1653, l’année où Jeanne Mance sauva le Canada

8 mars 2024


Avant-propos : Depuis quelques années, pour célébrer la Journée internationale des femmes (le 8 mars), ce blogue inverse ce jour-là la règle grammaticale selon laquelle le genre masculin l’emporte sur le genre féminin.

Mais comme dans le texte qui suit, il n’y a pas grand-chose à inverser, on retiendra l’à-propos de célébrer aujourd’hui la mémoire d’une géante de notre histoire.

À juste titre, Jeanne Mance est considérée comme co-fondatrice de Montréal, une ville où elle a œuvré et où elle est décédée en 1673.

Née en 1606, Jeanne Mance est issue de la bourgeoisie de robe; son père était procureur du roi à Langres (en Champagne). Il avait épousé la fille d’un confrère.

À l’époque, la population de la France était environ le double de la population actuelle du Québec. Si bien que dans le petit monde de la noblesse et la haute bourgeoisie, tout le monde connaissait à peu près tout le monde.

N’ayant peu d’inclinaison pour la vie religieuse ni pour le mariage, Jeanne Mance avait choisi de se consacrer aux soins des malades. Pour ce faire, elle s’occupait d’œuvres charitables.

Or sa famille dévote comptait plusieurs ecclésiastiques qui avaient séjourné en Nouvelle-France. Si bien qu’à leur retour, ils racontaient leur pénible traversée, les immenses paysages sauvages qu’ils ont vus, et les peuples étranges qu’ils ont rencontrés et qu’on appelait les ‘Sauvages’ (ce qui, à l’époque, qualifie les gens qui vivent dans les forêts).

Alors que l’élan missionnaire s’empare du milieu catholique français, Jeanne Mance décide elle aussi de tenter l’aventure.

Elle se rend à Paris en 1630 où elle rencontre, entre autres, Angélique de Bullion, veuve du surintendant des finances de France dont elle avait hérité de l’immense fortune.

Or cette dernière caressait l’idée d’établir un hôpital quelque part au Canada (le nom donné au XVIIe siècle à la vallée du Saint-Laurent).

À leur quatrième rencontre, Madame de Bullion demande à Jeanne Mance si elle souhaiterait réaliser son projet. Une proposition que celle-ci accepte.

À cette fin, elle se rend en 1641 à La Rochelle. C’est de ce port que partaient les bateaux pour la Nouvelle-France. Mais avant de partir, elle rencontre Paul de Chomedey de Maisonneuve, chef d’une expédition qui doit fonder une colonie sur l’ile du mont Royal (alors inhabitée).

Celui-ci se cherche une femme vertueuse et compétente pour gérer cette colonie. Enthousiaste, Jeanne Mance accepte cette responsabilité.

Cette rencontre détermine donc le lieu où Jeanne Mance œuvrera: Ville-Marie (soit, de nos jours, Montréal).

Après la construction d’une palissade et des cabanes en rondins (qui bientôt cèdent leur place à des maisons de bois plus confortables), Ville-Marie prend l’aspect d’un fort en bois.

Toutefois, en 1653, la situation de Ville-Marie devient précaire.

Quatre ans plus tôt, les Iroquois avaient détruit la Huronie (qui était située sur une péninsule au milieu des Grands Lacs).

Ces vastes étendues d’eau permettaient de transporter des marchandises sur de grandes distances en se fatiguant beaucoup moins que par voie terrestre.

En tant que peuple sédentaire et exportateur de maïs, les Hurons-Wendats jouissaient de l’amitié de nombreux autres peuples autochtones qui eux étaient nomades. Ce sont les fourrures obtenues en échange de maïs qui permettaient aux Hurons-Wendats d’être impliqués dans leur commerce.

La Huronie occupait donc une position stratégique dans ce commerce.

Rapidement, les Hurons-Wendats en étaient venus à fournir entre 50 % et 60 % des peaux de castor exportées vers la France.

Alors que l’étau se resserre sur Ville-Marie, menacée par les Iroquois, la population du fort n’est pas suffisante pour résister à une attaque de grande ampleur que les Iroquois pourraient déclencher.

Voilà pourquoi Jeanne Mance s’adresse à sa mécène pour lui demander de financer la venue d’une centaine d’hommes à Ville-Marie. Ce que Madame de Bullion accepte.

Jeanne Mance offre alors à De Maisonneuve la somme de 22 000 livres, correspondant littéralement à la valeur de 22 000 livres d’argent. Cette somme équivaut, de nos jours, à un million de dollars.

L’arrivée à Ville-Marie d’un grand nombre de personnes — parmi lesquelles Marguerite Bourgeoys — relancera la vigueur de la colonie et l’empêchera de connaitre le même sort que la Huronie.

Référence : La découverte de nouvelles archives révèle que Jeanne Mance a donné l’équivalent d’un million de dollars pour sauver Montréal en 1653

Compléments de lecture :
Gabriel Sagard en Huronie
Les Sauvages

Laissez un commentaire »

| Histoire | Mots-clés : | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Ukraine : l’histoire secrète de la révolution de Maïdan

1 mars 2024

Introduction

Au moment de l’éclatement de l’URSS et de l’indépendance ukrainienne, en 1991, l’Ukraine était alors un pays relativement harmonieux.

De 1991 à 2014, le pays fut gouverné alternativement par des gouvernements pro-russes et pro-occidentaux, rappelant l’alternance au Québec entre le PLQ et le PQ.

L’élection de 2004 provoquera d’immenses manifestations auxquelles participèrent plus d’un demi-million de personnes et qui aboutirent au renversement du président élu frauduleusement et l’adoption d’une nouvelle constitution.

Les années qui suivirent marquèrent le retour de la paix sociale. Mais tout bascula définitivement en 2014.

Le contexte politique en 2014

En Ukraine, les élus le sont pour une durée de cinq ans.

À l’élection présidentielle de 2010, le candidat pro-russe — sous la bannière du Parti des Régions — avait été élu de justesse avec 48,95 % des votes (contre 45,47 % pour sa rivale pro-occidentale).

Deux ans plus tard, à l’élection législative de 2012, c’est également le Parti des régions qui obtint plus de sièges au parlement, sans toutefois en obtenir la majorité. La répartition des sièges fut la suivante :
Parti des Régions : 187 sièges,
Union panukrainienne ‘Patrie’ : 101 sièges,
Alliance démocratique ukrainienne pour la réforme : 40 sièges,
Parti communiste d’Ukraine : 32 sièges,
Svoboda (Liberté) : 37 sièges.

Pour redonner un second souffle au mouvement pro-occidental, l’Europe avait proposé à l’Ukraine un accord qui visait, à long terme, à paver la voie à son adhésion en bonne et due forme.

En 2013, au moment où l’Ukraine s’apprête signer cet accord, le pays est au bord de la faillite.

En novembre de cette année-là, il lui reste 18,79 milliards de dollars de réserves de change alors qu’elle doit bientôt rembourser sept-milliards de dollars à ses créanciers, dont la Russie (à qui elle doit dix-sept-milliards de dollars de gaz fossile impayé).

Depuis quelques mois, Vladimir Poutine offrait secrètement au gouvernement ukrainien la levée des barrières tarifaires entre l’Ukraine et la Russie, une baisse du prix de son gaz fossile, de même qu’un prêt de quinze-milliards de dollars. L’offre est irrésistible.

Le premier ministre ukrainien (désigné par le président) se tourne alors vers Bruxelles pour lui demander un prêt de vingt-milliards d’euros. Ce qui lui est refusé. En contrepartie, on lui promet vaguement une aide financière. Bref, rien de concret.

