Un petit tour en REM

12 mars 2024




 
Cet après-midi, j’ai effectué mon premier déplacement en REM (Réseau express métropolitain).

De la Gare Centrale à Brossard, quatre stations sont en service.

Puisque tout est automatisé, au wagon de tête et à celui de queue, les passagers ont la vue sur la ville qu’aurait le conducteur s’il y en avait un.

La partie la plus photogénique de ce trajet se trouve entre la Gare Centrale et la Station Ile-des-Sœurs (que j’ai parcourue quatre fois).

Voici trois photos que j’en ai rapportées.

Détails techniques : Sigma DP1 infrarouge à spectre complet.
Pré-traitement : filtres Fuchsia pour Foveon (filtre bleu B+W KB20 + filtre vert jaunâtre B+W 061 + filtre bleu LBC8 de Kenko + filtre anti-infrarouge partiel GRB3/KG3)
Post-traitement léger.
1re photo : 1/60 sec. — F/4,5 — ISO 100 — 16,6 mm
2e  photo : 1/30 sec. — F/4,5 — ISO 100 — 16,6 mm
3e  photo : 1/20 sec. — F/4,5 — ISO 200 — 16,6 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Ukraine et Russie : l’échec cuisant de Victoria Nuland

11 mars 2024

Introduction

Aux États-Unis, le secrétariat d’État est l’équivalent chez nous du ministère des Affaires étrangères.

Jusqu’à la semaine dernière, Victoria Nuland y était la troisième personne en ordre d’importance.

Depuis vingt ans, elle fut l’éminence grise de six présidents consécutifs au sujet des relations américaines avec la Russie. Sauf au cours du mandat de Donald Trump

Le changement de régime en Russie

Impitoyable pour ses ennemis politiques — comme le sont tous les dirigeants autoritaires — Vladimir Poutine est froid, calculateur, et probablement le chef d’État le plus compétent parmi ceux actuellement au pouvoir à travers le monde.

En 2000, Vladimir Poutine a hérité d’un pays devenu l’ombre de lui-même. Un quart de siècle plus tard, sous sa gouverne, la Russie a connu un spectaculaire redressement économique et dernièrement, une adaptation tout aussi surprenante aux sanctions occidentales.

Pour Victoria Nuland, l’hégémonie américaine ne peut tolérer quelqu’un comme lui. Malheureusement pour elle, les États-Unis ont raté une belle occasion.

Au lendemain de l’effondrement du régime communiste, la Russie était à genoux. L’espérance de vie y avait chuté d’un an en raison de la misère qui y régnait (notamment chez les retraités) et de l’augmentation de l’alcoolisme. Concrètement, cette diminution de l’espérance de vie, ce sont des millions de Russes qui sont morts prématurément dans l’indigence.

Au début de son régime, alors que l’URSS s’était disloquée une décennie plus tôt, Vladimir Poutine espérait que la Russie serait admise au sein de l’Otan et participerait ainsi au maintien de l’ordre mondial.

L’Otan a conclu un certain nombre de partenariats avec les pays de l’Europe de l’Est (y compris la Russie), mais a fait passer les autres avant elle. Si bien que la Russie, bernée par l’Otan, s’est retrouvée entourée d’ennemis militaires.

Cela s’est produit avant que Victoria Nuland acquière l’influence qu’elle avait jusqu’à la semaine dernière.

La tâche qu’elle s’est donnée a été de travailler au renversement du régime de Poutine.

Sous son influence, les États-Unis ont mis tous leurs œufs dans le panier d’Alexeï Navalny. Ce dernier fut un leadeur charismatique d’une grande intelligence.

Grandement exagérée par nos médias, sa popularité était limitée aux adolescents (qui ne votent pas) et aux jeunes adultes branchés sur les médias sociaux.

Dans l’ensemble de la population russe, sa popularité n’a jamais dépassé cinq pour cent des intentions de vote. Pourquoi ? Parce les Russes ne sont pas stupides.

Les États-Unis n’ont jamais caché leur préférence pour Navalny. Or quel peuple voterait pour le candidat chouchou de ses ennemis militaires ? Aux yeux des Russes, Navalny était le cheval de Troie de l’Occident.

Actuellement, la principale opposition politique à Vladimir Poutine, c’est le Parti communiste (à environ vingt pour cent des intentions de vote).

Quant aux sanctions économiques draconiennes décidées contre la Russie, leur but était, dans l’esprit de Nuland, de provoquer l’effondrement de l’économie russe et de manipuler les Russes afin qu’ils se soulèvent contre Poutine.

Ce n’est pas vraiment ce qui est arrivé.

Au contraire, en saisissant les avoirs des oligarques russes à l’Étranger, les pays occidentaux ont interrompu la fuite des capitaux hors de Russie. Dorénavant, le seul endroit au monde où ils peuvent faire fructifier leur fortune, c’est en investissant dans l’économie russe. Et pour ce faire, ils doivent dorénavant baiser les mains de Poutine.

Le changement de régime en Ukraine

C’est en 2004 que les États-Unis commencèrent à se mêler directement des affaires intérieures de l’Ukraine. Lors de la campagne électorale présidentielle de cette année-là, les États-Unis dépensèrent 65 millions de dollars pour soutenir le candidat pro-occidental.

À l’élection présidentielle de 2010, c’est le candidat pro-russe qui fut élu pour cinq ans. Au grand déplaisir de Washington. En plus, à l’élection législative de 2012, son parti fit élire suffisamment de députés pour former un gouvernement minoritaire.

Toutefois, en novembre 2013, les dirigeants ukrainiens annonçaient leur décision de renoncer à une association économique avec l’Union européenne au profit d’une autre, plus avantageuse, avec la Russie.

