Pénuries de main-d’œuvre, immigration et âge de retraite

15 mai 2023

De 37 millions de Canadiens en 2021 à 100 millions en 2100

Jusqu’en 2015, le Canada accueillait environ 250 000 immigrants par année. Compte tenu du taux de fertilité actuel au Canada, ce nombre d’immigrants, s’il avait été maintenu, aurait fait en sorte que la population du pays aurait avoisiné 53 millions de personnes en 2100.

Toutefois, en 2016, le Conseil consultatif en matière de croissance économique — un comité fédéral composé de quatorze personnes dont aucun Québécois francophone — recommandait de presque doubler le nombre d’immigrants accueillis au pays, soit 450 000 par année. Et ce, afin de contrer les effets du vieillissement de la population et de répondre aux besoins de main-d’œuvre.

Le 14 février 2022, Ottawa dévoilait son plan d’accueillir 1,3 million de néoCanadiens au cours des trois prochaines années. En gros, c’était ce que recommandait le Conseil consultatif six ans plus tôt.

De 2023 à 2025, cela devrait comprendre :
• 762 000 immigrants économiques,
• 327 500 personnes admises au motif de réunification familiale, et
• 239 000 réfugiés.

À cela s’ajoute l’immigration irrégulière comme celle des personnes qui, jusqu’à tout récemment, empruntaient le chemin Roxham.

Cela ne comprend pas non plus les travailleurs temporaires et les étudiants étrangers. En effet, ceux-ci habitent le territoire une partie ou la totalité de l’année sans faire partie, officiellement, de la population canadienne.

En 2022 (l’année qui a précédé l’entrée en vigueur de ce plan), la population du Canada augmentait déjà de plus d’un million de citoyens pour la première fois de son histoire. Essentiellement par le biais de l’immigration.

Cette année-là, rien qu’au Québec, sur les 149 900 personnes qui se sont ajoutées, 146 000 étaient des immigrants permanents ou temporaires. L’écart entre les naissances et les décès, n’a ajouté que 2 300 personnes.

Le groupe de pression politique modestement appelé Initiative du siècle comprend des gens d’affaires et des ex-politiciens torontois. Le document qu’il a élaboré, Pour un Canada qui voit grand, veut faire en sorte que la suggestion du Conseil consultatif, prévue pour trois ans, devienne permanente. Ce qui fait que la population canadienne atteindrait cent-millions d’habitants en 2100.

L’objectif de soumettre le Canada à une immigration massive fait donc son chemin à Ottawa depuis des années.

Le texte de l’économiste Rodrigue Tremblay, paru dans l’Action nationale en juin 2022, l’entrevue accordée à la même époque par son collègue Pierre Fortin à Radio-Canada, et l’article de l’urbaniste Richard Bergeron, paru dans La Presse en novembre 2022, n’ont pas suffi à alerter l’opinion publique.

Il a fallu la manchette du Journal de Montréal du 6 mai dernier pour que, soudainement, on se réveille.

Depuis ce temps, les chroniqueurs et les éditorialistes québécois sont unanimes à condamner le plan d’immigration massive du fédéral. Un plan qui n’a fait l’objet d’aucune consultation populaire.

Mercredi dernier, les députés de l’Assemblée nationale du Québec adoptaient unanimement une motion gouvernementale jugeant le document torontois incompatible avec la protection de la langue française au Québec.

Face à ce tollé, le ministre fédéral de l’Immigration a senti le besoin de s’en distancier… sans toutefois le désavouer explicitement puisque son ministère suit déjà ses recommandations.

Comble d’hypocrisie, les députés libéraux et néodémocrates ont battu aujourd’hui une résolution présentée par le Bloc Québécois (et appuyée par le Parti conservateur) demandant le rejet des objectifs de la Century Initiative par la Chambre des Communes, et demandant au gouvernement fédéral de ne pas s’en inspirer pour développer ses seuils d’immigration à venir.

Pénurie de main-d’œuvre et immigration

Lorsqu’une pénurie de main-d’œuvre est ponctuelle, l’immigration est un excellent moyen de la corriger. Cela consiste à faire appel à l’Étranger pour combler des besoins que le marché intérieur n’arrive pas à corriger de lui-même.

Mais cela n’est plus vrai lorsque la pénurie est généralisée.

Par exemple, les centaines de milliers de néoCanadiens et les 1,5 million de résidents non permanents au Canada (dont 346 000 au Québec) doivent se loger. Ce qui aggrave la pénurie actuelle de logements au pays.

Ces personnes sont également des consommateurs de biens et de services. Entre autres, ils achètent ce qui leur faut pour se nourrir, pour se vêtir contre le froid, et pour de se déplacer en ville.

Et leurs enfants vont à la garderie ou à l’école.

Bref, chaque néoCanadien aggrave la pénurie de main-d’œuvre partout sauf dans le domaine précis où il a été embauché.

Une fois naturalisés, lorsque ces néoCanadiens veulent que leurs aïeuls les rejoignent, même si les règles canadiennes obligent les premiers à assumer tous les frais médicaux dont leurs aïeuls auraient besoin pendant cinq (?) ans, cela ne change pas la pression exercée sur notre système de santé, déjà au point de rupture.

Bref, dans un contexte de pénurie généralisée de main-d’œuvre, tout effet positif de l’arrivée d’un néoQuébécois est contrebalancé par la pression qu’il exerce en raison de l’ensemble des biens et des services qu’il requiert.

En 315 pages, c’était la conclusion à laquelle arrivait ‘Le Remède imaginaire : pourquoi l’immigration ne sauvera pas le Québec’ publié en 2011 par le philosophe Benoît Dubreuil et le démographe Guillaume Marois.

Pénurie de main-d’œuvre et âge de la retraite

Il y a un demi-siècle, il y avait sept travailleurs pour chaque retraité. Actuellement, ce rapport est de trois pour un. Et dans moins de quinze ans, il sera de seulement deux pour un.

Les retraités se distinguent par le fait que leur consommation de biens et de services requiert de la main-d’œuvre — pour regarnir les tablettes d’un magasin où ils ont acheté quelque chose, pour effectuer un paiement à la caisse, etc.— sans qu’à leur tour, ils œuvrent à satisfaire la demande de biens et de services des autres.

En somme, il y a une relation directe entre le vieillissement de la population et la pénurie généralisée de main-d’œuvre. Et ce, par le biais de la baisse de la proportion de la population active.

Au sein des pays de l’OCDE, le pourcentage de la population âgée de 65 ans ou plus est passé de 9 % en 1960 à plus de 17 % en 2019.

Dans l’édition de septembre 2019 de L’Action Nationale, Michel Paillé, le plus respecté des démographes québécois, écrivait :

Le Québec se montre, depuis bientôt 50 ans, indifférent au cumul des naissances manquantes qui auraient été nécessaires pour assurer à long terme le remplacement des générations.

D’autre part, pendant des décennies, la baisse de la proportion de la population active a été compensée par ces coupures de personnel que les gestionnaires imposaient aux grandes entreprises. Même lorsque celles-ci enregistraient de profits records.

Dans nos hôpitaux, le recours aux heures supplémentaires obligatoires palliait le manque chronique de personnel.

Puis, la plus importante pandémie depuis un siècle a causé six-millions de morts, dont des centaines de milliers de travailleurs. Et elle a occasionné la ‘Grande Démission’ chez beaucoup de personnes pour qui les bouleversements occasionnés par cette pandémie furent une occasion de repenser leur vie.

Comme un grain de sable dans un engrenage bien huilé, les conséquences de la baisse progressive de la population active sont soudainement apparues évidentes.

Dans les pays dotés d’un régime de pensions de vieillesse qui évite de plonger dans la misère ses retraités, les mesures volontaires qui sont destinées à motiver les gens à demeurer sur le marché du travail au-delà de l’âge de la retraite donnent peu de résultats.

