Abus de téléphonie à la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ)

13 septembre 2012

Il y a quelque temps, j’ai reçu un avis de convocation pour le renouvellement de mon permis de conduire. La photo sur mon ancien permis a été prise il y a quatre ans et voilà pourquoi je dois prendre un rendez-vous.

Sur cet avis, on m’invite à communiquer à la SAAQ en composant le 514-873-7620. Si vous désirez obtenir un permis plus (qui sert également de pièce d’identité pour traverser la frontière américaine en automobile, en train ou en autobus), voici les douze étapes à franchir.

Pour finalement parler à un être humain, il vous faudra environ cinq minutes que vous passerez à écouter 33 options parmi lesquels vous aurez à choisir :
• au menu principal, le choix de la langue (2 possibilités)
• au sous-menu, cinq choix possibles
• au sous-sous menu, six choix possibles
• au sous-sous-sous menu, deux choix possibles
• au sous-sous-sous-sous-menu, quatre choix possibles
• au sous-sous-sous-sous-sous-menu, quatre choix possibles
• au sous-sous-sous-sous-sous-sous-menu, trois choix possibles
• au sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-menu, deux choix possibles
• au sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-menu, vous aurez à taper votre numéro de téléphone
• au sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-menu, deux choix possibles
• au sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-menu, vous aurez à taper le numéro de dossier qui apparait sur l’avis de convocation
• au sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-sous-menu, troix choix possibles.

À l’avant-dernière étape, il vous faudra donc taper votre numéro de dossier. Celui-ci débute toujours par la première lettre de votre nom de famille. Sur un téléphone à clavier, vous avez ces touches qui indiquent la correspondance entre des lettres (ex. : A B C) et une touche correspondante (ex. : le « 1 » dans ce cas-ci).

Non seulement ce n’est pas le cas sur les téléphones portables, mais dans le cas du mien, celui-ci n’accepte que des chiffres. J’ai beau taper « M » (pour Martel), le téléphone ne fait rien. Pendant ce temps, le système vocal de la SAAQ s’impatiente : devant votre mutisme apparent, il insiste pour obtenir une réponse. Pendant ce temps, une imagette sur votre téléphone vous signale que la pile est passée de « pleinement chargée » à « chargée aux deux tiers ».

Sachez qu’à la place, pouvez taper n’importe quel chiffre et finalement, lorsque vous parlerez à un préposé, vous pourrez corriger l’erreur.

Ma suggestion à la SAAQ est simple. Déterminez les principales raisons pour lesquelles les gens vous appellent. Parmi les milliers d’appels quotidiens, est-ce possible que très peu contactent la SAAQ au sujet du remisage de leur voiture ? Si c’est effectivement peu fréquent, pourquoi en faire un des cinq choix du premier sous-menu ?

Si, comme je le pense, la très grande majorité des personnes appellent pour obtenir ou renouveler leur permis de conduire, la marche à suivre pourrait se faire en quatre étapes :
• le choix de la langue,
• l’option de l’obtention ou du renouvellement du permis (taper 1), les coordonnées de la SAAQ (taper 2) et autres raisons (taper 3),
• la saisie du numéro de téléphone,
• la saisie du numéro de dossier (sauf la première lettre).

De plus, si peu importe les choix effectués par l’appelant, on aboutit aux mêmes préposés, pourquoi obliger des millions de personnes à écouter annuellement des dizaines d’options possibles (dont la presque totalité ne s’applique pas à leur cas) et obliger les préposés à lire toutes les options choisies alors qu’il est beaucoup plus simple d’écouter ce que les gens ont à dire ?

Se parler et s’écouter les uns les autres, c’est probablement extrêmement démodé. J’en conviens. Mais cela a très bien fonctionné pendant des millénaires. Alors pourquoi ne pas continuer quelques années de plus ?

À mon avis, la téléphonie est probablement la seule technologie au monde où l’inefficacité triomphe systématiquement. Je ne serais pas surpris d’apprendre que l’absentéisme lié à la maladie entraine moins d’heures de travail perdues annuellement que tout ce temps à écouter des choix de réponses et à naviguer dans la hiérarchie complexe des menus et sous menus de certains systèmes téléphoniques.