Cette décision provoqua des manifestations violentes sur la place de l’Indépendance de Kyiv qui durèrent jusqu’en février.

Profitant de ce climat insurrectionnel, Victoria Nuland conçut un plan qui visait non seulement à renverser le président au pouvoir, élu démocratiquement, mais à provoquer un changement de régime.

Pour ce faire, il fallait un évènement si odieux que les Ukrainiens se révolteraient contre les responsables présumés, c’est-à-dire à la fois le président pro-russe et son gouvernement. À cette fin, quoi de mieux qu’un massacre.

Précédemment, en raison des violences sur la place de l’Indépendance, les autorités avaient déjà tenté, en vain, d’y interdire les manifestations. Puis ils avaient essayé de déloger les protestataires par la force.

Le massacre du 20 février changea la donne. Il fit 49 tués (et 157 blessés) chez les manifestants, et 4 tués (et 39 blessés) parmi les forces de l’ordre. À juste tire, il souleva l’indignation de l’ensemble de la population ukrainienne.

Washington n’a même pas eu le besoin de demander à ses ONG de répandre la rumeur selon laquelle c’était la faute du président autoritaire pro-russe. Pour tout le monde, le responsable ne pouvait être que lui.

Et ce qui devait arriver arriva. Peu après, le président s’enfuit à l’Étranger et un peu plus tard, le parlement déclencha des élections anticipées à l’issue desquelles les partis pro-occidentaux prirent le pouvoir.

Victoria Nuland était si certaine de son coup que deux semaines avant le massacre, elle faisait savoir à l’ambassadeur américain à Kyiv les exigences de Washington quant à la composition du prochain gouvernement ukrainien.

Effectivement, plusieurs dirigeants pro-nazis (compromis secrètement dans le massacre) héritèrent de postes ministériels clés.

Mais Nuland connaissait suffisamment l’Ukraine pour savoir que si ceux-ci sont pro-occidentaux, ils sont surtout hypernationalistes. Donc, pas aussi serviles qu’on pourrait le penser.

Ce qui était primordial pour Washington, c’est que la personne nommée au poste de ministre de l’Économie soit vouée aux intérêts américains. Pour ce faire, Victoria Nuland exigea que ce soit Natalie Jaresko, cheffe de la section économique de l’ambassade des États-Unis en Ukraine.

Celle-ci obtint la citoyenneté ukrainienne d’urgence le 2 décembre 2014, le jour de sa nomination comme ministre de l’Économie. On aimerait que le ministère canadien de l’Immigration soit aussi efficace…

Mais elle ne demeura à ce poste que deux ans.

Sous le prétexte de favoriser la modernisation du secteur agricole par le biais d’investissements étrangers, son ministère fit adopter une loi qui libéralisait la vente des terres ukrainiennes, les plus fertiles d’Europe.

De 2014 à aujourd’hui, la moitié du territoire ukrainien — à l’exclusion donc des villes et du territoire occupé par la Russie — est devenue la propriété de spéculateurs américains.

La guerre russo-ukrainienne a donc été une occasion pour les États-Unis de spolier l’Ukraine.

Quand la poussière de cette guerre retombera, les Ukrainiens réaliseront à quel point les États-Unis se sont moqués d’eux.

La vulnérabilité militaire de l’Occident

Pour les États-Unis, le conflit russo-ukrainien est devenu un gouffre financier sans fin.

Cette guerre a fait fondre leurs réserves d’armement. Il a révélé qu’une guerre de haute intensité nécessitait des quantités colossales de munitions. Beaucoup plus qu’on pensait.

Si bien que le niveau estimé des réserves stratégiques est non seulement trop bas, mais en soutenant l’Ukraine comme ils l’ont fait, les États-Unis se sont mis dans un état de vulnérabilité dont la première responsabilité incombe à Victoria Nuland, aveuglée par son anticommunisme.

De plus, l’idée de rapprocher les missiles nucléaires américains pointés contre la Russie en les déplaçant de la Roumanie à l’Ukraine est moins utile qu’avant puisque cette guerre a provoqué un basculement géostratégique que personne (y compris moi-même) n’avait anticipé; la perte de la neutralité militaire de la Finlande.

Que les États-Unis déplacent leurs missiles en Ukraine ou en Finlande, c’est pareil. Donc l’Ukraine, à bout de souffle, ne leur sert plus à grand-chose.

Plus grave encore, avant cette guerre, on savait déjà que toute guerre était ruineuse. Mais on découvre maintenant à quel point.

Du coup, les investissements auxquels les pays membres de l’Otan se sont engagés volontairement en 2014 — deux pour cent du PIB — apparait dix ans plus tard largement insuffisants pour faire face à une Troisième Guerre mondiale.

En investissant beaucoup plus, les pays occidentaux — déjà très endettés — seront incapables de faire face à leurs obligations courantes et de s’adapter aux changements climatiques… à moins de piller l’argent caché dans les paradis fiscaux.

Dans la majorité des pays, cela nécessiterait des changements constitutionnels afin que le droit fiscal ne soit plus couvert par le secret professionnel. Des changements auxquels toute la profession juridique s’opposera.

Bref, en raison de la délocalisation de leur secteur manufacturier vers le Sud global, les pays occidentaux n’ont plus la capacité industrielle de soutenir un effort de guerre de grande envergure.

De plus, en militarisant l’accès au dollar américain, les États-Unis ont retiré à leur devise son statut de pilier sécuritaire des réserves de change. Pour beaucoup de pays du Sud global, il est dorénavant imprudent de compter aveuglément sur cette devise.

Voilà pourquoi le yuan chinois est devenu la deuxième devise utilisée pour les transactions financières, encore loin derrière le dollar, passant de 1,89 % en janvier 2012 à 8,66 % en octobre 2023.