Au Japon, on a préféré compter sur des politiques natalistes pour pallier (sans grand succès) le vieillissement de sa population.

La seule mesure qui permet de combattre progressivement une pénurie généralisée de main-d’œuvre, c’est de hausser l’âge où les gens quittent le marché du travail et non d’ouvrir les vannes de l’immigration.

Mais la colère sociale suscitée récemment en France par la hausse de l’âge des retraites est de nature à refroidir l’ardeur de tout gouvernement qui voudrait imiter ce pays.

On peut donc s’attendre à ce que les pénuries de main-d’œuvre persistent dans tous les pays occidentaux pour encore très longtemps.

Conclusion

Dans son rapport présenté à Londres en 1839, Lord Durham écrivait :

Le meilleur moyen de résoudre l’opposition des deux groupes français et anglais [au Canada], c’est de noyer la population française sous le flot continu d’une immigration organisée méthodiquement, contrôlée au départ, accueillie à l’arrivée, assurée d’une situation privilégiée dans [ce pays].

En dépit du fait que la plus importante minorité ethnique au Canada est le peuple francoQuébécois, le gouvernement canadien a toujours considéré qu’il était de son devoir de protéger ce qu’on appelle la ‘minorité anglaise du Québec’. Alors que celle-ci est plutôt l’annexe québécoise de la majorité angloCanadienne.

En favorisant cette annexe par le biais, notamment, de sa politique migratoire, Ottawa suit les recommandations du rapport Durham.

Lorsque le gouvernement de René Lévesque adoptait la Loi 101 en 1977, cette dernière ajoutait au droit canadien la notion de droits collectifs; elle établissait les bases juridiques du droit du peuple francoQuébécois d’assurer sa survie en protégeant le français au Québec.

C’est ce qui a motivé Ottawa à entreprendre la rédaction d’une nouvelle constitution qui, cinq ans plus tard, consacrait la suprématie des droits individuels sur les droits collectifs.

En somme, son but était de retirer au Québec une bonne partie des moyens dont il avait besoin pour lutter contre son anglicisation.

Si l’ethnie dominante au Canada a pu adopter sans nous cette camisole de force constitutionnelle, on voit mal ce qui la ferait hésiter à se doter de cibles migratoires qui lui conviennent… même si cela devrait accélérer l’anglicisation du Québec.

Une anglicisation à laquelle elle travaille déjà depuis 150 ans et qui s’approche dangereusement du point de non-retour, si on en juge par les résultats du dernier recensement…

Références :
Anglicisation de Montréal depuis quinze ans
Canada wants to welcome 500,000 immigrants a year by 2025. Can our country keep up?
100 millions de Canadiens d’ici 2100 : Ottawa dit non à l’« Initiative du siècle »
Immigration : entrevue avec l’économiste Pierre Fortin (vidéo)
Justin Trudeau et la camisole de force constitutionnelle de 1982
La cible d’Ottawa «incompatible» avec la protection du français, dit Québec
La façade ministérielle de l’État canadien
La Grande démission aux États-Unis
Le Canada à 100 millions d’habitants en 2100
Libéraux et néodémocrates refusent de «rejeter» l’Initiative du siècle
L’immigration permet-elle de régler la pénurie de main-d’œuvre?
L’Initiative du siècle est une menace pour le Québec, dit Legault
Pénurie de logements : une crise sociale nous guette
Pour un Canada qui voit grand
Texte de la motion bloquiste au sujet de la « Century Initiative »
Un nouveau plan en matière d’immigration

Parus depuis :
Ottawa accusé de retarder l’immigration francophone (2023-05-18)
Immigration : l’appel du patronat entendu par François Legault (2023-05-27)
Le Canada ne peut pas loger plus d’immigrants (2023-08-08)Une croissance de la population « insoutenable », avertissent des économistes (2024-01-11)

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés au prix que nous payons pour appartenir au Canada, veuillez cliquer sur ceci.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’immigration et le français au Québec

1 juillet 2020

La langue, facteur de rétention

Après avoir obtenu leur citoyenneté, 81 % des néoQuébécois vivaient toujours au Québec cinq ans plus tard. Ce taux de rétention est moindre qu’en Ontario (91 %), qu’en Alberta (90 %), et qu’en Colombie-Britannique (87 %).

Au Québec, ce taux est toutefois très élevé (95 %) chez les immigrants qui, à leur arrivée, connaissaient le français sans savoir l’anglais.

Ce taux tombe à 84 % chez ceux qui parlaient les deux langues officielles du pays, à 73 % chez ceux qui parlaient anglais sans savoir le français, et à seulement 53 % chez ceux qui ne parlaient aucun des deux.

On peut donc présumer que l’unilinguisme français au travail (là, par exemple, où l’anglais n’est pas nécessaire) favorise à la rétention des immigrants au Québec.

L’ascension sociale

Selon Statistique Canada, le revenu annuel médian des Canadiens était d’environ 35 000$ en 2017.

En 2015, les personnes qui avaient déjà acquis de l’expérience au Canada à l’occasion d’un permis temporaire de travail ou d’un permis d’études et qui demandaient ensuite la citoyenneté canadienne avaient un salaire médian de 34 400$ un an après leur demande, contre 19 800$ pour ceux sans expérience.

De 2006 à 2016, l’immigrant au Québec passait d’un salaire annuel de 15 600$ (un an après son arrivée en 2006) à 30 700$ dix ans plus tard (en 2016). En Ontario, il passait de 18 200$ à 30 300$. Dans l’ensemble du Canada, c’était de 19 100$ à 31 700$.

Références :
Le français, un facteur essentiel de la rétention des immigrants au Québec
Les poches percées de la classe moyenne

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Immigration : expulsions et droits de la personne

28 novembre 2019

C’est hier soir que les cinq membres de la famille Batalla-Charris ont été expulsés vers l’Espagne par ordre d’Ottawa.

Cette famille a été accueillie à titre de réfugiés colombiens, après avoir séjourné huit ans en Espagne. Les parents avaient deux enfants à leur arrivée au Canada. Depuis, un troisième est né au Québec.

Les autorités fédérales ont estimé que les membres de cette famille ne pouvaient invoquer le danger qu’ils courent dans leur pays d’origine puisqu’ils avaient refait leur vie en Espagne.

C’est donc vers ce pays qu’ils ont été expulsés.

On peut se demander pourquoi cela prend cinq ans pour en arriver à une décision aussi évidente.

À sa face même, des gens qui vivent depuis huit ans en Espagne — qui ont probablement la citoyenneté de ce pays — ne peuvent prétendre être encore en danger en Colombie alors qu’ils n’y vivent plus depuis des années.

Normalement leur demande aurait dû être rejetée immédiatement.

Mais à Ottawa, une âme bienveillante a décidé de les accueillir à titre de réfugiés, en attente d’une décision. Une décision longuement évaluée par des commissaires fédéraux payés de l’heure et rendue par un tribunal administratif où des avocats se sont graissé la patte.

Bref, tout cela aura pris cinq ans et probablement couté une petite fortune aux contribuables canadiens.

Entretemps, cette famille s’était établie à Sherbrooke. Toute la famille parlait français et les parents occupaient un emploi dans cette ville. Ils payaient des taxes et des impôts, en plus de contribuer à l’activité économique de la ville en tant que consommateurs.

Or partout au Québec, on manque de main-d’œuvre. Qui est gagnant dans cette décision de corriger maintenant une erreur commise il y a cinq ans ?

En d’autres mots, y a-t-il encore quelqu’un qui a du jugement à Ottawa et qui est capable de se demander s’il est raisonnable de jeter des gens à la rue en raison de l’incurie administrative du ministère fédéral de l’Immigration ?