Conséquemment, le 21 novembre 2013, le président pro-russe annonce son refus de signer l’accord d’association avec l’Union européenne. Ce qui déclenche des manifestations dès ce jour-là sur la place de l’Indépendance (ou Maïdan), la plus importante place publique de Kyiv.

D’abord pacifiques, celles-ci dégénèrent entre le 30 novembre et le 8 décembre. Elles atteignent le maximum de leur violence entre le 18 et le 21 février 2014.

Jusque là, tant du côté des manifestants que celui des escouades anti-émeutes, personne n’utilise d’armes mortelles.

Pour éviter qu’au sein des forces de l’ordre, un policier pris de panique dégaine son arme et ne tue quelqu’un, ces escouades (en Ukraine comme en France et au Québec) sont équipées de canons à eau, de bombes assourdissantes, de matraques et d’armes à projectiles à mortalité réduite.

Ces dernières ont une force d’impact suffisante pour casser des dents ou des mâchoires, crever des yeux, et provoquer des commotions cérébrales. Mais elles tuent rarement.

Le 20 février, des manifestants et des policiers sont blessés ou tués par balles pour la première fois. Que s’est-il passé ?

L’opération du 20 février 2014

Traversée par un boulevard, Maïdan est une place allongée, aux extrémités arrondies, qui est bordée par des immeubles de prestige, dont des hôtels de luxe et des édifices gouvernementaux.

C’est sur cette place que depuis trois mois se réunissent quotidiennement des manifestants qui réclament le départ du président pro-russe.

Mais ce jour du 20 février fut différent des autres.

Place de l’Indépendance et hôtel Ukraina à l’arrière-plan

Venus surtout de l’ouest de l’Ukraine, c’est à l’hôtel Ukraina que logent les députés du parti Svoboda quand ils siègent au parlement.

Afin d’assurer la sécurité de ses députés dans le contexte insurrectionnel ambiant, ce parti avait confisqué l’hôtel le 25 janvier et en assurait la garde depuis.

Le hall de l’hôtel servait d’infirmerie pour les manifestants blessés.

Contrairement aux hôtels plus modernes dont les fenêtres sont scellées, les fenêtres à guillotine de l’hôtel Ukraina peuvent s’ouvrir afin de mieux admirer la vue sur la ville.

Simple manifestant (et non député), Ivan Bubenchik avait fait monter à sa chambre plusieurs caisses de balles de Kalachnikov la veille du 20 février.

Au 11e niveau de l’hôtel — le 10e étage au sens français du terme, c’est-à-dire en excluant le rez-de-chaussée — plusieurs tireurs avaient pris position dans des chambres réservées à des dirigeants du parti Svoboda.

De nombreux sympathisants néo-nazis, recrutés par ce parti dans son fief de l’ouest de l’Ukraine, avaient convergé armés vers cet hôtel la veille. Le lendemain, ils se posteront un peu partout dans des chambres en hauteur qui donnent sur la place de l’Indépendance.

Postés derrière la balustrade de l’Académie de musique (à droite sur la photo ci-dessus), des tireurs ont une vue encore plus dégagée sur la place. Ceux-ci proviennent principalement de Galicie orientale.

Tout comme l’Académie de musique, le Bureau de poste central de Kyiv est situé du côté ouest de la place de l’Indépendance, immédiatement de l’autre côté du boulevard qui la traverse. Or à l’époque, cet édifice est le quartier général du mouvement ultranationaliste Secteur Droit (Прáвий сéктор). Sur son toit, d’autres tireurs sont postés.

Pour terminer, au nord de la place, des tireurs étaient montés sur le toit de l’hôtel Kozatsky. Or cet hôtel est le poste de commandement des Patriotes d’Ukraine, un mouvement paramilitaire néo-nazi qui, plus tard en 2014, sera incorporé dans le bataillon Azov, principal responsable des exactions qui seront commises contre la minorité russe de l’Est de l’Ukraine.

Mais il y a plus. Parmi ces tireurs postés çà et là, on trouve des mercenaires provenant de Géorgie et de quelques pays baltes.

Lors du procès tenu en novembre 2021, ceux-ci témoigneront que les dirigeants de l’Union panukrainienne ‘Patrie’ et certains des chefs du mouvement de protestation leur avaient donné l’ordre de massacrer des manifestants et des policiers — en fait, de les dresser les uns contre les autres — afin d’empêcher le parlement ukrainien d’entériner l’entente intervenue entre le gouvernement minoritaire pro-russe et la Russie.

Toujours au cours de ce procès, d’autres témoins ont déclaré qu’ils avaient capturé des tireurs d’élite, mais que les organisateurs des manifestations avaient choisi de les libérer aussitôt sans donner de raison.

On peut s’étonner d’apprendre aujourd’hui que certains des chefs du mouvement de contestation étaient complices du massacre de la place de l’Indépendance.

Ceux-ci étaient des organisateurs politiques. Des gens habitués d’organiser des marches de protestation, des campagnes de financement, et de la mobilisation sur des réseaux sociaux.

Ces gens n’auraient jamais entrepris la contestation contre le régime du président pro-russe s’ils avaient su dès le départ que cela finirait par un bain de sang commis grâce à leur complicité.

Mais de fil en aiguille, on finit par consentir à des actes désespérés lorsqu’on les présente comme un sacrifice destiné à sauver la patrie.

Le massacre

Après avoir été chassés de la place de l’Indépendance dans la nuit du 29 au 30 novembre 2013, les manifestants y étaient revenus plus nombreux et décidés de l’occuper jour et nuit.

Quand le jour du 20 février se lève sur cette place, des camps de fortune et des barricades ont été érigés un peu partout. Et depuis plusieurs semaines, ceux qui s’y trouvent effectuent un va-et-vient entre leur logement et la place afin de se laver et d’apporter des vivres.

Dès le lever du jour, les tireurs postés sur l’un ou l’autre des dix-huit édifices contrôlés par les forces de l’opposition se mettent à tirer à la fois sur les manifestants et les policiers.

Or ces derniers n’ont pas la permission de tirer avec des balles réelles. Ils répliquent avec ce qu’ils ont.

Il faudra un certain temps aux manifestants pour réaliser que les claquements qu’ils entendent ne sont pas ceux émis par l’arsenal habituel des escouades antiémeutes et que les tirs proviennent d’ennemis retranchés dans les hauteurs de la place. Mais pour ces manifestants, c’est du pareil au même; ils présument que ces tireurs sont de l’escouade antiémeute.

Pris au piège, policiers et protestataires tentent séparément de se protéger comme ils peuvent.

Entre 5h30 et le retrait des policiers (de 8h50 à 9h00), 4 policiers avaient été tués et 39 autres avaient été blessés.

Après le retrait des policiers, un autobus transportant des renforts (15 à 20 policiers équipés entre autres de Kalachnikovs) est venu permettre l’évacuation des policiers coincés à l’hôtel Zhovtnevyi.

Au cours de cette opération de sauvetage, trois manifestants ont été tués. Toutefois, l’examen des vidéos démontre que les moments où les manifestants ont été tués ou blessés ne coïncident pas avec les moments où ces armes étaient pointées vers eux par les policiers.

C’est seulement à 10h37 que les policiers reçurent la permission de tirer avec des balles réelles. Bien après que l’immense majorité d’entre eux eurent quitté les lieux.

Chez les protestataires, le bilan du massacre du 20 février se solde par 49 tués et 157 blessés.

Conséquences politiques du massacre

Le massacre de la place de l’Indépendance a enlevé toute légitimité au pouvoir du président Yanukovych (le président pro-russe dont on parle depuis le début).