Ceci étant dit, faisons le bilan.

Conclusion

Navalny est mort. Poutine est plus fort que jamais. Les sanctions occidentales ont jeté la Russie dans les bras de la Chine. En renonçant à l’avantage concurrentiel que leur donnait l’approvisionnement en hydrocarbures russes, l’industrie lourde européenne est en crise.

Tout cela, c’est l’effondrement de la politique que poursuivait depuis vingt ans Victoria Nuland. Sa démission ne sonne pas vraiment le glas de l’hégémonie américaine; l’économie américaine progresse, mais aux dépens d’alliés dont elle aurait besoin en cas de conflit armé avec la Chine.

Consciente de ce fiasco, à l’approche d’un retour possible de Donald Trump à la Maison-Blanche, Victoria Nuland a préféré quitter le Titanic.

À l’heure où le PIB des BRICS dépasse maintenant celui des pays du G7, les États-Unis devront partager avec la Russie et la Chine la responsabilité de maintenir l’ordre mondial.

À défaut de quoi, celui-ci s’effondrera.

Références :
Le yuan, deuxième devise pour les transactions financières
Natalie Jaresko
Ukraine : l’histoire secrète de la révolution de Maïdan
Victoria Nuland

Compléments de lecture : L’engrenage ukrainien

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Des Gravol™ pour Amira Elghawaby

10 mars 2024


Avant-propos : Le texte qui suit décrit des scènes qui pourraient heurter la sensibilité de certains lecteurs.

À l’époque où elle n’était que militante, Amira Elghawaby avait déclaré qu’entendre dire que les francoQuébécois étaient un peuple opprimé, cette idée provoquait en elle une telle révulsion que cela lui donnait envie de vomir.

Depuis ce temps, Ottawa l’a nommée représentante spéciale du Canada dans la lutte contre l’islamophobie, un poste créé spécialement pour elle.

Au cours des dernières semaines, des dizaines de milliers de civils musulmans sont tués dans la bande de Gaza grâce à la complicité d’Ottawa.

L’Aviation royale canadienne a aidé Israël à rapatrier ses soldats de l’Étranger et le Canada lui vend des armes. Notre pays a même voulu couper les vivres à l’UNRWA, une mauvaise décision sur laquelle il est revenu récemment après le tollé que cela a provoqué.

Des dizaines de milliers de civils gazaouis (donc musulmans) sont morts. Encore plus ont été blessés.

De retour d’un hôpital où il œuvrait dans la bande de Gaza, un médecin français racontait que, dans son établissement, entre 6 et 30 césariennes sont pratiquées quotidiennement à froid.

Cela signifie que dans chacun de ces cas, le médecin ouvre l’abdomen de sa patiente et lui coupe l’utérus au bistouri, en extrait le bébé dont il coupe le cordon ombilical, puis recoud sa patiente pendant que celle-ci — si elle ne s’est pas évanouie — crie de douleur.

Puisque les Gazaouis disposent en moyenne de 1½ à 2 litres d’eau par jour, on s’en sert exclusivement pour boire et pour manger. Conséquemment, on ne se lave pas.

Voilà pourquoi beaucoup de blessures s’infectent et se gangrènent.

Jusqu’ici, plus de dix-mille enfants ont été amputés à froid.

Concrètement, cela signifie qu’on met un torchon dans la bouche de l’enfant. Et pendant que des adultes l’empêchent de bouger, le chirurgien lui scie le genou, le coude ou l’épaule afin d’empêcher l’infection de se disséminer dans tout le corps du bambin.

Dernièrement, alors que certains pays occidentaux larguaient par avion des caisses de vivres au-dessus de la bande de Gaza, l’armée israélienne en a profité pour mitrailler et tuer 118 affamés (en plus d’en blesser 760 autres) parmi ceux qui se précipitaient sur la nourriture. Un incident qu’on a appelé le Massacre de la farine.

Comme nous tous, Mme Elghawaby assiste quotidiennement au premier génocide télévisé de l’histoire de l’Humanité.

On aurait pu s’attendre à ce que Mme Elghawaby démissionne pour se dissocier des conséquences, pour les civils musulmans, de l’appui inconditionnel de son gouvernement à l’égard d’Israël ou, au moins, qu’elle exprime publiquement ma dissidence à ce sujet.

Pourtant, on ne l’entend pas.

Est-elle victime d’un bâillon imposé par Ottawa ? C’est possible.

Mais on peut également supposer que ce qui l’empêche de prendre la parole publiquement, ce sont ses vomissements répétitifs, elle si sujette aux nausées…

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Un exemple du moralisme regrettable du Canada

9 mars 2024

Le 6 mars dernier, le texte ‘La politique étrangère woke du Canada ou l’art de se peinturer dans le coin’ reprenait les reproches du politicologue Jean-François Caron à l’égard du gouvernement canadien.

Cela peut s’illustrer dans l’exemple suivant.

Après quelques jours d’hésitation, on annonçait hier la décision du Canada de rétablir son financement à l’Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA).

La décision canadienne de cesser ce financement avait provoqué, à juste titre, un tollé presque unanime. Voilà pourquoi nous saluons la décision de le rétablir.

Toutefois, en prenant finalement cette bonne décision, Ottawa ne pouvait pas s’empêcher d’ajouter, comme une mouche sur le potage :

Il faut avoir une tolérance zéro pour toute activité terroriste au sein des Nations unies et cela inclut l’UNRWA.

Comme si l’Onu avait tendance à s’adonner au terrorisme et que le Canada s’était donné la mission de l’avoir à l’œil.

Sur la scène internationale, le Canada n’est que le perroquet de son puissant voisin. Mais à force de voir les pays s’incliner devant des menaces dont il n’est que l’écho, le Canada surestime la puissance qu’il croit posséder.