Représentante de Sherbrooke à l’Assemblée nationale du Québec, la députée Christine Labrie (de Québec Solidaire) s’est dite déçue que le ministre québécois de l’Immigration ne se soit pas empressé de délivrer aux parents un certificat de sélection à titre de travailleurs qualifiés. Ce qui, selon elle, les aurait rendus aptes à demeurer au pays à ce titre (et non en tant que réfugiés).

Rappelons qu’en décembre 2017, les huit membres de la famille Lawrence (établie à Montréal et décrite comme un modèle d’intégration) avaient alors été expulsés du pays en dépit du fait que le ministre québécois de l’Immigration de l’époque leur avait délivré d’urgence un certificat de sélection.

Ottawa avait été impitoyable. Si bien que ces gens avaient, eux aussi, quitté le pays.

En matière migratoire, il serait peut-être temps de faire en sorte que tout dossier qui traine à Ottawa depuis plus de deux ans est automatiquement accepté. Quitte à prévoir des exceptions dans des cas d’une extrême complexité.

Et même deux ans, je me demande si cela n’est pas encore trop. Certainement, cela serait un pas dans la bonne direction.

Références :
À quelques heures de leur expulsion, la famille Batalla-Charris garde toujours espoir
Élan de solidarité contre l’expulsion d’une famille colombienne installée à Sherbrooke
La famille Lawrence expulsée du Canada
Les Batalla-Charris expulsés en Espagne

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Immigration : une solution digne du 14 février

14 février 2019

Introduction

De tous les sujets d’actualité, celui m’attriste le plus présentement, c’est la décision du gouvernement québécois d’annuler 18 000 demandes d’immigration en attente d’une décision.

De ces 18 000 demandes, 3 700 ont été présentées par des demandeurs qui vivent déjà sur le territoire québécois tandis que les autres demandes ont été présentées de l’Étranger par des demandeurs qui y sont demeurés.

Cette décision affecte environ 50 000 personnes.

Ce qui me déçoit, ce n’est pas le ministre de l’Immigration, ni le gouvernement Legault, ni les sympathisants de la CAQ qui y consentent.

Ce qui me déçoit, c’est nous tous.

Non pas que j’éprouve la moindre culpabilité à l’égard de cette décision, mais parce que cela jure avec la conception flatteuse que je me fais du peuple francoQuébécois.

Dans l’éventail des décisions que l’opinion publique d’ici juge acceptables, comment cette politique brutale et inhumaine peut-elle trouver le moindre écho favorable ?

L’humanité en régression

En conclusion d’un autre texte, j’écrivais que depuis quelque temps, le monde est entré en régression.

Entre autres, cette régression se caractérise par une déshumanisation des peuples.

Quand l’administration Trump punit les immigrants illégaux en emprisonnant séparément les enfants de leurs mères — alors que ces dernières sont les plus compétente au monde pour déchiffrer le langage non verbal de leurs petits — cela est d’une telle cruauté qu’on s’étonne que le peuple américain tout entier n’en soit pas scandalisé.

Tout ce qu’on a vu aux États-Unis, c’est un regret après que quelques enfants soient morts parce que les agents de l’État ont mal interprété l’expression par ces enfants de leurs besoins les plus élémentaires (dont la soif).

Ce résultat était la conséquence inévitable d’une telle politique.

De manière analogue, quand le gouvernement québécois se propose de détruire d’un trait de crayon tous les efforts accomplis par cinquante-mille personnes pour refaire leur vie au Québec, je m’attends à une indignation beaucoup plus vive que la petite controverse que cette nouvelle suscite au sein de la classe politique.

Parmi ces gens, 3 700 couples ont déménagé au Québec et meublé un appartement ou la maison qu’ils ont achetée. Ils occupent des métiers depuis des mois ou des années. Ils paient des impôts. Certains de leurs enfants sont nés au Québec tandis que d’autres vont à l’école française et n’ont d’amis que d’autres petits Québécois.

Qui voudrait être à la place de ces parents, paniqués et plongés dans les limbes, qui doivent cacher cette nouvelle à leurs enfants pour ne pas les inquiéter ?

Une alternative plus humaine

Les fonctionnaires sont les bras de l’État. Un gouvernement peut adopter n’importe quelle politique, mais celle-ci demeurera lettre morte s’il n’y a pas d’employés de l’État pour la mettre en application.

Les 18 000 dossiers en attente sont le résultat de l’austérité libérale. En somme, le ministère de l’Immigration manque de bras.

Cela ne veut pas dire que l’embauche de nouveaux fonctionnaires soit la seule issue à l’accumulation des dossiers non traités.

La seule autre solution est la simplification draconienne du processus d’approbation des demandes.

Aux États-Unis, à chaque mois de mai depuis 1995, cent-mille candidats à l’immigration sont choisis au hasard parmi les vingt millions de demandeurs. Les gagnants de la Green Card Lottery voient leurs dossiers traités de manière prioritaire.

Le Québec pourrait s’inspirer de cette idée pour accepter aveuglément tous les dossiers en attente s’ils remplissent les conditions suivantes :
• les personnes concernées vivent déjà au Québec depuis un nombre minimal de mois,
tous les membres de la famille parlent couramment français,
• cette famille ne doit pas avoir été dépendante de l’aide publique depuis plus de 10% du temps vécu ici, et
• aucun des membres de cette famille ne soit sous le coup d’une accusation portée devant les tribunaux du Québec.

Cela ne supprimerait pas tous les cas en attente, mais en réduirait immédiatement le nombre. Et elle supprimerait l’injustice criante qui est exercée à l’égard de gens qui sont déjà parfaitement intégrés au Québec.

En ce jour de la Saint-Valentin, une telle suggestion mériterait d’être envisagée.

Références :
Cafouillage et insensibilité dans les dossiers d’immigration annulés
Etats-Unis: une loterie à 900 millions de dollars
Immigration : le ministre Jolin-Barrette clarifie la situation

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La politique migratoire de la CAQ

11 septembre 2018

Introduction

Le pourcentage d’immigrants au Québec qui choisissent de s’angliciser est passé de 65% à 60% en une décennie. C’est encore trop.

François Legault a raison de dire ‘qu’importer’ un demi-million d’immigrants par décennie qui choisissent à 60% de s’angliciser, c’est compromettre la pérennité à long terme du français au Québec.

Cela ne se voit pas en région ni dans les banlieues montréalaises (massivement francophones). Mais c’est déjà évident à Montréal à la lecture des résultats inquiétants du dernier recensement canadien, alors que tous les voyants lumineux clignotent au rouge.

Si le diagnostic de François Legault est bon, quels sont les remèdes qu’il prescrit ?

Réduire l’immigration au Québec de 24%

Entre autres, la Coalition Avenir Québec se propose de réduire à quarante-mille le nombre d’immigrants accueillis annuellement au Québec, et ce dès 2019.

Selon les données du gouvernement québécois, le Québec aura accueilli cette année 53 900 immigrants.

De ce nombre, 31 800 auront été choisis par Québec à titre de travailleurs qualifiés et 22 100 auront été choisis par Ottawa à titre de réfugiés ou en vertu de sa politique de réunification des familles.

Afin de ne pas assumer seule la tâche de réduire le flot migratoire au Québec, la CAQ espère convaincre le fédéral de contribuer proportionnellement à cette réduction.

Les responsabilités canadiennes en matière d’immigration

Au Canada, la compétence constitutionnelle en matière d’immigration est exclusivement fédérale.

Toutefois, en 1991, le gouvernement fédéral a délégué au Québec le droit de choisir les requérants à titre de travailleurs qualifiés.

Néanmoins, le fédéral a conservé ses prérogatives en matière d’accueil des réfugiés parce qu’il doit répondre de ses obligations internationales à ce sujet.

Quant à ses décisions en matière de réunification des familles, elles peuvent être contestées devant les tribunaux. Afin de s’assurer qu’elles soient prises de manière équitable, celles-ci sont déléguées à des tribunaux administratifs qui jouissent d’une grande autonomie.