Interdire des manifestations, cela s’est vu récemment en France et, à l’occasion, dans bien d’autres pays démocratiques. Mais massacrer son propre peuple, c’est la caractéristique des tyrans.

Si bien que même des députés de son propre parti (le Parti des Régions) se joignirent aux partis de l’opposition pour exiger sa démission.

Le soir du 21 février, le commandant des tireurs de l’hôtel Ukraina adresse par vidéo au président pro-russe l’ordre de démissionner d’ici 10h le lendemain matin. À défaut de quoi il lancera un assaut contre lui.

Le lendemain, le président pro-russe avait quitté le pays.

Une opération orchestrée par qui ?

Tôt le matin du 20 février, un dispositif meurtrier de grande envergure s’est déployé, préparé de longue date, et qui nécessitait la concertation d’un grand nombre d’acteurs d’idéologie apparentée.

Ceux-ci ont été convaincus de mettre de côté leurs rivalités politiques et leurs conflits de personnalités afin de servir une grande cause; un coup d’État destiné à empêcher un accord économique avec la Russie.

Dans leur témoignage lors du procès de novembre 2021, les mercenaires géorgiens ont non seulement incriminé les dirigeants du principal parti d’opposition et les organisateurs des manifestations sur la place de l’Indépendance, mais également d’anciens dirigeants anticommunistes de leur pays, la Géorgie.

Un seul organisme est capable de fédérer tous les grands partis d’opposition et recruter, directement ou indirectement, un grand nombre de tireurs d’élite provenant d’un territoire s’étendant de l’ouest de l’Ukraine à la Géorgie, en passant par les pays baltes.

Cet organisme est la CIA. Tout, ici, porte sa griffe. C’est le même mode opératoire que le recours aux Contras pour renverser le régime sandiniste au Nicaragua.

Depuis 2004, les États-Unis n’ont eu de cesse que de manipuler le peuple ukrainien afin de le convaincre de devenir un ennemi militaire de son puissant voisin et de faire fi de l’avertissement de Poutine selon lequel entreprendre une démarche visant à l’adhésion de l’Ukraine à l’Otan serait un casus belli.

S’appuyant sur les partis politiques et les mouvements les plus racistes d’Ukraine, les États-Unis ont mené ce pays à la ruine en le poussant à la guerre dans le dessein d’affaiblir l’armée russe.

Maintenant que l’Ukraine est à bout de souffle, les États-Unis laissent tomber ce pays comme un citron pressé…

Références :
Élections législatives ukrainiennes de 2012
La nostalgie nazie en Ukraine
L’engrenage ukrainien
Le problème du nazisme en Ukraine
The “snipers’ massacre” on the Maidan in Ukraine
Tirs de balles de plastique : attend-on de tuer quelqu’un ?

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés à la guerre russo-ukrainienne, veuillez cliquer sur ceci.

5 commentaires

| Géopolitique, Guerre russo-ukrainienne, Histoire | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Il y a 80 ans : le Soulèvement du ghetto de Varsovie

17 décembre 2023
Cliquez sur l’image pour démarrer

Résumé

Pendant 28 jours au printemps de 1943, un millier de Juifs polonais prirent les armes dans le ghetto de Varsovie contre l’occupant allemand. Cette révolte fut le plus important soulèvement de Juifs au cours de la Shoah.

L’invasion de la Pologne

Le premier septembre 1939, l’armée allemande envahit la Pologne, ce qui déclencha la Seconde Guerre mondiale.

À l’hiver qui suivit, les forces d’occupation allemande entamèrent dans ce pays la stigmatisation et la persécution des Juifs. Comme ils l’avaient fait déjà en Autriche et en Tchécoslovaquie.

On ordonna aux Juifs :
• le port au bras gauche d’un brassard blanc décoré d’une étoile bleue de David (et non jaune comme ailleurs),
• l’identification de leurs commerces comme appartenant à des Juifs,
• la confiscation des radios (et notamment des radios à ondes courtes),
• l’interdiction de quitter leur ville et de voyager par train,
• la fermeture de leurs écoles,
• l’interdiction de travailler pour la fonction publique et d’exercer certains métiers,
• l’interdiction d’acheter ou de vendre des biens à des non-Juifs.
• de se soumettre aux arrestations arbitraires et d’endurer les humiliations subies de la part de la population non juive.

Le 2 octobre 1940 fut donné l’ordre de regrouper les Juifs dans des zones réservées, bientôt fusionnées à Varsovie dans deux ghettos adjacents, de tailles différentes, séparés par une passerelle en bois.

Bien qu’environ 30 % de la population de la ville était juive au moment où la Pologne fut envahie, le ghetto ne s’étendait que sur 2,4 % de sa superficie, soit 3 km².

Il était entouré d’un mur de deux mètres de haut, long de 18 km et surmonté de fils barbelés.

En y concentrant les Juifs provenant de la capitale et des environs, le ghetto de Varsovie atteignit une population maximale de 439 000 habitants en juin 1941.

Cette concentration des Juifs à un seul endroit avait pour but de faciliter leur extermination.

Soumis à de sévères restrictions quant à la nourriture et quant aux combustibles qui pouvaient y entrer, le ghetto de Varsovie devint bientôt une grande prison à ciel ouvert.

En moyenne, six personnes y habitaient par pièce. La ration alimentaire journalière y équivalait au dixième de l’apport calorique minimum requis.

Le quotidien de ses habitants se limitait à une quête obsessionnelle de nourriture. De novembre 1940 à juillet 1942, 80 000 Juifs de Varsovie périrent de soif, de faim, de froid, de tuberculose ou de typhus.

Quand des soldats allemands (ou leurs supplétifs) arrêtaient une famille en vue de sa déportation, ils en profitaient pour prélever tous les objets de valeur qui se glissent bien dans les poches d’un uniforme. Mais ils laissaient derrière eux la nourriture, aussitôt pillée par les voisins.

Après l’ouverture du camp de Treblinka

Le 23 juillet 1942, avec l’entrée en activité du camp d’extermination de Treblinka (situé à 84 km de la capitale), le génocide juif débute sa phase industrielle.

Jusque là, la population du ghetto ignorait qu’elle était vouée à l’extermination. Elle endurait son sort, comme toutes les populations accablées par la défaite. Ce sont les déportations massives vers Treblinka qui soulevèrent les soupçons.

À partir des listes fournies par le Conseil juif (formé de Juifs qui administraient le ghetto), on expédia quotidiennement à Treblinka six-mille personnes provenant du ghetto de Varsovie. Plus de 245 000 Juifs de la capitale y furent convoyés par train pour y être gazés.

La population du ghetto était réduite à 60 000 survivants quand soudainement, le 18 janvier 1943, éclate le Soulèvement du ghetto de Varsovie.

Dès l’été 1942, cette insurrection fut préparée par une contrebande d’armes et de munitions qu’on achemina clandestinement au ghetto par différents moyens (notamment par les égouts de la ville). Le principal fournisseur d’armement fut la résistance polonaise non juive.

Quand la révolte éclate, mille résistants s’opposent à deux-mille soldats allemands. Après quatre jours de combat, l’armée allemande arrêta les déportations, devenues impossibles à effectuer.

Aussitôt récupérée par la propagande ennemie, cette insurrection fut jugée par les forces d’occupation comme un véritable affront au Troisième Reich. Un affront qui ne pouvait être lavé que dans le sang.

À partir des témoignages obtenus depuis, on sait aujourd’hui que les insurgés étaient des adolescents et de jeunes adultes. Et la plupart de leurs dirigeants étaient au début de la vingtaine.