Si le Canada souhaite de nouveau être élu au Conseil de sécurité de l’Onu, il devra cesser de donner des leçons blessantes à ceux qui ne les méritent pas.

Références :
L’aide humanitaire à Gaza : l’hypocrisie du Canada
Le gouvernement Trudeau confirme qu’il rétablit le financement de l’UNRWA

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Écrit par Jean-Pierre Martel


1653, l’année où Jeanne Mance sauva le Canada

8 mars 2024


Avant-propos : Depuis quelques années, pour célébrer la Journée internationale des femmes (le 8 mars), ce blogue inverse ce jour-là la règle grammaticale selon laquelle le genre masculin l’emporte sur le genre féminin.

Mais comme dans le texte qui suit, il n’y a pas grand-chose à inverser, on retiendra l’à-propos de célébrer aujourd’hui la mémoire d’une géante de notre histoire.

À juste titre, Jeanne Mance est considérée comme co-fondatrice de Montréal, une ville où elle a œuvré et où elle est décédée en 1673.

Née en 1606, Jeanne Mance est issue de la bourgeoisie de robe; son père était procureur du roi à Langres (en Champagne). Il avait épousé la fille d’un confrère.

À l’époque, la population de la France était environ le double de la population actuelle du Québec. Si bien que dans le petit monde de la noblesse et la haute bourgeoisie, tout le monde connaissait à peu près tout le monde.

N’ayant peu d’inclinaison pour la vie religieuse ni pour le mariage, Jeanne Mance avait choisi de se consacrer aux soins des malades. Pour ce faire, elle s’occupait d’œuvres charitables.

Or sa famille dévote comptait plusieurs ecclésiastiques qui avaient séjourné en Nouvelle-France. Si bien qu’à leur retour, ils racontaient leur pénible traversée, les immenses paysages sauvages qu’ils ont vus, et les peuples étranges qu’ils ont rencontrés et qu’on appelait les ‘Sauvages’ (ce qui, à l’époque, qualifie les gens qui vivent dans les forêts).

Alors que l’élan missionnaire s’empare du milieu catholique français, Jeanne Mance décide elle aussi de tenter l’aventure.

Elle se rend à Paris en 1630 où elle rencontre, entre autres, Angélique de Bullion, veuve du surintendant des finances de France dont elle avait hérité de l’immense fortune.

Or cette dernière caressait l’idée d’établir un hôpital quelque part au Canada (le nom donné au XVIIe siècle à la vallée du Saint-Laurent).

À leur quatrième rencontre, Madame de Bullion demande à Jeanne Mance si elle souhaiterait réaliser son projet. Une proposition que celle-ci accepte.

À cette fin, elle se rend en 1641 à La Rochelle. C’est de ce port que partaient les bateaux pour la Nouvelle-France. Mais avant de partir, elle rencontre Paul de Chomedey de Maisonneuve, chef d’une expédition qui doit fonder une colonie sur l’ile du mont Royal (alors inhabitée).

Celui-ci se cherche une femme vertueuse et compétente pour gérer cette colonie. Enthousiaste, Jeanne Mance accepte cette responsabilité.

Cette rencontre détermine donc le lieu où Jeanne Mance œuvrera: Ville-Marie (soit, de nos jours, Montréal).

Après la construction d’une palissade et des cabanes en rondins (qui bientôt cèdent leur place à des maisons de bois plus confortables), Ville-Marie prend l’aspect d’un fort en bois.

Toutefois, en 1653, la situation de Ville-Marie devient précaire.

Quatre ans plus tôt, les Iroquois avaient détruit la Huronie (qui était située sur une péninsule au milieu des Grands Lacs).

Ces vastes étendues d’eau permettaient de transporter des marchandises sur de grandes distances en se fatiguant beaucoup moins que par voie terrestre.

En tant que peuple sédentaire et exportateur de maïs, les Hurons-Wendats jouissaient de l’amitié de nombreux autres peuples autochtones qui eux étaient nomades. Ce sont les fourrures obtenues en échange de maïs qui permettaient aux Hurons-Wendats d’être impliqués dans leur commerce.

La Huronie occupait donc une position stratégique dans ce commerce.

Rapidement, les Hurons-Wendats en étaient venus à fournir entre 50 % et 60 % des peaux de castor exportées vers la France.

Alors que l’étau se resserre sur Ville-Marie, menacée par les Iroquois, la population du fort n’est pas suffisante pour résister à une attaque de grande ampleur que les Iroquois pourraient déclencher.

Voilà pourquoi Jeanne Mance s’adresse à sa mécène pour lui demander de financer la venue d’une centaine d’hommes à Ville-Marie. Ce que Madame de Bullion accepte.

Jeanne Mance offre alors à De Maisonneuve la somme de 22 000 livres, correspondant littéralement à la valeur de 22 000 livres d’argent. Cette somme équivaut, de nos jours, à un million de dollars.

L’arrivée à Ville-Marie d’un grand nombre de personnes — parmi lesquelles Marguerite Bourgeoys — relancera la vigueur de la colonie et l’empêchera de connaitre le même sort que la Huronie.

Référence : La découverte de nouvelles archives révèle que Jeanne Mance a donné l’équivalent d’un million de dollars pour sauver Montréal en 1653

Compléments de lecture :
Gabriel Sagard en Huronie
Les Sauvages

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le pronom ‘madame’ est-il sexiste ?

7 mars 2024

Lors de la rédaction du texte publié hier sur ce blogue, j’ai appris qu’une experte en sécurité nationale (Stephanie Carvin) déteste, au point de se mettre en colère, lorsqu’on utilise le pronom ‘madame’ pour la désigner.

