande de terrain prive la Syrie d’environ la moitié de son accès à la Méditerranée. Cette annexion est reconnue internationalement mais la Syrie ne l’a jamais acceptée.

Cette animosité se reflète par la nature des échanges commerciaux entre ces deux voisins, qui se limitent essentiellement de nos jours à la contrebande de pétrole.

À l’est et au sud-est, le pays voisin est l’Irak. Avant les sanctions économiques contre la Syrie, c’était en Irak que la Syrie expédiait la majorité de ses exportations.

Au sud, se trouve la Jordanie. Pays fragile, la Jordanie essaie de vivre harmonieusement avec tous ses voisins. Lorsqu’elle doit choisir, elle se range du côté du plus puissant.

À l’ouest, se trouvent le Liban et Israël. Celui-ci a annexé illégalement le Golan (le sud-ouest de la Syrie) en 1981 après l’avoir occupé pendant des années.

À l’époque où la Syrie était une puissance régionale, celle-ci faisait la pluie et le beau temps au Liban, n’hésitant pas à assassiner ou à faire tuer les dirigeants libanais qui ne lui convenaient pas.

C’est par le biais de la Syrie que l’Iran fait parvenir armes et financement à un mouvement terroriste chiite libanais appelé le Hezbollah. Comme beaucoup de mouvements qui font la promotion de l’Islam politique, le Hezbollah est à la fois un organisme caritatif et paramilitaire.

Guerre_syrienne_zUn peu moins de 200km de la frontière occidentale de la Syrie donne directement sur la Méditerranée. C’est sur cette rive qu’est construite — à Lattaquié, quatrième ville du pays — la seule base maritime russe en Méditerranée.

De plus, le port syrien de Tartous, à 60km plus au sud, accueille en permanence des navires de la flotte russe. C’est là que se trouve aussi une base de radars russes.

En aout et septembre derniers, la Russie a construit sa première base aérienne en Syrie, autour de l’aéroport de Jableh, une ville située à 25km au sud de Lattaquié, et qui est également un port maritime.

De plus, la Russie a entamé la construction d’une deuxième base aérienne. Celle-ci est située à Shayrat, à l’intérieur du pays, près de la troisième ville la plus populeuse (Homs) et à environ 100km de la capitale (Damas). Cette nouvelle base militaire protège ces deux villes et bloque l’avancée des milices de l’État islamique vers l’ouest.

Sur ses bases militaires, la Russie déploie ses missiles sol-air les plus sophistiqués, d’une portée de 400km et d’une précision remarquable. Dans les faits, depuis le déploiement récent de ces missiles, la Russie — allié du gouvernement syrien — a pris le contrôle de l’espace aérien du pays. Ses missiles peuvent également tirés à partir du sous-marin Rostov-on-Don, stationné à l’intérieur des eaux territoriales de la Syrie.

En comparaison, les bombardiers américains se ravitaillent sur des bases militaires turques situées en Turquie. Les États-Unis sont donc soumis au bon vouloir et aux caprices de leur hôte.

La Grande-Bretagne, entrée officiellement depuis peu dans la guerre syrienne, stationne ses bombardiers sur une base militaire britannique située sur l’île de Chypre. Celle-ci est à 187km des côtes syriennes. On voit donc l’avantage que possède la Russie d’avoir plusieurs bases militaires situées beaucoup plus près des zones de combat.

Quant à la France, ses bombardiers se ravitaillent sur le porte-avion Charles-de-Gaulle, stationné au large des côtes syriennes.* La position de la France, hostile à la fois au régime de Bachar el-Assad et à l’État islamique a pour conséquence que ses chasseurs doivent rester hors de portée des défenses antiaériennes syriennes en faisant le détour par la Turquie au nord ou par la Jordanie au sud.

L’influence générale de la Russie dans les affaires internationales n’est plus ce qu’elle était aux beaux temps de l’URSS. Toutefois, dans le cas particulier de la Syrie, ses avantages stratégiques sont tels qu’il ne peut avoir de résolution de la crise syrienne sans elle.

*Post-scriptum du 2016-01-12 : Le porte-avion Charles-de-Gaulle a quitté la Méditerranée; il est maintenant en route pour le golfe Persique. La Russie ayant pris le contrôle de la presque totalité de l’espace aérien de Syrie, il devenait plus prudent pour la France (hostile à Bachar-el Assad), d’aller œuvrer en Irak.


Ce redéploiement est également un autre signe annonciateur de la reconquête de Mossoul (la deuxième ville irakienne, actuellement aux mains de l’État islamique).

Références :
Chute de près de 100% du commerce extérieur syrien
CIA World Factbook – Syria
La Russie a frappé des cibles en Syrie pour la première fois depuis un sous-marin
La Russie a installé une deuxième base militaire en Syrie
Le porte-avions français Charles de Gaulle est entré en action en Syrie et en Irak
Les Kurdes, un peuple éclaté entre quatre pays
Les missiles S-300 russes et la neutralisation de la suprématie militaire américaine
Russia is building a second military airbase in Syria
Russia’s Expanding Military Presence in Syria
Russian S-400 missiles turn most of Syria into no-fly zone, halt US air strikes
Syrie

Parus depuis :
Le chef du Pentagone en visite pour la première fois sur le « Charles-de-Gaulle » (2015-12-19)
Opérations aériennes contre l’EI depuis le porte-avions « Charles-de-Gaulle » (2016-09-30)

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Écrit par Jean-Pierre Martel