L’imposition un quota de réduction de 24% à ces tribunaux administratifs provoquerait un tollé d’autant plus prévisible que cette contrainte serait imposée à la demande du Québec, une province que de nombreux commentateurs anglophones aiment dépeindre comme raciste et xénophobe.

Bref, il n’y a pas la moindre chance que le fédéral accepte de contribuer à une réduction du nombre d’immigrants au Québec à la demande de la CAQ.

La seule manière pour elle d’avoir autorité à ce sujet est de réaliser d’abord l’indépendance du Québec.

La démission de la CAQ en matière migratoire

D’ici là, la CAQ devra se débrouiller seule.

Compte tenu de la part fédérale, pour faire passer de 53 900 à 40 000 le nombre total d’immigrants au Québec, un gouvernement caquiste sera obligé de réduire le nombre d’immigrants qu’il accepte de 31 800 à 17 900.

Des 40 000 immigrants au Québec en 2019, 17 900 seraient donc choisis par Québec et 22 100 (la majorité) seraient choisis par Ottawa.

Les besoins de main-d’œuvre des entreprises québécoises, au lieu d’être assurés principalement par des politiques québécoises spécialement adaptées à cette fin, seront assurés par des politiques migratoires fédérales dictés par des considérations humanitaires totalement étrangères aux besoins économiques du Québec.

De plus, en donnant à Ottawa le contrôle majoritaire de notre immigration, la CAQ espère que la pérennité du français soit assurée dorénavant par des fonctionnaires fédéraux à 92% unilingues anglais.

Parce qu’il faut le dire : la fonction publique fédérale est massivement anglophone. Même les postes ‘bilingues’ à Ottawa sont confiés à des unilingues anglais qui disent vouloir apprendre le français et qui quittent leur poste plusieurs années plus tard sans jamais l’avoir appris.

Bref, c’est sur eux que François Legault compte pour expulser les immigrants qui n’auront pas appris le français après trois ans de séjour au Québec et pour sélectionner des réfugiés majoritairement francophones.

Disons les choses clairement : la politique migratoire de la CAQ est une trahison au profit du gouvernement colonial canadien.

Références :
Accord Canada-Québec relatif à l’immigration et à l’admission temporaire des aubains
Québec prévoit recevoir jusqu’à 53 000 immigrants en 2018
Un fonctionnaire fédéral défend son droit de travailler en français

Paru depuis :
Kafka en Québec (2021-05-03)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le ‘Test des valeurs’ de la CAQ : distinguer entre la connaissance et l’allégeance

18 mai 2018

L’immigration est un des thèmes récurrents de la Coalition Avenir Québec (CAQ).

Alors que le Québec manque de main d’œuvre pour soutenir son développement économique, ce parti politique veut réduire le nombre annuel d’immigrants. Et on croit que la venue d’un nombre jugé excessif d’étrangers créerait un risque de perversion de nos valeurs.

Dans ce contexte, la politique migratoire de la CAQ joue un rôle capital dans son programme électoral.

Dans celui-ci, la CAQ se propose d’imposer la réussite d’un Test des valeurs à tout immigrant et cela, trois ou quatre ans après son accueil chez nous.

Elle compte sur la menace d’une expulsion du pays pour motiver les immigrants à la réussite. Une expulsion qui, doit-on le préciser, ne dépendrait pas d’un gouvernement de la CAQ puisque celle-ci compterait sur Ottawa pour ce faire.

Cet examen serait un test de connaissance et non un serment d’allégeance. En d’autres mots, il ne s’agirait pas d’un engagement solennel à y adhérer.

Il est donc illusoire d’imaginer qu’un tel test protègerait la société québécoise de la ‘perversion’ causée par l’accueil de gens différents de nous; on peut savoir ce que sont les valeurs québécoises sans avoir la moindre intention de s’y conformer.

Dans le texte ‘Le serment d’allégeance aux valeurs du pays’, je suggérais que soit modifié le serment que l’immigrant doit prêter lors de la cérémonie de naturalisation, c’est-à-dire lors de l’étape ultime qui lui permet de devenir citoyen canadien.

Ce serment ne peut être exigé que par Ottawa.

Si la CAQ veut que le gouvernement québécois ait le pouvoir de l’imposer, il lui faudra réaliser l’indépendance du Québec (ce qui n’est pas dans son programme politique, je crois).

Au sein du Canada, il ne reste plus à la CAQ que le pouvoir d’exiger la connaissance de valeurs dites québécoises.

Mais pour exercer ce pouvoir limité, elle doit le faire avant l’émission d’un certificat de sélection. C’est-à-dire avant que le requérant mette les pieds au Québec.

Or cela se fait déjà.

Lorsqu’une personne demande à immigrer au Québec, elle doit signer une Déclaration sur les valeurs communes de la société québécoise.

Le requérant y déclare vouloir respecter ces valeurs et apprendre le français.

Tant que ce document n’est pas signé, le dossier du requérant est incomplet et ce dernier ne peut recevoir le certificat de sélection émis par Québec.

Tout comme un test de connaissance, une déclaration d’intention est moins contraignant qu’un serment d’allégeance. On peut très bien déclarer vouloir une chose et changer d’idée le lendemain, alors qu’il est plus difficile de renier un serment qui faisait de vous un citoyen du pays.

En somme, la déclaration d’intention est l’équivalent d’une résolution du Nouvel An.

Mais la CAQ n’a pas le choix; une fois que la personne concernée est admise au pays, un gouvernement caquiste ne pourrait rien exiger de plus. Cette impuissance est le prix du fédéralisme.

En effet, l’appartenance au Canada se paie par la soumission de la CAQ à une constitution adoptée en 1982 par le Canada anglais à l’issue d’une séance ultime de négociation à laquelle le Québec n’a pas été invité.

Cet ordre constitutionnel condamne tout gouvernement provincial à n’être que l’intendant régional du gouvernement canadian. Parce que c’est ce que veut l’ethnie dominante du pays.

La CAQ contribue à une psychose antimigratoire alors que sa politique à ce sujet, clé de voute de son programme électoral, est son talon d’Achille. Et c’est précisément parce que cette faille met en péril sa crédibilité que ses adversaires s’acharnent à ce sujet.

À quelques mois des élections, la CAQ pourrait in extremis apporter les changements nécessaires à son programme électoral.

À défaut de cela, ce parti enfourchera une picouille — sa politique migratoire actuelle — comme cheval de bataille de son combat contre l’immigration. De toute évidence, la CAQ risque de payer cher ce choix de monture.

En faisant la promotion de mesures coercitives qu’elle ne peut réaliser qu’après l’indépendance du Québec, la CAQ suscite des espoirs qui ne peuvent trouver leur aboutissement que si ses sympathisants portent au pouvoir une autre formation politique…

Tout un paradoxe !
 
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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les Pères Noël libéraux

19 décembre 2017

Introduction

Le Comité fédéral sur la citoyenneté et l’immigration recommandait récemment l’abolition des entraves à l’immigration des personnes handicapées au pays.

Actuellement, le gouvernement fédéral rejette automatiquement toute demande d’immigration de nature à entrainer une charge annuelle supérieure à 6 655$ au système de soins du pays.

Précisons que cette disposition ne s’applique pas aux réfugiés.

Majoritaires sur ce comité, les représentants libéraux estiment qu’une telle discrimination est contraire aux valeurs canadiennes en plus de violer la Convention relative aux droits des personnes handicapées (dont le Canada est signataire).

La convention de l’ONU

L’article 18 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées porte sur le droit de circuler librement et sur la nationalité.

L’alinéa 18.1.1 précise que les pays signataires reconnaissent aux personnes handicapées «…le droit d’acquérir une nationalité et de changer de nationalité et ne soient pas privées de leur nationalité arbitrairement ou en raison de leur handicap.»