3 commentaires

| 2012-2014 (années Marois), Politique québécoise | Mots-clés : , , | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Raoul

12 septembre 2012
James Thiérrée

Jusqu’au 13 septembre inclusivement, la TOHU présente à Montréal le spectacle solo Raoul de l’auteur, metteur en scène, et acteur James Thiérrée.

Celui-ci est un artiste exceptionnel. Essentiellement basé sur la pantomime, son spectacle sans parole fait aussi appel à de la gymnastique, à des mouvements de danse de rue, à des marionnettes géantes, à des ombres, à de la magie, bref à tout ce qu’il est possible d’accomplir avec le corps, quelques accessoires, de même qu’un éclairage et une trame sonore expressives.

Même si ce spectacle peut se diviser en différents numéros, la virtuosité remarquable de l’artiste est constamment au service du récit poétique de l’auteur.

À ceux qui n’ont pas encore vu ce spectacle, il ne vous reste donc que deux soirs pour en profiter.

Très chaudement recommandé.

Détails techniques de la photo : Olympus OM-D e-m5, objectif Lumix 12-35mm F/2,8 — 1/80 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 35 mm

Laissez un commentaire »

| Culture, Spectacle | Mots-clés : , , | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


La responsabilité de l’attentat terroriste au Métropolis

11 septembre 2012
Funérailles de Denis Blanchette

Préambule

À l’époque où j’étudiais à l’université de Montréal, je m’étais assis un jour à la table d’un de mes professeurs. Ce dernier — dont je ne me rappelle plus du nom — avait les traits et la peau pigmentée des peuples du sous-continent indo-pakistanais.

Nous avions été rejoints par un de ses amis. Très tôt, ce dernier s’était lancé dans une tirade hostile à mon égard, me reprochant — en tant qu’Occidental blanc — d’avoir profité et d’être complice (donc responsable) de l’impérialisme anglais qui avait tant humilié, pillé, et torturé son peuple.

Étudiant, j’étais plutôt nationaliste. Il m’apparaissait donc étonnant qu’on puisse m’accuser des méfaits de l’impérialiste britannique. Estomaqué par l’accusation, je n’avais rien trouvé à lui répondre : pour moi, l’incident se résumait à un manque de politesse, de la part d’une personne frustrée.

Dès cette époque et depuis ce temps, j’ai toujours refusé de porter quelque responsabilité que ce soit dans les méfaits commis par des inconnus avec lesquels je partage certaines caractéristiques. Ce n’est pas parce que je suis homme, blanc, et francophone, que je mérite d’être blâmé par un crime commis par un autre homme, un autre blanc ou un autre francophone. Lui c’est lui, et moi c’est moi.

Voilà pourquoi j’ai toujours été complètement imperméable au discours de certaines féministes à l’effet que tous les hommes seraient des irresponsables, des violeurs potentiels, et des abuseurs-nés. Et j’ai toujours fait la sourde oreille à ceux qui voudraient me convaincre que je suis complice de tous les abus contre lesquels je ne m’élève pas.

C’est donc avec un manque total de sympathie que j’ai lu les thèses de ceux qui cherchent à trouver des responsabilités collectives à l’attentat terroriste au Métropolis.

C’est la faute des autres

Dans mon billet du 7 septembre, j’ai déjà parlé de la thèse stupide d’un ex-ministre libéral à l’effet que les Péquistes « ont couru après ».

D’autre part, sous le prétexte que le tireur au Métropolis était non seulement anglophone, mais se prétendait être le bras armé du réveil des Anglophones, certains y voient une responsabilité de ces derniers ou de leurs institutions. À mon avis, une telle accusation relève de la chasse aux sorcières.

C’est ainsi que la Société Saint-Jean-Baptiste blâme les média canadiens-anglais de diffuser des commentaires haineux de lecteurs qui ne se gênent pas de faire des parallèles entre le mouvement indépendantiste et les mouvements fascistes, voire néo-nazis. Malheureusement, la SSJB elle-même est bien connue pour ses excès langagiers comme l’accusation lancée à tous les députés québécois au gouvernement fédéral d’être des « traîtres ».

Et puisqu’il y a probablement aussi des déséquilibrés chez les partisans de l’indépendance du Québec, que dirait la SSJB si l’attentat avait été perpétré par l’un d’eux contre un rassemblement libéral ou caquiste ?

