Les candidats à l’investiture républicaine aux États-Unis sont en désaccord sur de nombreux points mais ils sont unanimes sur la nécessité de maintenir ou d’accroitre les exemptions fiscales au profit des riches afin de stimuler l’économie de ce pays.
« Plus on donne de l’argent aux riches » disent-ils, « plus ceux-ci sont en mesure de démarrer de nouvelles entreprises et conséquemment, de fabriquer de nouveaux produits et d’embaucher du personnel. En somme, cela crée des emplois et tout le monde finit par en profiter. »
Cela est très logique. Mais cela ne résiste pas aux faits.
Les exemptions fiscales consenties aux riches sous G.W. Bush n’ont pas freiné le déclin économique des États-Unis. Et ce, en dépit d’une dévaluation d’environ du tiers du dollar américain.
Lorsqu’une monnaie perd de sa valeur, tout le pays est en vente aux yeux des étrangers. Normalement, cela stimule les exportations et, de manière générale, toute l’économie du pays dont la devise a été dévaluée.
Cela ne s’est pas produit parce que l’écart entre les salaires versés aux États-Unis et ceux versés dans les pays avec lesquels les USA sont en concurrence, est beaucoup plus grand que le pourcentage de la dévaluation de la devise américaine : les entreprises ont donc continué de délocaliser leur production en dépit de la dévaluation du dollar.
Au lieu d’acheter plus de biens produits aux États-Unis, les étrangers se sont contentés d’acheter à rabais les moyens de production ou les moyens d’échange détenus par les Américains. C’est ainsi que des investisseurs étrangers ont acheté des hôtels, des usines, des salles de cinéma, des centres commerciaux, etc.
Et qu’ont fait les anciens propriétaires de cet argent reçu pour la vente de leurs actifs ? Ils ont acheté des biens de luxe produits à l’étranger, se sont payés des résidences secondaires en Europe ou sous les tropiques, et principalement se sont mis à spéculer à la bourse.
Or la spéculation, c’est du vent : on peut tripler la capitalisation boursière d’une entreprise, cela ne donne pas un sous de plus dans les coffres de l’entreprise et dans les poches de ceux qui y travaillent (à moins qu’ils ne soient eux-mêmes des spéculateurs).
Bref, le peuple américain n’a vu aucune différence; le revenu familial moyen aux États-Unis a continué de stagner comme il le faisait déjà depuis plus de quinze ans.
Nous visons dans une société de consommation. Si les consommateurs n’ont pas plus d’argent qu’avant, la seule façon de les amener à dépenser d’avantage, c’est de les inciter à acheter maintenant ce qu’ils auraient acheté plus tard. En d’autres mots, il faut qu’ils s’endettent.
Malheureusement c’est déjà fait : les ménages américains sont surendettés. Si bien que les taux d’intérêts actuels, extrêmement bas, ne réussissent pas à stimuler la consommation.
Contrairement à ce que dit la Droite américaine, le problème fondamental de l’économie américaine n’est pas la paperasserie administrative de l’État — le fameux Red tape — qui étouffe l’esprit d’entreprise, ce n’est pas que les entrepreneurs manquent d’argent pour financer leurs projets d’investissement, c’est plutôt que l’économie américaine est saignée à blanc par un déficit commercial record (liée à l’achat d’énergie fossile) et que l’augmentation faible de la richesse dans ce pays n’atteint jamais le consommateur (celui qui est en mesure de stimuler l’économie par des dépenses) mais est accaparée par une petite minorité de possédants voraces qui contrôlent les médias et le pouvoir politique américains.
Puisque l’offre de produits industriels américains est supérieure à la demande, on peut gonfler l’offre et creuser cet écart en incitant les investisseurs à créer de nouvelles entreprises, cela ne produira aucun effet : les nouvelles entreprises feront faillite ou, si elles sont plus dynamiques que les anciennes, elles pousseront leurs concurrents à disparaitre. Bref, c’est du pareil au même
Puisque les États-Unis produisent essentiellement des produits de masse et non des produits de luxe, la seule façon de stimuler leur consommation interne, c’est d’augmenter le pouvoir d’achat des classes moyennes et non celui des riches.
Il n’y a probablement pas de solution miracle au déclin de l’économie américaine. Toutefois parmi la multitude de mesures envisageables, il est clair que l’exemption fiscale des millionnaires américains est un coup d’épée dans l’eau.