Le 19 avril 1943, à la veille de la Pâque juive, invoquant son droit de se défendre contre les terroristes juifs, l’armée allemande entreprit la destruction du ghetto.

Environ 7 000 Juifs furent tués, sans compter les 6 000 autres brulés vifs par les incendies allumés par les forces d’occupation.

L’opération prit fin le 8 mai 1943. Les survivants furent déportés.

Le 16 mai 1943, le ghetto fut rasé à 99 % par un bombardement intensif.

Conclusion


 
Le Soulèvement du ghetto de Varsovie fut le résultat d’une révolte sans issue de jeunes Juifs face à un ennemi dont ils savaient l’écrasante supériotrité militaire.

Finalement, leur sort ne fut pas différent des autres. Mais ils sont entrés dans l’Histoire la tête haute (comme chanterait Karl Tremblay, des Cowboys Fringants).

Animés par l’énergie du désespoir, ces révoltés humilièrent leurs oppresseurs.

Comme le font d’autres peuples de nos jours.

Références :
Aktion Reinhard
Centre d’extermination de Treblinka
En 1943, le soulèvement du ghetto de Varsovie
Le soulèvement du ghetto de Varsovie
Opération Himmler
Soulèvement du ghetto de Varsovie

Détails techniques de la photo : Canon Powershot G6 — 1/125 sec. — F/2,0 — ISO 50 — 7,2 mm

2 commentaires

| Histoire | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Le grand-père de la vice-première ministre du Canada, un collabo nazi

7 octobre 2023

Introduction

En 2017, Chrystia Freeland venait à peine d’être nommée ministre des Affaires étrangères du Canada qu’est soudainement apparue la rumeur selon laquelle son grand-père maternel, d’origine ukrainienne, était un collabo du Troisième Reich.

Soulignant cette coïncidence, le gouvernement fédéral avait déclaré que cette rumeur était essentiellement de la propagande russe. Et la plupart des grands journaux du pays, en bons patriotes, s’étaient tus afin de ne pas faire le jeu des Communistes.

Qu’en est-il ?

Le trésor secret

Le grand-père dont il est question est Michael Chomiak. Mort au Canada, il est né dans ce qui s’appelait autrefois la Galicie.
 

 
La Galicie était une province polonaise qui sera scindée en 1945; sa partie occidentale (en violet sur la carte), peuplée à 13 % de Polonais ukrainophones, est demeurée en Pologne alors que sa partie orientale (en mauve), peuplée à 65 % d’Ukrainophones, a été cédée à l’Ukraine.

Depuis le rattachement définitif de ce territoire à l’Ukraine, ceux qui y sont nés et qui y ont vécu sont considérés des Ukrainiens. Tout comme les personnes nées en Alsace à l’époque où celle-ci faisait partie de l’Allemagne, sont aujourd’hui considérés comme des Français.

Au décès de Michael Chomiak en 1984, son gendre découvre que son beau-père conservait secrètement un trésor.

Ce trésor, c’était une collection de numéros de Krakivs’ki Visti — ce qui signifie ‘Les Actualités de Cracovie’ — un quotidien tiré à environ dix-sept-mille exemplaires et qui fut publié en langue ukrainienne de 1940 à 1945, c’est-à-dire au cours de l’occupation allemande de la Pologne.

Légués aux archives provinciales de l’Alberta, ces documents comprennent également de la correspondance éditoriale entre le quotidien et l’occupant nazi, notamment les directives de ce dernier.

Mais revenons un an avant la création de ce quotidien.

Sous l’occupation allemande

Après le partage du territoire polonais entre l’Allemagne et la Russie en 1939 (qui précède le partage définitif du pays en 1945), l’ouest du pays, sous contrôle allemand, devint le refuge pour les Polonais qui ne pouvaient pas souffrir la domination russe.

Ce fut le cas d’un bon nombre de Polonais de langue ukrainienne, dont Michael Chomiak. Celui-ci et sa famille s’installèrent en 1939 à Cracovie, la deuxième ville de Pologne (le point rouge sur la carte ci-dessus).

Il y arrive alors que le Comité central ukrainien de Pologne préparait le lancement d’un quotidien destiné à galvaniser la minorité ukrainienne de Pologne contre la Russie. Ce quotidien, ce sera Les Actualités de Cracovie.

L’occupant nazi avait facilité la naissance de ce quotidien en lui octroyant les presses qu’il avait confisquées d’une maison d’édition juive.

Les Actualités de Cracovie était l’organe officiel du Comité central ukrainien. Cet organisme à vocation partiellement caritative était dirigé par un Ukrainien renommé pour son fanatisme pronazi.

Ce biais était tel que Les Actualités de Cracovie fut le seul quotidien polonais dont le rédacteur en chef n’était pas un Allemand nommé par les forces d’occupation; cela n’était pas nécessaire.

Un mois après la parution du premier numéro (daté du 7 janvier 1940), Michael Chomiak devient le rédacteur-en-chef des Actualités de Cracovie et le demeura jusqu’à la fin de la guerre.

Au fil des années, le quotidien publiera de très nombreux textes de propagande, dont toutes les nouvelles relatives au déroulement de la guerre.

Ce qui est normal en temps de conflit armé. Cette propagande ne prouve rien quant aux convictions profondes des artisans du journal dirigé par Michael Chomiak.

Le quotidien publiait par ailleurs des textes d’intérêt général écrits par des historiens, des écrivains, des poètes, des critiques littéraires et des théologiens, assurant de maigres revenus aux intellectuels ukrainiens réfugiés dans la partie de la Pologne occupée par les Nazis.

En 1943, l’Allemagne essuya plusieurs défaites sur le front oriental. Pour renflouer ces pertes, on se résigna à créer des milices SS indépendantes de l’armée régulière allemande, des milices formées de Slaves zélés de la cause nazie.

Le président du Comité central ukrainien (dont nous avons parlé plus tôt) fut celui qui mit sur pied la Division SS Galicie dont a fait partie le vétéran nazi ovationné récemment à la Chambre des Communes.

Rappelons que cette milice ukrainienne sous commandement allemand est responsable de quelques-uns des pires massacres survenus au cours de la Deuxième Guerre mondiale.

Afin de motiver les lecteurs des Actualités de Cracovie à adhérer à cette milice, le Comité central ukrainien demanda aux dirigeants du quotidien de rédiger toute une série de textes particulièrement haineux contre les Juifs et contre l’Armée rouge (qui, rappelons-le, était alliée du Canada dans cette guerre).

En raison des difficultés à trouver des auteurs pour cette série, il est probable que Michael Chomiak ait mis les mains à la pâte.

Collabo ou non ?

De nos jours, ceux qui désirent que la mémoire de Michael Chomiak soit honorée plaident deux arguments pour le disculper de l’accusation d’être un collabo.

Premièrement, disent-ils, parmi tous les textes haineux publiés dans son quotidien, on n’en trouve aucun signé par Michael Chomiak. C’est vrai.

Alors que les textes ordinaires du quotidien étaient signés par leurs auteurs, les textes antisémites étaient toujours signés d’un pseudonyme. Or on ignore celui qu’aurait pu emprunter le rédacteur-en-chef.

Deuxièmement, on prétend que ce dernier n’a fait que gagner sa vie comme il le pouvait sous occupation nazie. Ce qui veut nécessairement dire qu’il devait obéir à l’ordre de publier la propagande du Troisième Reich.

On pourrait réfuter cette thèse en disant que si le grand-père de Chrystia Freeland éprouvait des remords d’avoir publié une telle propagande, il aurait tenté d’en bruler tous les exemplaires. Comme pour tenter d’effacer un passé honteux.