C’est de notre faute

À l’autre extrémité du spectre des opinions, ils y a les « auto-flagellateurs » c’est-à-dire ceux qui croient que nous portons tous la responsabilité de cet attentat.

Le philosophe Nicolas Lévesque déclare : « Le délire de cet homme n’aurait pas pris cette forme-là si le Québec était une société où on pouvait vraiment discuter. Nous sommes tous responsables : les intellectuels qui n’osent prendre leur place, les médias qui ont abandonné les idées, les gouvernements, les universités, les Québécois qui n’osent plus discuter à table.»

Prétendre que tout le monde est responsable, cela revient à dire que personne ne l’est véritablement.

Si la responsabilité de tous les crimes sur Terre sont la faute des collectivités humaines dans lesquels ces crimes sont perpétrés, les criminels sont alors des marionnettes dont les comportements ne sont que la conséquence d’un avilissement dont toute la société est responsable. Et leurs victimes ne sont que les cibles aléatoires de leurs bourreaux.

Quelle conception masochiste du monde…

Conclusion

Pour moi, les choses sont simples. Il y a une cible : un rassemblement de sympathisants péquistes. Il y a un tueur, un mort et un blessé. C’est tout. Si d’autres attentats surviennent, on cherchera des similitudes, des causes communes et des solutions. Mais pour l’instant, on ne cherchera pas à tirer des lois générales d’un fait particulier.

Les média anglophones ne sont pas responsables. Les Anglophones du Québec ne sont pas responsables. La société québécoise n’est pas responsable. Je ne suis pas responsable et vous ne l’êtes pas non plus. Pour l’instant, seul le tueur l’est. Dans quelle mesure est-il lui-même responsable de ses actes ? C’est ce que son procès nous révélera.

Au-delà du tueur, tout au plus pourra-t-on blâmer les lacunes de la protection de Mme Marois par la Sécurité du Québec.

Références :
Attentat au Métropolis: la SSJB pointe les médias anglophones
L’aveuglement partisan d’un imbécile
Lettre – Nous ne sommes pas tous responsables
«Nous sommes tous responsables» de l’attentat du Métropolis

Paru depuis : Au Métropolis, une police de pee-wee (2022-12-02)

Détails techniques de la photo : Olympus OM-D e-m5, objectif M.Zuiko 40-150mm R — 1/320 sec. — F/5,6 — ISO 200 — 108 mm

7 commentaires

| 2012-2014 (années Marois), Politique québécoise | Mots-clés : , | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


L’aveuglement partisan d’un imbécile

7 septembre 2012
Funérailles de Denis Blanchette

Il y a des jours où je me rends compte que je ne devrais pas consulter les journaux.

Je suis furieux. Je viens de lire les commentaires de l’ex-ministre libéral Serge Simard relativement à la tuerie au Métropolis.

L’ex-ministre, qui s’est déjà fait remarqué pour avoir félicité le maire de la ville de Saguenay pour ses propos xénophobes, a accusé le Parti Québécois d’être responsable de la mort cette semaine de Denis Blanchette au Métropolis.

Sa déclaration exacte est : « Les derniers mois, on a cultivé la violence et certains partis à l’Assemblée nationale ont favorisé la violence. Ça, c’est regrettable parce que, regardez qu’est-ce que ça fait; ça amène des individus qui ont des difficultés mentales à poser des gestes semblables à ceux qui ont été posés.»

Si nous avions affaire ici à un partisan péquiste qui avait tenté de faire bruler vif des centaines de partisans libéraux, je comprendrais la réaction de l’ex-ministre. Mais ce n’est pas le cas. Pas plus que la tuerie à l’Assemblée nationale en 1984 n’était causée par un Indépendantiste.

Puisque l’ex-ministre y fait allusion, parlons de la violence de la crise étudiante. Ce conflit social est né d’une hausse substantielle des frais de scolarité décrétée dans le dernier budget du gouvernement Charest.

Cette mesure ne découle pas d’une promesse électorale explicite. Il ne s’agit donc pas d’un choix de société — c’est-à-dire d’un mandat que le peuple a confié au Parti libéral, réélu sur la base de cette promesse — mais simplement d’un choix budgétaire.