Si on lit attentivement cet article, il ne crée pas d’obligation pour les États signataires à accepter les demandes d’immigration de personnes handicapés.

À titre de comparaison, le droit de divorcer et de se remarier ne signifie pas que le divorcé peut épouser en secondes noces quelqu’un contre son gré.

De manière analogue, les pays signataires de cette convention (presque tous les membres de l’ONU) ne se sont pas engagés à ouvrir leurs frontières à tous les handicapés de la Terre.

Si tel était le cas, des millions de désespérés n’hésiteraient pas à se mutiler pour échapper aux persécutions dont ils sont victimes et afin d’assurer un meilleur avenir à leur famille.

Donc les handicapés sont libres d’émigrer… dans les pays qui voudront bien d’eux. C’est tout. Voilà ce que stipule la convention.

Les valeurs canadiennes

Il n’y a aucun doute que la notion du partage est une des grandes valeurs canadiennes.

Le peuplement de ce vaste pays n’aurait pas été possible sans le partage forcé de terres autochtones — notamment celle des Métis des provinces des Prairies — au profit de colons anglais.

Le gouvernement Trudeau a donc raison de souligner l’importance de cette grande valeur canadienne. Toutefois, il ne donne pas un très bon exemple à ce sujet.

Son ministre des Finances, multimillionnaire, a négligé de révéler son patrimoine familial. Ce qui lui permettait de dissimuler — involontairement, bien sûr — les avantages personnels qu’il pouvait retirer des politiques que son ministère adoptait.

En mai 2017, le gouvernement Trudeau a reconnu officiellement un nouveau paradis fiscal, les iles Cook, où les riches Canadiens pourront dorénavant faire de l’évasion fiscale en toute impunité.

Le ministre de l’Immigration, avocat de métier, fait lui-même partie du 1%. Comme probablement tous les ministres fédéraux.

Et ce sont ces ministres richissimes — dont la classe sociale n’a de cesse que de trouver les moyens d’éviter de payer sa juste part du financement de l’État — qui font la morale aux autres Canadiens au sujet de leur devoir d’adhérer aux valeurs de partage du pays.

Les conséquences

Si le Canada avait accepté toutes les demandes d’immigration reçues de la part de personnes handicapées, cela n’aurait occasionné qu’une dépense supplémentaire annuelle d’à peine 135 millions$ pour le système de soins du pays.

Toutefois, cette estimation n’est possible qu’à la condition que personne n’entende dire que le Canada songe à devenir un pays refuge pour les personnes handicapées. Si, à travers le monde, les centaines de millions d’entre eux l’apprennent et frappent à nos portes, comment cela va-t-il couter ?

D’autre part, même si un grand nombre de personnes saisissaient alors l’offre qui leur serait faite par le fédéral, l’essentiel des dépenses supplémentaires serait assumé par les gouvernements provinciaux, dont la Santé est un domaine exclusif de compétence constitutionnelle.

Dans les faits, ces sommes seraient payées par les contribuables de la classe moyenne puisque c’est eux qui assument véritablement le fardeau du financement de l’État.

Quant à l’engorgement du système de santé occasionné par la prise en charge de ces nouveaux arrivants, on se demande pourquoi un ministre attendrait des heures à l’urgence quand il lui est si facile d’aller à la clinique privée qu’il a les moyens de se payer…

Références :
Committee urges federal government to repeal law that bans disabled immigrants
Immigration: le Canada s’ouvrirait aux handicapés
L’Accord avec les Îles Cook critiqué
Les «affaires» Bill Morneau: les scandales collent à la peau du ministre des Finances du Canada
Texte intégral de la Convention relative aux droits des personnes handicapées

Paru depuis :
Ottawa ne veut plus rejeter les immigrants sur la seule base de leur handicap (2018-04-16)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les Chippendales du PQ ou l’art de déchirer sa chemise en public

14 janvier 2017


 
Dans une lettre ouverte publiée dans Le Devoir, cinq Indépendantistes influents critiquent certaines des modifications que M. Jean-François Lisée, chef du Parti québécois, se propose d’apporter au programme de sa formation politique.

Soumettre les CÉGEPs anglophones à la Loi 101

Selon les signataires, «…il est si essentiel que le champ d’application de la Charte de la langue française soit étendu au collégial, agissant ainsi en amont du monde du travail.»

En somme, ils veulent limiter l’accès des CÉGEPs anglophones aux seuls angloQuébécois. Il s’agit d’une mesure que ni René Lévesque, ni Jacques Parizeau, ni Lucien Bouchard, ni Bernard Landry, ni Pauline Marois n’ont entreprise.

Pourquoi aucun gouvernement péquiste n’a osé faire cela jusqu’ici ? Parce que le problème était moins important, répondent les signataires.

Le fond de l’histoire, c’est que M. Lisée veut enlever du programme du PQ une disposition qui permettrait aux Libéraux de crier au loup. Une mesure qui, de toute manière, ne serait mise en application ni par lui ni par personne d’autre.

Au niveau collégial, 23% des parents québécois jugent — à tort ou à raison — que leurs adolescents devraient suivre leurs cours en anglais.

J’inviterais les protestataires à se demander pourquoi tant de parents pensent ainsi. Promouvoir un programme électoral de type ‘punitif’ pour corriger le peuple de ses défauts n’est pas très vendeur.

En contrepartie, au niveau des CÉGEPs anglophones, M. Lisée propose que tous les finissants réussissent un examen de français avant de recevoir leur diplôme. Conséquemment, le français devient alors l’équivalent d’une matière obligatoire.

Même auprès des parents angloQuébécois, cela se justifie au nom de l’employabilité. De plus, c’est une mesure facile à mettre en application et qui a l’avantage indiscutable d’être mieux que rien.

Les cours de francisation aux immigrants

Les auteurs de la lettre ouverte écrivent : « …étant donné qu’encore aujourd’hui, plus de 200 000 Québécois issus de l’immigration ne parlent pas un mot de français, les cours de francisation devraient être obligatoires et les allocations pour ce faire, bonifiées.»

Les cours de francisation demeureront nécessaires dans le cas des réfugiés. M. Lisée se propose de les maintenir et de les rémunérer.

Mais les signataires radotent au sujet des travailleurs qualifiés. Ce que M. Lisée propose à leur sujet est beaucoup plus radical et beaucoup plus efficace : le candidat à l’immigration et son conjoint devront démontrer une connaissance intermédiaire ou avancée du français, sinon ils ne recevront pas de certificat de sélection.

En d’autres mots, un travailleur qualifié ne pourra pas mettre le pied au Québec s’il ne connait pas déjà le français. Peut-on trouver une meilleure motivation à apprendre notre langue ?

Fini les excuses des néoQuébécois qui ont renoncé à apprendre le français au Québec sous le prétexte que c’était trop difficile.

L’unilinguisme français de l’État québécois

Les signataires écrivent : «…il faut considérer comme prioritaire de mettre fin au bilinguisme institutionnel dans les services gouvernementaux.»

Qualifiant cette mesure de vexatoire et de mesquine, M. Raymond Labelle réplique : « Refuser de parler anglais au citoyen unilingue anglais qui cherche à payer ses impôts, se fait soigner, va au CLSC ou demande des renseignements sur son permis de conduire ne se fait pas en pratique de toute façon – c’est pour ça que ça n’arrivait pas même sous les gouvernements du PQ.»

Je ne saurais pas dire mieux.

Conclusion

Depuis des décennies, j’assiste impuissant à l’anglicisation de Montréal pendant que le PQ — qui devrait nous protéger — se déchire dans des débats futiles. Cette lettre publiée dans Le Devoir en est un exemple.

Le PQ est né d’un mouvement politique, le Mouvement Souveraineté-Association. Il a malheureusement conservé les attributs d’un simple mouvement politique, notamment un programme truffé de mesures ‘décoratives’.

