Fabergé, un joaillier académique

Publié le 11 septembre 2014 | Temps de lecture : 4 minutes
Coupelle (néphrite, or, saphirs et perles) et Gobelet & couvercle (néphrite, vermeil et rubis)
Charka (ou coupe à vodka) en héliotrope, or, émail et rubis
Étui à cigarettes (or et rubis)
Sceau (bowenite, or, vermeil, perles et calcédoine)
Calendrier perpétuel (néphrite, or, vermeil, émail et agate)
Broche Scarabée (grenat, or, diamants, rubis, émail et argent)
Bouton de sonnette (néphrite, or, argent, rubis et diamants)
Aubépine (néphrite, calcite rubanée, or, calcédoine, aventurine et corail)
Encrier (néphrite, or, vermeil, émail et cristal de roche)

Entre 1882 — l’année où il vendit un premier bijou à l’épouse du tsar Alexandre III — et 1918, soit l’année où il cesse toute production et s’enfuit en Suisse, il s’écoula 36 ans.

Il aura donc fallu à Fabergé moins de quatre décennies pour devenir le joaillier le plus célèbre de tous les temps. Et cette réputation, il l’a acquise non pas en faisant carrière dans la capitale culturelle de son temps — Paris, où toutes les modes étaient lancées — mais à partir de Russie, un pays qui s’était ouvert à la civilisation occidentale à peine quelques siècles plus tôt.

En plus de son centre de production à Saint-Pétersbourg, il n’eut de succursales qu’à Moscou (1887), Odessa (1901), Londres (1903) et Kiev (1906-10). Essentiellement, c’est donc un créateur d’Europe de l’Est disposant d’un comptoir à Londres, ce dernier étant plus accessible pour la famille royale britannique et les riches clients américains du joaillier.

À l’opposé de son contemporain Lalique — connu aujourd’hui comme verrier, mais qui devint célèbre d’abord à titre de bijoutier Art Nouveau — Fabergé n’est pas un innovateur.

Si Fabergé est capable de fantaisie et d’imagination, s’il peut s’illustrer par la virtuosité de son art — notamment par l’utilisation de 142 teintes d’émail, un record inégalé — il n’invente pas un style à lui dans ses compositions. Il pige çà et là dans le répertoire stylistique de ce qui est déjà connu.

Conséquemment, s’il est permis de parler de peintres « académiques », souvent eux aussi brillants et doués, on peut alors utiliser ce qualificatif en bijouterie : il convient parfaitement à Fabergé.

Essentiellement, Fabergé crée des objets d’une absolue perfection technique, parfois d’un luxe inouï, aptes à séduire l’aristocratie conservatrice de son temps.

Beaucoup de ses rivaux, desservant la même clientèle richissime que lui, n’ont pas su résister à l’apothéose du kitch de l’époque. Au contraire, Fabergé a toujours fait preuve d’un classicisme de bon goût qui permet à ses créations de bien traverser le temps.

Au sommet de sa gloire, Fabergé employait plus de 500 employés. Son entreprise produisit au total 200 000 objets d’art, bijoux et articles d’argenterie.

Sa production s’étend des œuvres d’art (que sont ses œufs pascals) jusqu’aux objets du quotidien : tabatières, calendriers, bibelots en forme d’animaux ou de plantes, bonbonnières, et jusqu’à des boutons de sonnette.

L’infime partie de ses créations qui a réussi à se rendre jusqu’à nous, atteint actuellement des prix inégalés sur le marché de l’Art. Un œuf impérial qu’on croyait perdu — et qui a été retrouvé cette année — se serait vendu pour vingt millions de dollars.

Il faut donc remercier le Musée des Beaux-Arts de nous offrir la chance d’observer de près les précieuses créations du bijoutier, créations à ce point merveilleuses qu’on ne remarque pas la scénographie par endroit insipide destinée à les mettre en valeur.

S’il vous est possible de voir cette exposition remarquable, je vous invite à le faire le plus tôt possible : elle se termine le 5 octobre 2014.

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5, objectifs Voigtländer 25 mm F/0,95 (la sixième photo) et M.Zuiko 12-40 mm F/2,8 (les autres photos)
1re photo : 1/60 sec. — F/5,6 — ISO 4000 — 25 mm
2e  photo : 1/80 sec. — F/5,6 — ISO 1250 — 40 mm
3e  photo : 1/100 sec. — F/5,0 — ISO 3200 — 40 mm
4e  photo : 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 500 — 40 mm
5e  photo : 1/80 sec. — F/5,0 — ISO 1600 — 40 mm
6e  photo : 1/200 sec. — F/2,0 — ISO 200 — 25 mm
7e  photo : 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 800 — 40 mm
8e  photo : 1/80 sec. — F/5,0 — ISO 1600 — 40 mm
9e  photo : 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 1000 — 36 mm


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Écrit par Jean-Pierre Martel