On aurait pu penser que c’est parce que cette personne possède une identité de genre masculine. Or les photos d’elle sur l’internet montrent que ce n’est pas le cas.

Une deuxième explication pourrait être culturelle. Puisque Stephanie Carvin écrit son prénom sans accent — contrairement à ce que j’ai écrit originellement hier — présumons qu’elle est anglophone.

Or il est courant chez les Anglophones de s’appeler entre eux par leurs prénoms. Même lorsqu’ils ne se connaissent pas. Pour nous, Francophones, cette fausse familiarité nous apparait vulgaire. Mais pas à leurs yeux. Donc, il est possible que Stephanie Carvin tienne mordicus à ce qu’on l’appelle ‘Stephanie’.

Une troisième explication est qu’elle aurait vu le film ‘Madame Claude’ sur Netflix et s’imagine qu’en français, le pronom ‘madame’ désigne la propriétaire d’un bordel. Ce qui est inexact.

Une dernière hypothèse est qu’elle partage le préjugé largement répandu selon lequel ce pronom est sexiste parce qu’il fait référence à l’état civil alors que le pronom ‘monsieur’ ne le fait pas.

Voyons ce qui en est.

Il suffit de consulter un dictionnaire pour réaliser que le pronom ‘madame’ possède plusieurs sens.

Il peut, en effet, servir à désigner une femme mariée. Mais il peut aussi désigner toute personne de sexe féminin au-delà de l’adolescence. Ce peut être également un titre donné à une femme adulte, mariée ou non, appartenant à la noblesse ou exerçant une fonction (madame l’Inspectrice). Etc.

C’est pareil pour le pronom ‘monsieur’. Il désigne une personne adulte de sexe masculin. Tout comme, en résumé, ‘madame’ désigne une personne adulte de sexe féminin.

Seul, le pronom ‘mademoiselle’ indique réellement l’état civil. Il désigne généralement une personne célibataire, de sexe féminin, peu importe son âge. Dans la mesure où ce pronom n’a pas d’équivalent masculin, on peut le considérer comme sexiste.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La politique étrangère woke du Canada ou l’art de se peinturer dans le coin

6 mars 2024

Introduction

Québécois d’origine, Jean-François Caron est professeur de sciences politiques à l’université Nazarbayev du Kazakhstan.

Le 9 février dernier, il recevait l’invitation à se présenter à la séance du 14 février du Comité permanent des Affaires étrangères et du Développement économique de la Chambre des communes d’Ottawa.

Deux heures avant d’être entendu, M. Caron apprend de la greffière du comité que son nom a été retiré de la liste des personnes appelées à témoigner.

Pourquoi ?

C’est qu’une autre invitée, Stephanie Carvin — professeure de relations internationales à l’École des Affaires internationales Norman Paterson de l’université Carleton d’Ottawa — menaçait de ne pas se présenter si M. Caron n’était pas ‘désinvité’.

En principe, c’est le comité qui dresse la liste des personnes qu’il désire entendre. Si l’une d’elles déclare “C’est lui ou c’est moi”, le comité n’a pas à choisir entre les deux; il maintient ses invitations. Et si une personne décide de ne pas apparaitre, c’est son choix.

Mais le président libéral du comité en a décidé autrement.

Ce que M. Caron avait à dire

On trouvera sur le site de Libre-Média, le résumé de l’exposé que M. Caron s’apprêtait à présenter.

Dans l’entrevue qu’il a accordée à Stéphane Bureau, le professeur Caron précise ce qu’il aurait probablement ajouté en réponse aux questions.

Sa thèse est simple.

En 1995, le gouvernement de Jean Chrétien a présenté les piliers de la politique étrangère du Canada. Cette politique s’articule autour de trois axes :
• favoriser la prospérité au Canada par le biais du commerce et des échanges,
• contribuer à l’ordre international, et
• promouvoir les valeurs canadiennes.

Selon le professeur Caron, le troisième axe est devenu trop prédominant.

Le moralisme parfois bienvenu du Canada

À l’époque où l’apartheid était en vigueur en Afrique du Sud, c’est à l’initiative du Canada que ce pays a été expulsé du Commonwealth.

C’est également grâce au premier ministre Brian Mulroney que les membres de l’Onu ont décidé de ne plus vendre d’armemment à ce pays. Un boycottage respecté par tous les pays sauf Israël.

De la même manière, les pays où l’excision était pratiquée ont été menacés d’être privés de l’aide du Canada s’ils ne réprimaient pas cette pratique au sein de leur population.

Par contre, les ‘valeurs canadiennes’ des gouvernements libéraux ne sont pas identiques à celles des gouvernements conservateurs. C’est ainsi que ces derniers ont retiré en Afrique le financement des ONG pro-choix au profit des ONG pro-vie. Un financement rétabli lorsque les Conservateurs ont perdu le pouvoir.

Le colonialisme moral du Canada

Le problème du Canada, c’est qu’il tient un discours moralisateur et menaçant qui est perçu dans les pays du Sud global comme une tentative de présenter leurs mœurs et leur culture traditionnelle comme arriérées.

Le Canada ne peut pas espérer se faire des amis en les insultant. Voilà pourquoi la diplomatie canadienne est dans un état pitoyable.

Malgré les progrès accomplis, les pays africains et asiatiques sont encore des pays à la fois misogynes, et répressifs à l’égard des minorités sexuelles.

Dans les pétromonarchies, l’homosexualité est punissable de la peine de mort. Et les mariages arrangés prévalent non seulement dans les pays musulmans, mais également dans presque tous les pays asiatiques.

Présentée comme la plus populeuse démocratie du monde, l’Inde est toujours un pays où les femmes sont victimes de viols d’une brutalité extrême.