Peu importe la valeur et la pertinence de cette décision, un choix budgétaire n’est qu’un choix budgétaire. Rien ne justifie que l’État s’entête et provoque un chaos social à moins que la survie de la Nation passe absolument par la mise en œuvre de cette mesure, ce qui n’est pas le cas ici.

Le Parti libéral a été élu en 2008 par 42% des votes exprimés lors d’un scrutin dont le taux de participation n’était que de 57%; conséquemment, seulement 24,6% des citoyens adultes ont donc voté pour cette formation politique (comme 23,8% de ces derniers ont voté pour le PQ mardi dernier).

Aveuglé le succès de sa stratégie électorale et heureux d’être enfin majoritaire à l’Assemblée nationale, le gouvernement Charest a oublié l’essentiel : la faible caution populaire qui le privait de l’autorité morale de chambarder quoi que ce soit.

Plutôt que de reculer — comme il l’a fait dans le dossier aujourd’hui oublié de la privatisation du Mont-Orford — le gouvernement s’est entêté et à répondu à la bruyante désobéissance civile des étudiants en déchaînant les pouvoirs répressifs de l’État.

Loin de moi l’idée d’excuser les méfaits commis à l’occasion des protestations étudiantes. Mais le gouvernement Charest porte une lourde part de responsabilité dans le climat social qui s’est installé au Québec depuis quelques temps.

Même le port symbolique d’un petit carré de tissus coloré représentait à ses yeux un geste subversif et un acte violent. Et dans sa rhétorique belliqueuse, l’État s’en prenait verbalement — non pas aux Témoins de Jéhovah et aux Communistes, comme sous le gouvernement de Maurice Duplessis — mais aux « Carrés rouges » et aux anarchistes. Sans le pouvoir rassurant des tribunaux, le Québec aurait reculé 60 ans en matière de droits civiques.

C’est donc pour moi un sujet de scandale qu’un ex-ministre xénophobe, répudié par ses électeurs, ait l’audace de tenter d’excuser un acte terroriste commis une fois de plus par un défenseur armé de l’unité canadienne, et tente de récupérer cet attentat à des fins politiques par un raisonnement aussi tortueux que faux.

Références :
Affaire de la privatisation du Mont-Orford
Attentat au Métropolis : la SSJBM met en cause la presse anglophone
Denis Lortie
Serge Simard salue le courage du maire Jean Tremblay

Sur le même sujet : La responsabilité de l’attentat terroriste au Métropolis

Détails techniques de la photo : Olympus OM-D e-m5, objectif M.Zuiko 40-150mm R — 1/320 sec. — F/5,6 — ISO 200 — 108 mm

Laissez un commentaire »

| 2012-2014 (années Marois), Politique québécoise | Mots-clés : , | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Interprétation des résultats du scrutin québécois de 2012

6 septembre 2012

Le pragmatisme de l’électeur

L’opinion favorable selon laquelle le gouvernement Charest a bien géré l’économie québécoise est tellement ancrée dans l’esprit des Québécois, que le Parti libéral aurait été très certainement reporté au pouvoir mardi dernier s’il n’avait pas subi la concurrence d’un autre parti fédéraliste (la Coalition avenir Québec).

Pourquoi un si grand nombre d’électeurs préfèrent-ils voter pour un parti corrompu à l’os ? Tout simplement parce qu’ils croient qu’ils y ont personnellement intérêt.

La corruption représente toujours une injustice envers l’entrepreneur honnête et un gaspillage des fonds publics parce qu’elle limite la concurrence au bénéfice des contributeurs à la caisse du parti au pouvoir. Toutefois, pour de nombreux électeurs, ce jugement moral défavorable ne fait pas le poids devant des considérations pragmatiques.

Lorsqu’un parti au pouvoir est en mesure de prouver aux contribuables qu’ils deviendront riches s’ils acceptent de fermer les yeux sur des petites pratiques moralement discutables, beaucoup d’entre eux préféreront ne pas s’en offenser.

En somme, contrairement au scandale des commandites, la corruption libérale a été commercialisée comme un mal bénéfique à chacun d’entre nous. Comme s’il s’agissait de payer des honoraires nous permettant de bénéficier de l’expertise de gestionnaires hors du commun. On doit donc reconnaître ici le génie des stratèges libéraux.