Au contraire, il les a conservés précieusement pendant plusieurs décennies. Comme de précieuses reliques.

Il n’y a pas de preuve plus convaincante de ses sympathies nazies que sa nostalgie de l’époque sanglante de l’occupation de la Pologne par le Troisième Reich.

Probablement parce qu’à l’époque il était habité par deux sentiments qui le grisaient.

En premier lieu, par la conviction que son métier de journaliste lui octroyait le privilège de consigner par écrit l’Histoire au fur et à mesure qu’elle de déroulait sous ses yeux.

De plus, à voir le succès de la campagne de recrutement à la Division SS Galicie (orchestrée par Les Actualités de Cracovie), il devait être conscient de son pouvoir de modifier la trajectoire du conflit par ses écrits.

Conclusion

On n’est jamais coupable des fautes commises par ses aïeux. On ne peut donc pas reprocher à Chrystia Freeland d’avoir un grand-père qui était un collabo nazi. Elle n’y est pour rien.

De plus, on doit pardonner à ceux qui posent un regard indulgent sur ceux à qui ils doivent la vie. Sur les médias sociaux, Chrystia Freeland a toujours présenté sa famille de manière flatteuse. Sachant que l’amour est aveugle, on lui permettra de fermer les yeux sur certains secrets de famille.

Le seul reproche qu’on peut adresser à Mme Freeland c’est d’avoir rejeté du revers de la main, en 2017, les rumeurs au sujet de son grand-père collabo. En somme, d’avoir menti.

Comme un boomerang, on voit ce sujet revenir dans l’actualité alors qu’il peut aujourd’hui causer des dommages beaucoup plus importants en raison de la succession de bourdes commises récemment au parlement et qui ont terni la réputation du Canada à l’Étranger.

Références :
Freeland knew her grandfather was editor of Nazi newspaper
Krakivski visti and the Jews, 1943: A Contribution to the History of Ukrainian-Jewish Relations during the Second World War
Les squelettes de Chrystia Freeland et le silence de Justin Trudeau
Long-Distance Nationalism: Ukrainian Monuments and Historical Memory in Multicultural Canada
Michael Chomiak
Volodymyr Kubijovyč

Compléments de lecture :
La désinformation au sujet de la Division SS Galicie
La nostalgie nazie en Ukraine

3 commentaires

| Histoire, Politique canadienne, Politique internationale | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


La désinformation au sujet de la Division SS Galicie

30 septembre 2023

L’indulgence canadienne à l’égard du nazisme

La Division SS Galicie est une milice ukrainienne sous commandement allemand qui est responsable de quelques-uns des pires massacres survenus au cours de la Deuxième Guerre mondiale.

À la fin de ce conflit, l’armée britannique avait capturé plusieurs centaines de ses combattants.

En 1948, le ministre britannique de l’Intérieur écrivait :

Nous espérons toujours nous débarrasser des prisonniers de guerre ukrainiens les moins désirables, soit en Allemagne, soit au Canada.

À la suite de quoi, à la demande de la Grande-Bretagne, notre pays accueillait 1 200 à 2 000 vétérans nazis de la Division SS Galicie.

De plus, à la même époque, Londres suggérait secrètement au Canada de mettre un terme à la dizaine de procès qu’il avait intentés contre des criminels de guerre nazis.

Deux décennies plus tard, l’accord d’extradition conclu entre le Canada et Israël rendait irrecevable toute demande d’extradition présentée par ce dernier pays pour cause de crimes de guerre commis par des Nazis.

Et finalement, le 4 novembre 2022, le Canada a essayé de faire battre à l’Onu une résolution adoptée annuellement depuis 2012 qui condamne le nazisme. À cette occasion, l’Ukraine a également refusé de condamner le nazisme…

Laver l’affront

Le 22 septembre 2023, l’ovation au parlement canadien d’un ex-soldat de la Division SS Galicie a éclaboussé non seulement la réputation internationale du Canada, mais également la communauté ukrainienne du pays.

Afin de se porter à sa défense, Jurij Klufas — le président de la Fédération nationale ukrainienne du Canada — a déclaré hier que ce SS ukrainien n’était pas nazi et qu’il se battait pour l’Ukraine et non pour l’Allemagne.

On joue sur les mots.

Strictement parlant, le mot ‘nazi’ ne s’applique qu’aux adhérents au parti National-sozialistiche Deutsche Arbeiterpartei d’Adolf Hitler. Or, on n’y acceptait que des personnes de ‘race aryenne’. Ce qui excluait tous ceux de ‘races’ inférieures (dont les Slaves).

À moins d’être un descendant d’une lignée pure allemande, aucun Ukrainien ne pouvait être nazi si on donne à ce qualificatif son sens le plus strict.

Mais si on considère que le nazisme est d’abord et avant tout une idéologie raciale haineuse, on peut être nazi sans être membre du parti politique d’Adolf Hitler.

De plus, détenir la citoyenneté allemande était un prérequis pour adhérer à l’armée du Troisième Reich. Voilà pourquoi la Division SS Galicie n’était pas un bataillon de l’armée régulière allemande, mais une milice formée de volontaires armés par l’Allemagne nazie.

Contrairement aux affirmations de M. Klufas, les miliciens de la Division SS Galicie ne se battaient pas pour l’Ukraine; ils exécutaient les ordres de leurs chefs. Or tous les officiers supérieurs de cette milice étaient des SS. Et leurs ordres, c’était de tuer des Juifs, des Polonais et des Slovaques pour faire place à des colons allemands.

Le texte de Radio-Canada déclare également que dans son rapport, la Commission Deschênes (au sujet des criminels de guerre) aurait écrit que « les accusations de crimes de guerre contre les membres de la division de Galicie n’ont jamais été fondées.»

Ceci est inexact.

Au paragraphe 58 de la première partie de son rapport, le juge Deschênes écrit plutôt qu’aucune preuve ne lui a été présentée afin d’étayer les accusations de crimes de guerre portées contre les membres de la Division Galicie. Il n’a pas dit que ces preuves n’existaient pas, mais que si elles existent, elles ne lui ont pas été soumises.

Par contre, les avocats de la poursuite au Procès de Nuremberg ont disposé de ressources considérables. Or ils y ont fait la preuve que la Division SS Galicie avait commis quelques-uns des pires massacres de la Deuxième Guerre mondiale.

Conclusion

En 2019, la famille de Yaroslav Hunka a versé une somme de 30 000$ à l’Université de l’Alberta à titre de dotation privée à son nom.

À la suite du scandale à la Chambre des Communes invoqué plus tôt, l’université, à juste tire, a retourné cet argent à la famille Hunka.

Cette dernière serait bien avisée de verser cette somme à une fondation juive qui honore le nom des victimes de la Shoah.

De plus, au lieu de justifier les pages sombres de son passé, l’ex-milicien SS devait plutôt dire (même s’il n’y croit pas) que son adhésion à la Division SS Galicie était une erreur de jeunesse — il n’avait que 17 ou 18 ans — à une époque où il était difficile de partager les bons et les méchants.