Sont décoratives les mesures que personne n’a l’intention de mettre en application, qu’aucun gouvernement péquiste n’a implantées alors qu’il était au pouvoir, mais qui demeurent dans le programme parce que cela fait joli.

Or un programme politique se définit comme un ensemble de mesures qu’un parti s’engage à mettre en place une fois élu.

Retirer du programme des mesures indéfendables et les remplacer par d’autres, simples et efficaces, voilà ce que proposent les nouveaux dirigeants du PQ. Et voilà justement ce qui m’a incité à adhérer au PQ; voir ce parti renouveler son idéologie vieillissante, pleine de belles résolutions creuses.

Au cours des mois qui viennent, les propositions présentées aujourd’hui feront l’objet de discussions parmi les membres de chaque circonscription. Et ces propositions, amendées ou non, seront soumises à un congrès en septembre 2017 pour approbation finale.

Pour les signataires de cette lettre ouverte, qu’est-ce qui justifiait l’urgence de déchirer leurs chemises sur la place publique ? Sont-ils à ce point désespérés de ne pouvoir se faire entendre de la direction du PQ ?

Je suggèrerais à nos Chippendales de se rhabiller et d’en discuter calmement, entre amis, devant les diverses instances du PQ.

Références :
Langue française: Lisée rencontre de la résistance
La proposition de Jean-François Lisée est insuffisante
Le PQ et la francisation des immigrants

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le PQ et la francisation des immigrants

13 janvier 2017

Introduction

Sur le site du Devoir et de Radio-Canada, on apprenait hier que le Conseil national du Parti Québécois présentera demain une nouvelle politique relative à la francisation des immigrants.

Deux fois par année, un Conseil national réunit deux délégués provenant de chacune des circonscriptions du Québec.

Cet hiver, les propositions présentées à cette réunion feront l’objet de discussions parmi les membres de chaque circonscription. Et s’il y a des amendements, ceux-ci seront soumis à un congrès en septembre 2017.

Les propositions, amendées ou non, deviendront alors la position officielle du Parti québécois.

Francisation des immigrants

Parmi les candidats à l’immigration, le PQ fait la distinction entre les travailleurs qualifiés et les réfugiés.

Les travailleurs qualifiés

Les dirigeants du PQ veulent que 100% des travailleurs qualifiés parlent français avant d’arriver au Québec.

En d’autres mots, avant de recevoir un certificat de sélection, le candidat à l’immigration et son conjoint doivent démontrer une connaissance intermédiaire ou avancée du français. Sinon, leur demande sera rejetée.

Ce faisant, le PQ s’inspire de la Grande-Bretagne. Dans ce pays, l’immigrant ne peut pas mettre le pied sur le sol britannique s’il n’a pas déjà la connaissance de l’anglais. De manière conséquente, un citoyen britannique ne peut pas faire venir son conjoint de l’Étranger si cette personne ne parle pas l’anglais.

Ce qui distingue le Canada de la Grande-Bretagne, c’est que la Cour suprême du Canada a déjà fait savoir — dans son jugement relatif aux écoles passerelles — que la réunification des familles est de la plus haute importance à ses yeux. Conséquemment, il est probable que les tribunaux canadiens invalideront tout refus d’accorder la citoyenneté à un conjoint pour des motifs linguistiques. Alors qu’en Grande-Bretagne, la Cour suprême de ce pays a déjà reconnu la validité du refus de permettre l’immigration du conjoint qui ne parle pas l’anglais.

Tout cela pour dire que le PQ a raison d’étendre l’exigence de la connaissance du français au conjoint du requérant.

En comparaison, la Coalition avenir Québec propose d’obliger tous les membres d’une même famille à suivre un programme de francisation une fois qu’ils sont accueillis au Québec.

L’idée est excellente. Malheureusement, elle est anticonstitutionnelle; la Canadian Constitution de 1982 consacre le droit absolu de tout citoyen canadien de s’assimiler au groupe linguistique de son choix. Or la célèbre cause du niqab nous a appris que même les immigrants reçus ont des droits constitutionnels. En d’autres mots, même si on n’est pas encore citoyen canadien, on est protégé par cette constitution dès qu’on est admis au pays, ce qui invalide la proposition de la CAQ.

Une fois au Canada, l’immigrant ne peut donc pas être forcé à parler français. Alors que, demeuré à l’Étranger, il ne peut invoquer les dispositions de la Canadian Constitution.

Les réfugiés

Il serait cruel d’obliger un requérant en danger de mort dans son pays à demeurer chez lui jusqu’à ce qu’il ait appris le français.

Dans le cas des réfugiés, ceux-ci seraient admis au Québec et rémunérés pendant plusieurs mois pour apprendre le français. Un échec n’entrainerait cependant pas leur expulsion (contrairement à ce que propose la CAQ).

Les propositions extramigratoires

Dans sa tournée des salles de rédaction et des médias, le chef du PQ a également présenté des éléments de la politique linguistique de son parti qui dépassent le cadre strict de la francisation des immigrants.

La francisation des petites entreprises

M. Jean-François Lisée a réitéré l’intention du PQ d’étendre l’obligation d’obtenir un certificat de francisation aux entreprises de 25 à 49 employés. Cette obligation existe déjà pour les entreprises de cinquante employés et plus.

Cette mesure ferait d’une pierre deux coups.

Elle créerait une incitation majeure à apprendre le français puisqu’il deviendrait à peu près impossible pour un immigrant qui ne connait pas le français de décrocher un emploi au Québec.

De plus, elle règle les difficultés des Francophones québécois à être servis dans leur langue au Québec. En effet, la grande majorité des plaintes à l’Office de la langue française relatives à la langue de service concernent des petites entreprises (notamment des restaurants) dont le personnel ne parle pas le français.

Le Parti libéral s’y oppose catégoriquement. Quant à la CAQ, elle préfère émettre le vœu que les entreprises s’y soumettent volontairement alors qu’elles ont déjà toute la liberté de se franciser volontairement.

Pas de diplôme universitaire sans connaissance du français

Selon M. Lisée, vingt pour cent des jeunes angloQuébécois se déclarent unilingues. Plus précisément, le pourcentage d’étudiants anglophones qui connaissent le français diminue progressivement de la fin du secondaire à la fin des études universitaires. Selon le chef du PQ, aux CÉGEPs et aux universités anglophones, les jeunes angloQuébécois désapprendraient le français.

Cet unilinguisme constitue un handicap sur le marché du travail et pousse ces jeunes diplômés à s’exiler à la fin de leurs études. Cela constitue un gaspillage des fonds publics puisque la société québécoise paie la grande majorité du financement de ces maisons d’enseignement et perd alors les fruits de cet investissement.

Au niveau des CÉGEPs anglophones, le PQ exigera que tous les finissants réussissent un examen de français avant de recevoir leur diplôme. Conséquemment, le français devient alors l’équivalent d’une matière obligatoire.

Au niveau universitaire, les choses se compliquent.

Les universités anglophones du Québec accueillent des centaines d’étudiants étrangers (notamment américains) qui viennent recevoir dans une institution comme McGill une formation de très grande qualité à un cout substantiellement inférieur à celui exigé par les universités de leur pays.

Chacun d’eux investit annuellement plus de 17 000$ dans l’économie québécoise sous forme de frais de subsistance, ce qui correspond à un investissement annuel de millions de dollars dans l’économie québécoise pour l’ensemble de ceux-ci.

Selon Radio-Canada, M. Lisée entend dialoguer avec les universités anglophones du Québec afin de les convaincre que tout étudiant d’origine québécoise doit être appelé à démontrer sa capacité de travailler en français dans son domaine pour obtenir son diplôme. Dans le cas des étudiants étrangers, ils se verraient plutôt proposer un cours d’initiation au français.