Le silence étonnant du Parti québécois

À aucun moment important de la campagne électorale, le Parti québécois n’a critiqué le bilan économique du gouvernement Charest. Comme si le PQ lui-même était d’accord pour reconnaître que le Parti libéral avait fait un bon travail. Or la perception qu’ont les électeurs du bilan économique des Libéraux était la clé du pouvoir pour le PQ.

Seule la CAQ a présenté l’envers de la médaille. Mais sa voix n’a pas été entendue parce qu’elle ne fut relayée par personne. De plus, j’ai été estomaqué d’entendre le président de cette formation politique faire tout un drame d’une paire de billets de spectacle donné par un entrepreneur véreux à une ministre libérale alors que par exemple, un contributeur à la caisse du parti libéral a obtenu sans appel d’offres une série de contrats totalisant 360 millions$ — vous avez bien lu : un tiers de milliards$ sans appel d’offres — pour obtenir 120 place pendant 25 ans dans un foyer pour personnes âgées situé dans la région de Québec.

Madame Marois a bien souligné qu’en tant que ministre des Finances d’un gouvernement péquiste, elle avait présenté en 1999 un budget qui dégageait un surplus de 500 millions$. Mais qu’en est-il du bilan global du gouvernement Charest ? Pas un mot de la part du PQ.

Si le PQ est incapable de dire fièrement que la croissance économique du Québec a dépassé la moyenne canadienne au cours de neuf des dix dernières années du gouvernement péquiste de Lucien Bouchard et de Bernard Landry, qui le dira ?

Par contre, si le PQ ne souligne pas que sous les Libéraux de Jean Charest, la croissance économique du Québec a été inférieure à la moyenne canadienne de 2003 à 2008, comment les Québécois l’apprendront-ils ? Et la belle performance de 2008 à 2011 dont se vante M. Charest (4,7% au Québec vs 3,5% pour l’ensemble du pays), qui dira que cet avantage d’un pour cent sur trois ans (0,3% annuellement) n’a pas été suffisant pour réparer les dommages subis de 2003 à 2008 ? Pas le PQ, apparemment.

Pourtant, c’est ce qui a fait chuter le Québec du quatrième rang canadien en 2003, à l’avant-dernier rang du pays actuellement (devant l’Île-du-Prince-Édouard) quant au revenu disponible par personne (comme le soulignait si justement la CAQ).

Au cours de la récente crise économique, la Caisse de dépôt et de placement a perdu 25% de la valeur de ses actifs, comparativement à 18,4% pour la moyenne des grandes caisses de retraite canadiennes. C’est une perte de 40 milliards$ de nos épargnes en vue de notre retraite. Cette perte colossale, apparemment, n’émeut pas le PQ.

Lorsque la Parti libéral a pris le pouvoir en 2003, le portefeuille de la Caisse comprenait 20% d’actions québécoises (si ma mémoire est bonne). En 2007-2008, cette proportion avait chuté à 12%. Des milliards$ de nos épargnes servaient à créer des emplois ailleurs qu’au Québec. Pourquoi ? Parce que la caisse préférait spéculer sur les rendements extraordinaires du « papier commercial » plutôt que ceux plus faibles des entreprises d’ici. Au moment de la crise, la Caisse possédait à elle seule le tiers de tous les titres toxiques détenus au Canada (13 milliards$ sur 30 milliards$). Je ne peux pas croire que le PQ n’y voit pas matière à scandale et si oui, pourquoi elle n’a pas cru bon le rappeler aux électeurs.

Conclusion

Du strict point de vue économique, le gouvernement Charest est le plus incompétent que le Québec ait connu depuis quarante ans. Mais en l’absence de critiques à ce sujet, un nombre appréciable d’électeurs ont pensé qu’il était dans leur intérêt de voter pour le Parti libéral. Conséquemment, le PQ a été élu à la tête d’un gouvernement minoritaire.

Faut-il s’en étonner ?

Laissez un commentaire »

| 2003-2012 (années Charest), Élection québécoise de 2012 | Mots-clés : , | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Le gouvernement à l’essai

5 septembre 2012


 
Tout comme le Parti libéral en 2008, le Parti Québécois a été porté hier au pouvoir par une minorité de l’électorat. Il y a quatre ans, Jean Charest avait recueilli 42,8% des voix : hier Pauline Marois a obtenu 31,9% des voix.