Dans ce pays, il n’est pas rare qu’une femme soit la proie d’un viol collectif; après l’acte, la victime est étranglée, sa dépouille est brulée et son corps calciné est jeté dans un fossé ou sous un viaduc comme une ordure.

La théorie de genre

Il y a quatre jours, le texte Le wokisme et la paix ironisait au sujet d’un communiqué annonçant de nouvelles mesures d’aide à l’Ukraine.

Ce que le blogue évitait de dire, c’est que ce communiqué n’a pas été publié par le ministère des Affaires étrangères ni par le ministère de la Défense (comme on aurait pu s’attendre), mais rédigé et publié par le bureau du premier ministre.

C’est donc à dire que le wokisme prévaut au sommet de l’État canadien.


 
D’autre part, ce n’est pas pour rien que 85 % de la population mondiale vit dans des pays qui refusent de s’impliquer dans la guerre russo-ukrainienne.

Ces pays sont sensibles à la propagande de la Russie qui se présente comme la Troisième Rome (après Constantinople), victime d’une guerre civilisationnelle au cours de laquelle elle subit l’assaut des barbares décadents de l’Occident.

Les pays du Sud global se sentent beaucoup plus proches des valeurs traditionnelles et conservatrices de la Russie — la foi, la patrie, la famille et le travail — que des nôtres.

Et quand ces pays du Sud global regardent ce qui se passe dans la bande de Gaza, ils assistent au premier génocide télévisé de l’Histoire de l’humanité.

Un génocide auquel le Canada participe en aidant l’armée israélienne à rapatrier ses soldats de l’Étranger sur les ailes de l’Aviation royale canadienne, en vendant des armes à Israël et en favorisant la famine des Gazaouis en coupant les vivres à l’UNRWA.

Face à l’effondrement moral de l’Occident, le Canada peut bien tenter de se présenter comme le modèle messianique de la Vertu, il ne convainc personne.

Conclusion

Même si j’éprouve des réserves sérieuses quant aux exemples que donne le professeur Caron pour soutenir sa thèse, je suis d’accord avec elle quant au fond.

Le Canada a perdu son influence sur la scène internationale en raison d’une politique étrangère moralisatrice dans un monde où l’ordre mondial établi au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale craque de partout.

En somme, la politique extérieure du Canada devrait se recentrer sur la défense des intérêts canadiens.

Pour terminer, laissons le mot de la fin au journaliste Philippe Sauro-Cinq-Mars, résumant la thèse du professeur Caron :

L’avènement d’un monde multipolaire, où des pays aux sociétés demeurées très traditionnelles possèdent un immense pouvoir, rend définitivement caduques des politiques idéalistes fondées seulement sur la coopération internationale et la moralisation du tiers-monde.

Références :
L’aide humanitaire à Gaza : l’hypocrisie du Canada
Le Comité permanent des affaires étrangères refoule un professeur invité pour une allocution qui s’était déplacé depuis le Kazakhstan
Le wokisme est entré au parlement canadien (vidéo)
Résumé de la présentation de M. Caron

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le nouveau toit du Stade olympique

4 mars 2024

Introduction

Il y a un mois, le gouvernement québécois annonçait son intention de consacrer 870 millions$ à la réfection du toit du Stade olympique. Un demi-siècle après sa construction, cette toiture arrive en fin de vie après environ vingt-mille déchirures.

Soutenue par certains, l’idée de le détruire (parce que cela éviterait une telle dépense) doit être rejetée pour une raison très simple; une grande métropole a besoin d’un stade sportif qui répond à ses besoins actuels et futurs.

Dans la liste des stades montréalais, les deuxième et troisième places sont occupées par des stades extérieurs d’une capacité nettement moindre : le stade Percival-Molson (25 000 places) et le stade de soccer Saputo (20 000 place).

Couvert, le Stade olympique (d’une capacité de 65 000 places) est unique et irremplaçable. De plus, c’est une structure emblématique de la métropole.

La neige et le verglas : des dangers sous-estimés

Pour vendre le nouveau toit, on nous promet une meilleure acoustique. Ce qui permettrait, dit-on, de rentabiliser cet investissement en rendant possible la tenue à Montréal de concerts de vedettes pop d’envergure mondiale comme Taylor Swift.

Tout ceci fait penser à la fable ‘La laitière et le pot au lait’; on ne construit pas un modèle d’affaires sur du vent.

En tant que grosse structure creuse en béton, le stade possède une acoustique très réverbérée. La seule fois où j’y ai assisté à un concert, on entendait à peine les artistes sur scène, enterrés par la clameur de la foule et son écho. Or la toiture dont on parle n’est que la partie centrale d’une voute dont la majeure partie, en périphérie, demeurera inchangée.

D’autre part, en vertu du Code du bâtiment, on ne peut pas y tenir des évènements si plus de 3 cm de neige ou si plus de 3 mm de verglas s’est accumulé sur le toit.

Cela ne signifie pas que le toit s’effondrerait au quatrième centimètre. Cette norme est dictée par la prudence; les responsables nous assurent que le toit pourrait supporter un poids bien au-delà de la charge maximale permise… sans savoir exactement leur marge de manœuvre; j’ai posé la question à ce sujet à la Régie des installations olympiques (RIO) sans réussir à obtenir une réponse précise. Donc, on ne le sait pas.
 

 
La partie périphérique du toit comprend une large bande verte. Cette bande, c’est une pellicule de polychlorure de vinyle. Cette pellicule fait glisser la neige du toit.

De plus, en raison de la forme convexe du toit actuel, la neige a peu tendance à y rester. En balayant la neige de son souffle, le vent évite qu’elle ne s’y accumule.

Toutefois avec le nouveau toit, cela n’est plus vrai.