On peut présumer de l’enthousiasme des universités anglophones à servir de police de la langue pour le compte du gouvernement péquiste et leur motivation crépusculaire à séparer le bon grain québécois de l’ivraie étrangère. Je vois déjà les caricatures postées sur les médias sociaux montrant les étudiants universitaires angloQuébécois décorés d’une fleur de lis jaune brodée à la poitrine pour les distinguer des autres…

Pour ne rien vous cacher, je crois que cette proposition est superflue.

Étendre la Loi 101 à toutes les entreprises d’au moins 25 employés fera en sorte qu’il sera très difficile pour l’étudiant unilingue anglais de trouver un emploi d’été lui permettant de financer ses études. D’où une motivation nouvelle à maintenir ses connaissances du français.

Les stages scolaires dans l’autre langue officielle

Selon Le Devoir, pour contrer l’attrait du CÉGEP anglais chez les étudiants provenant des écoles francophones, les CÉGEPs français seraient appelés à leur fournir un parcours d’anglais enrichi qui pourra comporter une session dans un CÉGEP anglais.

Voilà une idée très intéressante.

De nos jours, la langue anglaise est l’équivalent de ce qu’était la langue romaine au sein du clergé chrétien du Moyen-Âge. La connaissance de l’anglais est un atout incontestable. Conséquemment, la grande majorité des parents québécois souhaitent que leurs enfants puissent comprendre et s’exprimer en anglais.

Pour répondre à cette préoccupation, le Parti libéral a décidé que la sixième année du primaire serait une année d’immersion en anglais pour tous les étudiants du Québec. Cette mesure rencontre d’énormes difficultés d’application.

Dans beaucoup de classes du Québec, un seul professeur est responsable de l’enseignement de toutes les matières en sixième année, sauf la gymnastique et peut-être l’enseignement religieux. Pour l’enseignant, il y a un gouffre entre s’exprimer en anglais et tout enseigner dans cette langue, ce qui signifie la maitrise de tous les termes techniques utilisés en physique et en sciences naturelles, par exemple.

Proposer que les élèves francophones effectuent un ou plusieurs stages dans un CÉCEP anglais — et réciproquement, un ou plusieurs stages des élèves anglophones dans un CÉGEP francophone — serait un moyen efficace de favoriser la cohésion sociale de tous les Québécois, peu importe leur langue d’origine.

Permettre l’école anglaise aux enfants des soldats canadiens

Selon ce que j’apprends de l’éditorialiste Michel David du Devoir, la CAQ aurait fait tout un scandale en 2013 dans la région de Québec (où elle est influente) à propos de la petite Sandra, la fille d’un militaire blessé en Afghanistan. Celle-ci faisait partie d’une poignée d’enfants de soldats francophones auxquels le gouvernement Marois voulait retirer le privilège de fréquenter l’école anglaise.

Pour la CAQ et ses partisans, les sacrifices consentis sur les champs de bataille justifiaient le privilège de se soustraire à une règle applicable à tous les autres francophones du Québec.

Dans un pays étranger, les envahisseurs se donnent tous les droits. Mais pas à leur retour dans leur pays d’origine.

Le principe fondamental de la Loi 101, c’est que seule l’école publique française est gratuite. Comme l’école publique italienne est la seule gratuite en Italie. Ou l’école publique allemande en Allemagne. Font exception à cette règle, les angloQuébécois qui ont le droit acquis et constitutionnel d’accéder à l’école publique anglaise.

Tous les autres parents — qu’ils soient francophones ou allophones — peuvent, s’ils le désirent, faire instruire leurs enfants en anglais à la condition que ce soit à leurs frais, c’est-à-dire en les envoyant à l’école privée anglaise. Mais il n’ont pas droit à l’école publique anglaise, réservée aux seuls angloQuébécois.

Le principe est simple; le peuple francoQuébécois refuse de financer sa propre extinction en payant l’école publique anglaise aux enfants des néoQuébécois.

Toutefois, en 1982, les provinces anglophones ont adopté la Canadian Constitution à l’issue d’une ultime séance de négociation à laquelle le Québec n’a pas été invité.

Depuis ce temps, tous les moyens sont bons pour tenter d’invalider des pans entiers de la Loi 101. Multiplier les cas d’exception — comme c’est le cas au sujet de ces militaires francophones — ne fait que donner des arguments à ceux qui soutiennent que la Loi 101 est une législation discriminatoire et injuste.

Le désir de M. Lisée de supprimer les irritants qui divisent les Québécois est légitime surtout, dit-il, lorsque cela ne concerne que très peu de personnes. C’est là une attitude pragmatique.

Toutefois, on doit réaliser qu’il existe une distinction fondamentale entre favoriser l’apprentissage d’une langue seconde par les étudiants francophones et autoriser la transformation d’un jeune québécois en citoyen anglophone. Je ne vois aucune raison de faciliter la tâche aux familles francophones qui veulent s’assimiler à l’anglais.

Qu’il s’agisse de trois enfants ou d’un demi-million de personnes, le PQ ne peut favoriser l’anglicisation du Québec. Cela est une hérésie idéologique.

Afin de favoriser l’élection du PQ, on peut transformer la Loi 101 en fromage gruyère parce que les sondages montrent que beaucoup de Québécois le souhaitent. C’est la stratégie adoptée lors de cette élection basée sur la Charte de la laïcité. Avec le résultat qu’on sait.

Une règle d’or en politique est de ne jamais saper sa base électorale. Or celle du PQ est composée de farouches défenseurs de la Loi 101. Il est donc préférable, même si le temps presse, d’entreprendre une campagne qui vise à transformer l’opinion publique en espérant recueillir les fruits de ce labeur aux prochaines élections.

Défendre ou promouvoir le français ?

Aux prochaines élections, les Québécois qui voudront chasser le Parti libéral du pouvoir auront le choix entre la CAQ et le PQ. Pour simplifier ce choix, le PQ devra se distinguer de cette formation politique.

Or la CAQ a pris un virage qui se veut nationaliste, dans le but évident de gruger la clientèle des Indépendantistes ‘mous’, tout en butinant les fédéralistes déçus du PLQ. Cette stratégie est brillante et sera gagnante si le PQ tarde à se décaquiser.

Le PQ a accompli un pas important dans cette voie en abandonnant sa charte de la laïcité.

Sur le plan linguistique, les mesures préconisées par la CAQ reposent sur la promotion de français sans l’assortir de mesures coercitives.

Nos amis angloCanadiens n’ont pas eu la naïveté de miser sur la séduction irrésistible de la langue de Shakespeare. L’anglais a été imposé aux Métis et aux minorités francophones du Canada par l’abolition des écoles françaises et la punition des écoliers qui parlaient français entre eux dans les cours de récréation. Quant aux peuples qui parlaient une langue autochtone, c’est le kidnappage de leurs enfants dans des pensionnats anglophones qui les a anglicisés.

Ceux qui veulent qu’on entreprenne une campagne de promotion du français oublient que des milliers de scénaristes, de cinéastes, de dramaturges, de comédiens, de paroliers, de chanteurs, de romanciers et de poètes s’affairent déjà depuis plus d’un siècle à faire aimer notre langue.

Si on tient compte des émissions de télévision et de radio, des films, des pièces de théâtre, des chansons, des romans, des bandes dessinées et des livres de poésie, le cout des moyens utilisés pour rendre notre langue attrayante peut être évalué à plusieurs centaines de millions de dollars annuellement.

Peut-on faire mieux ? Il serait tentant de répondre cette lapalissade selon laquelle on peut toujours faire mieux. Mais en réalité, nos créateurs sont déjà acclamés partout à travers le monde. Il nous faut donc reconnaitre qu’on pourrait difficilement faire mieux.

Pour une nation de huit-millions de personnes, cet effort promotionnel en faveur du français est herculéen.