Lorsqu’on tient compte du taux de participation (57,4% en 2008 et 74,6% hier), le Parti libéral avait formé un gouvernement majoritaire avec l’appui de 24,6% des personnes aptes à voter, alors que le Parti québécois formera un gouvernement minoritaire grâce à 23,8% de la population adulte.

PQ PLQ CAQ QS etc.
2012 – Pourcentage des votes 31,9% 31,2% 27,1% 6,0% 3,8%
2012 – Pourcentage de l’électorat 23,8% 23,2% 20,2% 4,5% 2,8%
2008 – Pourcentage des votes 35,2% 42,8% 16.4% 3,8% 1,9%
2008 – Pourcentage de l’électorat 20,2% 24,6% 9,4% 2,2% 1,1%

Note : dans le tableau ci-dessus les données dans la colonne de la CAQ sont celles de la CAQ (en 2012) et de l’ADQ (en 2008).

 
Diriger un gouvernement minoritaire, ce n’est pas ce que souhaitait le PQ, mais c’est la meilleure chose qui pouvait lui arriver dans le contexte actuel.

Le PQ stagne aux alentours de 33% dans les intentions de vote dans toutes les élections générales depuis une décennie. Tout au long de la récente campagne électorale, le PQ a fait du surplace. On peut même dire que sans la CAQ, le Parti libéral aurait été réélu hier soir.

La raison est simple. La grande majorité des Québécois sont en faveur du maintien du Québec au sein de la fédération canadienne. Les mois qui viennent sont une occasion pour le PQ d’apprivoiser les Québécois, très majoritairement fédéralistes, donc méfiants à l’égard d’un parti indépendantiste.

Parce que le talon d’Achille du PQ, c’est l’empressement. Si le PQ s’était retrouvé à la tête d’un gouvernement majoritaire, ses militants les plus ardents l’auraient pressé à s’engager dans des réformes controversées qui auraient handicapé sa réélection au scrutin d’après.

Mais un gouvernement minoritaire est un gouvernement condamné à se faire aimer. S’il est vrai que ses adversaires politiques ont intérêt à ce qu’il se trompe, ils n’ont pas intérêt à voter en faveur de ses erreurs.

Il est donc prévisible que les projets de loi adoptés l’Assemblée nationale seront des mesures aimables, susceptible de rallier malgré eux les adversaires politiques du gouvernement.

Ce gouvernement n’imposera le bâillon que pour les raisons pour lesquelles cette mesure draconienne a été conçue, soit pour faire taire une minorité bruyante qui fait obstacle à l’intérêt national et à la volonté du peuple.

Un allié libéral de mauvais gré

Le sort de ce gouvernement minoritaire péquiste sera facilité par une opposition officielle décapitée. Tant que le Parti libéral n’aura pas trouvé un successeur à M. Charest (battu dans son propre comté), cette formation politique n’a pas intérêt à provoquer la chute du gouvernement et conséquemment, à déclencher des élections précipitées.

Le Parti libéral devra condamner les mesures gouvernementales… tout en votant pour elles à chaque fois que le gouvernement transformera le projet de loi en une motion de confiance. Rappelons qu’un projet de loi se transforme en motion de confiance lorsque le gouvernement menace à l’avance de démissionner si un projet de loi devait être rejeté par l’Assemblée nationale.

On peut imaginer la frustration des députés libéraux au cours des mois qui viennent à chaque fois que cela se produira.

S’il est habile, le gouvernement actuel s’empressera à accorder l’immunité aux personnes qui voudront témoigner à la Commission Charbonneau (sur la corruption dans l’industrie de la construction). Jusqu’ici, les témoins qui nomment des personnes ou des entreprises à cette Commission, s’exposent à être poursuivies pour diffamation. Avec un projet de loi qui garantit l’immunité des témoins, les langues se délieront.

Pour favoriser l’adoption d’un tel projet de loi, le gouvernement Marois pourra compter sur l’appui de la Coalition avenir Québec (deuxième parti d’opposition), heureuse de contribuer au déclin du Parti libéral et d’augmenter ainsi sa popularité à ses dépens.

D’ici à ce que Mme Marois se sente suffisamment confiante pour déclencher de nouvelles élections afin d’obtenir un mandat majoritaire, le gouvernement péquiste pourra donc compter sur une opposition officielle qui collaborera officieusement avec elle par dépit.