À l’entrevue qu’il a accordée à Benoit Dutrisac, l’ingénieur québécois François Delaney est catégorique. En raison du fait que la partie centrale du nouveau toit sera plate, cela veut dire qu’à chaque tempête, il faudra pelleter la neige qui s’y accumulera.

À défaut de quoi, lors d’une vraie grosse tempête, le poids de la neige sera suffisant pour provoquer l’effondrement de la tour inclinée. (sic)

Or M. Delaney n’est pas n’importe qui; c’était un des adjoints de Roger Taillibert, l’architecte du Stade olympique.

Écoutez la vidéo de cette entrevue : c’est ce que M. Delaney déclare explicitement. En effet, cette tour-ci supportera à 75 % le poids de la neige accumulée. Or, selon l’expert, elle n’a pas été conçue pour cela.

L’autre 25 % sera supporté par l’anneau technique. En réalité, cela se fait par l’intermédiaire d’un anneau elliptique de verre. À sa face même, compter sur la solidité du verre pour supporter quoi que ce soit est une mauvaise idée.

Pour ce qui est du verglas, rappelons que le Stade olympique a traversé la crise du verglas de 1998 sans s’être effondré. Pourtant, beaucoup plus que 3 mm de glace la recouvrait.

Paradoxalement, ce qui l’a protégé, c’est la fragilité du tissu de la partie centrale du toit.

En effet, lors d’une tempête de verglas, de la glace s’accumule le long des câbles qui relient la tour au toit. Or en dégelant, des carottes de glace glissent le long des câbles et viennent frapper la partie du toit qu’ils soutiennent.

C’est ainsi qu’au cours de cette tempête, la chute de ces carottes a perforé la toiture à plusieurs endroits.

Avec un toit plus solide, celui-ci encaissera leur impact plutôt que de les évacuer par des déchirures. Ces carottes rebondiront sans doute un peu partout sur la toiture et tomberont peut-être au sol.

Toutefois, il ne semble pas qu’on ait modélisé tout cela.

Un toit ouvrable ou fermé ?

Cliquez sur l’image pour démarrer

Depuis une vingtaine d’années, François Delaney propose une solution audacieuse; un toit ouvrable en deux moitiés, reposant sur quatre bras (ou consoles) fixés directement sur le roc situé sous le bâtiment.

Non seulement ces consoles s’intègreraient à l’architecture intérieure du stade, mais elles soulageraient celui-ci de quatre-mille tonnes de pression.

Projet retenu

Le projet retenu par la RIO est plutôt un toit fixe dont la partie centrale, relativement plate, sera soutenue à 75 % par des câbles reliés à la tour et à 25 % par l’appui sur l’anneau technique.

Ce nouveau toit aura une partie centrale opaque, entourée d’une ellipse de verre translucide. On dit qu’il permettra à beaucoup plus de lumière naturelle d’entrer dans le stade.

En réalité, cette dose de lumière sera homéopathique. La partie centrale du nouveau toit fixe sera pâle, mais opaque. Et la toiture verte en périphérie (de loin, plus importante) est également opaque. Seule la minuscule ellipse de verre permettra à la lumière extérieure de pénétrer dans le stade.

Lorsqu’on compare la solution retenue par les dirigeants du stade avec la suggestion de M. Delaney, la première est, à mon avis, plus artistiquement réussie alors que la seconde est plus sécuritaire.

Avec la solution de M. Delaney, la nouvelle partie du toit s’appuie directement sur le roc du Bouclier canadien. Rien n’est plus solide.

L’étude de marché

Selon une étude de marché effectuée par la RIO, 99 % des évènements qui se dérouleront au Stade olympique ne nécessiteront pas de toit ouvert.

Pourtant, je verrais très bien un salon annuel du jardinage tenu au printemps dans un stade ensoleillé, mais dont on pourrait fermer le toit rétractable les jours de pluie.

Je verrai un très bien également un derby de démolition (où la poussière serait évacuée par le haut), une course équestre, et plein d’autres activités auxquelles il serait agréable d’assister au grand air dans un espace au toit ouvert.

Il suffirait d’un peu d’imagination pour attirer au Stade olympique la tenue d’évènements qui n’intéresserait personne dans un stade scellé comme une tour de bureaux.

Mais l’étude non dévoilée de la RIO dit le contraire…

Conclusion

Je suis assez indifférent quant à savoir quelle est la meilleure solution. Toutefois, je ne vous cacherai pas que les mises en garde de M. Delaney m’inquiètent au plus haut point alors que les arguments de vente des dirigeants de la RIO me semblent extrêmement superficiels.

Quand on me dit que ce projet est réalisé en mode ‘collaboratif’ (sous-entendu : entre tous les partenaires), j’y vois des gens qui couchent dans le même lit.

Ce qui me désole, c’est la mauvaise foi des dirigeants de la RIO. Or cette mauvaise foi s’explique par le lien fusionnel qui se développe inévitablement lorsqu’on travaille en mode ‘collaboratif’ puisque toute menace aux intérêts de l’un devient une menace aux intérêts de l’autre.

Dire à M. Delaney qu’il n’a qu’à se trouver un consortium prêt à réaliser son idée et à soumettre un devis, cela aurait été bien inutile face à un appel d’offres taillé sur mesure pour lui être défavorable.

Il y eut une époque où on était heureux de rencontrer et d’encourager les nôtres qui avaient de bonnes idées.

En 1962, le gouvernement du Québec mandatait un ingénieur de 32 ans de réaliser ce qui était à l’époque la plus importante structure en béton au monde, longue de 1,5 km, soit le pont-tunnel Hippolyte-La Fontaine.

C’était à cette époque qu’on confiait à un étudiant en architecture à McGill la tâche de concevoir Habitat’67, devenu un des chefs-d’œuvre mondiaux d’architecture du XXe siècle.