Et pourtant, de 2006 à 2011 (date du dernier recensement publié), la proportion de Francophones a reculé de 1% sur l’ile de Montréal et presque autant dans ses banlieues.

Une telle diminution, en aussi peu de temps, est extrêmement préoccupante.

On juge un arbre à ses fruits. Le laisser-faire libéral mène directement à l’extinction du peuple francoQuébécois. Et les moyens incitatifs de la CAQ aboutiront au même résultat.

C’est cela qu’il faut démontrer aux Québécois et non occulter les menaces qui planent sur notre avenir par un discours jovialiste et faussement rassembleur.

Conclusion

À l’exception de l’anglicisation des enfants des militaires canadiens (un détail auquel je suis farouchement opposé), je partage les principales mesures proposées par la nouvelle direction du PQ.

Plus précisément, l’assujettissement de toutes les entreprises de 25 employés ou plus à la Loi 101 et l’adoption de la solution britannique en matière d’immigration sont deux mesures d’une redoutable efficacité pour stopper l’anglicisation de Montréal.

Justement pour cette raison, le PQ ne pourra pas échapper à la controverse. Toutefois, plus la CAQ criera au scandale, plus elle révèlera la superficialité de son virage nationaliste. Quant au PQ, il lui sera facile de rallier une bonne partie des Québécois francophones (notamment dans la région de Montréal) à l’importance de défendre le français.

Compte tenu du morcèlement des allégeances politiques, de nos jours, il n’en faut pas plus pour prendre le pouvoir.

Ceci étant dit, on doit se rappeler qu’une politique de francisation des immigrants n’est pas destinée à couvrir tous les aspects d’une politique linguistique.

La langue de travail, la langue de service et l’affichage commercial sont d’autres volets d’une telle politique. Or ils ne sont pas abordés ici ou ils le sont indirectement.

Si on passe sous silence certaines propositions extramigratoires controversées, la nouvelle politique de francisation des immigrants est la plus sérieuse et la plus efficace jamais proposée au sein de cette formation politique.

Références :
Cap sur la « francisation 100% » pour le Parti québécois
Données linguistiques de Montréal selon le recensement de 2011
Franciser sans diviser
Immigrants’ spouses must speak English before entering UK
La CAQ veut rendre la francisation obligatoire pour les immigrants
La Charte de la laïcité : un mauvais départ
L’augmentation des frais de scolarité
Le français en péril — Deuxième de trois volets
Le souvenir de Sandra

Parus depuis :
Laval s’anglicise (2018-01-16)
Un immigrant belge dénonce le recrutement à l’étranger du Nouveau-Brunswick (2018-04-25)
Quand il faut parler anglais pour travailler à Montréal (2021-03-10)
Augmentation des résidents non permanents dans les écoles anglaises (2021-03-19)
Une vision pour demain (2021-03-20)
La maîtrise du français, nouvel enjeu de management (2021-10-25)
Immigration Canada recrute des agents uniquement anglophones au Québec (2021-11-04)
La francisation des immigrants suffit-elle pour assurer la pérennité du français au Québec ? (2022-03-01)
Rejet des étudiants francophones : le ministre du Travail du Québec interpellé (2022-03-31)
Des élèves qui peinent à parler français malgré les classes d’accueil (2023-02-02)
Italian government seeks to penalize the use of English words (2023-04-01)

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés à l’anglicisation du Québec, veuillez cliquer sur ceci

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Écrit par Jean-Pierre Martel


L’intégration des immigrants en Grande-Bretagne

5 janvier 2017
Concentration des néoBritanniques

Commandé en 2015, le rapport Casey a été remis au gouvernement britannique le 5 décembre dernier.

Ex haute fonctionnaire et membre de la liste des cent femmes les plus influentes de Grande-Bretagne, Mme Louise Casey avait pour mandat de diriger une étude au sujet de l’intégration des communautés culturelles, religieuses et raciales dans son pays.

Résultat d’un passé colonial qui s’est étendu sur tous les Continents, le multiculturalisme anglais a fait de la Grande-Bretagne un grand laboratoire de diversité ethnique.

Pourtant, en 2015-6, on y comptait officiellement 62 518 crimes haineux, une augmentation de 19% en comparaison avec l’année précédente. On estime que leur nombre réel est quatre fois supérieur.

L’aptitude d’une personne à migrer vers une couche socioéconomique supérieure à celle de ses parents est plus facile pour un Britannique ‘de race blanche’; c’est le cas de 43% des hommes ‘blancs’ et de 45,6% des femmes ‘blanches’.

Chez la première génération de Britanniques nés d’immigrants africains, indiens, pakistanais ou bangladeshis, cette proportion n’est que de 34,3% chez les hommes et de 27,6% chez les femmes.

Le rapport formule douze recommandations.

  1. L’État devrait adopter une politique destinée à favoriser la cohésion sociale. À cette fin, la Grande-Bretagne devrait soutenir les initiatives locales vouées à :
    • la promotion de la connaissance de la langue anglaise
    • l’émancipation de groupes de femmes marginalisées
    • l’employabilité des groupes les plus marginalisés
    • l’augmentation de la participation des femmes au travail
    • la maitrise des technologies de l’information par les parents provenant de milieux défavorisés
    • l’augmentation de la mixité sociale chez les jeunes, entre autres par la pratique du sport
    • l’adoption d’autres programmes mettant clairement l’accent sur la réduction de la ségrégation dans certains milieux.
  2. Créer une liste d’indicateurs de bris de cohésion sociale — nombre de crimes haineux, déficience de la connaissance de la langue anglaise, etc.— et en faire le suivi de manière périodique.
  3. Favoriser l’émulation en faisant connaitre les initiatives locales qui auront été couronnées de succès.
  4. La promotion à l’école de la législation, de l’histoire et des valeurs britanniques. Sont jugées ‘valeurs britanniques’ :
    • la Démocratie,
    • le respect du Droit,
    • la liberté,
    • l’égalité,
    • la liberté d’expression,
    • le respect mutuel, la compréhension interconfessionnelle et la tolérance.
  5. Faire connaitre auprès des personnes intéressées à immigrer en Grande-Bretagne, quels seront leurs droits et obligations et mettre sur pied des mesures d’accompagnement auprès des immigrants qui en ont le besoin dès leur arrivée en sol britannique.
  6. Imposer un serment d’intégration aux valeurs britanniques à l’arrivée au pays plutôt qu’au moment de la remise du certificat de citoyenneté.
  7. Travailler à l’intégration des diverses collectivités et accroitre les occasions de mixité scolaire.
  8. Mettre sur pied des programmes destinés à combattre les lacunes en anglais et les obstacles culturels à l’accès au marché de l’emploi.
  9. Prioriser la connaissance de l’anglais chez les adultes là où cela est nécessaire.
  10. Étudier dans quelle mesure la rénovation domiciliaire et les politiques de logement social peuvent favoriser l’intégration des différentes communautés culturelles.
  11. S’assurer que l’instruction à domicile et l’éducation privée ne soient pas des obstacles à l’intégration.
  12. Modifier le serment prêté par les représentants de l’État de manière à enchâsser l’obligation de respecter les valeurs britanniques.

Certaines de ces recommandations rejoignent celles exprimées à de multiples reprises au Québec et qui, en dépit de leur caractère raisonnable, ont suscité les accusations de xénophobie et le repli identitaire.

Comme ces créateurs québécois dont le talent ne nous semble évident qu’une fois leur consécration à l’Étranger, ces suggestions ont probablement plus de chance d’être adoptées ici maintenant qu’elles ont été légitimées dans un pays reconnu pour sa tolérance aux différences culturelles.

Voilà pourquoi la lecture des 199 pages du rapport Casey est recommandée à quiconque veut comprendre les défis à l’intégration auxquels font face les sociétés occidentales.

Référence :
The Casey Review — A review into opportunity and integration

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Écrit par Jean-Pierre Martel