La CAQ, un trésor à piller

Aucun parti politique n’a le monopole des bonnes idées. Le PQ serait sage de regarder attentivement les promesses électorales de ses rivaux pour y voir des mesures à adopter.

Je l’ai dit et je le répète : la promesse de la CAQ de donner un médecin de famille à chaque québécois est une de ses bonnes idées.

Il est inconcevable que le quart de la population québécoise soit privé de l’accès à des soins de première ligne et, conséquemment, doive choisir entre endurer son mal ou attendre des heures pour être soigné à l’urgence d’un hôpital ou dans une clinique sans rendez-vous. La promesse de la CAQ respecte un droit fondamental : celui du droit à la santé.

L’idée de forcer chaque médecin à prendre en charge un nombre fixe de 1 000 patients était simpliste mais l’intention de fond était louable. En réalité, il faut que l’État s’entende avec la corporation professionnelle et les syndicats de médecins pour augmenter la charge de travail moyenne des omnipraticiens de manière à ce que tout le monde ait accès à un médecin de famille, prévoir un pourcentage minimal de rendez-vous consacrés aux urgences et adopter des mesures accessoires — plus précisément la délégation d’actes — qui permettent d’alléger la tâche des médecins et d’éviter d’allonger les délais pour obtenir un rendez-vous.

Bref, réaliser les meilleures promesses des partis rivaux est un moyen de les priver de munitions lors d’un prochain scrutin et de diminuer les raisons de voter pour eux.

Mme Marois pourrait aussi songer à la possibilité de répéter le coup d’éclat du Premier ministre Robert Bourassa qui, en 1970, avait nommé Jean Cournoyer, ministre du travail quelques mois plus tôt dans le gouvernement d’un parti rival, à ce même poste dans son propre cabinet nouvellement élu.

La Première ministre pourrait donc offrir un poste ministériel à certaines vedettes caquistes. Ceux-ci auront le choix entre réchauffer les bancs de la deuxième opposition officielle et souffrir de son manque de visibilité ou, dès maintenant, travailler au progrès du Québec dans un gouvernement d’union nationale.

S’ils sont en nombre suffisant, ces transfuges pourraient même donner au PQ ce qui lui manque pour former un gouvernement majoritaire.

Conclusion

Privés du mandant de s’aventurer dans des réformes importantes, les gouvernements minoritaires représentent des gouvernements faibles, condamnés à se faire aimer du peuple ou à disparaitre.

Pour diriger l’État en dépit des pièges qui leur tendent leurs ennemis, ces gouvernements doivent faire preuve d’habilité et de diplomatie afin d’unir la population derrière eux et ainsi faire hésiter ceux qui voudraient replonger le Québec dans une nouvelle élection.

De tous les partis politiques, le PQ est celui qui possède le plus de gens dont l’intelligence, l’habilité et la ruse sont capables de lui permettre de naviguer dans les eaux tortueuses d’un gouvernement minoritaire.

Les mois qui viennent s’annoncent donc très intéressantes pour ceux qui s’intéressent à l’actualité politique au Québec.

Détails techniques de la photo : Olympus OM-D e-m5, objectif M.Zuiko 40-150mm R — 1/250 sec. — F/5,6 — ISO 2000 — 150 mm

Laissez un commentaire »

| 2003-2012 (années Charest), Élection québécoise de 2012, Politique québécoise | Mots-clés : , | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Les résultats imprévisibles de l’élection québécoise du mardi 4 septembre 2012

1 septembre 2012

Lorsque le Parti québécois a été élu pour la première fois en 1976, les Québécois francophones étaient sous le choc d’un fait divers qui avait passionné l’opinion publique.

Dans les mois qui avaient précédé cette élection, on avait appris que la Canadian Air Transport Security Authority (c’est-à-dire la régie fédérale des transports aériens) avait émis une directive interdisant à un pilote et à un contrôleur aérien, tous deux francophones, de se parler en français entre eux. Les contrevenants s’exposaient à des pénalités et, ultimement, au congédiement. Je crois comprendre que, de nos jours, cette pratique est universelle : les communications dans le transport aérien international se font toujours en anglais, même en France. Je compte sur les lecteurs européens de ce blogue pour me corriger si je me trompe.