Un demi-siècle plus tard, après la réussite de nos grands barrages hydroélectriques, nous sommes devenus des peureux. Et lorsqu’un des nôtres présente une idée originale, on sent le besoin de tuer son idée dans l’œuf plutôt que s’y intéresser et de la promouvoir s’il y a lieu.

Dans l’histoire de l’architecture, on n’aurait jamais érigé des cathédrales gothiques (dont Notre-Dame de Paris) si on avait tenu à continuer de faire des petites églises romanes, comme il y en avait déjà partout.

On n’aurait jamais donné naissance à des gratte-ciels (édifiés autour d’un squelette de métal) si on avait continué à construire des édifices reposant sur des murs porteurs.

On n’aurait pas construit des dômes géodésiques (comme le Biodôme de Montréal). Les arcs elliptiques de Gaudí n’auraient jamais vu le jour.

Devant tout projet d’infrastructure, la première question à se poser est de savoir si celui-ci est cautionné par des ingénieurs ou des architectes qui en garantissent la solidité.

L’insistance des dirigeants de la RIO à ne considérer que des solutions dites ‘éprouvées’ témoigne de leur manque d’audace et de leur médiocrité.

Références :
Breffage technique, remplacement de la toiture du Stade olympique (vidéo)
870 millions pour le nouveau toit et le nouvel anneau technique du Stade olympique
Le nouveau toit du Stade olympique devra laisser entrer la lumière naturelle
Le stade, l’invraisemblable saga du toit et l’inventeur François Delaney
Stade : il a proposé un toit moins cher, sans risques et… on l’a ignoré ! (vidéo)
Un nouveau toit fiable pour les 50 prochaines années

Postscriptum du 7 mars 2024 : On annonce aujourd’hui que le contrat entre Québec et le consortium Pomerleau-Canam a été officiellement conclu au prix de 729 millions$ (excluant les dépenses déjà effectuées).

Réalisé en mode ‘collabo’, ce contrat est 279 millions$ plus élevé que les 450 millions$ du projet de François Delaney.

Contre les dépassements de couts, celui-ci comprenait déjà un ‘coussin’ représenté par une marge de profit de 100 % pour les entrepreneurs qui auraient réalisé son projet.

Référence : Le contrat officiellement conclu (2024-03-07)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Du Parc olympique au parc Maisonneuve

3 mars 2024
Statue de Nicolas Copernic devant le planétarium Rio Tinto Alcan
Cheminées de la Centrale thermique souterraine du Parc olympique


Au parc Maisonneuve

Au moment où ces lignes sont écrites — alors que le redoux a fait disparaitre presque toute la neige – on a peine à croire que ces photos ont été prises le 21 février, soit à peine il y a onze jours.

Détails techniques : Sigma DP1 infrarouge à spectre complet.
Pré-traitement : filtres Fuchsia pour Foveon (filtre bleu B+W KB20 + filtre vert jaunâtre B+W 061 + filtre bleu LBC8 de Kenko + filtre anti-infrarouge partiel GRB3/KG3).
Post-traitement léger.
1re photo : 1/60 sec. — F/4,5 — ISO 100 — 16,6 mm
2e  photo : 1/80 sec. — F/4,5 — ISO 100 — 16,6 mm
3e  photo : 1/100 sec. — F/4,5 — ISO 100 — 16,6 mm
4e  photo : 1/80 sec. — F/4,5 — ISO 100 — 16,6 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le wokisme et la paix

2 mars 2024

Le 23 février dernier, Ottawa annonçait une série de mesures d’aide à l’Ukraine.

Parmi elles, un montant de quatre-millions de dollars sera accordé à des « activités de déminage tenant compte des sexospécificités pour un avenir durable en Ukraine. [Cela comprend] la création d’un groupe de travail sur l’égalité des sexes et la diversité afin de promouvoir une action antimines transformatrice en matière de genre.»

La ‘sexospécificité’ (en anglais : ‘gender specificity’) est l’ensemble des caractéristiques spécifiques à chaque sexe. Ces caractéristiques peuvent être physiques, physiologiques ou comportementales.

Le gouvernement fédéral a raison; dans les activités de déminage, on voit excessivement d’hommes hétérosexuels blancs.

De la même manière, en Ukraine comme dans trop de pays, les régiments portent une lourde charge symbolique patriarcale, hétéronormative et cisnormative où des supérieurs machos utilisent la violence verbale pour se faire obéir.

Voilà pourquoi les tranchées ne sont pas des lieux sécuritaires (safe spaces) pour les minorités de genre. S’il est normal d’y être bombardé, il est néanmoins inacceptable qu’il y soit mal vu pour un homme de porter une robe, des talons hauts, des faux cils et une sacoche lorsqu’on donne l’assaut sur des positions ennemies.

Cela doit changer.

Quand vient le temps de tirer des obus contre les envahisseurs russes, la personne qui appuie sur le bouton devrait être, dans la moitié des cas, une femme ou, à défaut, quelqu’un qui prétend l’être. Ce qui revient au même.

De plus, dans l’accomplissement de cette tâche, on devrait donner la priorité aux Ukrainiens racisés, aux minorités sexuelles et aux minorités de genre.

Nous pouvons tous être fiers de notre pays, le Canada. Un pays à l’avant-garde dans la défense des personnes vulnérables et des opprimés. Un pays qui travaille jour et nuit pour un avenir durable en Ukraine… comme si l’avenir pouvait faire autrement qu’être durable.

Références :
Aide prévue par l’Accord de coopération en matière de sécurité entre le Canada et l’Ukraine
Justin et les LGBTQ++ au secours de l’Ukraine!!!

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Écrit par Jean-Pierre Martel