Références :
À l’Onu, le Canada refuse de condamner le nazisme
Chrystia Freeland’s granddad was indeed a Nazi collaborator – so much for Russian disinformation
Comment des militaires d’une unité SS sont-ils arrivés au Canada ?
FSWC Appalled by Standing Ovation in Parliament for Ukrainian Veteran Who Served in Nazi Military Unit
Hundreds in Ukraine attend marches celebrating Nazi SS soldiers
Hunka un ex-SS : les Ukrainiens canadiens le savaient
L’ex-combattant nazi ovationné au parlement n’est pas le seul à avoir refait sa vie ici en héros
Long-Distance Nationalism: Ukrainian Monuments and Historical Memory in Multicultural Canada
14e division SS (galicienne no 1)
Rapport de la Commission Deschênes sur les criminels de guerre/a>
Un groupe ukrainien défend l’ancien membre de la Waffen-SS honoré au Parlement
University of Alberta returning $30,000 donation to Yaroslav Hunka’s family, closing endowment in his name

Parus depuis :
Rideau Hall s’excuse d’avoir nommé un vétéran nazi dans l’Ordre du Canada (2023-10-04)
La Russie poursuit pour « génocide » l’ex-soldat nazi ovationné aux Communes (2023-10-20)
L’ex-soldat nazi avait été invité à un autre événement par le bureau du PM (2024-02-05)
Canada memorial to Ukrainian soldiers in Nazi unit removed after protests (2024-03-12)

Laissez un commentaire »

| Histoire, Politique canadienne, Politique internationale | Mots-clés : , | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


La nostalgie nazie en Ukraine

26 septembre 2023

Introduction

Le 23 septembre dernier, en présence du président ukrainien Vlodymyr Zelensky, la Chambre des Communes a ovationné le Canadien d’origine ukrainienne Yaroslav Hunka, 98 ans, présenté par l’ex-président de la Chambre comme un héros qui s’est battu pour l’indépendance ukrainienne contre les Russes.

Contexte historique

Au cours de la Deuxième Guerre mondiale, le Troisième Reich s’est attiré la sympathie de nombreux Ukrainiens en promettant l’indépendance de leur pays si jamais l’Allemagne devait triompher de la Russie.

La campagne nazie de recrutement, menée durant l’hiver 1942-1943, rencontra un immense succès; près de 80 000 Ukrainiens se portèrent volontaires.

C’est ainsi que des milices composées de volontaires ukrainiens ont combattu la Russie. Rappelons qu’à l’époque, la Russie était l’allié du Canada dans cette guerre.

Ces milices étaient armées et entrainées par les SS. L’une d’elles est la Quatorzième division d’infanterie de la SS (galicienne No 1), surnommée Division SS Galicie.

Au procès de Nuremberg, cette unité a été pointée du doigt comme étant responsable de quelques-uns des pires massacres survenus au cours de la guerre.

Au moment où Yaroslav Hunka adhère à cette unité au printemps de 1943, il est âgé de 17 ou de 18 ans. La majorité des Juifs d’Europe centrale ont déjà été exterminés. Conséquemment, les massacres commis par son unité ont concerné essentiellement des populations civiles slaves, notamment en Pologne.

D’où le fait que la Pologne songe à demander l’extradition de Yaroslav Hunka afin de le juger pour crime de guerre.

De collabos à héros

De la fin de la Deuxième Guerre mondiale en 1945 jusqu’à l’indépendance de l’Ukraine en 1991, l’Union soviétique a considéré ces volontaires nazis comme des collabos et des traitres.

Mais depuis l’indépendance, l’Ukraine a revisité son histoire. Plus précisément, depuis la Révolution orange, ce pays a réévalué le statut de ces combattants de la première heure en faveur de l’indépendance nationale. Même si, pour ce faire, il leur a fallu combattre du côté des Allemands (sans nécessairement partager l’idéologie nazie).

C’est ainsi qu’en septembre 2020, la Cour suprême ukrainienne a statué que les symboles de la Division SS Galicie — dont son emblème, ci-contre — n’étaient pas liés au nazisme et ne pouvaient donc pas être interdits en Ukraine.

Pour la première fois en 2021, 300 personnes participèrent à une marche tenue à Kyiv (la capitale du pays) afin de célébrer le 78e anniversaire de la création de la Division SS Galicie.

Une marche similaire se tient depuis déjà plusieurs années dans la ville ukrainienne de Lviv (située à 70 km de la frontière polonaise).

La Brigade Azov

Afin de lutter contre les séparatistes russophones de l’Est du pays, le ministre ukrainien de l’Intérieur décide en 2014 de former des milices spéciales dont la plus importante deviendra la Brigade Azov.

Au départ, celle-ci est un bataillon paramilitaire composé de quelques dizaines de volontaires néonazis et ultranationalistes. En février 2023, ce bataillon (fort maintenant de 3 500 à 5 000 combattants) sera incorporé à l’armée ukrainienne.

Mais à l’époque où ce bataillon était indépendant de l’armée régulière, il opérait dans l’Est du pays.

Entre 2014 et 2020, la guerre civile au Donbass a fait plus de treize-mille morts, tant chez les Ukrainiens ukrainophones que chez les Ukrainiens russophones. Or la Brigade Azov a commis la grande majorité (si ce n’est pas la totalité) des exactions contre la population russophone d’Ukraine.

Conclusion

Il ne faut pas attacher plus d’importance qu’il en faut à l’accusation russe selon laquelle les Ukrainiens auraient des sympathies nazies.

La cause fondamentale de la guerre russo-ukrainienne est l’expansionnisme toxique de l’Otan.

En quelques mots, la Russie ne peut pas accepter d’être menacée d’ogives nucléaires américaines dans sa cour arrière (c’est-à-dire en Ukraine). Ce qui arrivera inévitablement après l’adhésion de ce pays à l’Otan.

Pas plus que les États-Unis ne pouvaient accepter que des missiles russes soient déployés à Cuba en 1962. Et pas plus qu’ils pouvaient tolérer que des armes de destruction massive soient prétendument détenues par l’Irak, à plus de dix-mille kilomètres de chez eux.

Ceci étant dit, la gaffe de l’ex-président de la Chambre des Communes est typique d’un pays dirigé par des personnes qui n’ont pas encore compris les ressorts véritables de cette guerre et qui, aveuglées par la propagande américaine, font involontairement l’apologie des personnes qui combattaient un allié du Canada au cours de la Deuxième Guerre mondiale, c’est-à-dire la Russie.

Références :
Brigade Azov
Comment des militaires d’une unité SS sont-ils arrivés au Canada ?
Crise des missiles de Cuba
FSWC Appalled by Standing Ovation in Parliament for Ukrainian Veteran Who Served in Nazi Military Unit
Guerre du Donbass
Hundreds in Ukraine attend marches celebrating Nazi SS soldiers
J’ai vu l’autre Ukraine, celle qui célèbre les SS et crimes nazis
La Shoah par balles
La Pologne veut faire extrader l’ex-soldat d’une unité nazie Yaroslav Hunka
L’épouvantail russe
Les malheurs de l’Ukraine
L’ex-combattant nazi ovationné au parlement n’est pas le seul à avoir refait sa vie ici en héros
L’expansionnisme toxique de l’Otan
Long-Distance Nationalism: Ukrainian Monuments and Historical Memory in Multicultural Canada
14e division SS (galicienne no 1)

Parus depuis :
Hunka un ex-SS : les Ukrainiens canadiens le savaient (2023-09-27)
La Russie poursuit pour génocide l’ex-soldat nazi applaudi au Parlement canadien (2023-10-20)

Complément de lecture : À l’Onu, le Canada refuse de condamner le nazisme

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés à la guerre russo-ukrainienne, veuillez cliquer sur ceci.

Laissez un commentaire »

| Géopolitique, Guerre russo-ukrainienne, Histoire | Mots-clés : | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Le 75e anniversaire du drapeau québécois

22 janvier 2023


 
Dans les principales villes du Québec, la Société Saint-Jean-Baptise organisait hier les festivités célébrant le soixante-quinzième anniversaire de l’adoption officielle du drapeau québécois (appelé Fleurdelisé).

Au son d’une troupe de percussionnistes, on déroula sur l’esplanade de la Place des Arts le plus grand drapeau québécois jamais conçu, mesurant 18 x 28 mètres.

Rappelons que le Québec adopta le Fleurdelisé en 1948, soit 17 ans avant l’Unifolié canadien.

Compléments de lecture :
Le jour du drapeau
L’histoire de la Fleur de Lys

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II, objectif M.Zuiko 12-40mm F/2,8 — 1/1000 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 12 mm

Laissez un commentaire »

| Histoire, Politique québécoise | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Aux origines du cinéma cubain (1896-1922)

30 octobre 2022

Introduction

C’est en 1895 que les frères Lumières ont inventé un appareil capable d’enregistrer et de projeter un film.

Le 19 mars de cette année-là, les deux frères réalisèrent à Lyon le premier documentaire, intitulé ‘La Sortie d’usine’. Ce court-métrage muet fut projeté à Paris trois jours plus tard.

À l’été de 1895, ils réalisèrent le premier film de fiction, ‘L’Arroseur arrosé’.

Convaincus que le succès de leur invention ne durerait pas, les frères Lumières formèrent rapidement des opérateurs qu’ils s’empressèrent d’envoyer partout autour du globe.

L’un d’eux fut Gabriel Veyre, arrivé à Cuba en 1896.

Et justement parce que l’engouement pour les ‘photos animées’ devait être éphémère, personne ne jugea opportun de créer des lieux qui leur seraient exclusivement consacrés.

Alors on projetait les films en plein air dans des fêtes foraines, parmi les attractions de cirques ambulants ou dans de petits théâtres temporaires en bois érigés dans des lieux publics.

C’est là qu’Atlas Bidel, à seize ans, voit un film pour la première fois.

L’enfance d’Atlas Bidel

Atlas Bidel était issue de la branche la moins prestigieuse d’une dynastie circassienne.

François Bidel, son grand-père, était dompteur de fauves. Il possédait la Grande ménagerie Bidel. Celle-ci comptait des lions, six tigres royaux, quinze panthères noires, dix ours, sept hyènes, trois chameaux, de même que des loups, des singes et des perroquets.

Ce cirque animalier prestigieux parcourait l’Europe et se produisit devant plusieurs têtes couronnées, dont Alphone XII en Espagne.

Le fils de François Bidel (prénommé Atlas, comme le sera son fils) était acrobate et donnait des numéros de foire dans le Languedoc et les Cévennes. Son épouse était charmeuse de serpents.

Il formait un duo avec son frère à lui, Hercule : Atlas-père était porteur et Hercule, voltigeur. Le duo se sépara quand le premier surprit sa femme au lit avec le second.

Alors qu’Hercule et son amante partaient de leur côté, les deux Atlas (le père et le fils) partirent du leur. Mais séparés, les deux couples gagnent difficilement leur vie.

Le village de Saint-Hippolyte-du-Fort est situé à quarante kilomètres de Montpellier. Ses habitants portent le gentilé de Cigalois. C’est de passage dans ce village que les deux Atlas découvrent qu’Hercule Bidel s’est recyclé en cinéaste forain. Ce qui, à l’époque, nécessitait peu d’investissement.

Atlas-fils a seize ans. C’est la première fois qu’il assiste à une représentation cinématographique. Et pour lui, c’est une révélation.

Si les cinéastes forains ont contribué au succès du cinéma, ils en furent les premières victimes puisqu’au tournant du siècle, on commença à projeter les films dans des théâtres et dans des salles paroissiales transformées en salles de cinéma.

Recommencer sa vie

Le Catalan Antonio Rosalès était un ami d’Atlas-fils dont le frère, installé à La Havane, l’implorait de s’expatrier à Cuba pour y faire fortune puisque le cinéma y rencontrait un immense succès.

Tentés par l’aventure, Atlas-fils et son ami s’achètent en 1900 une caméra, quelques films, de même qu’un phonographe Céleste de Pathé (pour l’accompagnement musical) et s’embarquèrent pour La Havane.

Mais ils n’y rencontrèrent pas le succès escompté. Gabriel Veyre, arrivé quatre ans plus tôt, s’était constitué un répertoire typiquement cubain d’actualités cinématographiques. C’est ainsi qu’il a réalisé le premier court-métrage de l’histoire du pays, Un simulacre de bombero (en français, Un exercice d’incendie).

De leur côté, les deux nouveaux venus ont de vieux films européens qu’ils projettent çà et là dans des cafés, des salles de jeux clandestins et dans des entrepôts de tabac.

À Cuba, Atlas Bidel a pris le surnom de Pistelli (le nom de famille à la naissance de sa mère).

La capitale de tous les plaisirs

En 1902, lorsque les États-Unis mettent fin à leur occupation militaire de l’ile, Cuba est sans administration étatique compétente. La Havane est alors une zone de non-droit où règne le crime organisé.

La capitale est partagée en deux groupes mafieux; le clan des Catalans et celui des Basques. Ce n’est que bien plus tard qu’ils seront délogés par la pègre américaine (dont le règne durera jusqu’à la Révolution cubaine).

Le frère d’Antonio Rosalès évolue dans la pègre catalane. Beaucoup de ses ressortissants viennent du département français des Pyrénées-Orientales.

Ce ne sont pas les seuls Français à La Havane. Émilie Bernard, d’origine normande, y tient un bordel. Elle engage Pistelli comme rabatteur, c’est-à-dire responsable du recrutement des prostituées.

Cela tombe bien puisqu’en plus du français (qu’il utilise avec la patronne), il parle l’espagnol (essentiel pour le recrutement) et le catalan (utile pour négocier l’embauche de prostituées ‘appartenant’ à des souteneurs de la pègre catalane).

1902 est une année charnière pour l’histoire du cinéma cubain. Pistelli a l’idée de tourner de petits clips dénudés et frivoles au cours desquels les pensionnaires les plus délurées de l’établissement dévoilent en partie ou en totalité leurs charmes.

Ces courts-métrages dits ‘galants’ sont projetés sur les murs de l’établissement et permettent aux clients émoustillés d’effectuer leur choix en toute connaissance de cause.

Le succès est tel que toutes les maisons closes de la ville veulent que Pistelli tourne des films pour elles. Ce qui implique de délicates négociations avec les établissements protégés par le clan basque.

Du jour au lendemain, Pistelli n’est plus le cinéaste de trop dans la ville; il en est la nouvelle coqueluche.

Il établit un studio où évoluent des actrices dont le jeu s’améliore de film en film. Et puisque ses scénarios sont de plus en plus sophistiqués, Pistelli embauche un décorateur pour construire des décors et même une couturière puisque les personnages de ces films sont des clients de diverses origines — curés, notables, domestiques, etc.— qu’on doit caractériser par l’habillement.

La naissance du porno

Pour être en avance sur des concurrents qui s’installent dans l’ile, Pistelli ose tourner de véritables scènes de sexe. Si les prostituées y sont plus ou moins nues, leurs clients s’affairent néanmoins en conservant leurs sous-vêtements ou leur chemise de nuit.

C’est ainsi que Pistelli, premier cinéaste érotique de l’histoire, crée le cinéma porno. Il fait de Cuba le premier pays (chronologiquement) où des films pour adultes sont produits, mais également le principal exportateur mondial de ce genre cinématographique. Un titre que Cuba conservera jusqu’à la Révolution.

Tout comme aujourd’hui, ces films rejoignaient toutes les classes sociales. Le jeune roi Alphone XIII d’Espagne, grand admirateur de Pistelli, lui commanda confidentiellement un film osé, basé sur un scénario de son cru, et dans lequel tous les personnages, assez nombreux, le font à tour de rôle.

Cinéma Campo Amor

Afin de faire fructifier son capital et diversifier ses activités, Pistelli décide de transformer un ancien théâtre (El Capitolio) et d’en faire une salle exclusivement dédiée au cinéma : c’est le Campo Amor (ou Champ d’Amour), aujourd’hui en ruine.

D’une capacité de 1 500 places, le Campo Amor ouvre ses portes le 15 aout 1917 par la projection du film américain Intolérance, dont la première avait eu lieu à New York le 5 septembre de l’année précédente.

Film à grand déploiement, ce film avait été le plus dispendieux jusque là.

La programmation ‘ordinaire’ du Campo Amor comprenait essentiellement les meilleurs films muets internationaux, accompagnés d’un grand orchestre de musique cubaine. Chaque projection était précédée de numéros de variété.

Les fins de semaine, le cinéma présentait en après-midi des films familiaux.

Pilier de la vie culturelle cubaine, Pistelli poursuivait d’autre part ses activités de réalisateur de films pornos afin de répondre à la demande des maisons closes de la ville.

La fin de Pistelli

Aperçu du cimetière Christophe-Colomb

En 1922, le meilleur ami de Pistelli, Antonio Rosalès, est tué par un homme de main de la pègre basque.

À l’enterrement prévu au cimetière Christophe-Colomb, le clan basque projette de s’y cacher afin de massacrer leurs ennemis catalans.

Mais une prostituée qui évoluait dans les deux milieux en informe le clan catalan qui s’arme en conséquence.

Au cours de la cérémonie, ce qui devait arriver arriva.

Pistelli est atteint mortellement; derrière une stèle de marbre de Carrare, il agonise pendant que les balles fusent de partout.

C’est ainsi que se termine la carrière sulfureuse d’Atlas Bidel, ce réalisateur français qui marqua les deux premières décennies de l’industrie cinématographique cubaine.

Référence : Le Campo Amor de la Havane

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5, objectif Lumix 12-35mm F/2,8
1re photo : 1/400 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 13 mm
2e  photo : 1/400 sec. — F/6,3 — ISO 200 — 18 mm

Un commentaire

| Histoire, Photos de Cuba, Photos de La Havane, Photos de voyage | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Petite histoire du vin québécois

3 août 2022



 
C’est en 1535 que Jacques Cartier découvrit l’ile de Bacchus, connue de nos jours sous le nom d’ile d’Orléans.

Ce qui avait incité cet explorateur français à la nommer ainsi, c’est l’abondance des plants de vigne des rivages (vitis riparia) qui y poussaient.

Peu après la fondation de Québec (en 1608), Samuel de Champlain tente de créer le premier vignoble en Amérique du Nord. Ce sera un échec puisque les cépages qu’il a importés de France ne résisteront pas à leur premier hiver canadien.

Les premiers colons se rabattront à essayer de faire du vin avec des raisins de vitis riparia. Mais la piquette obtenue découragera plusieurs d’entre eux de poursuivre leurs expériences.

Au milieu du XIXe siècle, quelques vignerons amateurs tentent la culture de cépages hybrides américains dans le sud du Québec. Sans succès.

En 1939, à titre expérimental, Joseph-O. Vandal crée à Neuville le premier vignoble québécois. Son exemple sera suivi à partir des années 1960 par plusieurs entrepreneurs d’origine européenne.

Mais il fallut attendre 1980 pour que soit créé à Dunham (en Estrie) le premier vignoble commercial québécois, le Domaine des Côtes d’Ardoise, propriété de Christian Barthomeuf.

Cinq ans plus tard, l’État québécois autorise la vente de vin québécois, mais seulement au vignoble.

En 1996, un premier vin québécois, L’Orpailleur, fait son entrée dans les succursales de la Société des alcools du Québec.

Deux ans plus tard, les vignerons du Québec obtiennent le droit de ravitailler directement les restaurateurs. Puis en 2016, le droit d’offrir leurs produits en épicerie.

De nos jours, les 146 vignobles du Québec produisent annuellement 2,5 millions de bouteilles de vin.

Référence : La petite histoire des vignobles d’ici

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II, objectif M.Zuiko 12-40mm F/2,8
1re photo : 1/500 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 26 mm
2e  photo : 1/500 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 40 mm

Un commentaire

| Histoire | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel


Les varioles et la collerette

12 juin 2022

La variole simienne

La variole simienne (mieux connue sous le nom de ‘variole du singe’) est une maladie virale à pustules, rarement mortelle, qui est endémique dans le bassin du Congo et en Afrique occidentale.

Son virus peut se développer chez une vingtaine d’espèces animales (dont certains primates et rongeurs).

Chez l’humain, après une période d’incubation de cinq à dix jours, la maladie se manifeste par une forte fièvre, une grande fatigue, des maux de tête, des courbattures et le gonflement prononcé des ganglions, surtout au niveau du cou et dans l’aine.

Deux jours après l’apparition des premiers symptômes, les lésions apparaissent sur la peau. Successivement, ces lésions sont des taches rouges (1 à 2 jours), des boutons solides (1 à 2 jours), des cloques contenant un liquide clair (1 a 2 jours), puis des pustules contenant de grandes quantités de virus (de 5 à 7 jours).

Ces dernières se dessècheront sur une période de deux à quatre semaines. Leur croute finira par disparaitre en laissant parfois une trace visible sur la peau.

La petite vérole

La variole simienne est cousine de la variole (tout court). Appelée autrefois ‘petite vérole’, cette dernière a été éradiquée en 1980 à la suite d’une campagne de vaccination massive orchestrée par l’Organisation mondiale de la santé.

Autrefois, le mot ‘vérole’ se dirait des maladies à pustules ou à vésicules; on connaissait la petite et la grande vérole, de même que la varicelle. Or la science moderne a démontré qu’il s’agissait de maladies différentes.

La petite vérole n’était petite que de nom. Elle fut responsable des pandémies les plus mortelles de l’histoire de l’humanité. Plus que la peste. Plus que le choléra. Plus que la grippe espagnole.

La grande vérole

Ce qu’on appelait autrefois la ‘grande’ vérole désigne aujourd’hui la syphillis.

Cette maladie existait en Europe depuis l’Antiquité mais fit un retour en force durant la Renaissance à la suite de la découverte des Amériques.

Cette découverte fut l’occasion du ‘Grand échange de véroles’; les conquistadors apportent la petite vérole aux Amérindiens (ce qui les décimera par dizaines de millions), alors que les marins européens contaminent l’Europe de la grande vérole (la syphillis) attrapée en violant les femmes des peuples autochtones conquis.

Or, parmi les séquelles cutanées de la grande vérole, il y avait le ‘collier de Vénus’.

Celui-ci était constitué d’une succession de taches brunâtres ou décolorées situées au niveau du cou.

Détail de Portrait de Frans Snyders et son épouse (1621) d’Antoine van Dyck

En raison de son aspect inesthétique, ces taches ont donné naissance à la mode des collerettes à godrons (ou à amples plis empesés), emblème vestimentaire de la Renaissance.

De la seconde moitié du XVIe siècle jusqu’au début du XVIIe siècle, femmes et hommes de la noblesse portaient cette décoration, plus tard remplacée chez les femmes par un col (souvent en dentelle) dressé derrière le cou et qui, cette fois, dégageait la poitrine des personnes épargnées par la grande variole.

Références :
Collerette (costume)
Variole du singe : comment se transmet-elle, quels sont les symptômes ?

Complément de lecture : La Grande peste et le Covid-19

Un commentaire

| Histoire | Permalink
Écrit par Jean-Pierre Martel