Mais à l’époque, ce sujet déchaînait l’opinion publique. Si bien que le PQ était alors porté au pouvoir sur la vague du mécontentement que cette « discrimination » provoquait.

Depuis quarante ans, la proportion de citoyens favorables à l’indépendance du Québec oscille entre le tiers et le quart de la population. Si le PQ a gagné plusieurs élections depuis ce temps, c’est que cette formation politique garantissait à chaque fois que le scrutin portait exclusivement sur sa compétence à gouverner et qu’elle promettait que tout projet d’indépendance serait soumis spécifiquement à l’approbation ou au rejet populaire.

En 1995, 49,5% des Québécois finissaient par voter « oui » à une question référendaire alambiquée, à la suite d’une période intense de propagande et de propos rassurants à l’effet qu’un « oui » ne donne le feu vert qu’à un processus de négociation qui, en cas d’échec donnerait suite à un deuxième référendum, décisionnel cette fois-là.

Depuis une décennie, le PQ stagne aux alentours de 33% dans les intentions de vote de toutes les élections générales.

Cette fois-ci, les sondages indiquent que le PQ est en tête tout simplement parce que le vote fédéraliste, très majoritaire, est divisé entre la CAQ et le Parti libéral en décomposition. Si les électeurs n’avaient le choix qu’entre le PQ et le Parti libéral, une majorité de Québécois voteraient probablement libéral en se bouchant le nez.

À l’heure actuelle, le PQ a fait le plein de tous les indépendantistes qui, par choix ou par dépit, votreront pour cette formation politique. À quelques jours du vote, le quart des électeurs sont indécis. Mais qui sont-ils ?

Ils sont fédéralistes, n’ont pas suivi les débats télévisés, sont peu instruits et craignent le changement.

Une minorité d’entre eux sont indécis parce que cela est dans leur nature. Dès leur réveil, on les imagine hésitants entre se lever ou rester couchés. Alors on peut imaginer le choix déchirant que sera pour eux d’aller voter.

Quant au reste, ils ont le profil du fidèle électeur libéral qui ne s’est pas encore résigné à changer de parti et qui se déclare indécis parce qu’il a honte d’avouer sa préférence. Si tel est le cas, on peut deviner que dans l’isoloir, ils auront tendance à voter pour le parti le plus près idéologiquement du Parti libéral, soit la CAQ. En effet, la CAQ, c’est le Parti libéral javellisé.

D’ici au scrutin, le Parti Québécois n’a pas grand chose à gagner à poursuivre ses appels à l’unité des indépendantistes : depuis quarante ans, il est impossible de prendre le pouvoir en ne s’appuyant que sur le vote indépendantiste.

Si Mme Marois veut devenir la première Première ministre, il lui faudra élargir sa base électorale aux fédéralistes et souligner ce que tout le monde devrait savoir — mais sur lequel Mme Marois n’a pas beaucoup insisté — soit qu’un vote péquiste est simplement un vote en faveur d’un gouvernement compétent et responsable. Si elle échoue, cette élection pourrait lui réserver des désagréables surprises.

En effet, il faut se méfier des sondages qui répartissent le vote des indécis comme s’ils allaient voter comme le reste de la population. Après les appels au vote caquiste d’à peu près tous les quotidiens du Québec (sauf Le Devoir), les indécis pencheront certainement plutôt vers la CAQ.

Les indécis qui songent à voter pour le Parti québécois constituent probablement moins du cinquième de l’ensemble de ceux qui hésitent encore. Mais dans la présente élection, chaque vote compte.

Motiver ceux qui pourraient voter péquiste à passer à l’acte est d’autant plus facile que s’il est élu, le PQ sera certainement à la tête d’un gouvernement minoritaire, c’est-à-dire d’un gouvernement dont les politiques seront mises en échec à chaque fois qu’elles ne réussiront pas à rallier l’un ou l’autre des deux autres grands partis que sont la CAQ et le Parti libéral.

Cette présence « rassurante » pourrait bien motiver certains indécis à voter péquiste mardi prochain si Mme Marois a l’habilité d’utiliser cet argument.

Sur le même sujet : Interprétation des résultats du scrutin québécois de 2012

Un commentaire

| 2003-2012 (années Charest), Élection québécoise de 2012 | Mots-clés : , | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel